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CARRIÈRE ET LIGNÉE

1. Pierre des Prés, de Montpezat en Avignon

1.3 Au service de l'Audience du Sacré-Palais

Au début du mois d'octobre 1316, le pape Jean XXII, nouvellement élu, charge

Bernard Rouiard, archidiacre de Saintes, auditeur général au sein de l'Audience93, et Pierre

Tissandier, chanoine de Saint-Antonin en Rouergue et docteur en droit canon, d'enquêter sur les agissements présumés d'Hugues Géraud, évêque de Cahors. Ce dernier est né près de La

Nouaille, dans le diocèse de Périgueux, au milieu du XIIIe siècle. Après des études de droit, il

semble entrer au service de Clément V, qui se l'attache en tant que chapelain et lui confère un canonicat à Limoges, un second à Saint-Astier, ainsi qu'une grâce expectative de prébende à Périgueux. Le pape le charge également de plusieurs missions diplomatiques, notamment auprès du roi de France en 1306. Hugues Géraud accumule les bénéfices ecclésiastiques, dont l'archidiaconé d'Eu. Lors du procès des Templiers, Hugues Géraud fait partie des administrateurs et curateurs des biens de l'Ordre déchu. Il est envoyé par Clément V comme nonce en Italie, auprès d'Henri de Luxembourg, et accompagne à cette occasion Robert de Mauvoisin, nommé archevêque de Salernes. La consécration de sa carrière arrive enfin le 16 février 1313 : Hugues Géraud devient évêque de Cahors. Il s'engage alors dans un processus de réforme de son clergé diocésain, par le biais de la publication en 1314 de mandements à cet effet, tout en cherchant à récupérer des biens de la mense épiscopale aliénés par ses prédécesseurs sans pour autant, semble-t-il, délier les cordons de sa bourse. L'évêché de Cahors était alors un des plus richement dotés du Midi, mais paradoxalement, les biens propres de l'évêque ne représentaient plus grand chose. Les agents d'Hugues Géraud paraissent user de méthodes peu orthodoxes et les plaintes de particuliers s'accumulent contre lui. L'évêque de Cahors se croit toutefois protégé, à la fois par le pape et par le roi de France, qu'il connaît et surtout qui l'estiment. Les décès successifs de Clément V et de Philippe IV le Bel ruinent ses espérances. Il ne lui reste plus qu'à souhaiter que le conclave élise un des parents ou un des favoris du pape défunt, afin que le nouveau souverain pontife excuse ses dérives.

Prudent, Hugues Géraud oblige toutefois ses complices, subordonnés ou victimes de jurer avec la formule « sit nomen domini benedictum » de ne jamais rien déposer contre lui. De même, il prend la précaution de déposer chez des bourgeois de Limoges une assez grosse masse de pièces d'argenterie et de nombreux livres. La nouvelle de l'élection de Jean XXII lui

arrive et il décide de se rendre à Lyon pour assister à son couronnement. Arrivé dans la capitale des Gaules, il demande à l'un de ses affidés, Pierre de Saleilles, arrivé lui quelques jours plus tôt, s'il pense que le nouveau pape va vivre longtemps. Jean XXII, à peine élu, a été saisi par les consuls de Cahors des plaintes à l'encontre de leur évêque : simonie, inconstance, violences diverses... Installé en Avignon le 2 octobre 1316, il charge, comme nous l'avons dit, deux clercs de mener une enquête pour vérifier ces faits. Les langues restant closes,

verrouillées par le fameux serment, le pape est contraint, le 1er novembre 1316, de décréter

qu'à partir de ce moment, toutes les personnes qui auraient prêté serment à Hugues Géraud étaient déliées de cette obligation. Les plaintes affluent et les deux commissaires, débordés, se

voient adjoints deux autres clercs pour les assister, Gailhard Saumate94, archidiacre de

Saint-Antonin, et Arnaud de Capdenac, chanoine de Mende et de Saintes.

En mars, la culpabilité de l'évêque de Cahors ne fait plus de doute pour les commissaires pontificaux. Hugues Géraud, à l'issu de ce premier procès canonique, est condamné le 18 mai 1317, à être déposé de son évêché et dégradé de sa dignité épiscopale. Entre temps, vient se greffer une nouvelle affaire, aux conséquences beaucoup plus néfastes pour lui. Deux hommes venant de Toulouse ont été arrêtés dans la cité avignonnaise. Des images de cire, qui représentent le pape et les cardinaux Bertrand du Pouget et Gaucelme de Jean, accompagnées de poudres suspectes, sont découvertes dans leurs bagages. Hugues Géraud se met semble-t-il lui-même en cause sans le vouloir, en proférant des paroles de trop. La sanction du pape est immédiate : il est arrêté avec tous ses familiers. Ses biens sont saisis et confiés à l'administration de Bernard Rouiard et Gailhard Saumate, tout juste promus

respectivement évêques d'Arras et de Riez, ainsi qu'à Pierre des Prés, chanoine de Saintes95.

Ce choix de Jean XXII pourrait s'expliquer par le fait que Pierre des Prés est un quercynois, né près de Cahors et lié aux puissantes familles de la cité. Mais les aïeux de Pierre des Prés ont racheté des biens aux évêques de Cahors, et leur ont également prêté de l'argent. Il est donc indirectement impliqué dans ce procès canonique, ce qui rend la décision du pape de charger Pierre des Prés de liquider les biens d'Hugues Géraud assez paradoxale.

Toutefois, le véritable début de la carrière de Pierre des Prés comme collaborateur de Jean XXII n'intervient que quelques semaines plus tard, toujours dans l'affaire d'Hugues Géraud. Un second procès, criminel, débute le 8 mars 1317. L'instruction est confiée à Arnaud

94 Gaillard Saumate est originaire du Rouergue. Il est un familier de Jacques Duèze et occupe la charge d'official (1307-1309) puis de vicaire-général (1308) de ce dernier lorsqu'il occupe le siège épiscopal de Fréjus. Évêque de Riez puis de Maguelonne en 1317, il est nommé archevêque d'Arles en 1318. Il meurt en 1323. Voir Pécout, 2012, p. 60.

de Trian, maréchal de justice du pape, et l'un de ses neveux, associé à un autre proche parent du pontife, le chevalier Pierre de Via. A ces commissaires laïcs, Jean XXII associe des clercs : Gailhard Saumate, évêque de Riez, Arnaud de Capdenac et Pierre des Prés. Ce dernier, nous l'avons vu plus haut, vient tout juste de quitter ses fonctions de juge des appeaux criminels de Toulouse. Dans la bulle, datée du 5 mai 1317, qui le charge de cette fonction de magistrat instructeur, Jean XXII loue ses qualités de professeur en droit civil et ses capacités de juriste.

Pourquoi Jean XXXII choisit-il à nouveau Pierre des Prés ? Certes, il est docteur en droit civil et possède une pratique de l'appareil judiciaire. Il n'est toutefois pas le seul dans l'entourage du pape, loin de là. Il a composé, nous l'avons vu, un petit ouvrage pratique d'instruction des procès en droit civil. Il est également quercynois de naissance, comme Jean XXII. L'argument est valable, mais, là encore, ne suffit pas. Il existe de nombreux clercs

quercynois qui sont au service du pape, certains même depuis longtemps96. Or, Pierre des Prés

n'est pas un de ceux-là. Il n'a pas été sur les bancs de l'université avec Jacques Duèze, dont au moins une génération le sépare, et n'a pas non plus semble-t-il été son étudiant à Orléans. Pierre des Prés ne compte pas parmi ses familiers lorsqu'il devient évêque de Fréjus, ne

l'accompagne pas à Naples ou en Avignon97.

Sa carrière à la cour pontificale est forcément due à un proche de Jean XXII, qui le recommande au nouveau pape comme un juriste patenté et un juge expérimenté pour seconder les commissaires nommés dans l'affaire Géraud. Ce personnage connaît également Pierre des Prés. Parmi les clercs qui appartiennent au premier cercle de l'entourage pontifical en cette fin d'année 1316, Bertrand de Montfavès pourrait être le premier protecteur de Pierre des Prés. Il est né vers 1270 à Castelnau-Montratier, ville peu éloignée de Montpezat-de-Quercy. Sa

famille possède la seigneurie de Gandoulès, située à cinq kilomètres du village98. Des liens de

parenté unissent en plus les familles de Montfavès et des Prés : Geoffroy de Vayrols, futur archevêque de Toulouse, est en effet qualifié, dans une lettre commune de Jean XXII, datée du 9 novembre 1329, qui lui confère un canonicat, une prébende et la dignité de préchantre dans la cathédrale de Barcelone99, d'oncle de Pierre des Prés mais également de parent (« consanguineum ») du cardinal de Santa-Maria in Aquiro. Pierre des Prés est donc un parent de Bertrand de Montfavès. Ce dernier a également enseigné le droit civil à l'université de

96 Theis, 2012, p. 111-112.

97 Theis, 2012, p. 108-115.

98 Albe, 1905

99 Lettre communes de Jean XXII, n° 047271. Le pape confère ce bénéfice à Geoffroy de Vayrols avec une

dispense liée à son âge, 21 ans, incompatible avec la dignité accordée. Ceci permet de donner l'année de naissance de Geoffroy de Vayrols, très certainement 1308.

Toulouse et occupe encore une chaire en 1316, au moment où Pierre des Prés lui-même y

dispense des cours100. Les deux quercynois se côtoient dans la cité des bords de Garonne et le

futur cardinal-diacre a tout le loisir de suivre la carrière de magistrat de son cousin. Bertrand de Montfavès est un ancien condisciple de Jacques Duèze sur les bancs de la faculté

d'Orléans101. Clément V l'a pourvu d'un canonicat à Cahors le 19 février 1313102. En

1315-1316, il enseigne à Toulouse et porte la qualification de docteur. Il appartient au « premier

cercle »103 des parents et familiers que Jacques Duèze, nouvellement élu pape en 1316, choisit

pour constituer son entourage proche. Jean XXII le créé cardinal-diacre au titre de Santa-Maria in Aquiro le 16 décembre 1316. Enfin, dernière preuve des liens qui unissent les deux prélats : Pierre des Prés est choisi par Bertrand de Montfavès comme l'un de ses exécuteurs testamentaires, après son décès, survenu en 1342.

Mais un autre personnage a pu également favoriser la carrière de Pierre des Prés à la cour pontificale : il s'agit de Jean des Prés, évoqué plus haut. Qu'il soit le frère de Pierre ou bien un parent plus ou moins éloigné, il a sûrement dû jouer un rôle certain dans le lancement de la carrière de ce dernier. Clerc et familier de la reine Clémence de Hongrie en 1316, Jean des Prés fréquente la cour de France, et peut donc recommander au souverain, Louis X puis Philippe V, son jeune parent, brillant juriste et de surcroît officier royal à Toulouse.

Toujours est-il que Pierre des Prés participe à l'instruction du procès criminel d'Hugues Géraud, affaire très délicate, qui requiert de bénéficier de la confiance absolue du souverain pontife. A partir de ce moment-là, il est possible d'affirmer que Pierre des Prés appartient au second cercle, voire au premier, des fidèles et loyaux serviteurs du pape.

La machine judiciaire est lancée : l'ex-évêque de Cahors, redevenu un simple clerc, est interrogé, ses complices traqués, parfois jusqu'en Aragon ou à Lausanne, emprisonnés et torturés ou menacés de l'être ; ils avouent leurs crimes et ceux de leur maître. Les figures de cire ont été confectionnées par un juif, baptisées par Hugues Géraud dans de l'eau bénite mais en suivant un rituel satanique, et devaient servir à entraîner la mort de Jean XXII et de ses deux fidèles cardinaux. Au cas où cela n'aurait pas fonctionné, le recours au poison devenait une seconde solution. Le meurtre de Jean XXII accompli, le conclave devait élire un gascon comme nouveau pape et ainsi sauver l'honneur d'Hugues Géraud. Les noms de prélats haut

100 Gilles, 1991, p. 115.

101 Pécout, 2012, p. 54.

102 Lettres communes de Clément V, n°9089. Sur ce cardinal, voir Gilles, 1991, p. 115-116.

103 Suivant l'expression de Valérie Theis. Bertrand de Montfavès partage les faveurs de Jean XXII avec Jacques de Via, Arnaud de Trian, Gaucelme de Jean, Bertrand du Pouget ou Pierre d'Arrabloy. Voir Theis, 2012, p. 110.

placés tombent. Pierre de Mortemart, docteur en droit, Gaillard de Pressac, évêque de Toulouse, Pons d'Antéjac, évêque de Clermont, ou le vicomte de Bruniquel semblent impliqués. Il convient d'être prudent sur l'éventuelle culpabilité d'Hugues Géraud. Comme le précise Noël Valois, au vu des faits connus aujourd'hui, et compte-tenu du fait que les minutes du procès ne sont pas arrivées complètes jusqu'à nous, et que nous ignorons également qu'elle était l'attitude des commissaires, juges et greffiers face à l'accusé, il est très difficile de porter un jugement sur cette affaire. Est-ce un coup monté par l'entourage pontifical pour se débarrasser d'un prélat proche de Clément V ? Certaines circonstances semblent en effet suspectes : complices arrêtés comme par hasard, témoins très au fait du complot, étiquettes retrouvées avec les images de cire ou « voûts » qu'il était facile de placer là à dessein. À contrario, il existe bien des éléments à charge contre Hugues Géraud : les témoignages se recoupent entre eux, et lui-même avoue ses crimes, sans même avoir été torturé. Présenté à sept reprises à Jean XXII, il confesse à chaque fois son désir d'avoir voulu attenter à sa vie et à celles des cardinaux du Pouget et de Via. Comment alors ne pas croire d'une part à la bonne foi de Jean XXII, qui encourage la tenue d'une enquête approfondie et d'autre part le fait qu'il ne pouvait que croire en la culpabilité d'Hugues Géraud ? Comme l'expose Noël Valois, en parlant de l'accusé : « il [Hugues Géraud] confesse la pensée meurtrière, le crime de lèse-majesté » ; « les accusés ne se résignent pas d'ordinaire à une attitude si désarmée, si désespérée, à moins que l'évidence de leur crime ne leur permette point d'en choisir une autre ». Hugues Géraud ne demande à aucun moment la grâce ou la magnanimité du pape : mal lui en prend, car ce dernier le livre au bras séculier. Hugues Géraud est brûlé vif en bords de Rhône. Quel est le rôle joué par Pierre des Prés dans ce procès ? Il semble l'instruire avec les autres commissaires, en bon juriste, en fidèle agent du pape. Il est présent notamment à chaque interrogatoire d'Hugues Géraud.

En parallèle, Pierre des Prés et Gaillard Saumate enquêtent, le 7 mai de cette même année 1318, sur les accusations de complot visant le pape, portées contre Bernard de l'Artige,

chantre de Poitiers, clerc dont ils démontrèrent l'innocence104.

Le pape semble satisfait de son attitude dans ces deux affaires sensibles, puisqu'il le

charge, trois mois à peine après l'exécution d'Hugues Géraud, le 7 janvier 1318105, d'instruire,

à nouveau en compagnie de Pierre Tissandier, prieur de Saint-Antonin-en-Rouergue, un second procès à charge contre un ecclésiastique de haut-rang, l'archevêque

d'Aix-en-104 Bernard de l'Artige est accusé, suivant des racontars, d'avoir organisé ou participé à un complot visant à assassiner Jean XXII en plein consistoire. Voir Albe, 1904, p. 130-132.

Provence, Robert de Mauvoisin. Celui-ci est accusé de blasphème, d’agressions physiques, de chantage, de simonie, de parties de chasse, de mauvaise gestion des affaires de l’Église et enfin, et avant tout, d'avoir usé de sortilèges, de pratiques divinatoires, de talismans, en faisant

notamment appel à un juif, Moïse de Trets106 probablement dans le but funeste d'attenter à la

vie du pape en personne. Les deux commissaires nommés par le souverain pontife, outre le fait qu'ils se connaissent parfaitement et ont déjà eu l'occasion de travailler ensemble sur une affaire similaire, se complètent à merveille : l'un est docteur en droit canon et le second l'est en droit civil. Au vu des chefs d'accusation lancés contre Robert de Mauvoisin, les deux spécialités juridiques se doivent d'être représentées. La première comparution de l’archevêque

d'Aix devant Jean XXII et les auditeurs du Sacré-Palais avait eu lieu le 17 décembre 1317107,

et ce n'est donc que quelques semaines plus tard, au vu des premières réponses du prélat, que le pape décide de nommer les deux clercs méridionaux comme commissaires spéciaux en charge d'instruire une enquête en bonne et due forme sur les agissements du suspect. Les deux magistrats se mettent au travail et auditionnent 36 témoins, entre le 14 janvier et la fin du mois de mai. Ils écoutent également Robert de Mauvoisin à huit reprises, dont au moins une

fois dans la maison qu'occupe Pierre des Près en Avignon108.

Le 27 février, il est en plus chargé de juger, en compagnie de Pierre Tissandier, de

Barthélémy Gras109 et de Gaillard Saumate, une affaire de magie et de nécromancie, qui

impliquait plusieurs clercs et laïques, dont le barbier de l'archevêque de Lyon110.

Son rôle dans ces affaires, en plus de son action lors du procès d'Hugues Géraud quelques mois auparavant, lui valent dans un premier temps le grade d'auditeur des causes du Sacré-Palais de troisième degré, puis sa crosse d'évêque : il est porté, en pleine instruction, sur

le siège épiscopal de Riez le 31 mars 1318111, où il remplace un autre commissaire pontifical,

Gaillard Saumate, promu à Maguelonne le 12 novembre 1317 puis à Arles le 8 février 1318. Il promit de payer ses services communs le 12 avril, puis fut sacré le 7 mai par le cardinal Niccolò da Prato. L’évêché de Riez avait bien été proposé à Gaillard de Preissac, l'archevêque de Toulouse impliqué dans l'affaire Hugues Géraud, mais ce dernier, réaction très certainement prévue par le pape, a refusé cette translation humiliante, qualifiée par Louis

106 Sur cette affaire de Robert de Mauvoisin, voir Shatzmiller, 1999, et Boudet et Théry, 2012, p. 159-235.

107 Shatzmiller, 1999, p. 20.

108 L'audition est datée du 14 janvier 1318. Le texte précise Avinioni, in domo quam dictus dominus Petrus de

Pratis inhabitat. Voir Shatzmiller, 1999, p. 183.

109 Il est originaire de Montalzat, village situé à quelques kilomètres en face de Montpezat-de-Quercy, et est évêque de Fréjus depuis le 20 janvier 1318.

110 Voir sur cette affaire Albe, 1904, p. 133-134.

Caillet de « quasi-destitution »112. Le choix de donner l'évêché de Riez à Pierre des Prés n'est pas innocent : Jean XXII, qui a choisi d'installer la cour pontificale sur les bords du Rhône, a besoin, pour asseoir son pouvoir, de reprendre la main sur les évêchés provençaux proches

d'Avignon, en y installant des clercs qui lui sont dévoués113. Pierre des Prés ou Gaillard

Saumate sont de ceux-là. Un des rares actes de Pierre des Prés en tant qu'évêque de Riez est de conférer, le 22 juillet 1318, à un certain Pierre de Via, clerc, le prieuré de Saint-Jean-de-Moustiers, qui appartient au monastère de Saint-Victor de Marseille mais dont la présentation du supérieur revient à l'ordinaire du lieu. Jean XXII entérine le choix de Pierre des Prés, même si le clerc choisi est un séculier, alors que le prieuré dépend d'un monastère

bénédictin114. Cet acte de Pierre des Prés doit être perçu comme une manière de remercier son

bienfaiteur : Pierre de Via, qui reçoit cette libéralité, n'est autre que le propre petit-neveu du pape. Il est alors à peine âgé de sept ans et vient tout juste de recevoir la tonsure des mains de

l'évêque de Cahors, Guillaume de Labroue115. Pierre des Prés décréta également le 30 mai

1318 que les Franciscains de Riez devraient demander l'autorisation à l'évêque chaque fois

qu'ils seraient amenés à porter la croix lors d'une procession pour un enterrement116.

Nommé évêque de Riez, Pierre des Prés termine l'instruction du procès de Robert de Mauvoisin en concluant l'affaire le 31 mai 1318, soit moins de six mois après son ouverture, ce qui dénote une rapidité exceptionnelle, comme le soulignent Jean-Patrice Boudet et Julien