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Chapitre 5. Cas d’étude n° 1, Marie

5.3. Schèmes d’usage documentaire de Marie

5.3.4. Concevoir de nouvelles ressources

La dernière classe de situations qui sert de support à notre analyse du travail documentaire de Marie concerne la transformation des ressources qu’elle collecte pour les assembler dans la ressource créée pour la nouvelle leçon. Nous nous focalisons sur les transformations selon le point de vue informationnel principalement, mais le point de vue didactique pourra être sollicité au besoin. Les transformations des ressources observées pendant les situations de préparation de leçon sont au nombre de quatre, qui correspondent aux quatre schèmes associés à cette classe de situations : saisir une ressource imprimée dans un traitement de texte, copier-coller d’une ressource numérique vers la nouvelle leçon, utiliser le logiciel Scratch pour intégrer les instructions d’un programme dans la nouvelle leçon, modifier des consignes et la mise en page.

Rédiger dans un traitement de texte une consigne issue d’une ressource papier

Le traitement de texte étant le principal outil de production d’une nouvelle leçon, Marie y centralise toutes les informations nécessaires à la conception de la leçon. Lorsque le copier-coller n’est pas possible, elle recopie dans un logiciel de traitement de texte les éléments de la ressource papier qu’elle souhaite réutiliser. C’est principalement le cas lorsqu’elle sélectionne une définition, un exercice ou une activité dans un manuel scolaire (8 occurrences dans la situation Ma1 : Annexe 17 à 16’39 ; 18’43’’ ; 29’19’’ ; 41’49’’ ; 62’24 ; 81’25 ; 88’53’’ et 4 occurrences dans Ma2 : Annexe 21-1 à 21’56’’ ; Annexe 21-2 à 15’09’’ ; Annexe 21-3 à 9’07’’ et 24’18’’). Elle commence le plus souvent par écrire le texte au clavier avant d’ajuster la mise en page. À plusieurs reprises, nous observons un travail d’harmonisation de la mise en page. Les titres des activités sont mis en gras et souligné. La police est uniformisée, en particulier à la suite de copier-coller.

Bien que ce schème ne relève pas d’un haut niveau technique, des invariants opératoires sont nécessaires à son opérationnalisation : placer le curseur à l’endroit où le texte va s’afficher, utiliser la souris pour se déplacer dans la page, savoir utiliser un clavier et afficher des caractères différents à partir de la même touche ou encore utiliser les fonctionnalités de mise en forme correspondant à ses besoins (tableau, gras, souligné…).

Copier-coller d’une ressource numérique vers la nouvelle leçon

Le copier-coller est une pratique courante et très commode pour éviter de saisir un texte qui existe déjà sous forme numérique. Puisque Marie s’appuie à chaque conception de leçon sur des ressources qu’elle a précédemment réalisées, elle a fréquemment recours au copier-coller (Annexe 17 de 13’38’’ à 18’43’’ à 20’51’’ ; 22’30’’ ; 29’19 ; 34’59 ; 40'52’’ ; 111’27’’ et Annexe 21-3 à 3’47’’). Le but de ce schème est de prélever des parties des ressources existantes et les intégrer dans la nouvelle ressource en cours de conception. Pour réaliser cette opération Marie sélectionne avec le curseur la partie de texte ou l’image choisie, utilise le clic droit copier ou utilise le raccourci clavier ctrl+c, puis insère la partie copiée avec le clic droit/coller ou le raccourci ctrl+v. L’action de copier-coller est donc nécessairement précédée d’une phase d’analyse de la ressource où Marie détermine les éléments qu’elle souhaite réutiliser. La place qu’elle choisit dans la nouvelle ressource pour coller la partie prélevée fait également l’objet d’une réflexion. Une fois que la partie sélectionnée est insérée dans la nouvelle ressource, un travail de mise en page ou de reformulation peut aussi intervenir. Nous proposons d’analyser en détail une séquence qui se situe au début de la situation Ma1 (Extrait 5-27).

L’extrait 5-27 met en évidence qu’il n’est pas toujours si facile de faire un copier-coller. Une ressource numérique est structurée par du code informatique. Quelques lignes de textes sont bien plus que des mots. En copiant le texte, Marie copie également le format de ce texte. Et c’est justement la forme que prend le texte au moment du collage qui ne lui convient pas et qu’elle ne parvient pas à changer. Elle ne connaît pas la fonction « collage spécial » qui permet de dissocier le texte et la forme.

Extrait 5-27 : Extrait Situation Ma1, avril 2017 - 13’38’’

[13:38 Marie affiche la ressource de son collègue C4] Allez, je vais commencer par donner la définition. Donc je vais reprendre la définition, la définition de C4 c’est la définition qui est dans le Myriad. [Elle sélectionne et copie la définition sur la ressource de C4]

[13:49 Création d'un nouveau fichier Word où Marie colle la définition. Elle est dans un cadre et cela ne convient pas à Marie.]

[14:30] Je ne vais pas faire ça parce que ça va me fatiguer.

[14:33 Marie réduit toutes les fenêtres affichées sur le bureau] Ça ne sert à rien ce que je viens de faire, mais ce n’est pas grave. (…) Je vais utiliser Libre Office [Marie va chercher le programme et le lance. Depuis le fichier Word, elle sélectionne et copie la définition puis la colle dans le document Libre Office. Le copier-coller ne produit pas le rendu souhaité.]

[15:42] Pfff. Ça commence (…) Ça m’emmerde ce truc.

[Marie efface la définition. Depuis la ressource de C4, elle sélectionne et copie la définition puis la colle dans le document Libre Office. Le copier-coller ne produit pas le rendu souhaité]. [16:08] Voilà ! Donc l'exemple même du truc qui me soûle. (…) Qui me soûle complet. [Marie efface à nouveau la définition et supprime le fichier]

[16:39 Marie ouvre un nouveau fichier, ferme les 2 premiers sans enregistrer, écrit un titre puis recopie la définition à partir d'un support papier]

[18:33] Donc là je m’inspire du Myriade.

La stratégie mise en place par la professeure s’appuie sur ses représentations du fonctionnement d’un traitement de texte. Elle tente d’abord d’écrire au-dessus du cadre, puis regarde les fonctions proposées dans le menu mise en page. Ne trouvant pas d’élément tangible, elle décide de changer de logiciel : elle ferme le fichier Word et lance Libre Office. Libre Office étant le seul éditeur de

traitement de texte installé au collège, elle l’utilise régulièrement, notamment pour éviter les problèmes de compatibilité avec Word. Les deux copier-coller qu’elle fait, à partir du fichier Word qu’elle vient de créer, puis à partir du fichier source, ne lui donnent pas satisfaction. L’intérêt majeur du copier-coller étant de gagner du temps, Marie finit par décider que cette stratégie n’est pas rentable. Elle décide alors de saisir au clavier la définition.

Quelques minutes plus tard (Annexe 17 de 20’51 à 24’15’’), de nouvelles difficultés apparaissent avec le copier-coller. Marie attribue cela au problème de compatibilité entre Word et Libre Office, elle résout problème en fermant toutes les ressources ouvertes avec Word et en les ouvrant à nouveau avec Libre Office. À la suite de cette opération, elle obtient une mise en forme qui lui convient.

Les invariants opératoires qui composent le schème ‘copier-coller une ressource numérique vers la nouvelle leçon’ montrent d’une part que Marie est consciente que deux logiciels de traitement de texte ne sont pas équivalents et qu’il peut y avoir des incompatibilités, et d’autre part que Marie ne distingue pas la dualité texte/format inhérente à tout traitement de texte, et au-delà aux suites bureautiques.

Intégrer les instructions d’un programme dans la nouvelle leçon avec le logiciel Scratch

Les situations de préparation de leçon que nous avons observées portent sur l’algorithmique et la programmation. S’il est relativement simple de recopier du texte dans un logiciel de traitement de texte, il n’en va pas de même pour du code informatique. Dans les activités que Marie a sélectionnées pour ses élèves, des modèles de programmes sont utilisés (Figure 5-11). Afin de les intégrer aux différentes ressources conçues, Marie met en œuvre un schème d’usage documentaire. Elle commence par recopier les instructions de l’exercice sélectionné dans le logiciel Scratch (Figure 5-12), puis elle effectue des captures d’écrans à l’aide du logiciel FS Capture. Elle obtient ainsi une image qu’elle colle dans le fichier de traitement de texte qui centralise et organise toutes les informations relatives à la leçon (Annexe 17 de 73’53 à 84’17’’ ; Annexe 21-2 de1’14’’ à 15’09’’ puis de 18’26 à 2’24 ; Annexe 21-3 de 7’04’’ à 16’29’’ puis de 21’56’’ à 30’05’’).

Figure 5-11 : exercice 4 p. 49 du Myriade sélectionné par Marie

Pour mettre en œuvre ce schème, Marie mobilise des connaissances sur le logiciel Scratch comme les fonctions des différentes zones de l’interface (zone des instructions, zone pour déposer les instructions, zone lancer le programme...) ou la typologie des instructions (évènement, mouvement, boucle, variable, instruction conditionnelle, opérateurs, bloc). Dans la situation Ma1, Marie se contente de recopier un programme. Dans Ma2, Marie termine la leçon en essayant de réaliser un programme par elle-même. Nous en déduisons que ses connaissances sur Scratch et sur la programmation se sont développées dans l’intervalle qui sépare les deux situations. La démarche qui consiste à recopier des programmes existants a probablement permis à Marie d’apprendre à maîtriser à la fois Scratch et les concepts de base de l’algorithmique.

Marie utilise également la stratégie du copier-coller par l’intermédiaire d’un logiciel de capture d’écran (FS Capture). Ainsi, elle est à même de transformer une image du manuel scolaire en programme qu’elle peut tester et en image à intégrer dans sa leçon.

Figure 5-12 : Marie écrit un programme dans Scratch

Modifier les consignes et la mise en page

Le dernier schème de la classe de situations ‘transformer des ressources collectées’ est sans doute celui où l’appropriation des ressources collectées est la plus visible. En effet, Marie ne se contente pas de recopier et rassembler des fragments provenant de ressources différentes. Tout au long de la conception, la professeure relit et adapte les consignes. Ce travail d’adaptation est bien souvent associé à un travail de mise en forme. Pour illustrer notre propos, nous analysons en détail l’adaptation de l’exercice 4 p.49 du Myriade (Figure 5-11) dans la situation Ma2 (Extrait 5-28). Le résultat final est visible sur la Figure 5-13 (cf. Annexe 23 pour voir la totalité de la ressource produite).

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