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Atmosphère Océan

3. Dynamiques socio-économiques et pressions sur le climat

3.4. Le contenu en carbone des énergies

Promouvoir une utilisation plus efficace de l’énergie en général est nécessaire mais certainement in- suffisant pour limiter les émissions de gaz à effet de serre39. L’énergie reste un facteur de production parmi les plus importants, et on envisage difficilement une diminution notable de sa consommation à moyen terme, même dans un scénario de grande efficacité énergétique, le scénario C1 de l’IIASA illustré Figure 2.16 par exemple.

Il existe toutefois des différences notables dans le contenu en carbone des différentes sources possi- bles d’énergie. A énergie produite égale, le gaz naturel émet moins de CO2 que le pétrole, lui même

1960 1970 1980 1990 150 200 250 300 Emissions CO2 CP combustibles PIB

Figure 2.15 : Découplage énergie-croissance dans les pays de l'OCDE.

plus propre que le charbona. Agir sur la composition du mélange des sources d’énergie primaire (en anglais energy mix) constitue donc l’autre idée directrice des politiques visées ici, qui peuvent s’articuler en trois volets.

• Le premier concerne la substitution entre les combustibles fossiles. Nous avons au chapitre pré- cédent que la ressource est considérée comme largement suffisante à l'échelle du siècle. consom- mer tout le potentiel techniquement réalisable de pétrole et de gaz classique, soit 300 GtC, ainsi que le quart des réserves de charbon, soit 800 GtC, conduirait dans l’hypothèse haute à un réchauf- fement global de 6.4 °C. Accroître l'utilisation du gaz naturel au siècle prochain est donc une me- sure susceptible de modérer le changement climatique, à condition que les fuites de méthane soient bien maîtrisés.

• Le second concerne les énergies renouvelables (énergie solaire, énergie hydroélectrique, énergie éolienne, biomasse traditionnelle et moderne, énergie thermique des mers, par exemple). Celles ci en sont à divers stades de développement technique et de maturité commerciale, mais on s'attend à des réductions de coût importantes dans les prochaines décennies40. La vision de leur rôle dans le futur est difficile à préciser, toutefois il est clair que leur potentiel n'est pas complètement exploité.

• Le troisième point concerne l'énergie nucléaire. Représentant actuellement environ 5% de l'énergie primaire produite (17% de l'électricité), c'est une technologie exploitée depuis plusieurs dizaines d'années dans de nombreux pays. Cependant, son utilisation pose des problèmes d’acceptabilité sociale, comme celui du choix des sites et la méfiance relative aux accidents; des problèmes poli- tiques comme le risque de prolifération des matières fissiles, et des problèmes écologiques comme le démantèlement et stockage des déchets. Des recherches actuelles visent à rendre son utilisation plus intrinsèquement sûre41, mais pour d’autres les perspectives concernant le coût de l'énergie nucléaire à moyen terme sont moins optimistes que celles concernant les énergie renouvelables. Comme le montre la Figure 2.16, on s'attend à ce que les combustibles fossiles constituent encore la source majoritaire d'énergie pour les prochaines décennies, mais que leur contenu en carbone tend à diminuer. Cette idée provient notamment de l’analyse du passé représenté Figure 2.17, et du fait que dans beaucoup de pays, il existe déjà une volonté consciente d’utiliser davantage de gaz naturel à la place du charbon42. Toutefois, on peut voir Figure 2.16 qu’il serait nécessaire d’aller bien au delà des tendances actuelles (scénario B) pour éviter un doublement des émissions d’ici 2050.

a Une façon de comparer les divers combustibles consiste à calculer le rapport du nombre d'atomes de carbone

sur le nombre d'atomes d'hydrogène dans une quantité donnée de combustible. Le bois est le plus riche en car- bone, avec un ration C:H de l'ordre de 10, puis viennent le charbon (C:H ≈ 1), le pétrole (C:H ≈ 1:2) et enfin le méthane (C:H ≈ 1:4)

0 5 000 10 000 15 000 20 000 25 000 B 1990 Present day C1 2050 Policy driven B 2050 Middle course A3 2050 Rich and clean Mtep Nucléaire Gaz Pétrole Charbon Autre

Figure 2.16 : Evolutions possibles des parts de différentes sources d'énergie.

Consommation mondiale d'énergie primaire par source, en 1990 et en 2050. Source: WEC/IIASA 1995.

Consommation mondiale d'énergie primaire

0 1 000 2 000 3 000 4 000 5 000 6 000 7 000 8 000 9 000 1860 1870 1880 1890 1900 1910 1920 1930 1940 1950 1960 1970 1979 1989 Mtep Elec Gaz Pétrole Charbon Bois

Figure 2.17 : Consommation mondiale d'énergie primaire par sources, 1860-1994.

La discontinuité en 1974 reflète que les données 1860-1974 proviennent de l’IIASA, celles sur 1974-1995 de ENERDATA. La qualité données est variable, l'évaluation de la biomasse restant problématique, et la conver- sion de l'électricité l’hydro et nucléaire en énergie primaire étant conventionnelle. On observe toutefois que la part relative des combustibles les plus riches en carbone tend à décroître avec le temps. La période de domina- tion du charbon a coïncidé avec l'expansion du chemin de fer, de l'acier et de l'électrification des usines. Dans les années 1960, la prédominance du pétrole a coïncidé avec le développement du transport automobile, de l'industrie pétrochimique, et du chauffage domestique au fioul. En prolongeant ces tendances par un modèle logistique, Nakicénovic (1979) projette que le gaz naturel sera la source d'énergie prédominante au siècle pro- chain, le pétrole conservant toutefois la seconde place jusque dans les années 2020.

3.5. Conclusion

En résumé, les conditions socio-économiques du problème sont marquées par l’opposition entre la croissance (démographique et économique) et le progrès technique. Ce dernier, peut être entendu comme la décroissance du ratio CO2 / PIB . En première approximation, on peut étudier à la place le

ratio E / PIB, ce qui a l'avantage de se ramener à problème étudié depuis longtemps, celui de l'inten- sité énergétique du PIB, mais l'évolution du contenu en carbone des formes d'énergie (ratio CO2 / E)

est aussi importante.

La Figure 2.18 illustre l'existence d’un tel progrès technique : l'intensité en CO2 du PIB mondial a

diminué d'environ 1/6 en 20 ans, soit une baisse de l'ordre de moins de 1% par an. Compte tenu de l'augmentation du PIB et de celle de la population, il est aisé de conclure que à l’évidence que, sans mesures politiques spécifiques, le progrès technique fera suffisamment progresser l’efficacité énergé- tique pour stabiliser les émissions.

On peut donc conclure qu’en l’absence de politiques spécifiques, il se produirait quand même un cer- tain progrès technique, le taux de pollution baisserait « naturellement », mais pour éviter les interfé- rences sérieuses avec le climat, il serait nécessaire d'accélérer le progrès technique au delà de ce taux « naturel ». Toute la thèse est à propos de cette accélération.

Figure 2.18 : Evolution de l'intensité énergétique du PIB.

Intensité énergétique du PIB en Mtep d’énergie primaire par G$90ppa, pour le monde, l’OCDE et les pays non OCDE (données Enerdata). Intensité en CO2 du PIB exprimé en GtC industriels par G$90ppa, (données

CDIAC)

Evolution de l'intensité energétique globale

0 0.1 0.2 0.3 0.4 1971 1976 1981 1986 1991 E/PIB Monde E/PIB OCDE E/PIB non OCDE

Evolution de l'intensité en carbone globale

0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 0.3 0.35 1960 1965 1970 1975 1980 CO2/PIB monde

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