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Analyse comparative du SRE et du SREV de Giovanni et d’Alain 1 Le SRE et le SREV de Giovann

RESULTATS DE L’ETUDE DIDACTIQUE CLINIQUE

SAE SRE SAEV SRE

4. Etude de cas croisée : Giovanni et Alain

4.3. Analyse comparative du SRE et du SREV de Giovanni et d’Alain 1 Le SRE et le SREV de Giovann

Lorsqu’on analyse le verbatim de la première séance de Giovanni, retranscrite en annexe 19, on peut observer que l’enseignant commence cette leçon par un long monologue de plus de dix minutes sur la présentation historique du karaté : « le karaté trouve ses origines

[…] dans la Chine ancestrale », ainsi que ses spécificités par rapport aux autres arts

martiaux : « la particularité du karaté, c’est qu’il faut être capable de détruire l’ennemi sur

un coup. Le karaté, c’est un coup unique ». Mais il est intéressant de noter que dans ce

discours, Giovanni n’hésite pas à apporter un contenu quasi philosophique : « le karaté va au-

delà de la simple pratique d’une activité sportive. C’est aussi un travail sur soi, trouver son propre chemin mais aussi sa propre rencontre parce que vous allez aussi vous rencontrer vous-même. C’est la pire des rencontres de se rencontrer soi-même ». Giovanni parle-t-il en

connaissance de cause, de lui ? Rien ne nous le dit, mais nous réservons cette question pour les EAC. Compte tenu de la place importante de ce discours dans sa séance, on peut présupposer qu’il leur délivre un message, sa référence personnelle du karaté, une rencontre avec soi même. Cela renvoie à une question que nous avons déjà abordée et que l’on retrouve dans ce cas, à savoir la transmission par l’enseignant de son propre rapport au savoir, thèse déjà développée par C. Blanchard-Laville (2001). Suite à ce discours, Giovanni va faire réaliser le salut. Le terme qu’il utilise est édifiant : « on se met en place pour apprendre le

rituel ». Il donne ainsi une connotation philosophique, presque « cultuelle »à l’acte puisqu’il en fait un rite qui est défini par le dictionnaire comme « l’ensemble des cérémonies du culte en usage dans une communauté religieuse » (dictionnaire Le Robert, 1990). Il va faire réaliser le salut traditionnel complet aux élèves, pas un simple salut debout, avec passage à genoux :

« c’est comme cela dans tous les arts martiaux, il y a le salut à genoux ». Puis il fait réaliser le

salut au professeur, « senseî ni reï » et le salut entre les élèves eux-mêmes : « otagani reï ». On peut d’ores-et-déjà noter un écart entre SAE et SRE puisque Giovanni disait dans l’EAS1 :

« il y a tout le rituel, le salut, le respect du professeur que l’on ne peut pas trop appliquer dans un établissement scolaire » (cf. annexe 18). Le temps n’étant pas extensible, il n’en reste

que peu pour le reste de la séance, qui dure une heure en tout. Les élèves étudieront la technique pour fermer le poing : « la première chose que l’on va apprendre, c’est comment on

ferme le poing ». Giovanni fera ensuite découvrir aux élèves une position de base qui est la

position yoï : « yoï cela veut dire en garde, prêt […] donc c’est la position prêt ! ». A chaque fois, Giovanni va utiliser une procédure d’enseignement propre aux arts martiaux, la démonstration et la répétition, avec le maître qui exécute et les élèves qui reproduisent. Il continuera ainsi avec l’apprentissage d’un premier blocage : « je démontre, un on le met à

l’épaule, l’autre coude serré, on déplie. Je le montre ici, voilà comme cela et là on a fait un blocage. Alors, on va le faire une ou deux fois ». La séance se terminera par l’étude de trois

positions de base et d’un coup de pied, toujours sur la même procédure : « alors maintenant

ce que l’on va avoir c’est à partir de cette position là, le coup de pied de face. Je montre, de profil, pour que vous voyiez bien ». Le SRE de Giovanni est fidèle à ce qu’il avait annoncé

dans le SAE, soit la transmission d’un savoir technique. L’aspect éthique est présent aussi, au vu du discours de présentation du cycle aux élèves et le rituel du salut en début de séance. Comme il le dit lui-même dans l’EPS1 : « je l’ai abordé sous l’aspect martial. Le côté

sportif, je l’ai complètement laissé. J’ai préféré développer le côté défensif et protecteur » (cf.

annexe 20). Quand on interroge Giovanni sur ce choix d’entrée dans l’activité il dit : « dans la

première séance entrer dans la confrontation […] je pense que ce n’est pas possible ou alors cela tourne en bagarre de rue. Il faut connaître un minimum de techniques de karaté pour les mettre en application ensuite ». Giovanni justifie aussi cette entrée technique traditionnelle

par la volonté de garder la spécificité défensive du karaté : « je suis rentré par

l’apprentissage de techniques de défense et non pas par des techniques d’attaque ». D’une

certaine manière, Giovanni semble associer le combat à l’attaque, à des notions d’agressivité, de performance d’attaquant. On sent bien que c’est alors une conception dont il se méfie et qu’il a du mal à envisager car quand on lui demande comment il va faire évoluer ses séances, il ne parle même pas des assauts conventionnels, mais de duo : « techniques à deux, en miroir,

l’un avance, l’autre recule en effectuant la même technique ». Giovanni reste donc très

prudent dans la progression qu’il envisage et semble réticent à inclure des changements de rôles et de l’incertitude (armes, cibles, distance). L’orientation technique du traitement

didactique de Giovanni est donnée dès la première séance, mais on s’est aperçu que l’aspect éthique est important aussi. Est ce à son insu que cela se produit ? L’enseignant veut-il utiliser les vertus éducatives du karaté pour l’aider avec cette classe qui montre en cours des difficultés de concentration et d’attention ? Nous ne pouvons à ce stade répondre à cette question, mais ces hypothèses seront à confronter au point de vue de l’enseignant dans les EAC.

La séance d’évaluation démarre par un salut debout, rapide. Il semble que Giovanni ait abandonné le salut assis complet, sans doute pour des questions de gain de temps : « c’est vrai

qu’ une heure cela va très vite […] les élèves ne sont pas habitués à ce genre de pratique et de façon de faire… ». (cf. EPS1, annexe 20). C’est un exemple d’assujettissement

institutionnel auquel l’enseignant d’EPS est confronté. La retranscription que l’on trouve en annexe concerne essentiellement l’explication aux élèves par l’enseignant du protocole d’évaluation. En effet, durant l’évaluation proprement dite, Giovanni va se contenter de superviser son bon déroulement. Il interviendra de manière sporadique dans les groupes afin de répondre à des questions d’élèves, les aider, même si parfois il ne peut s’empêcher de procéder à l’évaluation de l’élève lui-même : « là, la distance elle y est pas, tu vois, il est trop

loin », ce qui est un mode d’intervention fréquent chez les enseignants, qui ne peuvent tout de

même pas tout dévoluer à l’élève et se contraindre à ne pas intervenir dans la co-évaluation. A la fin de la séance, Giovanni va regrouper ses élèves et tenter de faire un bilan de la séance et du cycle mais il n’a pas l’attention nécessaire de sa classe pour y procéder. Il va donc finir ce cycle comme il l’a commencé, en insistant sur quelque chose qui semble lui être cher : l’écoute de ses élèves et le climat de la classe : « vous avez pu constater qu’il est très difficile

de travailler dans du bruit, dans du vacarme […]. Si chacun avait fait du silence, on aurait pu travailler plus facilement et plus rapidement ». Ce bilan de Giovanni est négatif car il avait

en effet commencé sa première séance du cycle en disant : « première des choses, je vous

demanderai du silence, et d’essayer de travailler un peu plus avec la réflexion ». Travailler en

silence était alors un objectif comportemental, une compétence générale à atteindre dans ce cycle, qui n’a pas été atteint d’après l’enseignant. A ce propos, Giovanni s’exprime dans l’EPSEV (cf. annexe 23) : « cela a été un cycle difficile. Ce n’est pas la classe la plus facile

que j’ai ». Pour autant, il nuance quelque peu ce propos car plus loin il dira : « j’ai quand même pu remarquer des élèves pendant l’évaluation qui avaient un réel souci de bien faire ».

D’un point de vue des savoirs, que peut-on dire de ce qu’a évalué Giovanni ? La situation qu’il met en place pour l’évaluation pose problème en soi. En effet, c’est une situation