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I. Premier chapitre –transgression des interdits religieu

2. Respecter les règles de purification : les tabous religieu

BM 114470131 est un document inédit, provenant de la ville d’Uruk. Cette tablette

présente une clause associée à la transgression d’un tabou rituel : « hīṭu ša Gubarru išaddad ».

Cette sanction concerne Baniya, fils de Kidinnu, dans le cas où il aurait réitéré sa faute. En voici les détails : [u4]-mu li-li-si zabar ina é-an-na iš-šak-ka-nu ù Idù-ia a-šú šá Iki-di-ni me-e la iš-

tan-gu-ma il-ki la it-tal-ka hi-ṭu šá Igu-bar-ru i-šad-[dad] : Quand on installera le tambour-lilissu

en bronze dans l’Eanna, si Baniya, fils de Kidinnu, ne se purifie pas (lit. ne se baigne pas), et s’il ne vient pas faire son devoir (de culte), il devra encourir le châtiment de Gobryas.

Selon K. Kleber, ce document peut être associé à deux documents réédités par P.-A. Beaulieu et J. P. Britton (Boissier, RA 23 et YOS 7 71)132. On peut alors comprendre les trois

documents dans un même contexte rituel, à savoir, un rite entourant une éclipse. Le but de ce rituel était de conjurer les mauvais effets d’un phénomène céleste inquiétant qui était mis en liaison avec le roi et entraînait l’installation d’un roi substitut. L’un des plus anciens exemples se trouve dans la Chronique des anciens rois133:

l. 31-36. Idèr-ra-zà-dib lugal Iden-líl-dù lú nu-kiri

6 a-na nu níg-sag-gil-e ina gišgu-za-šú ú-še-zib

aga lugal-ti-šú ina sag-šú iš-ta-kan Idèr-ra-i-mit-ti ina é-gal-šú pap-pa-su im-me-tú ina sa-ra-

pi-šú im-tu-ut Iden-líl-dù šá ina gišgu-za ú-ši-bi ul it-bi a-na lugal-ú-ti it-taš-kan, Erra-imitti, le

roi, a installé Enlil-bani, le jardinier, en tant qu’image de remplacement sur le trône. Il a placé le tiara sur sa tête. Erra-imitti est mort dans son palais parce qu’il avait avalé de la soupe chaude. Enlil-bani, qui occupait le trône, ne l’a pas laissé tomber et a maintenu sa souveraineté.

Ce passage signale que le neuvième souverain de la Ier dynastie d’Isin, Erra-imitti

(1868-1861), mort prématurément en son palais après avoir avalé une ‘soupe’ trop chaude, eut pour successeur un simple jardinier, du nom d’Enlil-bani, qu’il venait de prendre pour image de remplacement, autrement dit, substitut royal, et qui, après sa mort, s’était bel et bien maintenu sur le trône134.

131 J’aimerais remercier, tout d’abord, K. Kleber pour sa gentillesse et m’avoir permis de lire son article à paraître

publiant ce document. Kleber 2017 : à paraître.

132 Beaulieu et Britton 1994 : 73-86. 133 Grayson 2000 : 155, l. 31-36. 134 Bottéro 1987 : 171.

43 Cette tradition persiste ensuite à l’époque néo-assyrienne135. Les lettres préservées dans

les archives royales signalent par conséquent l’importance de ce phénomène céleste pour le roi136.

Deux autres documents peuvent être mis en parallèle avec BM 114470. Ils proviennent des archives d’Uruk, tout comme BM 114470, cependant, dans l’article d’A. Boissier137, les

personnes mentionnées sont originaires, semble-t-il, de la ville de Larsa :

Boissier, RA 23

01. Iim-bi-ia lú gar-umuš unugki dumu-šú šá Idna-na-a-kám

02. dumu Iki-din-damar-utu Idnà-gin-ibila lú šà-tam é-an-na

03. dumu-šú šá Ina-di-nu dumu Ida-bi-bi Idnà-šeš-mu lú sag lugal

04. lú en pi-qit-tu4 é-an-na Išá-dnà-ţa-a-bi lú qí-i-pi

05. šá uru šá-la-mu Iìr-damar-utu dumu-šú šá Inumun-ia dumu šá <I>e-gi-bi

06. Iìr-den dumu Işil-la-a dumu Imu-dpap-sukkal Idnà-mu-gar-un

07. dumu-šú šá Idnà-dú-šeš Išeš-dù dumu Idutu-gin-ibila dumu-šú šá

08. Iddi-ku

5-šeš-me-mu dumu Iši-gu-ú-a Ila-a-ba-ši-damar-utu

09. dumu-šú šá Iìr-den dumu Ie-gi-bi Ina-di-nu dumu-šú šá Iden-šeš-meš-ba-šá

10. dumu Ie-gi-bi Idnà-numun-gi-na dumu-šú šá Idnà-ka-şir

11. dumu Iár-rab-tu Idutu-mu-si-sá dumu-šú šá Idnà-en-mu-me

12. dumu Id30-tab-ni

13. ukkin lú qí-pa-a-nu ù dumu-dù-i-me šá i-na ú-šu-uz-zi-šú-nu 14. Iki-din-damar-utu dumu-šú šá Idnà-mu-gi-na dumu Ie-ţi-ri

135 ABL 437.

136 Voir Parpola 1983 : xxii-xxxii. 137 Boissier 1926 : 13-14.

44 15. Iìr-dbu-ne-en dumu-šú šá Igi-mil-lu dumu Iku-du-ra-nu

16. ù Inà-dugud-dingir-meš dumu-šú šá Iina-qí-bi-den a Idú-eš-dingir

17. iq-bu-ú um-ma ina iti sig4 u4 13-kám mu 8-kám Iku-ra-áš

18. lugal tin-tirki lugal kur-kur egir ri-ib šá dutu lú gala-me

19. šá é-barbar-ra li-li-si zabar i-na ká gal-i

20. šá é-babbar-ra il-tak-nu iq-ta-bu-ú um-ma an-ta-lù 21. ù lú un-me šá ud-unugki gab-bi šá-ka-nu šá li-li-si zabar

22. it-ti i-ni i-ta-am-ru Iìr-damar-utu dub-sar

23. dumu-šú šá Idamar-utu-mu-mu dumu Iden-ibila-uri 3

24. unugki iti šu u

4 15-kám mu 8-kám

25. Iku-ra-áš lugal tin-tirki lugal kur-kur

01-13 : Imbiya, le gouverneur d’Uruk, fils de Nanaya-ēreš, fils de Kidin-Marduk, Nabû-kin- aplu, šatammu de l’Eanna, fils de Nādinu, descendant de Dabibi, Nabû-ah-iddin, officier royal, responsable de l’Eanna, Ša-Nabû-ṭabi, gouverneur de Šalamu, Arad-Marduk, fils de Zēriya, descendant d’Egibi, Arad-Bēl, fils de Ṣillaia, descendant d’Iddin-Papsukkal, Nabû-šum-iškun, fils de Nabû-bān-ahi, descendant d’Ahu-bani, Šamaš-kin-aplu, fils de Kidin-ahhē-iddin, descendant de Šigûa, Labaši-Marduk, fils d’Arad-Bēl, descendant d’Egibi, Nādinu, fils de Bēl- ahhē-iqīša, descendant d’Egibi, Nabû-zēr-ukīn, fils de Nabû-kaṣir, descendant d’Arrabtu, Šamaš-šum-līšir, fils de Nabû-bēl-šumati, descendant de Sîn-tabni, l’assemblée des qipanu138

et les notables mār banî en leur présence.

14-17 : Kidin-Marduk, fils de Nabû-šum-ukīn, descendant d’Eṭiri, Arad-Bunene, fils de Gimillu, descendant de Kuduranu, et Nabû-kabti-ilāni, fils d’Ina-qibi-Bēl, descendant d’Eppeš-ilī, ont déclaré :

138 Depuis l’époque de Nabonide, trois personnes décidaient des affaires concernant le temple : le qīpu, son adjoint,

et rēš šarri. Cet ensemble était nommé qipani. M. H. Dandamaev l’a traduit par « plénipotentiaires » dans Dandamaev 1979 : 590.

45 17-22 : « Le 13e jour du mois de Simānu de la 8e année du règne de Cyrus, roi de Babylone, roi

des pays, après le coucher du soleil, les prêtres-kalû de l’Ebabbar ont joué du tambour-lilissu en bronze devant la porte de l’Ebabbar et ils ont prononcé le mot suivant : “L’éclipse !” et tous les habitants de Larsa regardaient l’exécution du tambour avec nous. »

22-25 : Arad-Marduk, scribe, fils de Marduk-šum-iddin, descendant de Bēl-apla-uşur, Uruk, le 15e jour du mois de Dûzu de la 8e année du règne de Cyrus, roi de Babylone, roi des pays.

D’après le document Boissier RA 23, Kidin-Marduk, fils de Nabû-šum-ukīn, descendant d’Eţeru, Arad-Bunene, fils de Gimillu, descendant de Kudurranu et Nabû-kabti- ilāni, fils d’Ina-qībi-Bēl, descendant d’Eppeš-ilī se présentèrent devant les qīpāni, les administrateurs, composés de Imbiya, gouverneur d’Uruk, Nabû-mukīn-apli, šatammu de l’Eanna, Nabû-ah-iddin, officier royal, responsable de l’Eanna, Ša-Nabû-ṭabi, officier-qīpu de la ville de Šalamu139, et les mār banî (8 personnes). Ils déclarèrent en ces termes : «Au 13e jour

du mois de Simānu de la 8e année de règne de Cyrus, roi de Babylone, roi des pays, après le

coucher du soleil, les kalû de l’Ebabbar ont joué le tambour-lilissu en bronze devant la porte de l’Ebabbar et ils prononcèrent le mot suivant : “L’éclipse !”. Et tous les habitants de Larsa voyaient l’exécution de tambour-lilissu avec nous. »

Parmi ces trois personnes, Kidin-Marduk, fils de Nabû-šum-ukīn, descendant d’Eṭeru, Arad-Bunene, fils de Gimillu, descendant de Kudurranu et Nabû-kabti-ilāni, fils d’Ina-qībi-Bēl, descendant d’Eppeš-ilī, ce dernier étant attesté comme témoin dans un document économique provenant de Larsa140 ; son nom est également évoqué dans YOS 7 177141 (Camb 5/4/8). Selon

ce document établi à Uruk, il fut obligé d’aller à Babylone durant le mois de Dûzu pour se rendre devant Nabugu, fils ainé de Gobryas, avec deux autres personnes. Il est donc peut-être prématuré d’en déduire qu’il était originaire de la ville de Larsa. Il semble plus prudent de remarquer que ce personnage avait un lien avec les communautés des villes de Larsa et d’Uruk. Hormis ces quelques données sur cet homme, on dispose de peu de données sur les deux autres

139 Selon Zadok 1985 : 285, Boissier 1926 : 4 est la seule attestation de cette localité, sans que l’on puisse

déterminer pourquoi elle est mentionnée dans le document. Il est possible que cette ville était située dans le voisinage d’Uruk. R. Zadok l’a mentionnée en ces termes : près du cours d’eau Harri-Šalam ?

140 Voir notamment Beaulieu et Britton 1994 : 74, n. 4, sur la présence de Nabû-kidin-ilāni, fils d’Iqbi-Bēl,

descendant d’Eppeš-ilī dans YNER 1 5.

46 personnages142. Si l’on prend en compte la dépendance du temple de l’Ebabbar de Larsa vis-à-

vis du temple de l’Eanna d’Uruk143, on peut comprendre pourquoi des gens de Larsa sont

présents dans ce document. Ils sont sans doute amenés à répondre aux questions posées par l’autorité de l’Eanna, au sujet de la présence de ressortissants d’Uruk à Larsa, pour le rituel de l’éclipse. On constate souvent qu’une aide est demandée par les prêtres du temple de l’Ebabbar de Larsa, au temple de l’Eanna. De plus, on sait que certains prébendiers d’Uruk possédaient également des prébendes du temple de Larsa144.

Trois jours après la rédaction de Boissier, RA 23, un autre document, YOS 7 71, fut rédigé. Il s’agit certainement de la même affaire, parce que les trois kalû145 mentionnés furent

interrogés à propos du jeu du tambour-lilissu à la même date que Boissier, RA 23. Par contre, les autorités indiquées sont ici différentes. Il s’agit du gouverneur d’Uruk, de l’assemblée- qipanu et des mār banî. En dehors des mār banî, le gouverneur (šakin māti) est nommé par le roi, tandis que le fonctionnaire-qīpu peut être considéré comme les yeux et les oreilles du souverain en dehors de l’administration du temple. Cette composition démontre la nature et l’importance de cette affaire aux yeux du roi. Les trois kalû146 déclarèrent ceci devant les autorités : « Lorsque l’on a joué du tambour-lilissu en bronze devant la porte du temple de l’Eanna le 13e jour du mois de Simānu de la 8e année de règne de Cyrus, roi de Babylone, roi

des pays, nous ne nous sommes pas concertés avec Nabû-mukīn-apli, šatammu de l’Eanna, fils de Nādin, descendant de Dābibi, ni avec Nabû-ah-iddin, officier royal, responsable de l’Eanna à propos de l’utilisation du tambour-lilissu en bronze. Cependant, ils ne nous ont pas fait participer à cette affaire jusqu’à l’enlèvement du tambour-lilissu »147.

La différence de composition des autorités dans les deux documents n’était pas liée à l’étape de la procédure judiciaire, mais plutôt à la nature de l’interrogatoire. En effet, les

142 Beaulieu et Britton 1994 : 73-75. P .-A. Beaulieu et J. P. Britton ont ajouté une supposition à propos d’Arad-

Bunene. Ainsi, il s’agirait d’un nom théophore formé sur le dieu Bunene, le vizir des dieux Šamaš et Aya, les divinités principales de la ville de Larsa. Arad-Bunene serait alors un habitant de Larsa.

143 Beaulieu 1993 : 137.

144 Beaulieu 1991 : 81. Beaulieu 1993a : 137-152.

145 Les trois kalû mentionnés dans ce document sont originaires de la famille Sîn-leqe-unninni. Voir à ce sujet:

Beaulieu 2000 : 1-16.

146 Le prêtre kalû avait un rôle important dans les lamentations, parce que ce rite visait à calmer la colère divine.

Voir Löhnert 2011 : 402-417.

147 17-24. ina iti sig

4 u4 13-kám [m]u 8-kám Iku-ra-áš lugal tin-tirki lugal kur-kur ul-tu li-li-si ud-ka-bar i-na ká-

gal-i šá é-an-na ni-iš-ku-nu it-ti Idnà-gin-ibila lú šà-tam é-an-na dumu-šú šá Ina-di-nu dumu Ida-bi-bi ù Idnà-šeš-

mu lú sag lugal lú en pi-qit-tu4é-an-na a-na ugu šá-[ka-n]u šá li-li-si ul ni-im-me-lik ù a-di ugu si-[ma-nu] šá da-

47 autorités présentes dans YOS 7 71 posent des questions sur le comportement du šatammu et sur celui du responsable de l’Eanna148.

Les deux documents décrivent la situation avec l’idiome « lilissi zabar šakanu » (système IV ou forme de statif). Lorsque šakānu accompagne un nom d’instrument, il a le sens de « jouer »149. L’utilisation du tambour-lilissi en bronze dans un cadre religieux est bien

attestée depuis l’époque paléo-babylonienne jusqu’à l’époque hellénistique150. Son usage dans

divers contextes aurait pu poser des difficultés pour identifier la nature du rite dont il est question ici. Cependant, Boissier, RA 23 a apporté une piste importante pour la compréhension du texte, lorsqu’il est précisé que les kalû avaient parlé de « l’éclipse ! ».

Il est ainsi évident que l’expression « Quand on a joué du tambour-lilissu » désigne une partie du rituel lié à l’éclipse. On peut également appliquer cette hypothèse à la tablette BM 114470151.

En outre, concernant l’homme dénommé Baniya, quel était son métier ? La phrase suivante pourrait nous apporter une réponse : Idù-ia a-šú šá Iki-di-ni me-e la iš-tan-gu-ma, si

Bāniya, fils de Kidinnu ne se baigne pas (ramāku).

Baniya, fils de Kidinnu, participait certainement au rituel. En effet, l’une de ses fautes fut qu’il ne s’était pas purifié. La purification était un élément très important de la religion mésopotamienne. On trouve des exemples de l’utilisation du verbe « ramāku, se baigner » dans nombre de textes rituels152. Le bain était l’un des éléments principaux de nombreux rituels, car

il procurait une précaution générale pour rendre le culte destiné aux dieux et aux déesses153.

Ainsi, si l’on voulait devenir prébendier et exercer des fonctions lors des rituels, on était obligé de passer par le rituel gullubu de purification, pour avoir accès à la cour-kisallu. Autrement dit, le propriétaire d’une telle prébende ne pouvait pas automatiquement exercer ses fonctions154, mais devait passer par de nombreuses étapes avant d’être admis parmi les initiés.

148 Beaulieu et Britton 1994 : 77. 149 CAD L : 187a.

150 Linssen 2002 : 92-94.

151 Boissier 1926 : 13-14, YOS 7 71 et Kleber 2017, n. 5, ont été rédigés dans le même contexte, parce que ce

dernier fut établi le 22e jour du même mois et de la même année que YOS 7 71. D’autre part, une éclipse est un

phénomène rare, ce qui renforce le lien entre les deux documents.

152 CAD R, ramāku : 112-113.

153 Sur la consécration des prêtres, voir Waerzeggers, avec une contribution de Jursa, 2008 : 1-35, et Kleber 2017 :

à paraître.

154 Voici l’explication donnée par S. Démare-Lafont (Démare-Lafont 2010 : 7) : « Par le jeu du droit des

48 La première condition était, bien sûr, de détenir la prébende pour laquelle il posait sa candidature. La deuxième était d’être issue d’une lignée paternelle légitime. La lignée de la mère était importante également, la lignée paternelle s’avère prépondérante. Le postulant devait aussi se comporter correctement dans la société, ce qui relève d’un concept lié à la pureté morale155. Une « perfection » physique156 était également requise et examinée par des experts

au début du processus157. Après être passé par toutes ces étapes, il pouvait être admis prébendier

par décision royale.

Le concept de pureté ne s’applique pas seulement au moment de la sélection des initiés. Il s’appliquait à toutes choses, y compris à l’architecture du temple par exemple. Plus précisément, on compte trois aires géographiques dans les sanctuaires, chacune en rapport avec les différents types de prêtres. La première aire se situe au plus profond des bâtiments du temple, là où l’on trouvait l’image du dieu ou de la déesse principale, dans une chambre dans laquelle on ne pouvait pénétrer que depuis une antichambre et un couloir masqués d’un rideau (on appelle aussi cet espace la cella ou le Saint des Saints). Seules les personnes admises à pénétrer dans le temple, les ērib bīti, pouvaient accéder à cet espace. La deuxième aire était constituée de la cour (kisallu) du temple158. C’était là que tous les fournisseurs de nourriture pour les repas

du dieu et de la déesse159 se réunissaient. Le dernier espace concerné était un lieu situé entre la

porte de la cour et le mur de temple. Le visiteur pouvait y trouver de petites rues, des places et

mêmes, parce que les tranches de service sont trop petites (une participation effective aux offrandes serait alors incohérents), ou encore parce que les titulaires ne peuvent techniquement assurer les tâches pour lesquelles ils reçoivent une rétribution (par exemple pour ceux qui fabriquent la bière ou qui pressent l’huile, activités qui nécessitent des compétences spécifiques), ou enfin pour des raisons d’incapacité. Celle-ci peut être liée à l’âge et, dans ce cas, c’est en général un parent qui exerce la fonction et en perçoit les revenus à la place du mineur, sans en avoir pour autant la propriété. Il existe également des incapacités liées au sexe : il arrive en effet assez souvent que des femmes soient titulaires d’une prébende, qu’elles ont achetée ou reçue en dot ou à titre héréditaire. Or, le corps des prébendiers est essentiellement masculin. »

155 Selon AnOr 8 48 : les personnes admises dans les temples, les surveillants, les brasseurs, les boulangers, les

sacrificateurs, les Babyloniens et les Urukéens, le collège de l’Eanna, déclarèrent au šatammu et à l’officier royal, le responsable de l’Eanna, que les parentés du candidat étaient correctes et qu’il n’avait pas de dossier (criminel ?).

156 Quels étaient les critères pour être apte physiquement aux yeux des experts ? Il existe un document de

divination (Lambert 1994 : 141-158.) qui explique quelles étaient qualifications nécessaires pour être un devin : « Le devin dont l’ancêtre n’est pas vénérable, qui n’est pas parfait pour ce qui est du corps et des membres, qui est atteint de strabisme et dont les dents sont abimées, avec un doigt coupé, dont un testicule présente une déchirure [?], souffrant de la lèpre, un […], un […], un être non arrivé à maturité, qui n’observe pas les rites de Šamaš et d’Adad, celui-là ne peut approcher du lieu où se tiennent Ea, Šamaš, Asalluhi et Bêlet-sêri, la tenancière des libres du ciel et de la terre inférieure, l’aimée de ses frères, pour un jugement divinatoire…» Les critères utilisés pour l’initié étaient très certainement les mêmes.

157 Waerzeggers, avec une contribution de Jursa, 2008 : 1-35.

158 Le possesseur de prébende devait être initié pour se rentre dans ce lieu particulier.

159 La liste de violation-māmītu, dans le document Šurpu, témoigne de l’importance de la notion de pureté (III,

49 les réserves des prêtres bâties côte à côte. De la même façon que les différents espaces étaient « classés », l’accessibilité des entrées de chaque zone était également distinguée. Un des paramètres de cette accessibilité était le degré de pureté. On demandait, en effet, une propreté minimale, même aux simples visiteurs qui n’avaient accès qu’à la troisième zone ; on parle ici d’une propreté d’ordre général : être lavé et habillé d’un vêtement propre160.

On comprendra alors que l’importance donnée à la purification ne se limitât pas seulement au moment de l’entrée au sein du groupe de l’initié : les prébendiers étaient régulièrement menacés de condamnation à cause de la pollution existant dans la vie quotidienne161. Pour répondre à cette menace, on constate l’activité régulière de barbiers pour

ce qui était de « l’art de l’établissement de la bonne tenue (ša-banûtu) »162 destinés aux

prébendiers à côté de « l’art du rasoir (gullubu) »163.

Cette obligation de pureté est attestée sous la forme d’un tabou dans la tablette 94 de la série de šumma alu164. Elle figure parmi certains tabous à respecter lorsque les prêtres entrent

dans le temple.

Si quelqu’un, lorsqu’il entre dans le temple de son dieu, a mâché du tamaris : il est pur.

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