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Les fusions et les scissions avant la loi du 5 Janvier

SECTION I DE LA NOTION DE LA TRANSMISSION UNIVERSELLE DE PATRIMOINE

A. Les fusions et les scissions avant la loi du 5 Janvier

100. Fusions et scissions : techniques d’apport en nature- Jusqu’à la loi du 24 juillet 1966, le système juridique français ne comportait pas de règle déterminant et réglementant, d’une manière spécifique, les fusions et scissions de sociétés. Se posa alors la question de savoir de quelle façon fallait-il organiser le fonctionnement de ces opérations. L’ingéniosité des auteurs aboutit à leur organisation de en ayant comme seule référence les principes généraux du droit des sociétés. Et très vite, les fusions et les

146 V. Cass. com., 14 avril 1972, journ. Soc., 1974.275, note LECOMPTE ; Com., 7 décembre 1966, D. 1968.119, note

DALSACE.

scissions furent perçues sous la forme d’un apport en nature du patrimoine de la société qui disparaît à la société absorbante ou nouvelle. Ce qui ne favorisa pas, tout naturellement, la mise en évidence de la nature juridique propre desdites opérations et, au-delà, la spécificité de leurs effets148. Les fusions et scissions continuèrent donc d’être considérées, analysées, en des apports en nature149. Et cela peut se lire dans la définition même donnée de ces opérations150. Il s’agit là de la conception analytique151.

101. Fuions et scissions : techniques de transformation ?- Ensuite, certains auteurs152 ont cru voir en ces opérations des causes de transformation et de non de dissolution sans liquidation153. Car, pour les tenants de cette analyse, une dissolution doit

logiquement entraîner comme conséquence la répartition de l’actif social entre les associés après bien sûr règlement du passif. Fort heureusement, cette thèse n’eut pas d’écho. Car aboutissant à identifier les fusions et scissions à des cas de transformation de sociétés. Celle-ci154 n’est qu’une modification dans le mode d’exploitation de la société par changement de forme sociale. Transformer une société, c’est lui donner une nouvelle forme juridique tout en maintenant inchangée sa personnalité morale155. En revanche, les fusions et scissions constituent, au contraire, des modes de transmission de patrimoine qui, très souvent, se suivent d’une modification substantielle de la structure juridique des sociétés en cause.

102. Conséquence de la fusion vue un simple apport en nature- La perception de la fusion en un apport en nature a fait en sorte que, pendant longtemps, la substitution corrélative de débiteur qui s’en suivait, ne pouvait suffire à s’imposer aux créanciers de la société dissoute sans l’acceptation expresse de la part de ceux-ci du changement de débiteur. Ils avaient le choix entre accepter soit la nouvelle société ou la société absorbante

148 En effet malgré qu’étant unanimement reconnues comme des opérations entraînant transmission universelle de

patrimoine, elle sont demeurées, eu égard à leurs effets, des opérations à titre particulier.

149 Signalons cependant que la jurisprudence a été très tôt perspicace puisque ayant admis, bien avant, le particularisme

des effets des fusions et des scissions.

150 V.art.371, al.2 et 3 de la loi du 24 juillet 1966, rédaction antérieure à la loi du 5 janvier 1988.

151 Il s’agit de la conception juridique selon laquelle les fusions et scissions se réalisent en deux temps. D’abord, elles se

caractériseraient par une dissolution anticipée de la ou des sociétés en cause et, ensuite en un apport en nature du patrimoine de celles-ci.

152 P. COULOMBEL, « Le particularisme de la condition juridique des personnes morales de droit privé », thèse ,

Nancy, 1949, p.178-181 cité par COQUELET M.-L., op.cit, .p.18.

153 Par cette analyse, la société bénéficiaire, la société absorbante ou nouvelle, n’apparaît que comme une société

transformée et élargie. Et ceci s’expliquerait, semble-t-il, par le fait que la dissolution, dans le cas des fusions et des scissions, n’emporte pas répartition de l’actif social entre les associés mais, au contraire, ceux-ci, continuent de participer à la nouvelle aventure sociale commune.

154 « Transformation, c’est le passage d’une forme à une autre », « transformer, c’est rendre quelque chose différent, le

faire changer de forme » : Le Petit Larousse Illustré 2002, p.1026.

comme débiteur et ce sous le joug d’un nouveau rapport d’obligation, soit ne pas admettre la substitution de débiteur. De fait, ils conservaient alors le droit de se faire payer sur les biens apportés sans subir le concours des créanciers personnels de la société nouvelle ou absorbante. Ce qui peut amener à faire cette constatation pertinente selon laquelle les fusions et les scissions entraînaient transmission réalisant non une confusion juridique mais, plutôt, une confusion matérielle des biens de la société fusionnée ou scindée dans le patrimoine de la société bénéficiaire156. Il ne fait pas de doute que c’est pour cela que la conception analytique n’a jamais assuré de protection efficace aux créanciers des sociétés mises en cause. Afin de combler cette lacune, le législateur et la jurisprudence se sont alors efforcés de donner aux fusions et scissions leur nature juridique véritable157.

103. L’affirmation jurisprudentielle de l’autonomie juridique des fusions et scissions de sociétés- La jurisprudence, comme nous l’avons précédemment dit, fut la première à avoir posé et solutionné le problème de la nature juridique des fusions et des scissions158. Elle considéra que ces opérations constituent des procédés de transmission universelle vu qu’elles emportent, de plein droit, substitution de la société bénéficiaire dans les droits et obligations de celle qui disparaît. Partant de l’analogie avec la succession de droit commun, la jurisprudence affirme que la société bénéficiaire ne saurait se décharger du passif alors même qu’elle a recueilli l’actif. Elle serait donc désormais tenue de l’ensemble du passif transmis et ce sur son propre patrimoine.

104. Fusions et scissions : techniques de transmission universelle- C’est ainsi que pour la jurisprudence les fusions et scissions en tant que modalités techniques de substitution universelle n’impliquent nullement, pour la transmission des droits et créances, le respect des formalités qu’impose l’article 1690 du Code civil. La société nouvelle ou absorbante étant l’ayant cause universel de la société dissoute est donc, à ce titre, substituée à celle-ci. Il n’est pas non plus nécessaire de respecter quelque formalité que ce soit pour la transmission des dettes, c’est-à-dire des obligations, dès lors que celles-ci n’ont pas fait l’objet d’une exclusion expresse dans la convention de fusion ou de scission. La substitution universelle qu’elle soit passive ou active est, par principe, globale et de plein

156 Coquelet, op. cit., p.22.

157 En reconnaissant à ces opérations les aspects de procédés de transmission universelle de patrimoine. 158 Cf. Cass. Civ., 28 janvier 1946, D.1946.168.

droit sans aucune discrimination. D’une manière générale, la doctrine ne conteste pas ce principe de transmission entière de plein droit159. Un auteur affirmait à ce propos que lorsqu’il y a fusion, de même lorsqu’il y a scission par voie de conséquence, « c’est le

patrimoine tout entier qui se transmet comme en cas de décès d’une personne physique et non pas les biens sociaux envisagés isolément 160».

B. La consécration législative de la nature juridique des fusions et des

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