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SAAST Acad. MACON

II. A.5. DES CONSTRUCTIONS MONUMENTALES MAL IDENTIFIEES

Outre les monuments et aménagements urbanistiques précédemment décrits, on trouve à Autun une série de constructions dont la fonction ne peut-être élucidée. Celles-ci ne sont connues que par des découvertes très partielles ou des mentions anciennes imprécises.

II.A.5.1. La tour de Jouère

Un premier édifice, situé dans l’îlot VIII-IX 5, correspond à une structure maintes fois décrite du XVIIe au XIXe siècle (pl. 161), ayant fait l’objet de dégagements, mais dont la fonction n’est toujours pas élucidée. A la fin de l’Ancien Régime, elle est appelée Tour de Jouère475. Les descriptions du XVIIIe siècle [VIII-IX 5, n° 1] parlent d’un édifice demi-circulaire avec des ouvertures à l’est, distant de 3 m d’une construction interprétée comme un temple. Aux alentours, on signale des substructions et de grandes pierres (grand appareil ?), des caveaux souterrains et des chambrettes profondes voûtées, jointes les unes aux autres. Le mur courbe a été plusieurs fois observé aux XVIIIe et XIXe siècles. Il est constitué d’une très belle maçonnerie en moellons large de deux mètres bordée par un épais béton. Des fouilles de la Société Eduenne en 1875 et 1879 ont permis d’établir qu’il était rectiligne sur une longueur de 15 mètres puis suivait une ligne courbe de 30 mètres de rayon, ce qui indique que la structure demi-circulaire visible au XVIIIe siècle devait mesurer environ 60 m de diamètre. A l’est de l’espace délimité par ce mur on a en outre observé d’autres substructions de 1,55 m de large qui semblaient rayonner vers différents centres (pl. 161, n° 3).

A. Rebourg a proposé que ce monument énigmatique soit un ensemble thermal, ce que les descriptions de l’Ancien Régime et du XIXe siècle n’indiquent pas. L’interprétation de l’auteur semble reposer sur la seule mention d’un petit aqueduc très bien conservé signalé à proximité de l’édifice par Courtépée. En définitive, l’hypothèse d’Anfert, qui y voit un théâtre, paraît plus crédible : une construction en hémicycle mesurant 60 m de diamètre, dans laquelle on trouve des murs rayonnant dans plusieurs directions pourrait tout à fait appartenir à un petit théâtre ou à un odéon. Cette interprétation se heurte cependant à plusieurs objections. En premier lieu, on ne peut ainsi guère envisager que deux théâtres aient pu coexister dans Autun intra muros, sauf peut-être si le second est associé à un sanctuaire, ce que ne permet pas d’affirmer la documentation disponible. S’il s’agit d’un odéon, l’éloignement du théâtre (plus

472 Ibid., XVII, 3.

473 Cf. supra.

474 Cf. supra.

475 Et ce depuis le Moyen-Age : Le Cartulaire Autun, XCV (1296) relate la vente d’un terrain sis à proximité du

93 de 600 m) correspond mal au schéma urbanistique classique qui associe presque toujours ces deux édifices.

II.A.5.2. Le pseudo « temple d’Apollon » dans l’îlot XIII 8

L’îlot XIII 8 abrite une construction énigmatique, qui se matérialise encore sous la forme d’un mur courbe de 2,3 m d’épaisseur, conservé sur près de 13 m de hauteur (pl. 238, n° 2-3 et fig. 16, p. 95). Elle a été interprétée anciennement comme étant le temple d’Apollon mentionné par Eumène. Nous avons vu plus haut que cette hypothèse devait être rejetée.

La structure de l’édifice, qui n’a pas fait l’objet de recherches récentes, demeure largement méconnue. Les observations archéologiques permettent d’attester la présence d’un importante structure de près de 50 m de diamètre (peut-être surestimé), possédant au moins une niche sur le coté intérieur. De nombreux auteurs ont voulu restituer un temple à cella circulaire, mais cette hypothèse se disqualifie pour de simples raisons architectoniques. Les murs présents autour de la construction [XIII 8, n° 3 et 4] ne précisent pas l’identification du monument. En l’état, on pourrait peut-être songer à une vaste exèdre destinée à accueillir des statues honorifiques, ce que suggéreraient les découvertes de sculptures monumentales au XVIIe siècle [XIII 8, n° 1].

Le pseudo « Temple d’Apollon » a souvent été daté du Bas-Empire par les érudits locaux, le caementicium ayant été constitué de blocs de gneiss mêlés à des matériaux anciens selon Fontenay. La présence d’arases de briques semble avoir été un autre argument de datation tardive. Des recherches récentes ont cependant montré que cette technique est attestée en Gaule dès l’époque augustéenne, notamment dans les bâtiments antérieurs à l’édifice dit Temple de Cybèle à Lyon476.

II.A.5.3. Autres édifices indéterminés

Dans plusieurs autres îlots de la ville, on signale des constructions d’apparence monumentale (fig. 13, p. 81). La nature des substructions rencontrées paraît correspondre à des constructions publiques, mais l’exiguïté des fenêtres de fouille, l’ancienneté des mentions ou des observations ne permettent pas de préciser la nature des constructions. On peut ainsi relever la présence de murs s’apparentant à des constructions monumentales dans les îlots VI 10 [VI 10, n° 1], XI 9 [XI 9, n° 1], XVII 3 [XVII 3, n° 2]. II.A.6. LES STRUCTURES D’HABITAT A LA FIN DU HAUT-EMPIRE

La nature et de l’aspect des habitats à Augustodunum à la fin du Haut Empire sont relativement mal connus. L’absence de fouilles complètes d’îlots - à l’exception de l’îlot XV 11 – en est la cause principale. Les plans sont partiels, et de nombreuses domus ont été dégagées anciennement, ce qui nous prive d’indispensables éléments chronologiques. Sans surprise cependant, on peut distinguer au moins deux grands types d’habitats. Le premier regroupe les résidences de l’élite aristocratiques de la cité, le second, mis en évidence plus récemment, semble attribuable aux catégories modestes de la population.

II.A.6.1. L’habitat aristocratique

La définition des habitats aisés à Augustodunum a longtemps reposé sur la seule présence d’éléments de décor luxueux comme les mosaïques. Depuis une vingtaine d’années seulement, la multiplication des fouilles préventives permet désormais d’obtenir des éléments de plan. Dans le meilleur des cas, les fenêtres de fouille ne permettent d’entr’apercevoir qu’un cinquième ou un quart de l’occupation. Toutefois, la présence d’un découpage urbain orthonormé respecté dans l’orientation de tous

476 Desbat (A.) – Note sur l’apparition des constructions à arases de briques dans la région lyonnaise, Gallia, 49, 1992, p. 45-50 ; Nouvelles recherches à l’emplacement du prétendu sanctuaire lyonnais de Cybèle. Premiers résultats,

les habitats fouillés à ce jour, le fait que les domus du Haut-Empire présentent une organisation axiale et la connaissance relativement fiable de la taille des îlots, permettent dans de nombreux cas de comprendre la logique d’implantation des architectures dégagées sur de faibles superficies.

D’une manière générale, les formes de l’habitat semblent s’inscrire à la fin du IIe et au IIIe siècle dans la norme des grandes demeures de la partie occidentale de l’Empire. Rappelons qu’en Occident, celles-ci possèdent une organisation linéaire caractérisée par la succession d’un vestibulium, d’un péristyle central autour duquel se distribuent les pièces d’habitation et d’une salle de réception qui est fréquemment le triclinium477. A Autun, plusieurs fouilles ont permis de repérer ces différentes composantes : vestibule de la domus dite de Bellérophon [VIII-IX 10, n° 1], péristyles dans deux fouilles récentes à proximité de l’amphithéâtre [XII 11, n° 1 et VIII-IX 13, n° 2], salles de réception, la plus célèbre étant celle de la Maison des Auteurs Grecs [VI 5, n° 1]. Les salles de réception avec abside semblent être une constante dans l’habitat de fort statut. Les péristyles paraissent munis de bassins d’agréments, repérés dans au moins deux fouilles récentes [VIII-IX 13, n° 2 et XII 9, n° 1 (Maison à l’Etui d’or)]. Dans certains cas, on est frappé de la monumentalité et de la richesse des pièces. Dans la Maison de Bellérophon [VIII-IX 10, n° 1], la mosaïque est installée dans un vestibule de plus de 20 m de long (pl. 171 et 172, n° 1). On notera que cet îlot est situé juste à l’est de notre proposition de localisation du forum [VIII-IX 8 et 9], et que ce vestibule paraît disposé exactement dans son axe. L’aspect exceptionnel de la mosaïque478 indique qu’elle devait orner une des plus importantes domus d’Augustodunum à la fin du Haut-Empire. Dans la Maison dite des Auteurs Grecs [VI 5, n° 1], la salle de réception avec abside mesure près de 10 m de long. En l’absence de plans complets, on ne peut que signaler la fréquence des hypocaustes et la plus grande rareté des éléments de balnéaires479.

Le décor de ces demeures n’est qu’entraperçu, essentiellement au travers des mosaïques. H. Stern et M. Blanchard-Lemée ont mis en évidence l’originalité de certaines compositions et supposé l’existence d’une école de mosaïque autunoise480. Quelques découvertes ponctuelles, outre la fameuse mosaïque des Auteurs Grecs481., montrent le haut niveau culturel sous-tendu par certains programmes décoratifs. On peut songer à une copie de Koré archaïque, type de statue extrêmement rare en Gaule482, ou à des copies d’œuvres hellénistiques, elles bien plus courantes483.

L’omniprésence des portiques de façade dans les fouilles effectuées à Autun permet de penser que la majorité des demeures devaient en être équipées, même si le lien avec un habitat a rarement été observé. Toutes les domus devaient posséder en façade un caniveau destiné à l’évacuation des eaux pluviales et peut-être usées484. En l’état actuel de la documentation, on notera enfin l’absence de dépotoirs domestiques dans le cadre de ces habitats privilégiés485.

La nature très partielle des fouilles effectuées jusqu’à présent ne permet pas de déterminer la taille des domus autunoises. Quelques cas permettent cependant des observations. Dans l’îlot VIII-IX 10, la taille du vestibule de la Maison dite de Bellérophon [VIII-IX 10, n° 1] indique à l’évidence qu’elle doit occuper au moins un tiers de l’îlot puisqu’il faut bien restituer la présence d’un péristyle (pl. 171). Celle-ci aurait pu occuper une surface de plus de 3000 m2. Dans quelques fouilles, la présence d’un ambitus suggère une partition des îlots en plusieurs habitations, ainsi entre la Maison de Balbius Iassus et la Maison à l’Etui d’or [XII 9, n° 1] (pl. 228).

477 Une synthèse récente dans Gros (P.) – L’architecture romaine, 2. Maisons, palais, villas et tombeaux. Paris, 1999, p. 136-211.

478 On se reportera aux observations de Stern et Blanchard-Lemée, Recueil mosaïques, n° 233 et M. Blanchard-Lemée dans Autun / Augustodunum, p. 319-323, n° 639-640

479 Malgré quelques découvertes appartenant selon toute évidence à des habitats comme [Ilot VI 9, n° 3].

480 Stern et Blanchard-Lemée, Recueil mosaïques, p. 13.

481 Stern et Blanchard-Lemée, Recueil mosaïques, n° 213. Selon M. Blanchard et H. Stern ce mosaïque reflète non pas une

culture vulgarisée mais une culture savante, une citation remplaçant les habituelles désignations nominatives sur ce type de

représentation. De nombreux auteurs ont d’ailleurs souligné l’influence probable des Ecoles Méniennes d’Autun dans cette composition. Rappelons comme autre témoin du philhellénisme local l’inscription CIG III, 6797 à Apollon et Artémis [XI-XII 8, n° 9].

482 Espérandieu, Recueil général, III, n° 1861, une notice de M. Pinette dans Autun / Augustodunum, p. 327, n° 648.

483 Autun-Augustodunum, p. 325-330, n° 644 à 656.

484 Rappelons en effet que l’entretient du bord de rue incombe à la propriété mitoyenne : Robinson (O.F.) – Ancient

Rome. City planning and administration. Londres - New-York, 1996 (3e éd.), p. 71 cite à l’appui un texte de Papinien repris dans le Digeste, 43.10.1.3-5. Sur la typologie de ces caniveaux à Autun : Kasprzyk, Labaune, Le gestion des déchets, p. 106-107.

(2) 3 (4)

[5] 1

0 40 m

Fig. 16. Les structures repérées dans l'îlot XIII 8 (pseudo- temple d'Apollon).

II.A.6.2. L’habitat des couches modestes de la population

La présence d’habitats destinés aux couches modestes de la population est à Autun un acquis récent de la recherche. Lors des fouilles du Lycée Militaire [XIV 11, XIV 12, XV 10, XV 11 et XV 12], on a pu pour la première fois étudier un quartier artisanal et dégager le premier îlot complet d’Augustodunum [XV 11]486.

L’analyse architecturale de l’occupation appelle quelques observations. Alors que les fouilleurs ont proposé de distinguer trois bâtiments dans l’îlot XV 11 (fig. 17, p. 95, bâtiments C, E et O), l’organisation de l’ensemble parait en réalité s’apparenter à celle d’un îlot d’agglomération secondaire. On remarque en effet la présence de constructions rectangulaires de 20 m de profondeur et 5 m de large en moyenne, disposées perpendiculairement à la rue. Au sud, à l’arrière de ces bâtiments, on trouve des dépotoirs, mais aussi des indices d’activités artisanales (four de potier), absents des habitats de fort statut487.

Ces constructions allongées disposées perpendiculairement à la voirie et derrière lesquelles sont regroupées fosses et dépotoirs sont particulièrement bien connues en Gaule de l’est : chez les Eduens, au Haut-Empire, elles sont présentes dans les agglomérations secondaires d’Alesia [site 21008-15] et Entrains-sur-Nohain488, mais aussi sur de nombreux sites d’agglomération secondaire de Gaule Belgique et de Germanie489. A Autun, elles semblent avoir été munis d’un étage d’habitation, le rez-de-chaussée abritant prioritairement ici des activités artisanales. Malgré la présence d’éléments d’enduits, ces constructions se caractérisent par l’absence de décors sophistiqués et la rareté des hypocaustes.

II.A.6.3. Existe-t-il un habitat des couches moyennes de la population ?

Le bilan des connaissances montre qu’il est relativement aisé de distinguer les domus aristocratiques des habitations populaires, mais qu’il est en revanche bien plus difficile de repérer des constructions de statut intermédiaire. On ne saurait cependant considérer que ces dernières sont absentes de la ville, mais les données disponibles ne permettent guère d’en dégager les caractéristiques éventuelles.

Par opposition avec les deux types précédemment décrits, on serait en mesure d’attendre des constructions d’une plus grande ampleur architecturale que les maisons rectangulaires des quartiers artisanaux, mais sans les éléments de décor luxueux attestés dans les demeures des élites locales. L’emploi de ces critères s’avère cependant problématique, car on atteint rapidement une impasse induite par la faible superficie de la majorité des fouilles effectuées à Autun. Deux habitations repérées dans des fouilles récentes pourraient répondre à ces caractéristiques [VIII-IX 4, n° 1 ou VII 4, n° 1], mais la faible superficie des excavations empêche de savoir si l’on se trouve effectivement dans de simples pièces de service d’une demeure plus luxueuse ou dans le cœur de l’habitation.

II.A.7. LE SUBURBIUM : NECROPOLES, VILLAE, SANCTUAIRES ET DEPOTOIRS La couronne périurbaine d’Augustodunum est occupée par un nombre important de nécropoles, un vaste sanctuaire périurbain, des établissements ruraux et villae ainsi que des zones d’épandage de déchets assimilables à des dépotoirs extra-urbains (fig. 11, p. 80).

486 Chardron-Picault (P.) et Pernot (M.) (dir.) – Un quartier antique d’artisanat métallurgique à Autun (Saône-et-Loire). Le site

du Lycée militaire. Paris, 1999 [DAF, 76]. 487 Cf. supra.

488 Bigeard et Bouthier, CAG 58, p. 148, fig. 106.

489 Parallèles très nets à Bliesbruck (Moselle) et Walheim (D) : Petit (J.-P.) – L’agglomération secondaire de Bliesbruck-Rheinheim : bilan des recherches, dans Petit et Mangin, Les agglomérations secondaires, p. 22-23 et fig. 6 ; Kortüm (K.) et Lauber (J.) – Forschung : Walheim. Truppen, Töpfer, Haüslesbauer, Archäologie in Deutschland, 2000, 1, fig. p. 6-7.

97 II.A.7.1. Les nécropoles

La topographie funéraire d’Augustodunum au Haut-Empire est bien connue, en grande partie grâce au fait que la ville actuelle a débordé tardivement les limites urbaines de la ville augustéenne. Un réexamen précis de leur implantation s’avère donc inutile, exceptées quelques observations de détail. Répétant un schéma classique, les nécropoles du Haut-Empire se sont implantées le long des voies sortant de la ville (fig. 11, p. 80). Plusieurs pôles funéraires peuvent donc être circonscrits.