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Définitions et concepts

2.1.3 Concepts connexes à l’innovation

Au cours de cette section, nous présenterons tout d’abord le concept de processus

d’innovation (section 2.1.3.1), puis nous évoquerons brièvement celui de diffusion de l’innovation (section 2.1.3.2), avant d’aborder la principale variable d’objectif

de cette étude : la capacité d’innovation (section 2.1.3.3).

2.1.3.1 Processus d’innovation

Comme nous l’avons mentionné à la section 2.1, contrairement au développement

économique ou à l’évolution économique, l’innovation présente un caractère «

li-mité » dans le temps. Cependant l’identification des « limites » temporelles d’une innovation ainsi que la conceptualisation des étapes qui mènent de son « début » à sa « fin », constituent un travail extrêmement ardu du fait du caractère com-plexe, imprévisible et difficilement observable de l’innovation. Ce travail a occupé de nombreux chercheurs intéressés par ce que l’on appelle les processus

d’innova-tion (Van de Ven, Angle, et Poole, 2000; Van de Ven et Poole, 1990; Le Masson,

Weil, et Hatchuel, 2006; Alter, 2000).

Ces différents travaux mettent en lumière un certain nombre de caractéristiques des processus d’innovation. Tout d’abord, ils mettent généralement en jeu une multitude d’acteurs, ayant un rôle plus ou moins actifs, et qui peuvent être tem-poraires ou prolongés, dans le déroulement du processus (Van de Ven, Angle, et Poole, 2000).

Par ailleurs, les processus mettent en jeu de nombreuses relations entre acteurs, qui sont porteuses d’échanges de connaissances (Le Masson, Weil, et Hatchuel, 2006), mais également de relations sociales (Alter, 2000). Ces relations ont une grande importance dans le déroulement du processus. Nous reviendrons en détail sur ces points au cours des chapitres 3, 4, et 5.

Ces travaux montrent aussi que les processus d’innovation sont loin d’être linéaires. Ils comprennent des interruptions – temporaires ou définitives –, et génèrent de nombreuses connaissances non-utilisées (Le Masson, Weil, et Hatchuel, 2006). Ils impliquent également des mécanismes d’essai-erreur visant à corriger ou adapter

les innovations (Van de Ven, Angle, et Poole, 2000). Notons que ces corrections et adaptations sont effectuées à partir de résultats intermédiaires. Ces résultats peuvent revêtir différentes formes plus ou moins abouties : rapport, prototype, produit, concept, brevet d’invention, article, business plan, etc. Ce sont souvent ces différents types de résultats intermédiaires qui sont utilisés comme marqueurs

d’innovation au cours des études empiriques sur l’innovation.

Un autre élément primordial pour comprendre les processus d’innovation tient à l’incertitude et à la prise de risque qu’ils impliquent. En effet, le bien-fondé d’une innovation ne peut pas être démontré à l’avance de manière logique et rationnelle (Alter, 2000). Dès lors, le processus d’innovation est chargé d’incertitude depuis son commencement. Qui plus est, cette incertitude est risquée pour au moins deux raisons. Tout d’abord pour une raison commune à toute action incertaine : les ressources investies peuvent être perdues. Elle est également risquée pour une seconde raison, spécifique à l’innovation : un échec peut être synonyme de lourde sanction. En effet, l’innovation cherche à modifier un ordre établi, et ce faisant, se heurte nécessairement aux tenants de cet ordre. En cas d’échec de l’innovation, ceux-ci sont enclins à sanctionner les instigateurs de l’innovation afin de protéger leur position (Alter, 2000).

Au final, ces différents éléments permettent de donner une première idée de la complexité des processus d’innovation. Au cours de cette thèse, nous nous atta-cherons à décrypter plus en détail leur déroulement – et en particulier les aspects concernant la structure sociale des acteurs qui les mettent en œuvre – afin d’en faire émerger des régularités en termes de facteurs explicatifs.

Notons que les travaux que nous avons cités se focalisent principalement sur les as-pects des processus d’innovation qui concernent la génération et l’implémentation d’invention. Mais, pour être complète, l’analyse de l’innovation doit se préoccuper également de la diffusion de l’innovation. Nous abordons ce concept dans la section suivante.

2.1.3.2 Diffusion de l’innovation

Nous l’avons dit, tant qu’une invention ne s’est pas diffusée dans une structure sociale, elle ne constitue pas à proprement parler une innovation. Le passage de l’invention à l’innovation implique donc un processus de diffusion. Or la compré-hension des voies et des moyens par lesquels la diffusion d’une l’invention se produit constitue une problématique complexe sur laquelle de nombreux chercheurs se sont penchés. Les travaux d’E. Rogers en sont l’élément fondateur. Rogers est en effet l’un des premiers à s’être penché sur cette question dans les années 1960 avec son ouvrage Diffusion of Innovations. Il y définit la diffusion comme :

2.1. Innovation et capacité d’innovation

Figure 2.2 – Courbe épidémiologique de Rogers ou courbe en « S »

« Le processus par lequel une innovation est communiquée au fil du temps, par le biais de différents canaux, au sein d’un système social.9» (Rogers, 1995, p.5 ; traduction de l’auteur)

Dans cet ouvrage, Rogers s’intéresse particulièrement à la diffusion d’innovations

technologiques. Il explique que la diffusion est un type particulier de communication

du fait du caractère novateur du message qui est transmis. Ce caractère implique un degré d’incertitude à son égard et une prise de risque en cas d’adoption. De ce fait, l’adoption ou la non-adoption de l’innovation par un membre du système qui la découvre dépend de l’évaluation qu’il fait de l’innovation. Cinq caractéristiques principales de l’innovation sont identifiées, qui influencent cette évaluation : (1) l’avantage relatif qui lui est associé, (2) sa compatibilité, (3) sa complexité, (4) la possibilité de l’essayer, et (5) l’observabilité de ses conséquences attendues (Rogers, 1995, p.36).

Le choix de l’adoption et la vitesse de la décision d’adoption dépendent de ce que Rogers appelle l’ « innovativeness » des individus, c’est à dire leur attitude générale à l’égard des innovations. L’auteur montre que l’on peut distinguer cinq catégories d’individus dans un système, au regard de leur « innovativeness » : (1) les innovateurs, (2) les adopteurs précoces, (3) la majorité précoce, (4) la majorité tardive, (5) les retardataires.

Le taux d’adoption rend compte de l’ampleur du processus de diffusion. S’il est faible, cela signifie que peu d’individu ont décidé d’adopter l’innovation ; l’inno-vation s’est donc faiblement diffusée. Si ce taux est élevé, cela signifie que de

9. « the process by which an innovation is communicated through certain channels over time among the members of a social system. »

nombreux individus ont adopté l’innovation ; l’innovation s’est donc bien diffusée. Rogers montre que le processus de diffusion au fil du temps peut être représenté par une courbe en « S » ou courbe « épidémiologique » (cf. figure 2.2). Cette courbe laisse apparaitre le fait que la diffusion – si elle a lieu – connait une phase d’aug-mentation rapide du taux d’adoption, qui fait suite à une phase de progression lente (durant laquelle seuls les « innovateurs » et les « adopteurs précoces » adoptent l’innovation), et qui précède une phase de stabilisation du taux d’adoption (au cours de laquelle une partie de la « majorité tardive » et certains « retardataires » finissent par adopter l’innovation). L’auteur définit la « masse critique » comme le point de cette courbe au-delà duquel un nombre suffisant d’individus ont adopté l’innovation pour que le taux d’adoption continue d’augmenter naturellement de manière auto-entretenue.

Ce travail séminal sur la diffusion de l’innovation a par la suite donné lieu à d’autres travaux mobilisant quant à eux le nombre de citations reçues par des brevets d’invention pour évaluer la diffusion de ceux-ci, considérée comme un gage de valeur économique, sociale et technologique (Scherer et Harhoff, 2000; Sapsalis, van Pottelsberghe de la Potterie, et Navon, 2006; Cassiman, Veugelers, et Zuniga, 2008; Mejer, 2013). Cette littérature met notamment en avant le fait que la distribution des niveaux de diffusion parmi les inventions est particulièrement asymétrique (un très petit nombre d’inventions génèrent en général une énorme partie de la valeur économique, sociale et technologique d’un ensemble d’invention). Il semble donc peu pertinent de ne prendre en compte que la quantité d’invention générée par une unité sociale pour évaluer son innovation.

Ces résultats seront mobilisés au cours de la section suivante (section 2.1.3.3) où nous proposerons une définition de la capacité d’innovation.

2.1.3.3 Capacité d’innovation

Tout comme la créativité ou l’inventivité représentent une capacité à générer de manière répétée au fil du temps des éléments créatifs ou des inventions, le terme

capacité d’innovation fait référence à la capacité à répéter au fil du temps des

innovations.

Différents travaux issus des sciences économiques et des sciences de gestion ont mo-bilisé le concept de capacité d’innovation (Koc et Ceylan, 2007; McGrath, 2001; Lemon et Sahota, 2004; Osborne, Chew, et McLaughlin, 2008). Ceux-ci s’inté-ressent principalement à la faculté à générer de manière répétée des inventions ou autres marqueurs d’innovation. Ce faisant, ils négligent deux aspects primordiaux de l’innovation que nous avons mis en lumière au cours de cette section : l’ampleur de sa diffusion, et son degré de réponse à des problématiques collectives de l’unité sociale, dans une perspective de développement durable.

2.2. Culture et diversité culturelle

Au regard de ces éléments, il apparait pertinent de définir la capacité d’innovation en prenant en considération les trois dimensions qui en témoignent conjointement : (1) sa propension à générer régulièrement une grande quantité d’inventions, ou au-trement dit son potentiel brut d’innovation ; (2) la tendance de ces inventions à être largement diffusées dans leur milieu social de destination, ou, autrement dit, à être

valorisées par d’autres acteurs de ce milieu ; et (3) la propension de ces inventions

à répondre à des problématiques collectives et pas seulement individuelles, dans une optique de participation à l’aspect durable du développement.

Nous définirons donc la capacité d’innovation de la manière suivante :

Définition. D1 : La capacité d’innovation d’une unité sociale est définie comme

sa propension à générer des inventions ayant de la valeur pour les acteurs de l’unité sociale et pour d’autres acteurs à l’extérieur de celle-ci, et permettant d’améliorer la réponse de l’unité sociale à ses problématiques collectives.

2.2 Culture et diversité culturelle

Il convient à présent d’apporter quelques précisions sur un deuxième concept clé de notre étude : la diversité culturelle. Pour ce faire, nous aborderons dans un premier temps la notion de culture et son utilisation dans la littérature des sciences économiques et de gestion (section 2.2.1). Puis dans un second temps, nous nous pencherons sur la notion d’identité culturelle ainsi que sur celle d’attribut culturel à laquelle nous l’associerons (section 2.2.2). Enfin, nous préciserons le sens du concept de diversité culturelle (section 2.2.3).

2.2.1 Culture

Différents auteurs de la littérature des sciences économiques et de gestion ont mobilisé le concept de culture (Hofstede, 1984b; d’Iribarne, Henry, Segal, Chevrier, et Globokar, 1998; Schein, 1983 ;cf. Meier, 2013, pour une revue).

Les travaux fondateurs de G. Hofstede, se sont attachés à analyser les différences culturelles qui peuvent être observées en fonction des pays ou groupes de pays (Hofstede, 1984b; Hofstede, Hofstede, et Minkov, 1997; Hofstede, 2001). L’auteur a notamment effectué une vaste étude en 2 phases, sur 90 000 salariés de la multina-tionale IBM10implantés dans plus de 60 pays différents (Hofstede, 1984b). Partant

de cette analyse, Hofstede parvient à identifier 4 dimensions au regard desquelles la variabilité apparait la plus grande d’une culture à l’autre : l’importance de la distance hiérarchique, l’orientation individualiste ou communautaire, la relation à l’incertitude et à l’ambigüité, et enfin, l’orientation masculine ou féminine des valeurs (Meier, 2013).

Par la suite, l’auteur a mobilisé ce cadre d’analyse dans différents contextes, en vue de « mesurer » les cultures organisationnelles (Hofstede, Neuijen, Ohayv, et Sanders, 1990), d’évaluer les contraintes liées aux différentes cultures en termes de management (Hofstede, 1993), de rendre compte du caractère relatif de cer-taines variable d’objectifs mobilisées par les organisations et les sociétés (Hofstede, 1984a), ou encore d’effectuer des comparaisons entre pays en termes d’attitudes, de valeurs, ou d’institutions (Hofstede, 2001).

Aussi pratique qu’elle soit dans sa capacité à expliquer certains effets des diffé-rences culturelles sur la gestion des organisations et des sociétés, l’approche de la culture d’Hofstede présente néanmoins certaines limites. Parmi elles, l’une apparait particulièrement problématique pour le traitement de notre question de recherche : elle ne permet pas d’expliquer une question fondamentale associée à la notion de

culture, à savoir, la continuité au fil du temps qui la caractérise, malgré les

mul-tiples évolutions et divergences internes qui la traversent (d’Iribarne, 1989). En effet, l’approche d’Hofstede est essentiellement descriptive et statique. Elle confère à chaque culture, chaque organisation, ou chaque individu, un « score » pour les dif-férentes dimensions évoquées précédemment et cette combinaison de score permet de caractériser la culture de l’entité étudiée à un instant donné. Les évolutions culturelles qui surviennent au fil du temps peuvent être prises en compte, mais seulement dans une optique de statique comparative : elles correspondent simple-ment à l’évolution des « scores » au fil du temps. La continuité qui caractérise une culture n’est pas expliquée. Elle est tout au plus observée empiriquement, mais rien n’empêche, en théorie, qu’une entité voit ses scores changer radicalement d’une pé-riode à une autre. Dès lors, la notion de culture perd une partie de sa substance, puisque c’est justement cette continuité au fil du temps et au fil des évolutions, qui lui sont spécifique, et qui la démarque notamment de concepts moins englo-bants comme les valeurs, les attitudes et comportements, ou encore les institutions (d’Iribarne, Henry, Segal, Chevrier, et Globokar, 1998).

Les travaux de P. d’Iribarne (d’Iribarne, 1989, 1991; d’Iribarne, Henry, Segal, Che-vrier, et Globokar, 1998) se sont attachés à rendre compte de cette spécificité. La conception de la « culture » à laquelle l’auteur se réfère est inspirée des travaux anthropologiques de chercheurs tels que C. Levi-Strauss ou C. Geertz. Dans cette conception, la notion de culture est intimement liée aux « univers de signification » au sein desquels les êtres humains évoluent. Ce sont ces univers de signification qui leur permettent de décoder et de donner sens aux actions et comportement

2.2. Culture et diversité culturelle

de leurs congénères, ainsi qu’à leurs propres actions et comportements. Ces uni-vers de signification sont portés par différentes formes de codes et de langages. Et dans cette optique, la culture correspond à une forme de langage qui « fournit un

référentiel permettant aux acteurs de donner un sens au monde où ils vivent et à leurs propres actions. Elle désigne, classe, repère, relie, met en ordre. Elle définit les principes de classification qui permettent d’ordonner la société en groupes dis-tincts ». Il en découle que « La continuité de chaque culture, alors même qu’elle est marquée par de multiples évolutions, vient de la stabilité du système d’oppo-sitions fondamentales sur laquelle elle est construite. (. . . ) De manière générale, l’existence d’une continuité culturelle n’est nullement incompatible avec le carac-tère évolutif de l’organisation de la société » (d’Iribarne, 1989, préface de la 2e ed., pp. VI-VII).

Notons que, dans cette conception, si les cultures nationales revêtent une impor-tance capitale dans la construction des univers de signification des individus, les cultures associées à des « sous-groupes » qui peuvent être identifiés au sein de chaque société, n’en sont pas moins prégnantes. Ainsi, dans cette étude, la no-tion de culture sera associée non seulement aux cultures nano-tionales, mais égale-ment aux cultures des sous-groupes qui y sont présents, identifiés par des critères d’ordre très divers : géographiques, ethnoculturels, linguistiques, religieux, relatifs à une activité, relatifs à une organisation, etc. Le dénominateur commun de ces sous-groupes tient dans le fait qu’ils doivent être porteurs d’un système

d’oppo-sitions fondamentales suffisamment spécifique et marqué pour que l’identité de

ses membres en soient significativement imprégnés. Nous reviendrons sur la notion

d’identité au cours de la section 2.2.2.

Dans cette approche de la culture, il est intéressant de souligner le regard que porte l’auteur sur la question des changements et des innovations. En effet, celui-ci explique que la diffusion des innovations au sein de la structure socelui-ciale est conditionnée par ce langage et ce système d’opposition fondamental que constitue une culture. Ainsi, ces innovations ne sont « validées » par le corps social qu’à partir du moment où ceux qui les portent mobilisent ce système d’oppositions

fondamentales pour faire la démonstration de leur bien-fondé. Pour l’auteur, la

nécessité qui s’impose aux innovateurs, de recourir à ce « langage », constitue la source même de la continuité des cultures (d’Iribarne, Henry, Segal, Chevrier, et Globokar, 1998).

Un autre éléments intéressant qui ressort de cette conception de la culture, tient dans l’interprétation qui peut en être faite, en termes de connaissances telle que définie dans la section 2.1.1. Rappelons que nous avons défini les connaissances, à la suite d’Hatchuel et Weil (2002), comme des propositions disposant d’un statut logique défini pour celui qui les formulent. Dans cette optique, les propositions n’ont pas un caractère « vrai » ou « faux » dans l’absolu, mais seulement de manière

subjective, pour celui qui les formule. Par ailleurs, pour cette même personne, de nombreuses propositions n’ont aucun statut logique déterminé, car elles ne font pas partie de l’ensemble de ses connaissances. Il existe donc une distinction entre, d’une part, la dichotomie qui s’opère entre existence d’un statut logique déterminé ou non, et d’autre part, la dichotomie qui s’opère dans la valeur du statut logique, si celui-ci est déterminé.

A notre sens, cette distinction est particulièrement utile pour formaliser l’idée de système d’oppositions fondamentales qui caractérise une culture au sens de d’Iribarne : deux individus partageant la même culture, ont un certain nombre de connaissances en commun puisqu’il existe un certain nombre de propositions auxquelles ils peuvent tous les deux attribuer un statut logique. Cela n’implique pas pour autant qu’ils attribuent le même statut logique à la proposition. A titre d’exemple, deux personnes peuvent avoir la même culture nationale, et à ce titre, partager des connaissances communes à propos de la politique de leur pays (les différents partis qui existent, le contenu de leurs programmes respectifs, leurs res-sentis respectifs à propos de ces programmes, etc.), sans pour autant avoir les mêmes positions politiques (à la proposition « monsieur X est le plus compétent pour diriger le pays », l’un attribuera le statut « vrai » l’autre le statut « faux »). A l’inverse, une personne complètement étrangère à leur culture commune ne par-tagera pas ces connaissances, mais de ce fait, ne sera pas non plus en opposition avec l’un ou l’autre a priori.

Notons que les connaissances qui caractérisent une culture présentent la particula-rité d’être interdépendantes. Autrement dit, le fait de pouvoir attribuer un statut logique à certaines propositions dépend de la détermination préalable du statut logique d’autres propositions. Ainsi, pour reprendre notre exemple, une personne ne peut être capable de distinguer le contenu des différents partis politique d’un pays, que si elle sait à quoi font référence les propositions qui y figurent, ce qu’elles modifient par rapport à la situation existante, etc.).

Au regard de ces éléments, c’est donc à l’approche de d’Iribarne de la culture que nous ferons référence tout au long de cette étude, en mettant à contribution la définition d’Hatchuel et Weil de la notion de connaissance. Nous définirons ainsi une culture comme un ensemble de connaissances interdépendantes partagée par

un groupe d’individus, et ayant un rôle significatif dans la construction identitaire de ceux-ci. La section suivante s’attache à préciser la notion d’identité.