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L’industrie des équipements électriques dans les régions de

6.2.4 Période d’étude et décalage temporel

Notre analyse empirique comporte également une dimension longitudinale. En ef-fet, nous avons vu au chapitre 3 que le concept de capital social sécant-cohésif revêt fondamentalement un aspect dynamique. Dès lors, il était primordial de pouvoir observer les évolutions temporelles des niveaux respectifs de capacité d’in-novation, de portée externe, de cohésion et de capital social sécant-cohésif des régions-industrie étudiées.

Par ailleurs, les processus d’innovation étant eux-mêmes étalés dans le temps, il existe un décalage temporel non-négligeable entre le moment où des actions sont entreprises en vue de favoriser l’émergence d’innovations et le moment où ces actions donnent effectivement lieu à des innovations pouvant être observés par différents « marqueurs d’innovation ». C’est en particulier le cas des brevets d’invention qui sont assimilés à un potentiel d’innovation : La première manifes-tation visible de l’existence d’une invention brevetée est la « date de priorité » du brevet correspondant, c’est à dire, la date à laquelle le déposant a effectué sa première demande (même auprès d’un office national autre que l’OEB). A cette date, le déposant présente une invention aboutie, minutieusement décrite et sché-matisée, dont l’intérêt en termes d’exploitation industrielle est démontré, et qui est éventuellement accompagnée de recherches d’antériorité démontrant le caractère « original » et « nouveau » de l’invention11. Un important travail de recherche, de conception, d’essais-erreurs, d’ajustement, de prototypage, et d’implémentation a alors déjà été mis en œuvre. Même avant que le projet d’invention ne débute, tous les acteurs du projet ont traversé, collectivement et/ou individuellement, de nom-breuses phases d’apprentissage, de maturation, d’échanges, ou encore de recherches qui leur ont permis de faire naitre l’idée ayant donné lieu au projet d’invention. On comprend donc l’importance de la prise en compte du décalage temporel entre les efforts mis en œuvre pour innover et la manifestation d’innovation, pour évaluer correctement la relation de causalité entre les fins et les moyens.

Concernant nos variables explicatives d’intérêt (les variables de réseau), le fait

11. Une recherche d’antériorité approfondie est par la suite effectuée à l’OEB par 2 experts évaluateurs du brevet (« referees »). Cette phase d’examination qui peut être longue (en moyenne un an et demi), aboutit à la décision par les experts d’accorder ou non au déposant le droit de publier le brevet d’invention, au regard des critères de nouveauté, d’originalité et d’utilité. Dans le cas d’un refus, si le déposant décide de ne pas poursuivre son projet et de ne pas réitérer sa demande, les frais engagés ne sont pas récupérés par le déposant, et le temps consacré à la mise au point du brevet est alors une perte sèche. S’il décide de poursuivre le projet, les nouveaux frais afférents sont ajoutés aux frais déjà engagés. Ainsi, le déposant a tout intérêt à minimiser non seulement le temps nécessaire à l’examination du brevet (au cours duquel l’incertitude sur le statut de l’invention n’est pas encore tranchée), mais également le risque de refus. Il mène donc généralement lui-même une recherche d’antériorité préalable qui lui permet non seulement de ne pas « réinventer la roue » mais également de nourrir son propre travail des travaux antérieurs.

6.2. Présentation du cadre empirique

Variables explicatives réseau (sur brevets)

Variables dépendantes (sur brevets) 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 Temps 2000-2001 2002-2003 2004-2005 2000-2001 2002-2003 2004-2005 Variables explicatives de contrôle 1998-1999 2000-2001 2002-2003

Figure 6.3 – La temporalité de notre modèle empirique

qu’elles soient construites à partir des mêmes brevets que ceux qui permettent d’évaluer la capacité d’innovation de la région-industrie présente l’avantage d’in-tégrer naturellement le décalage temporel que nous venons de décrire. En effet, les interactions entre les inventeurs d’un brevet, qui constituent les éléments de base utilisés pour la reconstitution des réseaux de co-invention, précèdent nécessaire-ment le dépôt du brevet, puisque celui-ci constitue un premier aboutissenécessaire-ment de leur travail collectif. Pour ces variables, aucun retard particulier ne doit donc être pris en compte pour rendre compte du décalage temporel.

A l’inverse, pour ce qui est des variables de contrôle, dans la plupart des cas, un retard doit être introduit dans notre modèle empirique afin de prendre en compte ce décalage. En effet, Si l’on considère par exemple le niveau des dépenses privées en R&D à un instant donné T , on peut supposer que leur utilisation est principalement destinée à financer des recherches qui n’aboutiront potentiellement à des brevets que plus tard dans le temps. Les brevets dont le dépôt est contemporain à ces dépenses bénéficient en effet assez peu de cette manne puisque le travail qui a mené aux inventions correspondantes leur est antérieur.

Aux vues de ces éléments, nous avons choisi de mettre en place en modèle dyna-mique comprenant des périodes successives de 2 ans : les brevets publiés au cours d’une période T de 2 ans, sont expliqués par les variables de réseaux déterminés à partir de ces mêmes brevets déposés en T , et d’une série de variables de contrôle évaluées au cours de la période précédentes T − 1 (pour le détail des variables et de leur calcul, cf. section 6.4.3).

Outre ces considérations concernant la prise en compte du décalage temporel, deux critères principaux ont guidé le choix de la période d’étude à proprement parler :

1. Absence de choc exogène majeur : pour pouvoir observer des évolutions dans le temps, il était important que des chocs exogènes majeurs ne se soient surve-nus au cours de la période. En effet, la présence d’un tel choc complique l’in-terprétation des résultats puisqu’il convient de contrôler pour ses effets (po-tentiellement différenciés) sur les différentes régions-industrie-année. C’est en particulier le cas de la crise économique majeure qui a débuté en 2007 et s’est amplifiée en 2008, et qui, bien qu’ayant frappé tous les pays de l’UE15, a eu des effets plus ou moins immédiats sur les économies et a suscité des réponses différentes de la part des pouvoirs publics. Nous avons donc préféré ne pas faire traverser la période d’étude par l’émergence de cette crise. De même, la mise en circulation de l’Euro et l’ouverture des frontières, qui constituent des évolutions majeures de l’Europe en tant que marché commun, dates de 1999. Nous avons donc là aussi préféré ne pas faire traverser notre période d’étude par ces évènements.

2. Disponibilité des données : comme pour le choix des régions, le choix de la pé-riode d’étude était également contraint par la disponibilité des données. En particulier les données de brevet géolocalisées auxquelles nous avons recours (OECD REGPAT 2012) ne sont exhaustives que jusqu’à 2008. A l’inverse, de nombreuses données issues d’Eurostat et d’Eurolio, notamment sur les dépenses en R&D, n’étaient disponibles qu’à partir de 2000. Enfin, toujours au niveau des variables de contrôle, beaucoup comprenaient des données manquantes pour certaines années. Nous avons effectué des interpolations li-néaires lorsque c’était possible et pertinent, mais là où ça n’était pas possible, nous avons été contraints de restreindre la période d’étude dans le temps.

Au final, compte tenu de ces impératifs, nous avons choisi la période 2000-2005 comme période d’étude, et celle-ci est découpée en 3 sous-périodes : 2000-2001, 2002-2003, 2004-2005. Par ailleurs, du fait des données manquantes, et/ou du fait que pour certaines régions, une activité innovantes en IEE n’était observable que pour certaines années, nous ne disposons nous pour cette période que d’un panel non-cylindré (toutes les périodes ne sont pas observables pour toutes les régions). La figure 6.3 fournit une représentation graphique de la temporalité de notre modèle empirique.

6.3 Données

Nous avons eu recours à 6 bases de données différentes pour mener cette analyse empirique : La base OECD REGPAT 2012 éditée par l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE ou OECD en anglais), ainsi que les bases

6.3. Données

HAN 2012 et CIT COUNTS 2012 qui lui sont connexes, l’ « Inventaire Vert » de la CIB éditée par l’Organisation Mondiale pour la Propriété Intellectuelle (OMPI) la base de données EUROSTAT en libre accès sur le site internet d’EUROSTAT, et enfin, la une base de données spécifique à la R&D réalisée par l’institut EUROLIO à partir des données d’EUROSTAT.

La majeure partie des données utilisées pour la mesure de nos variables de contrôles provient de la base de données régionale d’EUROSTAT en accès libre sur son site internet12. La base de données d’EUROLIO nous a permis, quant à elle, d’obtenir des données propres et complètes pour la variable « dépenses privées en R&D ». Ces données n’étaient en effet disponibles que de manière trop eratique sur le site d’EUROSTAT et ne pouvaient être exploitées telles quelles. Toutes ces variables sont présentées en détail dans la section 6.4.3.

Outre ces données, toutes les autres sont issues de la base OECD REGPAT 2012, ainsi que des bases HAN 2012, CIT COUNTS 2012 et de l’inventaire vert de la CIB qui lui sont liées. L’exploitation de ces données en vue de l’évaluation de nos variables explicatives a cependant nécessité un grand nombre de traitements préalables. Nous présentons au cours de cette section le contenu de ces bases de données ainsi que les traitements que nous y avons effectué.

6.3.1 Présentation de OECD REGPAT 2012 et des bases