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Chapitre 5. DIAM Modèle Dynamique Inertie-Adaptabilité

1.1. Cadre conceptuel

Le but du travail exposé ici est d’ajouter deux nouvelles dimensions au débat sur les coûts de réduction des émissions polluantes. Il s’agit de la question des coûts d’ajustement et du progrès technique induit par les contraintes institutionnelles dans les systèmes énergétiques.

Pour cela, nous mettons en oeuvre un modèle très agrégé de la réduction des émissions qui représente directement les coûts d'ajustement et qui nous permet d’examiner indirectement l’effet du progrès technique induit.

• Comme nous l’avons expliqué plus haut, le progrès technique induit permet de considérer que dans le long terme, les nouvelles technologies peu polluantes seront comparables en efficacité économique aux technologies actuelles. Négliger cet aspect dynamique conduit donc à surestimer le coût de réduction à long terme. Pour dissiper une confusion éventuelle, il importe de distinguer l’adaptabilité dont il est question dans DIAM, qui désigne l’effet à long terme du progrès technique induit dans le secteur énergétique, de ce qu’on appelle l’adaptation, qui désigne les mesures visant à limiter les impacts négatifs des changements climatiques.

• Si la pénétration des générations de capital plus performantes au regard des émissions de gaz à effet de serre se fait au rythme naturel de dépréciation de la base matérielle de l’économie, alors cela mobilisera moins de ressources que si elle se fait à un rythme accéléré entraînant l’obsolescence prématurée des équipements en place. Nous avons montré précédemment que la plupart des modèles sous estiment les coûts d’ajustement qu’il y aurait à réduire rapidement la pollution.

Si on croise ces deux idées, diverses situations peuvent surgir selon que les coûts d’ajustements sont forts ou faibles devant les coûts à long terme. Examinons sur des exemples concrets à quoi correspondrait les diverses situations illustrées Tableau 5.1.

Coûts permanents prédominants : Imaginons une fabrication artisanale de boudin blanc. Traditionnellement la fabrication de boudins nécessite 1 % de truffes du Périgord et 99 % d'autres ingrédients. Pour améliorer la qualité de son produit l'artisan décide d'augmenter la quantité de truffes à l'intérieur de ses boudins et de porter cette dernière à 1.5 %. Le prix des truffes étant bien plus élevé que celui de chacun des autres ingrédients une telle décision va accroître le prix unitaire de chacun des boudins vendu mais en revanche le coût transitoire sera très faible car il n'impliquera de la part de l'artisan aucune manipulation, ni savoir-faire supplémentaire.

Coûts d'ajustement prédominants : La fabrique de boudins blanc décide un jour de diversifier sa production. Il lui faut pour cela produire 50 % de boudins blancs et 50 % de confit de foie de volaille. Le prix de revient de chacun de ses deux mets est sensiblement le même si bien que la diversification ne coûtera rien à long terme. Le coût transitoire d'adaptation est par contre élevé. On peut citer à titre d'exemple la découverte des meilleures adresses pour se fournir de chacun des ingrédients, le savoir- faire des cuisiniers ou plus simplement les ustensiles nécessaires à la fabrication du nouveaux produits...

Superposition de coûts permanents et de coûts d'ajustement importants : Ce cas peut s’illustrer par la fatigue ressentie lors d'une ascension himalayenne de plusieurs jours. Cette fatigue provient à la fois de deux causes : l'altitude et l'effort de marche quotidien qui permet chaque soir de bivouaquer un peu plus haut que la veille. Il correspond probablement le mieux au coût social de la réduction des émissions polluantes, et est représenté Figure 5.1.

2000 2020 2040 2060 2080

Coûts de réduction (% GWP courant)

0.25 0.5 0.75 1 1.25 1.5 1.75 2 Total Permanent Adjustment Figure 5.1 : Décomposition du coût de réduction. Une décomposition possible des coûts permanents et des coûts d’ajustement concernant la réduction des émissions de CO2 , sans

actualisation. On a ici considéré un programme de réduction suivant une courbe en S, visant une réduction de 50% au bout de 50 ans.

A côté de la question des parts relatives des coûts permanents et des coûts d'ajustement dans le coût total, le Tableau 5.1 permet de poser une seconde question, qui est celle de l’importance de ce coût total. En termes géométriques, dans le Tableau 5.1, se déplacer selon la direction de la diagonale principale (NW-SE) correspond à une variation du coût total, les parts relatives des deux sortes de

Coûts d'ajustement

Fort Faible

Coûts

Fort Ascension himalayenne Augmenter la teneur en truffe

permanents Faible Diversifier dans le confit d'oie

Tableau 5.1 : Exemples de coûts permanents et de coûts d'ajustements.

NW

SE NE

coût étant inchangées. Au contraire, se déplacer selon l'autre diagonale (NE-SW) correspond à un raisonnement à coût constant.

Cette question seconde a son importance dans la détermination des politiques climatiques. En effet, toutes choses égales par ailleurs, lorsque les coûts de réduction augmentent, le niveau de réduction optimal diminue. Dans la mesure où la considération précédente apporte une réponse relativement triviale, nous avons préféré dans la suite raisonner à coût total constant, pour isoler l’effet des variations de la part relative des coûts d’ajustement.

L’enjeu n’est donc pas ici de remettre en question l’ordre de grandeur des évaluations de coût de réduction, mais de s’interroger sur la répartition dynamique de ces coûts : alors que les modèles tendent à décrire une situation où les coûts permanents dominent, que se passe t il si on fait l’autre hypothèse ?

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