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Pour traiter de ces questions, l'étude sera structurée en deux temps : un temps méthodologique et un temps d'analyse, en deux parties, et cinq chapitres.

La première partie est dédiée à l'explicitation de la méthodologie de collecte et d'analyse des bibliothèques participatives. Dans le premier chapitre, il sera question des enquêtes et terrains, sur lesquels la collecte de données a reposé. La bibliothèque municipale de Lyon, terrain central, y sera présentée ainsi que le projet Démocratie, une programmation d'événements en grande majorité participatifs organisée par la BmL entre 2015 et 2017 et proposée au public de novembre 2016 à mars 2017. La Nuit de la Démocratie à la bibliothèque décrite au début de cette introduction est l'un des événements de ce projet Démocratie. La présentation de ce terrain, des entretiens menés et des événements observés sera l'occasion d'avoir un premier regard sur les formes possibles de la participation en bibliothèque.

Ce premier chapitre sur le terrain des bibliothèques participatives se poursuivra par un deuxième chapitre consacré à l'étude de diérentes approches d'analyse des données collectées. Il s'agira d'abord de questionner la possibilité et l'intérêt d'une approche de la participation par la notion d'intention, ce qui nous amènera à considérer le développement de la participation comme une réponse des bibliothèques à des problèmes et des crises distincts. Il s'agira ensuite de s'intéresser à la notion d'eets et à plusieurs outils de mesure de la participation pour, à défaut de chercher à mesurer les eets de celle-ci sur les publics, repérer les points d'engagement et d'intégrité d'une bibliothèque développant des pratiques participatives. Enn, il s'agira de dénir une approche de la transformation du métier de bibliothécaire, qui tienne compte à la fois de l'intention et des limites de la mesure des eets, et que nous ferons reposer sur la notion de représentation et de rôle, en suivant Erving Goman48, pour faire émerger trois rôles du bibliothécaire, animateur,

formateur et témoin, dont il conviendra d'observer s'ils sont transformés ou pas par la participation.

La seconde partie de cette thèse sera consacrée à l'étude et l'analyse des bibliothèques participatives, en partant de trois crises identiées dans la première partie, comme susceptibles d'expliquer la mise en ÷uvre de la participation par les bibliothèques et qui feront chacune l'objet d'un chapitre. La crise de la sociabilité et du lien social, la crise de la représentation et la crise du débat démocratique sont les trois problèmes évoqués par les bibliothèques pour justier, expliquer ou légitimer la nécessité de proposer des pratiques participatives face à des échecs ressentis de leur action sur ces champs. Partant de ces problèmes, chaque chapitre aura pour objet de comprendre la relation entre la crise et la bibliothèque (intention), d'étudier les conditions et les limites de la partici- pation comme résolution de cette crise (eets) et enn d'observer les transformations du métier de bibliothécaire du fait du développement de ces pratiques (rôles). Dans un texte remarquable de 1998, Bertrand Calenge49 compare la bibliothéconomie à la

médecine. Comme cette dernière, art et non science, la bibliothéconomie proposerait

des modélisations, utilisables en situation de pathologies, c'est-à-dire de cas agrants où les collections (à la fois les fonds et les services50) ne permettent pas de résoudre

les problèmes de savoirs des collectivités (à la fois un territoire et une communauté). La bibliothéconomie permettrait ainsi de dessiner des modèles, facilitant le diagnostic d'une situation complexe et l'invention d'un traitement adapté ou pour le dire autrement d'outils pour la traiter et la résoudre. Il faut ajouter à cette vision médicale un point pharmaceutique, dans la droite ligne de ce que peut-être un pharmakon, à la fois remède et poison, qui complètera ce modèle par un temps de réexion sur les eets secondaires. Nous utiliserons le travail de dénition de Calenge comme une méthode de présentation de nos résultats plutôt que comme un choix de traitement de ceux-ci.

Le premier temps sera celui du diagnostic, soit l'étude des raisons de la mise en ÷uvre de pratiques participatives en bibliothèques aujourd'hui, dans un contexte d'accroissement signicatif de celles-ci depuis les années 2010. Ce travail sur les intentions nous permettra d'identier des pratiques participatives considérées comme des réponses à des crises actuelles : l'échange de savoirs pour la crise de sociabilité, les décisions collectives pour la crise de la représentation, la mise en valeur de la parole de tous pour la crise du débat démocratique. Le second temps sera celui du traitement, dédié à l'analyse de la réalisation de ces intentions, dans une perspective qui tiendra à la fois compte de ce que cela dessine comme projet démocratique et des écueils et limites rencontrés par ces mises en ÷uvre de la participation en termes notamment de reconnaissance, de décision et de diversité. Enn le troisième temps, celui des eets secondaires, sera tourné vers la compréhension de ce qui se transforme dans ce milieu professionnel, notamment en matière de formation à la participation, d'expertise et de transfert de connaissances et enn de conservation de traces et de récits communs. Il s'agira d'observer l'évolution du bibliothécaire dans son rapport à l'émancipation et à la démocratie et ce à travers des problématiques récurrentes liées à la valeur de la prescription, de l'événementiel et de la production de biens communs. Pour nir, nous conclurons ce travail par la proposition d'une approche éthique plutôt que déontologique du métier de bibliothécaire, enjoignant par là les bibliothécaires à assumer pleinement leur responsabilité et la subversivité propre à ces lieux politiques de savoir et de connaissance.

Partie I