Le commentaire de l’auteur face au commentaire du juge
3. Scènes de commentaire de texte face au roi justicier
On comprend le rôle décisif de la confrontation entre juge et poète dans l’élaboration du sens de l’œuvre, et dans la proposition de ce sens à l’ensemble varié des lecteurs bien au‐delà du tribunal, quand on se rend compte que cette confrontation se fige en une scène que les auteurs imaginent et réécrivent pour orienter la réception de leurs textes. On retrouve ainsi cette scène judiciaire ou para‐judiciaire dans l’avis « Aux lecteurs » des Tragiques d’Agrippa d’Aubigné, où se fait entendre non pas la voix du poète qui choisit de garder l’anonymat au moment de la première édition, mais celle du « larron Promethée », son serviteur fictif qui lui aurait dérobé son manuscrit pour en précipiter la publication. Ce bon larron défend le poète contre ses accusateurs, mais il décrit aussi les moments où son maître s’est défendu en personne, notamment sur le plan politique :
La liberté de ses autres escrits a faict dire à ses ennemis qu’il affectoit plus le Gouver‐ nement Aristocraticque que Monarchique, de quoy il fut accusé envers le Roy Henry quatriesme estant lors Roy de Navarre. Ce Prince qui avoit desja leu tous les Tra‐ gicques plusieurs fois, les voulut faire lire encore pour justifier ces accusations : et n’i aiant rien trouvé que supportable, pourtant pour en estre plus satisfait, appela un jour notre Autheur en presence des sieurs du Fay et du Pin, lesquels discourroient avec luy sur les diversitez des estats : Nostre autheur interrogé promptement quelle estoit de toutes administrations la meilleure, respondit que c’estoit la Monarchicque selon son institution entre les François114…
L’interrogatoire décrit ici ne se déroule pas dans un tribunal et l’auteur convoqué ne sort pas de prison, mais c’est bien en tant que juge suprême que le roi de Navarre,
113 Voir S. Lerer, « Errata: print, politics and poetry in early modern England », dans Reading, Society
and Politics in Early Modern England, éd. K. Sharpe et S. N. Zwicker, Cambridge, Cambridge University
Press, 2003, p. 41‐71, en particulier p. 55‐57.
114 Agrippa d’Aubigné, « Aux lecteurs », Les Tragiques, éd. J.‐R. Fanlo, Paris, Honoré Champion, 1995, t. I, p. 16.
saisi par un délateur, instruit le procès des Tragiques pour voir si le discours politique contenu dans le poème peut être qualifié de séditieux, autrement dit relever du crime de lèse‐majesté. La lecture répétée du texte précède l’examen des opinions du poète, sans que celui‐ci soit invité à éclairer le sens de tel ou tel passage de son œuvre, puisqu’aucun vers condamnable n’a pu en être extrait. Cependant, Promethée se permet de réintro‐ duire des citations poétiques, en l’occurrence un poème de Pibrac, pour prolonger le plaidoyer de son maître (« Pour vous en montrer son opinion plus au net, j’ay adjousté ici trois stances qui luy serviront de confession en ce qui est de la Royauté115… »).
J.‐R. Fanlo a montré dans son édition des Tragiques que cette anecdote était fort douteuse et que le poète l’avait probablement forgée a posteriori pour repousser les mises en cause qu’avait provoquées sa résistance aux propositions politiques d’Henri IV sur la répartition des pouvoirs entre catholiques et protestants à la fin des guerres de religion, une séquence politique bien postérieure à la période évoquée dans l’avis « Aux lecteurs »116. Tout en traitant le problème de datation de cette entrevue qui engage celui de la datation de l’œuvre, Fanlo fait remarquer que le manque d’inclination pour la poésie qui caractérise Henri IV d’après le témoignage des artistes de son entourage s’accommode mal avec la mention des multiples lectures de l’épopée que le Béarnais aurait faites117. Or, il est intéressant de voir, pour notre sujet, qu’Aubigné assume cette distorsion pour préserver le rôle de lecteur et juge ultimes associé à la figure royale. Si elle n’est pas cohérente avec le profil intellectuel d’Henri IV, l’anecdote semble cepen‐ dant conforme aux réalités judiciaires des poursuites engagées contre des livres de poésie hostiles au pouvoir royal. Le poète choisit de mettre en scène une confrontation judi‐ ciaire pour accroître l’autorité de la justification dont il accompagne son œuvre, utilisant la figure du juge pour peser sur le jugement des lecteurs qui découvrent son œuvre imprimée – construction d’autant plus efficace que le roi est à la fois juge et victime, offensé et réparateur, comme dans toute affaire de poésie anti‐monarchique. Cette scène de procès permet d’autoriser « la liberté [des] escrits » albinéens, de valider leur franc‐
115 Ibid., p. 17.
116 Ibid., t. II, p. 831‐835, en particulier p. 834 : « Le problème politique supposé par l’entrevue avec Henri de Navarre semble donc s’être posé assez tard, au plus tôt dans les années 1595‐1598. […] Agrippa d’Aubigné aurait donc imaginé cette scène pour répondre à des accusations tardives. […] il se prévaut de son intimité avec Henri de Navarre pour justifier politiquement une action qu’Henri IV pouvait tenir pour factieuse. Le roi en personne est pris pour caution dans la lutte contre le pouvoir monarchique. »
parler sur les sujets politiques et la peinture du pouvoir. La légitimité du poème et de son auteur apparaît renforcée par le fait qu’ils se sont au préalable soumis à un regard inquisiteur, qui les a trouvés exempts de tout reproche.
Une telle scène est donc toujours le produit d’une rhétorique défensive, qui s’exerce en son lieu de prédilection au seuil du poème. Mais on la retrouve également dans des récits d’actualité, où elle est davantage susceptible de traduire des discussions réelles. C’était le cas du récit déjà cité de l’interrogatoire du seigneur Desgais par Henri III qui figure dans le journal de L’Estoile, même si la fiabilité de ce témoignage reste dépendante d’une source qui ne nous est pas connue. C’est encore parmi les textes d’actualité du règne d’Henri III que l’on voit reparaître cette scène, racontée par l’auteur qui a subi l’interrogatoire, l’avocat parisien Louis Dorléans, connu pour son œuvre polémique au service des opinions de la Ligue118. La confrontation entre Dorléans et le roi a lieu en novembre 1588, quelques semaines avant l’assassinat des Guise, pendant les seconds États généraux de Blois ; Dorléans participe aux assemblées où s’élaborent les cahiers de doléances en tant que député du Tiers‐État. Il est convoqué par le roi à l’improviste pour répondre à deux griefs : le premier concerne sa participation à un projet de réforme fiscale qui contrarie le roi, et le deuxième concerne la portée politique d’un poème au ton menaçant que Dorléans a fait figurer en tête d’un de ses libelles, qu’il faut replacer dans son contexte si l’on veut prendre la mesure de l’interrogatoire qui le concerne.
Prônant la résistance acharnée contre les hérétiques et avivant les inquiétudes des catholiques face au rapprochement entre les deux Henri – Henri III et le chef du parti protestant Henri de Navarre –, le libelle a pour titre Advertissement des Catholiques
Anglois aux François Catholiques119, souvent cité dans les conversations de l’époque comme Le Catholique Anglois. La parution de ce texte donne un coup de fouet à la
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Sur cet auteur, voir C. Lenient, La Satire en France, ou la littérature militante au XVIe siècle, Paris,
Hachette, 1886, t. II, p. 87‐96. Sur sa production poétique, voir A.‐B. Rothenburger, « L’Églogue de la
Naissance de Jésus‐Christ par Louis Dorléans : datation et filiation poétiques », dans Le Poète et son
œuvre : de la composition àla publication, dir. J.‐E. Girot, Genève, Droz, 2004, p. 259‐273, en particulier
la première section « Louis Dorléans : champion ligueur et poète caméléon », p. 259‐261.
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Advertissement des Catholiques Anglois aux François Catholiques, du danger oùils sont de perdre leur
Religion, et d’experimenter, comme en Angleterre, la cruautédes Ministres s’ils reçoyvent àla Couronne
propagande de la Ligue, et son contenu est souvent repris par les prêtres militants dans leurs sermons engagés120, comme le rapporte Pierre de L’Estoile : Ce beau livre, intitulé Le Catholique Anglois, et imprimé à Paris en cest an 1586 (où le seul sonnet, mis au commencement dudit livre, est suffisant pour envoier son auteur au gibet, comme coupable et criminel du crime de leze Majesté), couroit à Paris, s’y voioit et lisoit avec grande ardeur et recommandation de ceux de la Ligue, pour estre extremement injurieux et seditieux contre le Roy de Navarre et tous ceux de son par‐ ti, de sa religion et de sa maison ; estant, au reste, bien fait pour une mesdisance, une mauvaise cause aiant rencontré un bon advocat, qui estoit Loïs d’Orleans, avocat au Parlement de Paris ; mais peu sage et advisé d’emploier sa rhetorique et son esprit à dénigrer de la maison et sang de France, et au bout faire imprimer son sot livre, pour acquérir bruict d’estre un veau121.
On voit qu’en rendant compte de l’influence des discours imprimés dans l’agitation polémique du Paris ligueur, le mémorialiste insiste sur le caractère diffama‐ toire de l’Advertissement122 ; réflexe de juriste (et de partisan de la légitimité monar‐ chique), il le qualifie d’emblée en termes judiciaires, extrayant même le sonnet liminaire comme la plus compromettante des preuves à charge – tout en reconnaissant par ailleurs, en termes esthétiques cette fois, l’éloquence qui se déploie dans le reste du livre. La diffamation répandue dans tout le libelle semble contenue à l’état condensé dans le poème d’ouverture, où l’auteur prend la France à partie pour lui ouvrir les yeux sur la déchéance dans laquelle les hérétiques l’entraînent ; le dernier tercet exploite le symbole de la fleur de lys qui figure sur l’étendard des successeurs de Clovis, en s’adressant toujours à la France personnifiée : « Ton lis s’en va mourir, l’en peux‐tu garentir ? / Il put au nez de Dieu comme une fleur impure, / Il l’a mis sous le pied pour ne le plus sentir. »
Or, L’Estoile n’est pas le seul à pointer du doigt ce sonnet liminaire. Un autre homme de loi qui publie des traités enflammés en soutien à la politique royale dénonce le symbole du lys fétide et foulé au pied exhibé par Dorléans : il s’agit du juriste toulou‐ sain Pierre de Belloy123 ; sa dénonciation du poème intervient dans un discours dirigé contre la Ligue, qui cherche à démontrer sur un ton virulent que l’action des militants catholiques radicaux, et en particulier les libelles qu’ils publient, sont passibles d’une
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Sur ce libelle et la place de l’audience de Louis Dorléans dans la stratégie politique d’Henri III durant les États, voir X. Le Person, « Practique »et « praticqueurs » : la vie politique àla fin du règne de Henri III (1584‐1589), préf. D. Crouzet, Genève, Droz, 2002, p. 550‐564, en particulier p. 553‐554.
121 Pierre de L’Estoile, Mémoires‐Journaux, op. cit., t. II, p. 392‐393.
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Sur la diffamation qui n’est finalement pas condamnée en justice dans cette affaire, voir T. Debbagi Baranova, Àcoups de libelles, op. cit., p. 306‐311, qui commente déjà le journal de L’Estoile.
123 Voir L. Gagné, La Pensée politique d’un juriste du XVIe siècle : Pierre de Belloy, mémoire de maitrise ès
condamnation pour crime de lèse‐majesté124. La qualification est la même que celle formulée par L’Estoile, mais le commentaire juridique de Belloy permet de comprendre que ce n’est pas seulement l’intention politique du poème qui mérite condamnation ; il soulève la question de savoir si, en termes de droit, il est possible de manipuler un symbole de la royauté sans mettre directement en jeu l’honneur personnel du prince. Autrement dit, est‐il possible de représenter le lys de la France piétiné sans attaquer le chef de « la maison de France » dont ce symbole est comme la signature ? Le juriste répond évidemment que non, en apostrophant l’auteur de l’Advertissement :
Mais quoy, Poëtastre perfide, ne sçais‐tu pas que quand ton Roy, ton Prince, ton Sei‐ gneur, se serviroit d’une fleur, d’une marque ou d’une enseigne beaucoup plus vul‐ gaire, que n’est la belle, pure, et odoriférante fleur de lys, et l’auroit prise pour ses armes, dés lors que les mesprises, les soüilles, les villanes, les corrompts, en parles, et en escripts autrement qu’avec l’honneur et reverence, qui est deue à sa propre per‐ sonne, tu es convaincu de leze Majesté, comme et de la mesme sorte, que si tu avois violé et mesprisé son image, son pourtrait et son effigie, au lieu desquels, les armes, les enseignes, et blasons Royaux ont esté surrogez125, par l’advis de noz Iuriscon‐ sultes126 ?
L’affrontement polémique amène naturellement à renverser le blâme ligueur en éloge monarchiste ; au lys impur et puant stigmatisé par Dorléans succède sous la plume de Belloy « la belle, pure, et odoriférante fleur de lys ». Mais qu’importe la connotation inscrite dans le symbole, l’important est de reconnaître qu’il n’est qu’un représentant juridique de la personne royale : les « blasons » tiennent lieu de portraits du roi127. La poésie se retrouve donc mise en cause comme le principal instrument du crime parce qu’elle fait et défait les symboles, qu’elle a un potentiel à la fois emblématique et iconoclaste : on la dénonce parce que c’est la pièce à conviction la plus visible dès lors qu’elle figure en tête du libelle comme une sorte d’emblème du projet polémique, et aussi parce qu’on lui reconnaît la capacité d’abîmer les images du pouvoir – de lacérer les portraits, de souiller les blasons.
124 De l’authorite du Roy, et crimes de leze majeste, qui se commettent par ligues, designation de
successeur, et libelles escrits contre la personne, et dignitédu prince, s. l., 1587, f. 54 r°‐56 v°.
125 « Surroger » ou « subroger » (ou encore « subroguer ») : « Terme de Pratique. Substituer, mettre en la place de quelqu’un » (Dictionnaire de l’Académie française, 1694).
126 De l’authorite du Roy, op. cit., f. 55 r°‐v°.
127 Le point de droit discuté ici peut rappeler la portée du geste d’adoption par la France de la loi du 18 mars 2003 sur la sécurité intérieure, qui étend le délit d’outrage à l’autorité de l’État en la personne de ses représentants, à commencer par le président de la République, pour intégrer l’outrage aux symboles impersonnels de la République, à commencer par le drapeau.
Ces mises en cause ne sont pas étrangères à la convocation de l’auteur du sonnet par le roi, le 25 novembre 1588. L’interrogatoire auquel elle donne lieu met en place un débat interprétatif qui porte sur le point de droit soulevé par Belloy – la question de la liberté de traitement des symboles de la royauté en poésie – et qui va mobiliser les outils du commentaire poétique. La scène est encore para‐judiciaire : même s’il ne s’agit pas d’un procès, le roi convoque le député pour mettre bon ordre à son comportement contestataire, et mesurer la portée criminelle de son poème. De cette entrevue, Dorléans a rédigé un compte‐rendu manuscrit au style peu soigné, qui semble écrit ou dicté à la hâte ; le texte s’intitule Relation d’un député de Paris aux États de Blois128, et s’ouvre sur l’arrivée au logis de l’auteur du maître d’hôtel du roi qui vient exprimer le mécontente‐ ment de son maître. Quand Dorléans est mené devant le roi, il commence par se justifier sur le sujet de la réforme fiscale, niant absolument y avoir participé. Mais le roi change de sujet : le Roy sçachant que ceste calomnie avoit peu d’apparence et que j’avoys trop de quoy me justiffier me dict que la Requeste ne le mouvoit sy fort comme ce que j’avois es‐ cript au Catholique angloys où j’avoys dict que le lis de la France s’en alloit mourir et qu’il puoit au nez de dieu comme une fleur impure pour ne le plus sentir. Qui [l’]estoient termes qui estoient excessifs et contre l’honneur de sa personne et de tout le Royaume129.
Si ces lignes ne font pas référence à la nature poétique du texte incriminé, les mots correspondent bien à ceux employés à la fin du sonnet placé en tête du libelle, à ceci près que le premier hémistiche du dernier vers a sauté à la rédaction, rendant la citation incohérente.
Dorléans se défend d’abord en invoquant les mauvaises interprétations dont son poème a fait l’objet.
Je luy dis lors que tout ainsy que nous estions en ung siecle meschant et miserable que plusieurs ayant leu l’escript de ce livre en avoient fort mal faict leur prouffict, d’aultant que quelques uns l’avoient attribué à la personne du prince duquel ils di‐ soient que j’avois prophetisé la mort, autres l’attribuoient à la France de laquelle ils disoient que j’avois publié le deshonneur, et que d’une part et d’autre j’estois tou‐ siours coulpable ; et […] que Belloy dans son livre de l’auctorité du prince en avoit faict un grand vacarme pretendant faulsement que j’avoys blasme la France130 […]. 128 B.N.F., ms. fr. 15534, f. 405 et suiv. Nous ignorons si le titre est de l’auteur ou de celui qui a constitué le recueil des pièces manuscrites, mais cette dernière option semble la plus probable. 129 Ibid., f. 407 v°. 130 Ibid.
Il lui faut ensuite combattre ces lectures, en défaisant le lien de référence entre le symbole du lys et la personne du roi :
quant à ceux qui disoient que je m’estois attaché à la personne du prince et que j’en avois profetisé la mort, je luy dis que je n’estois prophete ny enffans de propheste pour predire une chose sy secrette et du tout incongneue aux hommes comme est la mort d’un prince. Qu’il ny avoit que Dieu qui sceust ce secret et que je n’avois peu estre sy avant que d’en avoir leu l’arresté dans les registres. Au reste que parlant du lis de la France, je ne pouvois entendre de luy, veu que le lis de la France ne meurt jamais et que ce lis est comme le domayne et le propre de la France, laquelle ayant espousé un roy luy apporte ce lis et si tost qu’il est mort elle le reprend et le redonne à son successeur. Aussy que tous ceux qui ont parlé du liz, comme sainct Bernard sur les Canticques, l’attribuent plutost aux choses qu’aux personnes, estant le liz la beaulté, la splendeur et la vertu de ce royaume, et non la personne du prince131. Le plaidoyer de Louis Dorléans débute sur une observation de bon sens qui vise à apaiser l’inquiétude politique pesant sur la lecture des libelles, dans un pays éprouvé par près de vingt‐cinq années de guerres de religion : l’avocat rappelle que les écrits polé‐ miques ne peuvent pas être lus comme des prophéties funestes puisque les polémistes ne sauraient jouer les prophètes. L’avocat développe alors une défense plus complexe, entremêlant des considérations juridiques et mystiques dans sa définition du royaume de France dont on l’accuse d’avoir souhaité la perte. Il distingue d’abord le corps propre du roi et le corps politique du royaume : le premier est mortel tandis que le second est éternel comme le droit de propriété, le « domayne » (dominium) qui se transmet perpétuellement d’un possesseur à son héritier. L’imagerie des noces mystiques entre le roi et son royaume, suggérée par la métaphore du lys souvent associée à la virginité que l’épouse offre à son mari, permet de dire l’entrelacement du corps mortel et du corps