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Chapitre  I   –  Sociohistoire  de  l’évangélisme  pentecôtiste  au  Brésil  et  à  Recife

5.   Arrivée  et  implantation  de  l’évangélisme  pentecôtiste  à  Recife

5.1.   Assembléia  de  Deus  :  une  pionnière  du  mouvement  à  Recife

5.   Arrivée et implantation de l’évangélisme pentecôtiste à Recife

5.1. Assembléia de Deus : une pionnière du mouvement à Recife

Antérieurement, il a été précisé que l’implantation de l’Assembléia de Deus au Brésil a été une œuvre des pionniers Daniel Berg et Gunnar Vingren. Ceux-ci ont travaillé conjointement avec des Brésiliens développant des missions locales qui ont reçu le soutien de missionnaires étrangers, notamment des Suédois (Almeida, 198235 ; Freston, 1993).

Amorcée dans le Nord brésilien, ces missions évangélisatrices vont se développer sous l’impulsion de Gunnar Vingren. Elles vont partir de Belém pour atteindre les côtes du Nordeste. Il semblerait que les missionnaires voyageaient en bateau et débarquaient dans les ports des villes côtières de ces régions (Almeida, 198236). La première mission évangélisatrice de l’AD à Recife s’implante en 1916 avec Adriano Nobre (Omena, 1993)37. Dès son arrivée à Recife, Adriano Nobre va mener un travail d’évangélisation dans les rues du centre-ville, puis, chez certains individus intéressés par la nouvelle doctrine qu’il prêchait. Ainsi se crée le premier groupe de prière chez la famille Ribeiro (Ibid., 1993) 38. Par la suite, d’autres groupes se mettront progressivement en place. Ces réunions dans des maisons, prendront des proportions importantes.

Dans l’histoire de l’évangélisme protestant et pentecôtiste, avant de bâtir leur église, les pasteurs prêchaient dans des maisons ou d’autres lieux susceptibles de réunir des personnes (Fath, 2008). Les prêcheurs des Évangiles fondent leurs actions sur l’Évangile de Matthieu, chapitre 18, verset 19 : « (…) De même, je vous le dis en vérité, si deux d’entre vous, sur la terre, unissent leurs voix pour demander quoi que soit, cela leur sera accordé par mon Père qui est aux cieux. Que deux ou trois, en effet, soient réunis en mon nom, je suis là au milieu d’eux » (La Bible de Jérusalem, 1998 : 1679).

L’AD s’en est inspirée pour justifier son expansion. Si d’autres évangélisateurs mobilisent cette méthode pour démarrer leur entreprise évangélisatrice, l’AD l’applique de manière systématique. De fait, à travers les réunions de prière, réalisées le plus souvent dans des maisons, mais aussi dans des places publiques, elle va rassembler des individus autour de la doctrine évangélique pentecôtiste. La régularité de ces rencontres permet donc de rassembler et de maintenir le groupe formé.

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Voir ouvrages évangéliques.

36 Ibid. 37 Ibid. 38 Ibid.

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Cette pratique n’est pas une spécificité brésilienne, certes, puisqu’elle s’est répandue dans le monde, et a pris des formes singulières, notamment les house-churches en Asie (Homer, 2010 ; Kong, 2002). Au Brésil, le succès de ces réunions de prière, entreprises par les membres engagés dans le travail d’évangélisation de l’AD, est à l’origine de la construction d’églises bâties par les propres adhérents à la nouvelle doctrine qui se regroupent autour des réunions de prière. C’est le cas pour la première église de l’AD édifiée à Recife.

Dans cette ville, Adriano Nobre a été le premier à orchestrer les réunions de prière, devenues régulières, aux côtés d’autres individus engagés à les organiser. Progressivement, le nombre de personnes y participant va augmenter. Dans la décennie des 1920, on les estime à un total de mille-cinq cents individus (Almeida, 198239, Freston, 1993, Omena, 199340). Il a donc fallu prévoir l’édification d’une église, laquelle a vu le jour le 15 avril 1928 dans le bairro (quartier) Encruzilhada, situé dans la zone nord de Recife.

Cette toute première Assembéia de Deus a été envisagée pour accueillir l’ensemble des membres réunis autour des groupes de prière, jusqu’alors formés ici et là dans la ville de Recife (Omena, 1993) 41. Elle constitue l’aboutissement du travail d’évangélisation mené localement par Adriano Nobre. Il sera alors désigné pasteur de ce premier temple et restera reconnu à jamais comme l’initiateur du mouvement à Recife (Almeida, 1982 ; Araújo, 2014) 42.

Toutefois, quelques années après, il quittera la ville pour prendre la direction de Natal, une autre ville du Nordeste, située à près de trois cents kilomètres au nord de Recife. Il envisageait de poursuivre sa mission évangélisatrice à travers le Nordeste brésilien. Plus tard, des divergences doctrinales vont l’exclure de l’AD, et il fondera sa propre église (Araújo, 2014, Daniel, 2004)43. Il s’était rapproché d’évangélisateurs baptistes, ce qui a été mal perçu par ses homologues de l’Assembléia de Deus. Pourtant, son travail d’évangélisation restera reconnu, malgré sa désaffiliation du mouvement évangélique pentecôtiste fondé par les missionnaires suédois.

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Voir ouvrages évangéliques.

40 Ibid. 41 Ibid. 42 Ibid. 43 Ibid.

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Figure 1. Premier temple de l’Assembléia de Deus à Recife le jour de son inauguration, le 15 avril 1928. Selon Omena (1993), des centaines de personnes étaient présentes ce jour-là. Source : http://adencrecife.blogspot.com

La photo ci-dessus, montre le jour de l’inauguration réunissant l’ensemble des membres de la congrégation. Il faut remarquer la prédominance masculine. Certains portent une bible et tous sont vêtus de manière formelle, soit en pantalon, costume et cravate. Il s’agit là d’un code vestimentaire caractéristique à cette l’église (Freston, 1993). Ce premier temple restera quelques années l’église-mère de l’AD à Recife. Tandis que d’autres petites églises commencèrent à émerger dans d’autres quartiers de la ville (Omena, 1993)44.

Il est intéressant de noter que la façade extérieure mélange les traits d’une architecture moderne avec des arches gothiques. Or, d’après Mafra (2007), la première église-mère construite à Belém en 1926, se rapproche d’une « typique maison scandinave » (Mafra, 2007 : 149) avec ses deux colonnes droites au format carrée en façade, dont la partie supérieure fait penser à une sortie de cheminée. Les murs sont décorés de larges traits larges et peints en marron pour donner un effet de colombages. Selon l’auteure, ce premier modèle inspiré vraisemblablement d’une maison scandinave sera remplacé par un autre, plus moderne qui, dans les années 1980, va évoluer vers une architecture de type Niemeyerienne45 (Ibid., 2007 : 150-153).

Or, à Recife, la première église AD, datant de 1928, s’inscrit déjà dans une architecture moderne qui servira, par la suite, d’inspiration à l’édification d’autres églises, parmi lesquelles

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Voir ouvrages évangéliques.

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celle de l’Avenue Cruz Cabugá, créée en 1977, et celle de la municipalité d’Abreu e Lima qui, après sa rénovation, a été ré-inaugurée en 1994 (Omena, 1993)46. Ces temples sont une référence locale parce que, d’une part, ils sont des églises-mère, et d’autre part, ils vont servir d’unité centrale aux églises périurbaines qui lui seront rattachées. Les notions d’église-mère et d’église périurbaine seront traitées au cinquième chapitre.

La première église AD de l’Encruzilhada a été longtemps identifiée par les membres dirigeants comme l’église-mère. Avec le temps, elle sera déplacée vers le centre-ville de Recife. Vers la fin des années 1960, un terrain a été acquis47, sur lequel a été bâtie la nouvelle église-mère, désormais connue sous le nom de templo central48 et sede49, littéralement temple central et maison-mère. Elle a été fondée le 24 octobre 1977 au numéro 29 à l’avenue Cruz Cabugá, aux portes du centre-ville. Elle est localisée à l’angle de cette avenue avec la Rua dos Palmares.

Figure 2. Façade extérieure du temple central de l’Assembléia de Deus à Recife (Photo de l’auteure).

L’église-mère dispose d’une antenne de radio et d’un studio de télévision, regroupés autour de l’enseigne Rede Brasil de Comunicação (RBC), littéralement Réseaux Brésilien de Communication. Ce réseaux diffuse des programmes évangéliques produits par l’AD localement. Elle possède un centre de formation en théologie, une école biblique et une librairie.

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Voir ouvrages évangéliques.

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Information obtenue auprès du service de gestion urbaine de la municipalité de Recife.

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Ce terme est assez souvent mobilisé par les adhérents à l’Assembléia de Deus qui y ont recours pour identifier leur église-mère.

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Sede en portugais veut dire maison mère ou endroit où se concentre le pouvoir ou l’administration d’un établissement. Source : https://dicionariodoaurelio.com/sede consulté le 24 mai 2019.

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Des bureaux administratifs, des salles de réunion, des locaux destinés à l’orchestre et à la chorale y sont également installés.

Quant à la salle de culte (cf. illustration ci-dessous), elle a une capacité d’accueil de cinq mille personnes assises, et jusqu’à sept-mille-cinq cents lors des grands rassemblements. La salle est entièrement climatisée, dotée d’une illumination optimale, de bancs longs en bois et de chaises confortables, de caméras avec système à traveling, d’un vidéo projecteur, lequel est placé derrière l’autel qui est formé par une assemblée de ministres, soit des pasteurs, évangélisateurs et presbytères, lesquels représentent des membres dirigeants.

Figure 3. Intérieur du temple central de l’AD à Recife qui a une capacité d’accueil de cinq mille personnes assises. Source :

www.ieadpe.org.br

L’AD a entrepris un projet de construction d’un méga-temple. A cette fin, depuis 201250, elle a acquis un terrain, situé à l’avenue Mario Melo, à moins de deux-cents mètres du temple central de l’avenue Cruz Cabugá. Les enjeux sociopolitiques et religieux entourant ce projet seront présentés et discutés au cinquième chapitre.

Dans l’histoire institutionnelle de l’AD, elle a la particularité d’avoir toujours bâti des églises-mère avec une capacité d’accueil considérable. Son méga-temple, prévu pour les années à venir, prétend accueillir jusqu’à vingt-sept mille personnes. Sa croissance institutionnelle semble avoir comme objectif de s’affirmer en tant que leader du mouvement évangélique pentecôtiste national. En somme, depuis les années 1980, l’AD n’a cessé de bâtir des églises modernes, spacieuses et multifonctionnelles (Mafra, 2007).

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Information obtenue auprès du service de gestion urbaine de la municipalité de Recife. Une copie du document officiel se référant au projet se trouve dans les annexes.

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