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Troisième phase de l’étude de cas : l’analyse de l’entretien d’après-coup (EAC)

RESULTATS DE L’ETUDE DIDACTIQUE CLINIQUE

SAVOIRS SAE SAE

2.4. Troisième phase de l’étude de cas : l’analyse de l’entretien d’après-coup (EAC)

Pour mener cet entretien, nous rappellerons juste notre volonté de respecter les trois temps de notre méthodologie en didactique clinique, à savoir revenir avec Michel sur le SAE, puis sur le SRE et enfin l’après-coup, comme tentative d’objectivation, en insistant sur les

écarts que nous avons relevé au cours du processus d’enseignement qu’il a mené. Le fil conducteur de l’entretien suit le temps didactique, du savoir à enseigner et à évaluer au savoir enseigné et évalué. Nous avons commencé par interroger Michel sur son projet de cycle, dont les objectifs annoncés, par exemple « passer d’une attaque simple et sporadique à une

attaque construite et enchaînée » nous paraissait trop calquée sur des objectifs énoncés par les

programmes d’EPS du lycée. A cela, l’enseignant nous a répondu qu’il donnait souvent des objectifs institutionnels qu’il visait en deux ans, et qu’au cours des cycles il « travaillait sur

des sous-objectifs ». Très vite, nous sommes passés au SRE, et nous avons en tout premier

lieu demandé à Michel de commenter une communication extraite du début de la première séance afin de mettre en tension une consigne de réalisation donnée aux élèves (« c’est de

l’énergie, là on verrouille et c’est lourd ») et ce qu’il disait dans l’EPS1, à savoir qu’il rentrait

dans le cycle par la technique « pour travailler justement sur la sensation, sur l’assise, pour

dédramatiser un peu le combat » (cf. EPS1, annexe 11). Michel va répondre à cela que c’est

justement « une voie qui permet de rentrer différemment sur des activités très techniques ». Autrement dit, on peut penser que pour lui, une activité comme le karaté, très exigeante au niveau technique, va nécessiter des aménagements au niveau didactique afin de ne pas occulter cet aspect de l’activité. Michel nous donnera un exemple de sa pensée quand il dit :

« l’entrée notamment au niveau de l’équilibre se fait en ce qui me concerne par de la proprioception, centrage sur les sensations » (ibid.). A ce niveau, Michel se positionne sur

une référence bio-informationnelle de l’enseignement du karaté en EPS. Michel conçoit alors qu’un apprentissage technique peut certes prendre appui sur les gestes proprement dit mais aussi en incitant l’élève à porter son attention sur d’autres facteurs, à savoir ici un fonctionnement interne, ce qu’il confirmera quand il avance : « ce travail sur les sensations

permet finalement de dédramatiser, de recentrer l’élève sur un fonctionnement interne et pas sur quelque chose d’extéroceptif qui pourrait le bloquer » (cf. EAC, annexe 15).

Dans la discussion qui a suivi quant à la place de la technique dans l’enseignement de Michel, nous lui avons alors demandé si en fait il ne visait pas des savoirs purement sécuritaires, vu l’importance que l’enseignant y accordait dans son cycle. Il répondra que l’on ne doit pas considérer que sa démarche vise un objectif sécuritaire. Pour lui, ce n’est qu’ « un

moyen pour faciliter l’accès aux apprentissages » (cf. EAC, annexe15). La sécurité reste pour

lui « une préoccupation » mais n’est pas un objectif en soi. Il dira que c’est « une démarche

d’enseignement » que l’on assimile effectivement à quelque chose de transversal dans l’année,

interroger Michel sur l’influence de la pratique récente du style de karaté kyokushinkaï qui nous semble déterminante dans le choix du savoir enseigné. Michel précise d’emblée que « la

démarche dans laquelle il s’inscrit pour rentrer dans l’activité n’est absolument pas celle que l’on retrouve dans un club ». Il repose alors la question de l’influence, mais en termes de

niveau. Michel est conscient que sa pratique influence son enseignement et il insiste sur le fait que ce n’est pas une influence aveugle, qu’il a effectué un travail de traitement didactique. A ce propos, il dit : « lorsque je fais quelque chose, je le digère, j’en tire les grandes lignes et je

le transforme en contenus d’enseignement ». Cette remarque insiste sur le rapport réflexif de Michel au savoir ; cet enseignant interagit sans cesse avec sa classe, s’adapte, mais a besoin d’un temps de réflexion « après-coup » pour apprécier la pertinence de ses remédiations en cours. Il a besoin de ce retour réflexif sur son action pour que son enseignement soit plus efficace. Michel est ce que l’on pourrait appeler un « praticien réflexif » (Schön, 1994).

La dernière partie de l’entretien concerne le savoir évalué. Comme précédemment, nous avons confronté Michel à un écart, entre l’évaluation prévue en début de cycle (technique et stratégique) et celle réalisée (uniquement stratégique). Michel s’en explique de manière simple en disant qu’il n’hésite pas à s’adapter, notamment dans ce cas à la progression des élèves : « j’ai donc fait évoluer mon évaluation en même temps que la

progression des élèves ». Ensuite, au vu de la bascule progressive opérée par Michel lors du

cycle de technique à stratégique, nous avons voulu savoir comment il considérait le fait d’entrer dans un cycle de karaté par des savoirs techniques, pour en ressortir par du stratégique ou exclusivement du combat. Une fois de plus, il rattache cela à la démarche qu’il

« utilise quelle que soit l’activité ». Il explique alors qu’en terme de pourcentage, il y a en

début de cycle un rapport technique/stratégique de 70/30, ce rapport s’inversant progressivement tout au long du cycle : « en fonction des acquisitions, on renverse le

processus pour arriver à 30 % de technique en fin de cycle ». Au cours de la discussion,

Michel reviendra encore sur cette place qu’il accorde à la technique, d’abord d’un point de vue sécuritaire : « la technique reste un moyen sûr de préserver l’intégrité physique des

élèves », ensuite comme outil ou « passage obligé qui ne sert qu’à viser des aspects plus stratégiques ». Pour autant, on peut dire que nous avons là accès à la stratégie didactique de

Michel : pour lui, le savoir sécuritaire est confondu, inclus dans le savoir technique, comme une forme de « sécurité active ».

2.5. Synthèse de l’étude de cas : les références de Michel