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D ES QUESTIONS CONCERNANT L ’ ÉTHIQUE DES DONNÉES

TECHNODISCURSIF DE F ACEBOOK )

6.4 D ES QUESTIONS CONCERNANT L ’ ÉTHIQUE DES DONNÉES

La question de l’éthique est moins délicate dans les recherches quantitatives que qualitatives dans la mesure où cette dernière s’intéresse plus à la sphère privée des participants comme leurs perceptions et leurs relations, etc. Aujourd’hui cette question est devenue de plus en plus récurrente avec l’émergence d’Internet. Le caractère public d’un grand nombre des espaces numériques (forums, blogues, réseaux socionumériques) rend cette question encore plus problématique. Nous nous demandons: est-ce que le contenu publié sur FB est public ou privé? On peut lire sur Internet plusieurs témoignages de salariés qui ont été licenciés après avoir critiqué leur patron ou posté sur leurs profils personnels des photos de vacances pendant leur congé maladie. Certaines affaires ont été portées devant les tribunaux en France qui ont considéré Facebook comme un espace public28 et qui ont donc validé la

décision de licenciement. Selon Marcoccia (2016), le chercheur peut se baser sur la distinction public-privé surtout que depuis 2000 la loi en France considère les services de communication en ligne autres que les correspondances privées comme le courrier élecrtonqiue ou le SMS

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Référence : https://www.cadremploi.fr/editorial/conseils/droit-du-travail/detail/article/facebook-les-statuts- qui-les-ont-fait-virer-ou-pas.html

170 comme des services de communication audiovisuelle et publique (ibid.). Toujours selon Marcoccia, deux solutions s’offrent au chercheur : soit il considère les échanges comme étant d’ordre privé, dans ce cas il doit donc anonymiser tous les éléments qui pourraient identifier les personnes, soit il considère les échanges comme d’ordre public et il faut donc que le chercheur précise cette fois-ci les auteurs des messages afin de respecter la propriété intellectuelle.

Lors des entretiens, nous avons pu demander l’autorisation des interviewés d’exploiter les données enregistrées. En revanche, cela aurait été beaucoup plus difficile en ce qui concerne le corpus de messages. À qui demander la permission d'utiliser les échanges s’étant déroulés dans le Groupe FB ? À Facebook même ? À l'administrateur du Groupe ? Aux membres du Groupe ? Si, sur l'ensemble du Groupe, une personne refuse, devons-nous renoncer à l'analyse ? Ou devons-nous éliminer de l'analyse les publications émises par les membres n'ayant pas donné leur accord ce qui peut créer des incohérences dans l’ensemble des échanges ?

En tout état de cause la règle générale de l’éthique de la recherche consiste à protéger les participants contre tout risque de danger ou d’embarras en dévoilant des données personnelles ou intimes. Nous considérons que les données présentées dans notre corpus ne sont pas des données intimes dans le sens où les échanges que nous analyserons portent sur des thématiques générales et ne traitent pas des problèmes personnels ou des problèmes de couple par exemple. Malgré tout, nous avons choisi d’anonymiser les échanges pour que les participants impliqués ne courent aucun risque. Cependant, comme nous l’avons déjà expliqué dans l’introduction, à cause de l’énorme travail que demande l’anonymisation, deux versions de la thèse seront présentées. Une version à l’attention du jury qui ne sera pas anonymisée, et une autre version allégée en vue d’une diffusion ultérieure sur Internt où toute indication des personnes sera supprimée ou anonymisée. En ce qui concerne le corpus, il ne sera accessible qu’au jury de la thèse et ne sera pas diffusé par la suite sur Internet. Aussi, pour respecter la politique de confidentialité de FB, nous n’exploitons que les données aspirées par NodeXL autorisées par l'interface de programmation (API) de FB29. Même si certaines données sont

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« En informatique, une interface de programmation applicative (souvent désignée par le terme API pour

171 accessibles à travers le Groupe même et à travers les profils des participants, comme les informations personnelles (sexe, age, etc) , nous nous abstenons de les exploiter.

6.5 S

YNTHÈSE

Nous avons abordé dans ce chapitre la méthodologie que nous avons suivie pour la collecte et l’analyse des données. Nous avons montré que notre méthode est essentiellement qualitative couplée des éléments chiffrés. Il est utile de rappeler également que la thèse est d’inspiration ethnographique dans le sens où nous avons adopté une démarche inductive qui vise l’observation des pratiques communicationnelles dans leur milieu naturel.

Nous avons présenté les deux types de données recueillies ainsi que les objectifs et les méthodes d’analyse. Le tableau ci-dessous présente un récapitulatif des données :

Question de recherche les données Type d’analyse

Comment des apprenants réunis dans un Groupe FB utilisent-ils cet espace informel pour pratiquer le français ? Quelles sont les pratiques discursives observées ? Quelles sont les caractéristiques saillantes de leurs échanges ?

corpus d’échanges en ligne analyse sémiolinguistique- analyse quantitative

Comment la dimension relationnelle se manifeste- elle dans cet environnement numérique ? Les pratiques discursives observées

permettent-elles aux apprenants de constituer une communauté virtuelle ? Si oui, de quel type de communauté s’agit-il et quelle est son organisation ?

Corpus d’échanges de ligne + entretiens semi-directifs

analyse quantitative de réseau social - analyse qualitative

sert de façade par laquelle un logiciel offre des services à d'autres logiciels »(Wikipédia, article Interface de programmation).

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Quelle sont les perceptions des participants vis-à-vis de Facebook en général et du Groupe en particulier ? Et qu’est-ce qu’ils disent à propos de leurs activités ?

Entretiens semi-directifs Analyse thématique de contenu

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Conclusion de la deuxième partie

Nous avons réuni dans cette partie deux chapitres : le chapitre 5 portant sur la contextualisation et le chapitre 6 portant sur la méthodologie de recherche suivie. En ce qui concerne la contextualisation, elle concerne aussi bien l’aspect sociopolitique que technologique. Quant aux aspects sociopolitiques, nous avons exposé la situation actuelle du pays qui souffre encore de l’instabilité au niveau politique et éducatif avec de lourdes conséquences sur le parcours des apprenants. Nous avons également présenté une description du réseau socionumérique FB. Et pour finir avec la contextualisation, nous avons dégagé des entretiens réalisés avec des particiapants leurs pratiques et habitudes numériques vis-à-vis de Facebook. Nous avons constaté à travers cette analyse que FB fait partie des pratiques de l’appropriation informelle du français. Cependant, cette logique d’usage ne correspond pas à sa logique de conception (Perriault, 1989) puisque FB était conçu comme espace de socialisation. La sociologie des usages met en évidence que les artefacts techniques font souvent l’objet d’un « détournement » et qu’ils sont utilisés à des finalités autres que celles prévues par les concepteurs. Autrement dit, l’artefact évolue en même temps que l’usager. Ce double processus Rabardel (op.cit.) le désigne par l’expression « genèse instrumentale ».

Dans le chapitre 6, nous avons précisé nos choix méthodologiques concernant le type de recherche et la méthodologie d’analyse des données. Nous avons montré que nos analyses sont essentiellement qualitatives mais nous avons eu recours également à des procédés quantitatifs pour décrire les échanges. Nous avons privilégié dans notre travail une démarche ethnographique qui se base sur la description des pratiques effectives, la compréhension des phénomènes et l’interprétation des actions humaines. Cette démarche est donc empirique, naturaliste, interprétatitve et générative (Cambra Giné, op.cit.) Nous avons également abordé les critères de qualité pour une recherche dans le domaine de l’ALAO que nous avons essayé, dans la mesure de possible, de les appliquer.

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Introduction à la troisième partie

Après avoir présenté le cadre théorique et contextuel de la thèse, nous exposerons à présent les analyses et les résultats qui en ont découlés. Nous rappelons que l’objectif de ce travail est de comprendre ce qui se passe dans un espace informel de pratique de la langue. Nous cherchons également à examiner dans quelle mesure ces pratiques contribuent à l'émergence d'une communauté en ligne en nous appuyant sur les différents éléments théoriques et méthodologiques déjà énoncés dans les deux premières parties. Dans une démarche compréhensive, nous nous demandons également quelle est l’expérience vécue par les différents participants : quelles sont leurs perceptions ? Que disent-ils sur leurs pratiques ?

La présente partie s’articule donc autour de trois chapitres. Dans chaque chapitre nous tenterons de répondre à une des questions de recherche. La première question à laquelle nous apporterons des éléments de réponse est : comment des apprenants réunis dans un Groupe informel de FB utilisent-ils cet espace pour pratiquer le français ? Quelles sont les pratiques discursives observées ? Et quelles sont les caractéristiques saillantes de leurs échanges ? Pour répondre à cette question, nous aurons recours à une description assez générale de plusieurs aspects des échanges. L’intérêt scientifique de la description du corpus en ligne a déjà été souligné par Mondada

Internet est un immense réservoir de corpus discursifs pouvant renseigner sur les usages contemporains des langues et des formes communicatives, pouvant faire l'objet d'analyses et de descriptions, aussi bien que de sensibilisation à l'hétérogénéité des genres et des registres, au changement linguistique, aux rapports à la norme, à l'usage international de variétés d'anglais langue seconde. (1999, p. 5)

La deuxième question que nous abordons dans le chapitre 8 est : comment la dimension relationnelle se manifeste-elle dans cet environnement numérique ? Les pratiques discursives observées permettent-elles aux apprenants de constituer une communauté virtuelle ? Si oui, de quel type de communauté s’agit-il et quelle est son organisation ? Nous étudierons trois aspects de la construction de la communauté virtuelle. En premier lieu, nous dégagerons des indicateurs permettant d’identifier l’existence d’une CoV (voir 4.2). En deuxième lieu, nous analyserons le cycle de vie de la communauté (voir 4.6) et en dernier lieu nous nous pencherons sur son organisation sociale.

178 Quant au chapitre 9, nous réponderons à la troisième question : quelles sont les perceptions des participants vis-à-vis de Facebook et du Groupe ? Qu’est-ce qu’ils pensent de leur expérience ? Et comment décrivent-ils leurs activités dans le Groupe ? Nous analyserons dans ce chapitre les discours des participants afin de rendre compte de leur regard porté, d’une part, sur Facebook en général, et d’autre part, sur le Groupe en particulier. Nous finirons cette partie par une discussion générale dans laquelle nous essaierons de mettre en relation les différents résultats et croiser les conclusions obtenues dans ces trois chapitres.

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7 ANALYSE DES PRATIQUES DISCURSIVES DOMINANTES

DANS LE GROUPE FACEBOOK

L’objectif de ce chapitre est de chercher à caractériser les échanges dans le cadre de ce Groupe FB. Les membres du Groupe FB que nous avons choisi d'analyser, comme nous allons voir, se livrent à une forme de communication médiée peu courante, à mi-chemin entre le jeu et l'entrainement à la langue française dans un contexte informel. La CMO pédagogique a déjà été bien étudiée dans des contextes formels (voir tous les travaux sur le Français en première ligne), mais encore très peu dans des contextes informels. Il nous a donc semblé nécessaire de commencer par une analyse « tous azimuts » de cette communication dans le but de caractériser de manière assez générale les échanges en ligne de notre corpus. L'analyse, fondée sur les discours en ligne croisés avec les entretiens, sera guidée par les questions suivantes : que font les participants ? Dans quel but apparent ? Comment le font-ils ?

Se poseront au passage la question des langues utilisées, des fonctions du langage que mettent en oeuvre les messages (voir 2.2.4), de la manière dont les messages et commentaires se répondent (ou ne se répondent pas) les uns aux autres (voir cadre théorique 2.2.3) et enfin des caractéristiques sémiolinguistiques des échanges en se basant sur les travaux d’Anis (1999, 2003, 2006). Les deux chapitres suivants seront plus ciblés, l’un cherchant à caractériser le lien social qui s'établit : une communauté se constitue-t-elle ? Si oui, de quel type de communauté s'agit-il ? Et l’autre chapitre cherchant à examiner les perceptions des interviewés et les apports et les limites de leurs participations en ce qui concerne la pratique du français tels qu’ils sont perçus par les participants.