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SAAST Acad. MACON

II. A.2. LES EDIFICES CIVILS

La ville d’Augustodunum possède une parure monumentale particulièrement riche et variée, mais mal connue à bien des égards. A l’exception des édifices de spectacle, l’aspect exact des autres aménagements est encore mal défini. Ils ne sont généralement documentés que par des découvertes anciennes et d’interprétation malaisée ou des membra disjecta remarquables mais souvent hors contexte432. Ce constat est d’autant plus frustrant que deux des Panégyriques Latins rédigés au début du IVe siècle en l’honneur de Constance Chlore et de Constantin offrent des indications particulièrement précieuses sur la parure monumentale dans les années 300433. Leurs auteurs se soucient malheureusement peu d’indications topographiques précises et leurs descriptions sont donc difficilement utilisables dans une étude de l’urbanisme antique.

426 L’étude des systèmes d’adduction d’eau a fait l’objet d’un récent travail de maîtrise inédit : Borau (L.) – Les systèmes

d’adduction et d’évacuation d’eau antiques à Autun. Mémoire de maîtrise sous la direction de G. Sauron, Université Paris

IV, dactylographié, 2003Une présentation a peu près complète de ces deux ouvrages dans Rebourg, CAG 71/1, p. 56-59, n° 77-79 et fig. 41-42.

427 Fontenay, Autun, p. 101.

428 Fontenay, Autun, p. 101-105. Cette proposition de datation est basée sur une allusion d’Eumène qui signale la restauration des aqueducs d’Autun par Constance Chlore : Eumène, Pro instaurandis scholis oratio, IV, 3.

429 Rebourg, CAG 71/1, p. 58, n° 79.

430 CIL XIII, 3, 100029 310, Ganay (S. de) et Pinette (M.) – Tuyau de conduite d’eau, dans Autun / Augustodunum, p. 98, n° 142.

431 Sur ces égouts, Kasprzyk, Labaune, Le gestion des déchets, p. 107-108.

432 Les plus significatifs ont été publiés par A. Olivier dans le catalogue Autun / Augustodunum, p. 62-75, n° 97-106. On notera le grand nombre d’éléments d’architecture en marbre. Un Projet Collectif de Recherche sous la direction de V. Brunet-Gaston (INRAP) et P. Chardron-Picault (Ville d’Autun) s’emploie actuellement à inventorier tous les éléments lapidaires de la ville antique (situation courant 2004).

II.A.2.1. Le problème de la localisation du fo rum

La localisation du forum d’Autun est une question depuis longtemps débattue. Le discours d’Eumène y fait clairement allusion, puisque celui-ci fut prononcé dans son enceinte, devant le gouverneur de la province de Lyonnaise première434. C’est certainement le temple du forum qu’il évoque lorsqu’il parle du capitole d’Augustodunum et de ses autels435. De cet édifice, nous ne savons rien de plus, mais on devine qu’il était encore en usage au début du IVe siècle, puisque Eumène juge l’état des Ecoles Méniennes dégradant pour ce temple qui en est proche436.

La plupart des auteurs du XIXe et la première moitié du XXe siècle ont considéré que le forum se trouvait au centre de la ville antique, au croisement du cardo maximus et des deux principaux decumani, c’est-à-dire dans le quartier médiéval de Marchaux [VIII-IX 8] (fig. 14, n° 1, p. 85). Ce secteur est en outre qualifié à plusieurs reprises de forum aux XIIe – XIIIe siècle437. Dans sa thèse, A. Rebourg a proposé de le situer plus au sud438, sous l’actuel centre hospitalier, dans les îlots XI 7, XI 8, XII 7 et XII 8, où des éléments lapidaires en marbre, des portiques monumentaux, indiquent à l’évidence la présence d’aménagements publics (fig. 14, n° 2, p. 85). Plusieurs arguments conduisent à ne pas accepter en bloc cette localisation. En premier lieu, il ne suffit pas que les architectures découvertes dans cet îlot soient en marbre pour qu’elles appartiennent à un forum. Par ailleurs, les découvertes de l’îlot XI 7, situées dans l’espace qu’A. Rebourg attribue au forum, s’apparentent à des structures d’habitat [XI 7, n° 2-3]. De plus, il a considéré que la monumentalité du decumanus séparant les rangées d’îlots XI et XII entre le cardo maximus et l’amphithéâtre indiquait qu’il menait certainement au forum439. Une observation récente [XI 12, n° 1] a montré que cette voie possédait en réalité la même structure que les autres decumani secondaires de la ville. A. Rebourg pensait aussi que l’absence de decumanus entre les îlots XI 8 et XII 8 était liée à la présence d’une vaste place. En réalité, il s’agit d’un argument a silentio et aucune observation ne permet d’affirmer que l’on ne trouve pas de decumanus entre les îlots XI 8 et XII 8. Enfin, l’existence de la tour dite du capitole [XI-XII 8, n° 1] (fig. 14, n° 2, p. 85 ; pl. 197, n° 1 et pl. 198) - sans doute un temple à cella circulaire très proche par ses dimensions de la Tour de Vésone à Périgueux440, du temple de la rue Nationale à Tours441, ou du temple à cella circulaire récemment découvert à Cahors442 - dans l’angle du forum proposé par A. Rebourg se révèle être un argument suffisamment important pour écarter l’hypothèse que le forum puisse être situé dans cet îlot443.

434 S’adressant au gouverneur de Lyonnaise (PLRE, I, p. 1022, Anonymus 107) à propos de son discours il dit qu’il n’a pas l’habitude de in foro iactare : Eumène, Pro instaurandis scholis, I, 1 ; de même il rappelle in foro dicam ueniam : Ibid., III, 1.

435 Eumène, Pro instaurandis scholis, IX, 3 et X, 2. Gros (P.) – L’architecture romaine, 1. Les monuments publics. Paris, 1996, p. 221 et Balty (J.-Ch.) – Curia ordinis. Recherches d’architecture et d’urbanisme antiques sur les curies provinciales du monde romain. Bruxelles, 1991 [Académie royale de Belgique, Mémoires de la classe des Beaux-Arts, XV, 2] montrent que les capitoles des cités sont toujours situées sur les fora : Pompéi, Brescia, Augst.

436 Discussion, infra, § II.B.2.3.

437 Le 22 avril 1109 […] quandam terram quae est inter Marciale Forum et abbatiam sancti Joannis […] (Charmasse, Cartulaire

Eglise Autun, I, p. 56, n° XXXV), entre 1171 et 1178 […] in foro et civitate Edue […] (Charmasse, Cartulaire Eglise Autun,

II, XIX, p. 106), le 4 mai 1243 […] domui Dei de Foro Eduensi […] (Charmasse, Cartulaire Eglise Autun, II, XC, p. 165).

438 Rebourg, Urbanisme, p. 221, repris dans Rebourg (A.) et Goudineau (C.) – Autun antique. Guides archéologiques de la

France. Paris, 2002, p. 64-67. 439 Rebourg, Urbanisme, p. 184.

440 Lauffray (J.), avec la coll. de Will (E.) – La tour de Vésone à Périgueux. 49e suppl. à Gallia. Paris, 1989.

441 Jouquand (A.-M.), Neury (P.), Trébuchet (E.) et Wittmann (A.) – Nouvelles données sur le temple de Tours : fouilles du Centre Dramatique Régional (ancien cinéma Olympia – rue de Lucé), Bull. Soc. Arch. Touraine, XLVIII, 2002, p. 27-34.

442 Rigal (D.) – Cahors, centre Hospitalier, Archéopages, 7, juillet 2002, p. 40 et fig. Sur les temples circulaires de Gaule, voir les communications de Journée d’études (Bordeaux, 23 nov. 2003). Temples ronds monumentaux de la Gaule romaine, Aquitania, 20, 2004, p. 7-124.

443 Rebourg, Urbanisme, p. 198 place le « capitole » des auteurs modernes dans l’îlot mitoyen IX-X 8, ce qui n’est pas acceptable au vu des descriptions anciennes (plan de F. de Belleforest (1575) et surtout relevés et notes de J. Roidot-Deléage [Ilot XI-XII 8, n° 1 et pl. 198, n° 2].

1 2 [3] 4 5 6 7 [8] (9) 10 11 0 40 m 0 40 m VIII-IX 8 VIII-IX 9 1 2 3 3 1 2 XI 8 XII 8 1 2

Fig. 14. Les deux emplacements supposés du forum d'Autun. 1 : quartier de Marchaux, avec indication des découvertes ; 2 : site de l'Hôpital. Pour les numéros de découvertes, se reporter au catalogue.

bassin bassin Car do maximus Decumanus maximus cour 0 40 m I II III IV V VI VII VIII-IX IX-X XI XII XIII XIV XV XVI 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 2 i N 1

Fig. 15. Les thermes de l'îlot IX-X 8. 1 : structures observées dans l'îlot (se reporter au catalogue) ; 2 : situation de l'îlot par rapport aux deux collect--eurs principaux d'Autun, au probable

castellum diuisorium de l'îlot XI-XII 8,

n° 3 (cercle) et à l'entrée de l'aqueduc dans la ville (pointillés gras).

87 Bien que les îlots XI 8 et XII 8 abritent des constructions monumentales, il n’y a donc pas lieu de rejeter la localisation traditionnelle du forum sous le quartier de Marchaux [VIII-IX 8], étant donné les structures rencontrées et la localisation de cet îlot au centre exact de la ville antique. Des observations anciennes montrent en effet la présence de structures monumentales dans ce secteur (fig. 14, n° 1, p. 85) : énorme massif de caementicium de plus de 1000 m2 et de 3 m de haut au cœur de l’îlot VIII-IX 8 [VIII-IX 8, n° 2], qui peut parfaitement correspondre au podium d’un temple, bordé au nord par un mur de 37 m de long et large de plus de 1,80 m [VIII-IX 8, n° 3], présence d’éléments lapidaires de grandes dimensions et découverte de plusieurs centaines de fragments d’inscriptions publiques [VIII-IX 8, n° 1]. On serait tenté de mettre en relation des découvertes effectuées dans l’îlot théorique voisin VIII-IX 9 : fragments d’architecture et surtout un mur muni de contreforts observé sur une hauteur de 6 m, qui pourrait appartenir à un cryptoportique [VIII-IX 8, n° 1]444.