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II L’impuissance de l’accord de « stand-still »

2. La réaction du gouvernement allemand

Le gouvernement allemand réagit immédiatement. Dans une note datée du 21 septembre 1963, il explique longuement, preuve à l’appui, son point de vue et s’oppose à l’idée présentée par la Commission. Il estime que ses modifications des taxes compensatoires ou ristournes ont pour but de compenser, conformément aux dispositions des articles 95 et suivants du Traité, la charge fiscale interne tant à l’importation qu’à l’exportation. De ce point de vue, il essaie de justifier ses modifications des taux en soulignant la « situation particulière des secteurs industriels77 ».

Le 8 octobre 1963, la DG IV présente leurs critiques vis-à-vis de la prise de position de la RFA78.

« Les arguments théoriques étayant la thèse de la Commission ayant été présentés à plusieurs reprises lors des réunions avec les experts

75 Idem, Note précitée à l’attention du directeur général de la direction générale II, datée du 27 mars

1963.

76 CECA, B-59782, Modification des taux des taxes compensatoires allemandes, signée par le

représentant permanent de la France auprès de la CEE, signé par Boegner, datée du 14 juin 1963.

77 AHCE, BAC 5/1966 12, Avis du gouvernement fédéral concernant l’interpretation de l’accord

conclu le 21 juin 1960 par les représentatns des gouvernement des États membres réunis au sein du Conseil au sujet des mesures dans le domaine des taxes compensatoires sur le chiffre d’affaires et des ristournes, daté du 21 septembre 1963.

78 Idem, Note, déclaration présentée au comité des représentatns permanents par le directeur général

M. Verloren van Themaat et relative à l’avis du gouvernement fédéral concernant l’interprétation de la décision du 21 juin 1960 au sujet des mesures dans le domaine des taxes compensatoires à l’importation et des ristournes à l’exportation, le Conseil, datée 8 octobre 1963.

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sans convaincre la délégation allemande, il est peu vraisemblable qu’ils puissent y prévenir maintenant. C’est pourquoi je m’abstiens de les répéter une fois encore de façon approfondie. Je me contente de dire qu’à notre regret nous ne trouvons pas dans le mémorandum allemand des arguments suffisants pour nous amener à abandonner notre point de vue. L’argumentation allemande est en soi cohérente et logique, mais seulement, parce qu’elle néglige un des objectifs de l’accord de 1960, à savoir le maintien de l’équilibre existant, en se basant presque uniquement sur l’autre aspect de la discussion, l’aspect de la neutralité fiscale, interprétée dans le sens étroit des articles 95 et suivants. Quant à l’aspect politique et psychologique, semblables dans les autres États membres se trouvant dans des difficultés pareilles considèreront injustifié et contraire à l’esprit du Marché Commun le fait qu’un État membre puisse prendre des mesures de protection qui ne sont pas possibles dans leur propre pays et qui aggraveront encore, le cas échéant, leurs propres difficultés79».

Selon l’avis de la Commission, « des modifications de taxes compensatoires et des ristournes devraient le plus possible être évités80 ». Elle conclue donc qu’il n’y a pas lieu de modifier les taux des taxes compensatoires de la RFA maintenant. La DG IV propose une procédure assez longue pour la RFA : d’abord, la Commission doit poursuivre l’examen du problème dans le cadre de la procédure prévue par l’article 101 du Traité. Ensuite, la Commission et la RFA cherchent un compromis dans le cadre de la procédure de la consultation préalable selon l’accord de 1960. La Commission demande enfin à la RFA de ne pas effectuer la modification des taux compensatoires avant que l’examen réalisé par la Commission ne soit terminé.

Pieter Verloren van Themaat présente cette procédure dans le cas où le Conseil ne pourrait pas se mettre d’accord sur l’interprétation de la décision du 21 juin 1960. Il essaie ainsi de montrer la supériorité des intérêts communautaires à la politique individuelle des États membres.

Ainsi, la Commission prend de plus en plus le dessus vis-à-vis des politiques mises en œuvre par les États membres. Pour le gouvernement français, pourtant, ce « compromis » de la Commission comporte « des inconvénients qui ne sont pas

79 Idem. 80 Idem.

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compensées par des avantages correspondants81 ». Sa suggestion présente « par rapport à la décision du 21 juin 1960, un affaiblissement très net du contenu des règles que les gouvernements avaient adoptées82 » et « n’apporte en soi, compte tenu de la situation, aucun élément qui soit particulièrement intéressant de notre point de vue83 ». De ce point de vue, le gouvernement français demande auprès de la Commission et du Conseil « une politique commune que vers l’exégèse d’un texte contestable, ou, au moins, contesté84 » qui comporte l’« harmonisation des taxes sur le chiffre d’affaires85».

En fin de compte, le gouvernement allemand ignore les interventions de la Commission étant donné que les « délais prévus par l’accord de stand-still est expirés86 ». Juridiquement, en ce qui concerne la proposition de la part de la Commission au gouvernement allemand, elle n’intervient pas dans les Parlements des États membres. La Commission s’efforce donc d’en freiner les abus : en définitive, elle décide de s’attaquer aux « racines du mal » en supprimant les taxes à cascade, comme souhaite le gouvernement français87.

* * *

Les problèmes sur le réajustement des taxes aux frontières se posent depuis l’entre-guerre dans un contexte de développement du libre-échange. La réglementation au niveau international est mise en place dans le cadre du GATT au cours des années 1950 mais pour ce qui est des détails comme les taux ou les moyens de calcul, ils sont normalement stipulés dans le traité bilatéral mis en place entre les deux pays. La tentative d’un accord de « stand-still » vise en quelque sorte à stipuler une règle commune multinationale parmi les Six. Comme nous venons de le voir, il est pourtant difficile d’arriver à un consensus sur ce sujet.

Il est possible que la négociation qui se déroule, depuis la mise en place du Traité, au travers de la Commission, qui n’existait pas jusqu’alors, atténue quelque peu la tension

81 CAEF, B-59782, Projet de message pour M. Boegner, taxes de compensation allemandes –

interprétation de la décision des 20 et 21 juin 1960, préparé par SGCI, daté du 18 octobre 1963, p. 1.

82 Ibid. 83 Idem, p. 4. 84 Idem, p. 5.

85 Idem, p. 5. Voir aussi CAEF, B-59782, taxes compensatoires allemandes, télex du représentant

permanents au SGCI, daté du 30 octobre 1963.

86 CAEF, B-59782, Télex : Session des conseils des 4-5 novembre 1963. Modification des taux des

taxes compensatoires et des ristournes, préparé par Boegner, envoyé au SGCI, daté du 5 novembre 1963.

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politique entre les États membres. Mais, ils tiennent, naturellement, à garder leur liberté fiscale dans ce domaine. Il est donc tout à fait normal que, même après l’accord de « stand-still », la Commission ne puisse pas se mêler des décisions des États membres.

Or, on ne peut pourtant pas laisser ce problème de côté puisque les questions sur le réajustement des taxes aux frontières intéressent le libre-échange, base d’un Marché Commun. C’est la raison pour laquelle plus les États membres se heurtent à cette question, plus la Commission pense que les Six ont besoin d’harmoniser le système de taxes sur le chiffre d’affaire

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