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Soutenir l’élève immigrant dans son intégration sociale

CHAPITRE I : PROBLÉMATIQUE

1.3 Le travail des enseignants en contexte hétérogène

1.3.3 Soutenir l’élève immigrant dans son intégration sociale

Il est difficile de séparer l’intégration sociale de l’intégration culturelle de l’élève. Nous avons vu que l’intégration culturelle consiste à valoriser la culture d’origine de l’élève et à le sensibiliser à la diversité culturelle et que l’intégration culturelle accompagne l’intégration linguistique de l’élève d’origine immigrante, en raison du lien entre la langue et la culture. Pour nuancer, par intégration sociale, nous mettons en lumière les interactions qui se déroulent entre l’élève et l’enseignant. Cela ne concerne pas l’intégration de l’élève à la société dans laquelle il évolue. Il s’agit plus particulièrement de mettre en évidence le système de codes et de normes

qui entrent en jeu au moment des interactions entre l’élève et l’enseignant aidant l’élève dans son intégration sociale.

Des auteurs soulignent que les défis de l’intégration sociale chez les élèves engendrent des défis au niveau de leur intégration scolaire, de même que les défis d’intégration culturelle engendrent un défi sur le plan des interactions sociales de l’élève avec autrui (Gorgorio et Planas, 2005; Mertzman, 2008; Piquemal et Bolivar, 2009). Gorgorio et Planas (2005) considèrent que l’intégration culturelle de l’élève est précédée d’un processus de transition entre la culture d’origine et la nouvelle culture accompagnée d’une discontinuité culturelle de l’élève, c’est à dire, un conflit entre les deux cultures, celle d’origine et celle de la société d’accueil. Autrement, la discontinuité qui décrit les discordances entre plusieurs cultures signifie que l’élève d’origine immigrante ressent des difficultés sur le plan de l’intégration sociale et scolaire en raison de différences linguistiques et culturelles dans lesquelles il est trempé, de codes et de valeurs ainsi que de références pratiquées par la société d’accueil (Piquemal et Bolivar, 2009). Mertzman (2008) rappelle que les différences culturelles, ethniques et sociales entre les élèves et l’enseignant ont des implications sur l’interaction entre eux et des effets sur l’apprentissage de l’élève. Dans le même sens, des auteurs signalent que les difficultés de l’élève ne relèvent pas uniquement de la langue, mais aussi de la compréhension des ressources utilisées pendant le processus d’apprentissage qui relèvent de la culture et des normes de la classe (Arbour, 2013; Gibbons, 2002; Gorgorio et Planas, 2005). Comme le dit Arbour (2013), l’élève immigrant a besoin de déchiffrer les codes sociaux de la deuxième langue et d’en comprendre les « implicites » pour pouvoir la maîtriser et la valoriser. Les implicites sont une partie intégrante de la manière de s’exprimer (gestes, regards, blagues, expressions, ton de voix, attitudes...). Dans le même sens, l’élève a besoin que l’enseignant développe des situations d’échange et trouve des ressources convenables pour aider l’élève à reconstruire son identité individuelle et sociale durant son interaction avec de nouvelles expériences culturelles et sociales (Gibbons, 2002; Gorgorio et Planas, 2005). Ces auteurs ont relié l’apprentissage de l’élève immigrant à son intégration sociale en classe. Ils ont expliqué les raisons pour lesquelles l’élève éprouve des difficultés dans son intégration sociale. Selon eux, les différences linguistiques et culturelles, les codes et les valeurs de la

classe influencent sa compréhension des ressources utilisées en classe, ce qui affecte son intégration sociale. Ces textes suggèrent aux enseignants de développer des situations d’échange pour permettre à l’élève d’utiliser les ressources en classe. Toutefois, comment un enseignant du primaire peut-il développer des situations d’échange en classe et comment peut- il déchiffrer le sens des ressources à l’élève immigrant pour qu’il puisse les comprendre ? Considérant cette limite, nous nous attardons sur la façon dont la communication se construit en classe entre l’élève immigrant et l’enseignant. Tardif et Lessard (1999) soulignent que ce que fait un enseignant dans une classe repose sur des actions interactives comme expliquer, corriger le devoir, fournir des commentaires et des consignes, intervenir, soutenir, évaluer, échanger et communiquer. Ce travail interactif s’appuie sur la communication langagière et c’est à ce titre que ces auteurs caractérisent le travail de l’enseignant en deux catégories : l’interaction et la signification. Les différentes actions accomplies en classe se produisent en interaction entre l’enseignant et les élèves et en fonction des significations que ces partenaires donnent à l’action. Ainsi en classe, la communication entre l’élève et l’enseignant se fait dans les deux sens. L’élève interprète ce que l’enseignant dit et fait en fonction de ses traditions sociales, linguistiques et culturelles. À son tour, l’enseignant interprète les gestes ou ce que dit l’élève en fonction de ses traditions sociales et du contexte de la classe. De cette façon, il ajuste son programme d’action et ses interventions (Tardif et Lessard, 1999).

Les auteurs soulignent l’importance de parvenir à un consensus entre l’élève et l’enseignant sur le sens de la communication qui se déroule. Pourtant, dans le contexte réel de la classe, il se peut qu’un élève récemment arrivé, qui ne comprend pas la culture de la classe ou qui ne maîtrise pas parfaitement la langue, interprète différemment une consigne de l’enseignant. À quel point ce dernier peut-il prendre en compte ces possibles écarts de communication dans l’interaction et trouver des stratégies pour rectifier le tir devant les réactions de l’élève ? Comme on peut le constater, des auteurs soutiennent l’idée que le soutien de l’élève dans la langue d’enseignement et dans les autres compétences disciplinaires dépend de son intégration culturelle et sociale. Autrement dit, on demande à l’enseignant d’établir des relations avec l’élève d’origine immigrante qui ne maîtrise pas la langue de communication et qu’il mobilise de nouvelles ressources compréhensibles pour lui pour pouvoir interagir et communiquer avec

lui afin de favoriser son soutien. Les différents écrits recensés ne nous éclairent pas sur la manière de développer des situations d’échange en classe, de déchiffrer le sens des ressources à l’élève d’origine immigrante, de gérer les interactions individuelles avec chaque élève et les interactions collectives avec la classe, surtout que le rôle de l’enseignant consiste aussi à tenir compte de l’ensemble des élèves de la classe et à assurer la réussite de tous.

La recension des écrits nous a fourni des éclaircissements sur le travail de l’enseignant en contexte hétérogène en ce qui concerne le soutien qu’il apporte aux élèves d’origine immigrante sur les plans linguistique, culturel et social et en compétences disciplinaires. D’ailleurs, il est intéressant de regarder le point de vue de l’enseignant lui-même sur le contexte hétérogène, sur les élèves d’origine immigrante et sur le travail de soutien qu’il apporte aux élèves.