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Seuil de rentabilité et risque

La représentation graphique du seuil de rentabilité

3.1.6.4. Seuil de rentabilité et décisions de gestion

3.1.6.4.1. Seuil de rentabilité et risque

A l’évidence, l’incertitude qui pèse sur la vie des affaires ne peut avoir qu’une incidence forte sur le niveau des prévisions que les gestionnaires de l’entreprise sont à même d’effectuer, que ce soit au niveau du chiffre d’affaires escompté, des volumes de vente espérés et de la structure de coût anticipée. Au plus cette incertitude est grande, au plus le risque de voir ces prévisions ne pas se réaliser est élevé.

Ignorer cette incertitude et ne pas mesurer son impact éventuel sur le seuil de rentabilité de l’entreprise serait dommageable : en effet, rappelons-le une fois encore, les informations issues du système comptable interne et utilisées en comptabilité de gestion doivent avant tout aider et éclairer la prise de décision et la prise en compte effective du risque est un élément d’information capital dans de nombreuses décisions. L’impact de l’incertitude (que l'on peut assimiler conceptuellement à l'impact d'une information imparfaite qui amène éventuellement l'entreprise à formuler des hypothèses de travail peu réalistes ou peu compatibles avec les évolutions anticipées réelles de son environnement) et le niveau de risque qui en découle inévitablement sont d’autant plus importants à mesurer que l’entreprise atteint un niveau d’activité (donc de chiffre d’affaires) proche de son seuil de rentabilité : en effet, plus l’entreprise voit son niveau d’activité se rapprocher de son seuil de rentabilité, plus le risque est grand de commencer à générer des pertes (et donc de la non-valeur) et non plus des bénéfices (et donc de la valeur).

3.1.6.4.1.1. Seuil de rentabilité, risque et flexibilité de l’entreprise

Les concepts de seuil de rentabilité, de niveau de risque pesant sur l’activité de l’entreprise et de flexibilité sont en fait étroitement liés.

Pour bien le comprendre, partons d’un exemple : une société A produit dans son usine un produit simple, alors que la société B sous-traite une part importante de sa production, ce qui amène ces deux entreprises à présenter la structure de coûts suivante :

124 Dans la plupart des entreprises, en effet, l'adjonction d'une simple activité de distribution peut être intégrée sans

investissements nouveaux à l'intérieur de l'infrastructure existante. Notons toutefois qu'il n'en serait plus de même si l'entreprise devait engager du personnel commercial supplémentaire et à durée indéterminée pour permettre cette activité de distribution.

Tableau 2 : Les structures de coûts des entreprises A et B (données exprimées en Euros) Société A Société B Charges variables 15 000 Chiffre d’affaires 25 000 Charges variables 21 000 Chiffre d’affaires 25 000 Charges

fixes 8 000 Charges fixes 2 000

Résultat 2 000 Résultat 2 000

Tant A que B dégagent le même chiffre d’affaires et dégagent le même niveau de résultat. Pourtant, § A dégage un taux de marge sur coût variable de (25 000 € - 15 000 €) / 25 000 €, soit 40 % et son

seuil de rentabilité est de 8 000 € / 0.4, soit 20 000 € ;

§ quant à B, elle dégage un taux de marge sur coût variable de (25 000 € - 21 000 €) / 25 000 €, soit 16 % et son seuil de rentabilité est de 2 000 € / 0.16, soit 12 500 €.

L’entreprise B est très flexible en termes de structure de coûts, puisqu’elle s’appuie essentiellement sur des relations de sous-traitance avec ses fournisseurs, en rendant ainsi variable une part importante de ses charges d’exploitation. Au niveau d’activité actuel, elle se situe bien au-delà de son seuil de rentabilité et apparaît de ce fait, au niveau de chiffre d’affaires actuel de 25 000 €, bien plus sûre et donc moins risquée que A, qui dégage pourtant une marge sur coûts variables supérieure de 150 % à celle de B.

Le constat s’impose rapidement : une entreprise flexible qui parvient à rendre variable une part essentielle de sa structure de coûts parvient de ce fait à atteindre plus rapidement son seuil de rentabilité et devient de ce fait moins risquée qu’une entreprise qui intègre l’ensemble des outils nécessaires à son activité et qui voit ainsi sa structure de coûts fortement influencée par une part proportionnellement élevée de coûts fixes. Ceci explique que bon nombre d’entreprises actives dans des secteurs matures, fortement concurrentiels et donc fortement risqués (par exemple dans le secteur du transport aérien) privilégient des stratégies de gestion et des stratégies de gestion des coûts de type « low cost », basées à la fois sur une recherche de maîtrise permanente de leurs coûts (fixes et variables) de manière à abaisser leur seuil de rentabilité et sur une structure de coûts dominée par les coûts variables pour diminuer le risque pesant sur la rentabilité de leur activité (avec tout ce que ces choix stratégiques impliquent en matière de flexibilité et de sous-traitance des activités, et notamment en termes de sous-traitance des ressources humaines).

Notons toutefois que si cette flexibilité est incontestablement un atout en période de récession économique ou de difficultés passagères pour l’entreprise désireuse de présenter des résultats financiers qui restent positifs malgré les difficultés économiques (elle peut en effet diminuer aisément le volume de ses coûts simplement en ne renouvelant pas ses contrats de sous-traitance, en ce compris les contrats passés avec les agents intérimaires éventuels), elle peut s’avérer désastreuse en période de forte croissance économique, lorsqu’il devient difficile en raison d’une concurrence acharnée de trouver les compétences, les outils ou les infrastructures qui seraient indispensables au développement des affaires : les bénéfices de la croissance économique peuvent ainsi s’envoler aisément vers d’autres cieux, faute d’avoir constitué au sein de l’entreprise un portefeuille de ressources stables et susceptibles d’être mobilisées à court terme pour alimenter sa croissance interne.

3.1.6.4.1.2. Le concept de marge de sécurité

Il apparaît donc utile de compléter l’information contenue dans la notion de seuil de rentabilité par des indicateurs complémentaires, aptes à mesurer l’impact sur le seuil de rentabilité d’une modification du

niveau d’activité de l’entreprise et donc l’impact du risque opérationnel qui se traduirait par une baisse, voire une hausse, du chiffre d’affaires.

Le concept de marge de sécurité fait partie de ces notions. Techniquement, la marge de sécurité est définie par le rapport suivant :

Marge de sécurité = (Chiffre d’affaires - Seuil de rentabilité) / Chiffre d’affaires.

Appliqué aux données présentées à la section précédente, ce concept donne les résultats suivants : § pour la société A, la marge de sécurité s’élève à : (25 000 € - 20 000 €) / 25 000 €, soit 20 %, § pour la société B, la marge de sécurité s’élève à : (25 000 € - 12 500 €) / 25 000 €, soit 50 %.

Le niveau de son chiffre d’affaires par rapport au seuil de rentabilité donne donc à B une position moins risquée que celle de A : lorsque les charges fixes sont importantes, le seuil de rentabilité est donc atteint plus tard, même si le résultat final est satisfaisant 125, et l’entreprise est alors plus fragile en cas de chute du

niveau d’activité.

3.1.6.4.1.3. Le concept de coefficient de levier opérationnel

Le concept de marge de sécurité ne permet toutefois de mesurer que le risque opérationnel qui pèse sur l’entreprise. Il ne permet pas de mesurer l’impact de scénarii éventuels sur l’évolution du résultat de l’entreprise. Or, notamment dans une perspective de planification ou de budgétisation, ce type d’information est fréquemment attendu de la part des comptables de gestion.

Pour fournir une telle indication, il faut mesurer alors un coefficient d’élasticité du résultat opérationnel par rapport au chiffre d’affaires. En comptabilité de gestion, ce coefficient d’élasticité est évoqué sous le concept de coefficient de levier opérationnel et il mesure, pour une variation donnée du chiffre d’affaires et toutes autres choses étant égales (et notamment la structure de coûts de l’entreprise) par ailleurs, la variation du résultat opérationnel qui en résulte.

Mathématiquement, il s’exprime donc comme suit :

Coefficient de levier opérationnel = (Delta R / R) / (Delta CA / CA)

Il résulte du rapport entre la variation relative du résultat et la variation relative du chiffre d’affaires, s’assimilant de ce fait à l’élasticité du résultat par rapport au chiffre d’affaires réalisé.

Pour les données de notre exemple,

§ Le coefficient de levier opérationnel de la société A est de (1 000 € / 2 000 €) / (2 500 € / 25 000 €) = 5 pour une évolution du chiffre d’affaires de 10 %.

§ Dans le même temps, le coefficient de levier opérationnel de la société B est de (400 € / 2 000 €) / (2 500 € / 25 000 €) = 2 pour une même évolution du chiffre d’affaires de 10 %.

§ La société A apparaît de ce fait beaucoup plus sensible aux évolutions du chiffre d’affaires que B et est de ce fait beaucoup plus vulnérable en cas de retournement conjoncturel ou de difficultés passagères, mais apparaît plus prometteuse en terme de croissance en cas de haute conjoncture ou de circonstances particulières favorables.

125 Rappelons que pour les données de notre exemple, les résultats respectifs de A et de B sont égaux et correspondent

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