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groupes de travail

Deux aspects des structures sociales nous intéressent particulièrement en tant que facteurs potentiels de la capacité d’innovation des groupes de travail : leur diversité

culturelle et leur capital social. L’échelle des groupes de travail constitue l’échelle

d’analyse privilégiée du lien « diversité culturelle - capacité d’innovation » (Ely et Thomas, 2001; Ancona et Caldwell, 1992; Jehn, Northcraft, et Neal, 1999; Leonard-Barton et Swap, 1999; Reagans et Zuckerman, 2001). Cela s’explique d’une part par le niveau relativement grand d’observabilité et d’accessibilité aux données qui existent à cette échelle. Cette accessibilité facilite l’analyse empirique et permet ainsi de tester des hypothèses et des théories relativement fines, de les améliorer à mesure que les recherches avancent, d’en formuler de nouvelles, etc. Par ailleurs, à cette échelle, de nombreux travaux ont également étudié la relation entre ca-pital social et capacité d’innovation (Newell, Tansley, et Huang, 2004; Amabile, Conti, Coon, Lazenby, et Herron, 1996; Reagans et Zuckerman, 2001; Reagans, Zuckerman, et McEvily, 2004).

Au cours de ce chapitre, nous nous attacherons donc à répondre à notre première question de recherche, à savoir :

1. Les éléments empiriques issus de l’article de Reagans et Zuckerman (2001) ainsi que d’autres travaux de la littérature sur les groupes de travail permettent-ils d’étendre le modèle théorique RZ aux concepts plus généraux de « diver-sité culturelle » et de « capacité d’innovation » des groupes de travail ? (cf. figure 1.2)

Pour y répondre, nous commencerons par nous arrêter sur la notion de groupe de

travail afin d’en préciser les contours (section 3.1). Nous passerons ensuite en revue

dans la section 3.2 les éléments théoriques et empiriques suggérant l’existence d’un lien direct entre « diversité culturelle » et « capacité d’innovation » (« lien DC-CI » par la suite). Dans la section 3.3 nous aborderons les travaux qui s’intéressent à la relation capital social - capacité d’innovation. Nous verrons ensuite à la section 3.4 que de nombreux travaux ont mis en lumière l’existence de relations entre diversité culturelle et capital social. Dans la section 3.5, nous nous pencherons plus en détail sur une modélisation spécifique de la relation structure sociale -capacité d’innovation : celle proposée par Reagans et Zuckerman (2001) qui met en lumière l’importance de la complémentarité de deux types d’aspects du capital social : ses aspects cohésifs et ses aspects sécants. Enfin, dans la section 3.6, nous proposerons de retenir le concept de capital social sécant-cohésif comme facteur explicatif de la capacité d’innovation des groupes de travail. En effet, nous verrons qu’il permet de pallier aux principales limites des travaux présentées au cours du chapitre tout en conservant les éléments fondamentaux qu’ils mettent en lumière.

3.1 La notion de groupe de travail

Avant d’entamer notre revue de littérature, commençons par apporter quelques précisions à propos de la notion de « groupe de travail ». Nous commencerons par définir le terme (section 3.1.1), avant de préciser la fonction et les objectifs de ce type d’unité sociale (section 3.1.2).

3.1.1 Définition

Au cours des dernières décennies, de nombreux travaux se sont attachés à mettre en lumière les facteurs explicatifs de la capacité d’innovation des groupes de travail (cf. Hülsheger, Anderson, et Salgado, 2009, pour une revue). La raison de ce vif intérêt tient dans le rôle capital que jouent ces structures sociales de taille réduite dans les processus d’innovation (Hülsheger, Anderson, et Salgado, 2009; West, 2002; Anderson et King, 1993; Shalley, Zhou, et Oldham, 2004; Shalley et Gilson, 2004).

Ainsi, U. Hülsheger et N. Anderson soulignent le fait qu’au sein d’une organisation, une proposition créative qui parvient à se frayer un chemin pour devenir une inno-vation à l’échelle organisationnelle, a généralement été développée à l’origine puis poussée et défendue par un groupe de travail (Hülsheger, Anderson, et Salgado, 2009, p. 1128).

3.1. La notion de groupe de travail

Cependant, si la notion de groupe de travail a été largement étudiée dans les sciences de gestion, sa définition n’a pas toujours fait l’objet d’un réel consensus. Différentes subtilités ont été proposées afin de préciser à quel type de groupe de travail les auteurs se réfèrent. N. Anderson et M. A. West proposent par exemple de définir un groupe de travail proximal comme un collectif permanent ou

semi-permanent auquel des individus sont rattachés, auquel ils s’identifient, et avec lequel ils interagissent régulièrement dans le but d’accomplir des tâches liées à leur travail (Anderson et West, 1998, p. 236 ; traduction de l’auteur). Dans cette définition, on

voit ainsi apparaitre trois aspects primordiaux des groupes de travail : leur carac-tère permanent ou semi-permanent, la régularité des interactions, et l’interdépen-dance de leurs membres pour l’accomplissement de tâches relatives à leur travail. Outre ces trois aspects fondamentaux communs à tous les groupes de travail, la spécificité des groupes de travail proximaux selon les auteurs, tient dans l’impor-tance particulière qu’ils revêtent pour leurs membres en termes d’identification. En effet, les auteurs précisent que les individus font généralement partie de plusieurs groupes de travail simultanément. Dans cette optique, le qualificatif proximal in-dique que l’on ne s’intéresse qu’au groupe de travail auquel un individu s’identifie le plus.

Dans le cadre de notre étude, nous ne cherchons pas à étudier en particulier des groupes proximaux, puisque, comme nous le verrons par la suite, le degré d’identi-fication des membres à un groupe de travail constitue en soi un élément de carac-térisation de sa structure sociale (de son niveau de cohésion plus précisément ; cf. Friedkin, 2004). De ce fait, nous adopterons une vision moins restrictive du groupe de travail, en nous focalisant simplement sur les trois caractéristiques principales évoquées. Nous définirons donc un groupe de travail de la manière suivante :

Définition. D4 :Un groupe de travail se définit comme un collectif permanent ou

semi-permanent auquel des individus sont rattachés, et avec lequel ils interagissent régulièrement dans le but d’accomplir des tâches liées à leur travail (définition

adaptée de Anderson et West, 1998)

Notons que la possibilité pour un groupe de travail de revêtir un caractère

semi-permanent plutôt que semi-permanent, implique que des membres peuvent y être

inté-grés ou au contraire en sortir, sans que la notion de groupe de travail ne soit remise en question. Tant qu’une part significative des membres du groupe est maintenue en place, une forme de semi-permanence est assurée.

3.1.2 Fonction et objectif

Nous l’avons vu au cours du chapitre 2, la variable objectif finale à laquelle la capacité d’innovation des unités sociales est censée contribuer est le développement durable, qui comporte trois dimensions : économique, sociale, et environnementale. Au-delà de cet objectif général, toutes les unités sociales ne sont pas de même nature, n’ont pas les mêmes fonctions, et n’ont donc pas les mêmes objectifs. Ayant déterminé la nature de l’unité sociale « groupe de travail » à travers la définition que nous avons proposée à la section précédente, il convient à présent d’apporter quelques précisions à propos de sa fonction et de ses objectifs.

Les groupes de travail ont pour fonction première l’accomplissement d’une mission ou d’une tâche particulière. Ils agissent souvent pour le compte d’une organisation à laquelle ils sont rattachés. Dans ce cas, le choix de leur mission / tâche ne leur appartient pas entièrement. Il est – au moins en partie – le fait de l’organisation. Dans cette optique, nous considèrerons que l’objectif du groupe de travail est simplement l’accomplissement efficace et efficient de sa mission / tâche. C’est donc à cet objectif que doit contribuer la capacité d’innovation du groupe de travail. Notons par ailleurs, que lorsqu’ils agissent pour le compte d’une organisation, les groupes de travail ont une structure sociale qui est imbriquée au sein de celle de l’organisation. De ce fait, il existe mécaniquement une forme d’interdépendance entre les caractéristiques de leurs structures sociales respectives. Ceci implique qu’il existe aussi une interdépendance au niveau des variables d’intérêt que nous étudions dans cette thèse – diversité culturelle et capital social. Nous reviendrons plus en détail sur ce point au cours de la première section du chapitre 4.

3.2 Diversité culturelle et capacité d’innovation