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Valeur et conséquences de la règle de la continuation de la personne du défunt 122 Importance du principe de la continuation de la personne L’un des

SECTION II DU FONDEMENT DE LA RÈGLE DE LATRANSMISSION UNIVERSELLE DE PATRIMOINE

B. Valeur et conséquences de la règle de la continuation de la personne du défunt 122 Importance du principe de la continuation de la personne L’un des

aspects essentiels de ce principe c’est de permettre une certaine confusion de droit des deux patrimoines, ceux du de cujus et du successeur. La personnalité s’éteignant par le décès, la transmission globale du patrimoine peut tout de même s’opérer. Toutefois, la personne servant d’élément fédérateur des composants du patrimoine ayant disparu, l’unité entre droits et obligations ne s’explique plus. Les concepteurs de la théorie classique ont alors eu recours à la fiction de la continuation de la personne du défunt par son héritier. Ce qui implique comme conséquence l’obligation indéfinie de l’héritier aux dettes du défunt. Il en est ainsi parce que les dettes du défunt sont aussi les siennes199. Il est intéressant de

196 Contrairement au droit romain l’ancien droit coutumier ne connaissait que l’héritier volontaire. 197 Pothier cité par H. et L. MAZEAUD, J. MAZEAUD, F. CHABAS, op. cit., n° 1204, p.463. 198 H. et L. MAZEAUD, op. Cit., n° 1204, p.463.

199 C’est le reproche que fait à ce principe ses adversaires. Pour ceux-ci il est intolérable et injuste que l’héritier soit tenu

relever que malgré les critiques dont il a fait l’objet200, ce principe est toujours d’actualité en ce sens qu’il garde encore une certaine valeur. Et la pratique révèle que ce principe explique mieux que n’importe quel autre règle la transmissibilité des dettes du de cujus au successeur. On peut d’ailleurs affirmer qu’aujourd’hui ces critiques n’ont pas grande valeur eu égard aux correctifs201 apportés audit principe.

123. Implications du principe de la continuation de la personne- Le principe romain de la continuation de la personne en créant la cohésion familiale, fait de l’héritier le représentant du défunt. Et en tant que tel celui-là continue la personnalité de celui-ci. Et la condition, c’est que le successeur doit recevoir l’universalité ou une quote-part de la succession. Certains auteurs ont cru pouvoir ajouter à cela une condition supplémentaire. Selon eux les héritiers qui continueraient la personne du défunt sont ceux qui, en plus de la réception de l’universalité ou d’une quote-part de celle-ci, bénéficient aussi de la saisine. En d’autres termes il s’agirait uniquement des héritiers stricto sensu et les légataires universels lorsqu’il n’y a pas d’héritiers réservataires. Mais les rédacteurs du Code civil ne les ont pas suivis. Ce qui autorise de dire qu’en définitive continue la personne du de cujus tout successeur universel ou à titre universel.

124. Confusion des patrimoines de l’héritier et du de cujus- Il est intéressant de relever que l’héritier continuateur de la personne du défunt est ainsi placé dans la même situation que celui-ci ; il n’existe plus de cloisonnements juridiques entre son patrimoine et celui de son auteur. La disparition de ces cloisons entraîne du coup confusion des dettes et créances tant du défunt que de l’héritier. Celui –ci devient ainsi titulaire des droits réels et créances du de cujus. Il est par ailleurs tenu ultra vires de ses dettes, legs et charges puisque continuer la personne du défunt, c’est pour le successeur, assumer personnellement les obligations du mort sans aucune modification.

125. L’héritier, continuateur du défunt- L’héritier continuateur se substitue donc au défunt dans tous ses liens de droit. Ceci permet aux tiers de ne pas souffrir de la disparition d’un sujet de droit. Le successeur constitue le représentant de droit du de cujus car, la règle de la continuation de la personne autorise la substitution d’une personne à une

200 Il lui est aussi reproché de mettre en péril tant les intérêts des créanciers du défunt que ceux du successeur. Il en est

ainsi dans le premier cas lorsque l’héritier est insolvable et, dans le second, lorsque le passif du défunt est supérieur à son actif.

201 Nous voudrions évoquer ici le cas du bénéfice d’inventaire instauré en vue de protéger l’héritier ; mais aussi le

principe de la séparation des patrimoines qui protège les créanciers du défunt en leur évitant le concours des créanciers de l’héritier.

autre dans ses rapports juridiques. A ce titre le successeur sera tenu comme si lui-même s’était engagé personnellement dans les rapports de droit contenus dans le patrimoine qu’il reçoit. La substitution qui s’opère fait que l’héritier n’apparaît pas comme un tiers à l’égard des actes juridiques accomplis par le de cujus. Ceux-ci sont censé avoir été accomplis par le successeur et ce avec les mêmes modalités, les mêmes conditions d’exécution. Il en résulte que cette confusion de personnalités crée une certaine confusion de patrimoine, l’héritier prenant personnellement la place de son auteur. L’on sait que l’élément fédérateur des composants du patrimoine : c’est la personne même du titulaire de celui-ci. Or, il se trouve qu’à sa mort cet élément est anéanti, brisé. Le sujet de droit disparu, l’unité entre ses droits et ses obligations ne s’applique plus en principe. En effet, le facteur de cohésion des éléments constituant le patrimoine une fois disparu, logiquement l’unité du patrimoine ne se justifie plus. Les créanciers ne peuvent dès lors se faire payer puisque leur gage a disparu. Par ailleurs, il serait économiquement fâcheux que chaque fois qu’un sujet de droit meurt, que cela mette en péril les nombreux rapports juridiques et économiques qu’il a conclus. La nécessité impose donc d’éviter que la disparition du sujet de droit perturbe les échanges économiques entre particuliers202. L’équilibre de la vie sociale exige, d’une part, que les relations juridiques ne disparaissent pas par le fait que constitue le décès de la personne ; d’autre part, ce même équilibre impose que ces rapports de droit puissent continuer de la même manière qu’ils avaient été noués. En effet, si la mort d’une personne devrait à tout moment constituer une cause de rupture des relations de droit, on comprend bien combien sera grande l’insécurité203 et fragile le commerce entre les individus. Il y a donc une certaine urgence, un besoin évident à la survie tant des droits que des obligations de la personne qui disparaît. Et c’est pour répondre à ce besoin légitime de survie que le principe de la continuation fut créé. Celui-ci en tant que règle de base exprime que tout successeur est continuateur dès lors qu’il recueille la totalité ou une partie de la succession. Demolombe ne disait-il pas que patrimoine et personne étant indissolublement liés, celui qui succède à l’un succède nécessairement à l’autre204.

126. L’essence du principe de la continuation de la personne du défunt- La conséquence essentielle de ce principe de continuation est que le successeur continuateur se trouve de droit dans la même situation que le de cujus à l’égard des tiers. Ce qui

202 CLAUX J.-P., La continuation de la personne du défunt par l’héritier, thèse, 1969, Paris, p.71, n°57. 203 Surtout lorsqu’on sait que la sécurité constitue un des objectifs visés par le droit.

implique qu’à son décès, le de cujus se trouve substitué dans ses rapports juridiques par l’héritier. D’après Aubry et Rau, l’héritier en se substituant au défunt révèle qu’il est le représentant juridique de celui-ci. Ce qui évite alors aux tiers de ne pas souffrir de la disparition du sujet de droit. Les droits et les obligations transmis ne sont en rien modifiés. Le changement du titulaire du rapport de droit ne transforme pas l’obligation, pas plus d’ailleurs que le titulaire dans la possession ne modifie pas la nature de la possession. L’héritier n’apparaît donc pas comme un étranger aux relations de droit créées par son auteur. Les actes du de cujus sont considérés comme ayant été passés par l’héritier lui- même, avec les mêmes modalités205.

127. L’intérêt pratique du principe de la continuation de la personne- En consacrant la règle de l’héritier continuateur de la personne du défunt, fut consacrée du même coup la substitution d’une personne par une autre dans ses rapports juridiques. C’est ce principe qui fut transposé aux personne morales. Ceci étant, nous tenterons de voir, par cette transposition, si le principe de la continuation produit ici les mêmes effets. En l’occurrence s’il permet à la société bénéficiaire issue de la fusion ou de la scission de se substituer de droit, comme c’est le cas en droit de successions, dans les relations contractuelles créées par la ou les sociétés qui disparaissent. En d’autre termes il s’agira de se demander si le principe de la continuation de la personne remplit la même fonction en droit des sociétés commerciales qu’ en droit des successions.

II. Le principe de la continuation de la personne et le droit des sociétés commerciales 128. De quelques précisions- Il est évident que pour apprécier la transposition du principe de la continuation de droit commun aux sociétés commerciales, encore faudra-t-il comprendre le sens de ce fameux principe appliqué aux personnes morales. La question mérite d’être posée car on comprend bien que ce principe était, à l’origine, créé pour les personnes physiques. La formulation de la règle qu’il contient était donc faite pour la succession en droit civil. C’est pourquoi, pour bien comprendre ce principe et son sens dans la situation des personnes morales, notamment dans l’hypothèse des fusions et scissions des sociétés commerciales, deux points nécessitent d’être analysés. Le premier, c’est de faire un exposé de ce principe appliqué aux personnes morales (A) et, le deuxième

point, consiste à examiner les conséquences qu’il produit dans la situation objet de notre étude (B). Pour la commodité de l’analyse nous préférerons, pour le cas des sociétés commerciales, l’expression de « continuation de l’entité dissoute » à celle « continuation

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