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Premier échange au sujet de la meilleure taxe sur le chiffre d’affaires

III Le fossé entre la Commission et les États membres

B. La prémière réunion du Groupe de Travail N°

4. Premier échange au sujet de la meilleure taxe sur le chiffre d’affaires

Alors qu’il n’y a pas, entre les États membres, d’accord en vue d’une harmonisation des taxes sur le chiffre d’affaires ou de la suppression du système en cascade, ceux-ci échangent leurs points de vue concernant les trois systèmes de taxes sur le chiffre d’affaires proposés par la Commission à la fin de la première réunion du Groupe de travail N° 1. Cet échange de vues montre bien qu’au début de la discussion autour de l’harmonisation des taxes sur le chiffre d’affaires, la création d’un système commun de la TVA qui verra le jour en 1967 n’est pas évidente. La TVA n’est qu’un des systèmes à envisager.

Comme nous avons pu le constater précédemment, la Commission propose trois taxes sur le chiffre d’affaires : il s’agit de la taxation uniquement au stade de la

145 ANF, 19930275/41, Le rôle des mécanismes financiers et fiscaux dans l’expansion, travaux de la

Commission de Fiscalité du Plan, p. 110.

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commercialisation ; la taxe commune perçue au stade de la production combinée avec une taxe autonome perçue au stade de la commercialisation ; une taxe sur la valeur ajoutée.

En ce qui concerne la taxation uniquement au stade de la commercialisation, elle est classée en trois types : la taxe unique perçue au stade du commerce de détail ; la taxe unique générale perçue au stade antérieur à celui du commerce de détail ; la taxe perçue au dernier stade de la production (Tableau 3).

Tableau 3 Les systèmes de taxe sur le chiffre d’affaires proposés par la Commission et les évaluations du Groupe de Travail I

Systèmes de taxe sur le chiffre d’affaires Évaluation

Taxation uniquement au stade de la commercialisation

Taxe unique perçue au stade du

commerce de détail ×

Taxe unique générale perçue au stade

antérieur à celui du commerce de détail △ Taxe perçue au dernier stade de la

production △

Taxe commune perçue au stade de la production

combinée avec une taxe autonome perçue au

stade de la commercialisation

Une taxe sur la valeur

ajoutée △

Or, la taxe unique perçue au stade du commerce de détail est tout de suite écartée. Les délégations des États membres partagent l’avis que cette taxe présente de grandes difficultés techniques. Selon la délégation française, alors que « le nombre considérable des assujettis » demande beaucoup de travail à l’administration, « le poids total d’impôts sur les détaillants qui sont souvent des petits commerçants 147» n’apporte pas de revenu fiscal important. En effet, la France a déjà essayé d’introduire l’imposition de la taxe sur le chiffre d’affaires jusqu’à ce stade lors du passage au système de la TVA en 1954 et cette réforme a échoué face à l’opposition des détaillants. Les autres délégations se rangent aux objections de la délégation française.

147 ANF, 19900580/53, procès-verbal précité de la première réunion du Groupe de Travail N° 1, daté

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Quant aux autres systèmes fiscaux, les délégations des États membres se réservent la décision. Concernant la taxe unique générale perçue au stade antérieur à celui du commerce de détail et la taxe au dernier stade de la production, les délégations sont d’accord pour effectuer une étude plus approfondie.

Pour la deuxième proposition, il s’agit de la taxe commune perçue au stade de la production combinée avec une taxe autonome perçue au stade de la commercialisation, une uniformisation des taux et des exonérations en ce qui concerne la taxe à la production est particulièrement mise en question. Puisque les producteurs sont moins nombreux que les commerçants, il faut fixer un taux commun assez élevé pour couvrir les premiers besoins budgétaires. Toutes les délégations s’opposent à la fixation d’un taux élevé qui est suceptible de provoquer l’opposition politique. La délégation française émet surtout des réserves sur cette hypothèse car « si on fixait des taux communs assez élevés sur le stade de la production, la souveraineté fiscale, en fonction des besoins budgétaires, serait trop réduite sur le stade de la commercialisation148 ». Pour la France, il est important de garder la marge du maniement des taux des taxes sur le chiffre d’affaires au stade antérieur de la production. Pieter verLoren Van Themaat conclut que cette hypothèse mérite également une étude plus approfondie.

Concernant le système commun de la TVA, la troisième taxe, les délégations néerlandaise et italienne écartent tout de suite cette idée149. Mais le débat intéressant se déroule entre la RFA et la France autour de sa définition. La délégation française définit la TVA comme étant une taxe unique générale dont le paiement est fractionné en paiements partiels effectués à chacun des stades du processus de la production et sur la base de la « valeur ajoutée » du produit à ce stade. Selon sa définition, la TVA n’impose pas les biens d’investissement et respecte la neutralité fiscale.

Cependant, pour la RFA, la TVA française est une aide pour les grandes entreprises et elle ne respecte pas la neutralité fiscale :

« La déduction des investissements telle qu’elle est actuellement pratiquée en France en une seule fois, pour la totalité, est susceptible de fausser en définitive la valeur ajoutée imposable. La déduction sous cette forme a pour conséquence d’aider les grandes entreprises, de provoquer des inconvénients dans le domaine conjoncturel et pourrait en plus être peu compatible avec les principes du GATT et du Traité de Rome en détaxant totalement en une seule fois un moyen de production

148 Idem, p. 14. 149 Idem, p. 17.

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alors que sa valeur ne se retrouve pas encore incorporée dans les prix des produits fabriqués. […] La délégation allemande estime que le système actuel de la TVA avec la déduction totale en une seule fois des investissements n’assure pas la neutralité sur le plan de la concurrence150».

La délégation française admet que « le système de la TVA est scientifiquement le meilleur mais que pratiquement les petites entreprises peuvent rencontrer certaines difficultés d’application151 » en insistant sur le fait que le système français a surtout pour but d’éliminer certains inconvénients comme les doubles impositions. Elle rejette donc l’accusation d’avoir enfreint les prescriptions du GATT ou du Traité de Rome car il n’est pas interdit d’accorder des exonérations152.

Les Pays-Bas et l’Italie n’approuvent pas le système commun de la TVA. Les Pays-Bas craignent, par exemple, qu’ils soient obligés de supprimer de nombreux taux et de nombreuses exonérations de leur taxe sur le chiffre d’affaires après l’introduction du système de la TVA. Ils souhaitent garder la diversité dans le taux et les exonérations des taxes indirectes qui sont fixés par leur gouvernement pour effectuer sa propre politique.

Au cours de la première réunion du GT 1, les États membres ne peuvent pas parvenir à trouver un accord. En définitive, il est convenu de reporter la décision sur une priorité éventuelle des études à entreprendre à la prochaine réunion. Cependant, il va sans dire que cette réunion offre une bonne occasion pour déterminer et partager les différentes positions nationales. Les véritables études pour l’harmonisation des taxes sur le chiffre d’affaires sont ainsi amorcées.

* * *

L’harmonisation des taxes sur le chiffre d’affaires dans les Six est amorcée par l’initiative de la Commission. Étant donné que sa compétence attribuée par le Traité de Rome concernant les problèmes fiscaux est relativement restreinte, elle a besoin de l’élargir afin d’assumer ses tâches concernant les taxes compensatoires à l’importation et les ristournes à l’exportation. C’est dans ce contexte que la Commission propose, pour la première fois, l’harmonisation des taxes sur le chiffre d’affaires. Cependant, bien évidemment, les États membres ne partagent pas ce souhait de la Commission : ils

150 Idem, p. 16. 151 Idem. 152 Idem.

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refusent, à un degré et à un autre, d’harmoniser leurs systèmes de taxe sur le chiffre d’affaires. La divergence dans l’attitude des États membres vis-à-vis de la proposition de la Commission est due à sa propre situation économique et politique ainsi qu’à ses systèmes fiscaux.

Or, dès le départ, les fonctionnaires de Bruxelles envisagent la possibilité de l’introduction de la TVA commune mais cette taxe n’est pas la seule. En plus de la TVA, ils considèrent les taxes sur le chiffre d’affaires qui n’ont pas de caractère cumulatif, comme les taxes à une seule étape. Il y a donc une forte tendance à choisir la taxe sur la vente de gros comme système commun.

Dans tous les cas, à propos de l’harmonisation des taxes sur le chiffre d’affaires, durant l’année 1959, aucune politique concrète n’est décidée. Pourtant, une base importante s’est déjà mise en place : les administrateurs fiscaux commencent à échanger des avis et il se développe des relations entre les États membres et entre les gouvernements et la Commiss

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