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Conclusion de la première partie

4 Un processus physiologique

L’accouchement est vécu comme un rite. Il est perçu comme extraordinaire, participant de la transition d’un statut vers un autre, et s’accompagne de sensations visant à le signifier.

L’incertitude est valorisée dans sa capacité à renforcer la magie de la naissance, et in fine, du rituel. La nature est vue comme bien faite, le corps féminin étant admirable dans sa capacité à mettre au monde les enfants. Dans le chapitre 4, j’ai analysé une autre facette des représentions, à savoir que l’accouchement est conçu comme un moment dangereux, le corps maternel étant à la fois menaçant et menacé, et les douleurs insupportables. La médicalisation apparaît alors comme un bienfait pour gérer au mieux ces dimensions.

Des représentations concurrentes de l’incertitude et des décisions relatives qui sont à prendre se retrouvent ainsi dans les discours et pratiques des professionnelles et des femmes que j’ai rencontrées137. L’incertitude inhérente à la naissance, qui rend impossible une maîtrise totale des risques, sert la justification d’une surveillance étroite, d’une médicalisation et d’une institutionnalisation des accouchements. Il existe cependant une limite à cette mise sous contrôle des grossesses par la médicalisation selon les répondantes.

D’une part pour éviter des effets iatrogènes138 et d’autre part, pour éviter de « dénaturer » complètement l’évènement. Si l’accouchement comme moment risqué fait l’objet d’une démonstration par les preuves et l’expérience, il en va de même pour montrer que c’est aussi un processus physiologique. De plus, il s’agit de donner des limites à l’emprise de la médecine sur le rituel que constitue la naissance. Si dans la littérature, ces conceptions semblent réservées au milieu de l’accouchement à domicile ou de la maison de naissance,

137 Ces représentations cohabitent en partie dans les discours des professionnelles et des femmes, révélant l’ambivalence qui existe autour de la naissance.

138 Cette réflexion est de plus en plus présente en médecine. Dans le cas de l’obstétrique, un nombre croissant d’initiatives dans les maternités, par exemple les AVAC, accouchements par voie basse après césarienne, ou le retour progressif de maternités à la pratique de l’accouchement par siège, est révélateur de la volonté de freiner la progression des taux de césarienne, qui sont jugés trop élevés et à l’origine d’effets iatrogènes.

elles sont, en partie, partagées par les professionnelles exerçant en milieu hospitalier, et même par des médecins séniors.

Pour Lisa (parturiente, 1 mat) si l’accouchement était « si dangereux », « on ne serait pas 7 milliards, on serait beaucoup moins ». L’accouchement est pour elle quelque chose « de très naturel », le corps des femmes étant « fait pour enfanter ». La plupart des médecins que j’ai rencontrés avaient conscience que leur vision de la naissance comme moment dangereux était influencée par le fait qu’ils sont présents pour les cas compliqués ou qui se compliquent et non pour les accouchements qui se passent bien. Certaines internes ou cheffes de cliniques m’ont ainsi dit qu’elles apprécient d’assister à des accouchements normaux pour se souvenir qu’il s’agit d’un processus qui se passe bien la plupart du temps. Elles semblent avoir besoin d’en faire l’expérience de temps en temps, pour réintégrer cette idée. Le manque de temps à leur disposition, ainsi que le fait que les accouchements classés comme

« physiologique » sont la chasse gardée des sages-femmes (je le montrerai dans la partie suivante) leur permettent cependant peu de vivre ces expériences. Du côté des médecins adjoints, plusieurs apprécient les « cas privés » pour les mêmes raisons : « on a des patientes privées qui vont bien et puis tant mieux, parce qu’on voit que ça va bien aussi ! » (Andrea, adjoint).

Chez certaines parturientes, il y a une tendance à la naturalisation de l’expérience. La nature ayant prévue que la grossesse se déroule dans le corps des femmes, et que l’accouchement se fasse par les voies vaginales, cela constituerait la preuve que la naissance doit se passer ainsi. Pour Iris (1 mat, 2 AMN) « c’est logique », elle ne se pose « même pas la question ».

Quand elle entend des commentaires de femmes qui se plaignent de devoir porter l’enfant alors que le père en est déchargé, elle se dit « mais c’est pas possible, c’est la nature, y’a une raison !». Jessica (parturiente, 4 AMN) va dans le même sens en montrant que « c’est tellement bien fait », que chaque élément de la naissance a une fonction. Le passage par les voies vaginales sert à une « compression du cerveau » du fœtus qui va « le stimuler pour l’intellect ». Selon elle, «tout est tellement bien fait que ça peut être que comme ça quoi. On est vraiment faites pour ça. ». Malorie, chercheuse en biologie, aurait souhaité éviter les hormones de synthèse pendant l’accouchement. Je lui demande s’il y a un lien avec son métier et ses connaissances spécifiques. Comme scientifique, elle relève combien le corps est bien fait, et les dosages subtiles, une intervention risquant de déséquilibrer cette perfection :

en travaillant [dans le dom aine de la bio logie], on sait que plein de substances peuvent avoir quand mêm e des im pacts forts sur le vivant, donc heu... peut -êtr e quand m êm e que ça m 'a influencé un peu dans... Dans ce choix, de pas vouloir recevoir d'horm ones, parce qu'on perturbe le fonctionnem ent - déjà le fonctionnem ent du vivant est tellem ent m ultifactoriel et com plexe, alors si o n vient perturber - 'fin c'est toujours m ieux de pas intervenir, si on peut. (Malorie, parturiente, 1 m at)

Evelyne évoque aussi l’impossibilité d’atteindre des dosages hormonaux subtils :

le problèm e, c'est que c'est le m édical qui décide des doses subjectivem ent. La nature elle sait les doses. Nous on décide comm ent on veut faire, plus vite, m oins vite. Peut-être ça dilate plus vite, mais peut -être que le bébé aurait besoin de plus de tem ps pour trouver son chem in. Après il y a des conséquences avec le synto[cinon], rupture utérine ou bon des utérus qui on t du m al à se contracter après, des hém orragies. (Evelyne, sage-femm e agréée) Pour Olivia (CDC), les interventions médicales, en particulier la césarienne, doivent être pratiquées avec prudence, et uniquement pour des raisons médicales strictes. Elle a une

112 Construction du moment magique : « un des plus beaux jours de votre vie »

représentation du corps féminin que la nature a bien conçu et que le monde médical risque de corrompre : « [l’accouchement] c’est quelque chose qui est quand même fait par la nature et c’est quelque chose qui est sain, de faire une opération où moi j’ai l’impression que c’est pas encore nécessaire, c’est quand même quelque chose qui est trop invasif ». Maude (interne) sous-entend que les interventions médicales peuvent avoir des effets qui dépassent notre compréhension scientifique actuelle, ce pourquoi il faut se montrer prudent.

ton corps il est quand m êm e conçu en principe pour accoucher par voie basse.

Il y a clairem ent des avantages pour la voie basse. Quand tu sais que ton corps il est conçu pour faire certaines choses, pour se rem ettre de certaines choses (…) c’est tellement bien fait, la nature a tellement b ien prévu les choses , je trouve que les m édecins sont là pour rem ettre un peu sur le droit chem in les situations qui dévient un petit peu. (Maude, interne)

Dans le contexte de l’accouchement à domicile ou en maison de naissance, les sages-femmes invitent régulièrement les sages-femmes qui ont vécu de bonnes expériences d’accouchement à en parler, à les écrire et à les partager avec d’autres mères, voire directement avec le personnel de la maternité, « puisque les médecins ne voient que ceux qui sont transférés ». Il s’agit d’utiliser à leur tour le levier du « storry telling », en passant directement par les usagères.

De nombreuses femmes et professionnelles s’accordent pour considérer que la médicalisation doit être limitée à ce qui est nécessaire et que le vécu de la grossesse et de l’accouchement doivent être pris en compte :

si, on leur vole un petit peu leur grossesse, si on s’immisce tout le temps dedans, on essaie tout le tem ps de faire des choses pour surveiller, est -c e qu’on va pas leur laisser cette liberté de vivre les choses sans se poser trop trop de questions ? (…) Ils vont vivre en suspens en se disant, tant que le bébé est pas là, on sait pas (…) la grossesse, c’est pas une maladie. Pour moi. On peut pas traiter ça comm e on traiterait autre chose, une autre maladie, c’est que, à la base, c’est quelque chose que… Qui se fait depuis la nuit des temps, et qui continuera, j’espère, de se faire comme ça. Et on peut pas… Pas tout m aîtriser, et il faut relativiser. On peut pas, je trouve, laisser penser aux gens que c’est grave d’être enceinte, quoi. Que c’est dangereux (…) si on peut justem ent faire que les fem m es aient des grossesses harm onieuses et épanouissantes sans trop les stresser, je trouve qu’il y a déjà toutes ces femmes qu’on stresse parce qu’il y a besoin. (Lyanna, sage-femme mat)

Jade (adjoint) qui réfléchit sur les impacts sociaux et philosophiques d’une société de la surveillance et du contrôle diffusés encore un peu plus dans le domaine de la grossesse et de l’accouchement, s’en inquiète. Elle mentionne la crainte d’un monde futur, sur le mode du

« meilleur des mondes » de Huxley, où les enfants seraient placés dans des incubateurs afin de limiter toujours plus les risques.

Il y aura toujours des morts fœtales in utéro, et des fausses -couches tardives.

(…), parce qu’on sait aussi que la plupart des asphyxies néonatal es ce sont passées avant le moment de l’accouchement, et ça… on peut pas non plus l’enlever.

Solène : Et si on m onitorait les femm es depuis trois m ois de grossesse ? tu im aginerais une situation comm e ça ?

Ah non ! ce serait l’horreur ! mais c’est peut-être là où on va aboutir, là je provoque un peu, m ais que la grossesse ne se passe plus dans le corps de la femme. On sait aller jusqu’à faire la fécondation, élever les embryons avan t de les transférer et on sait prendre en charge un nouveau -né en incubateur à partir de 24 sem aines, donc on a une petite période de quelques semaines… mettre

dans un utérus artificiel ? Peut-être qu’un jour ce sera ça le risque zéro, ce sera quelque chos e qui se passe hors du corps de la femm e.

Solène : Cette évolution, qu’est-ce que tu en penses en tant que médecin ? C’est un thème qui m’intéresse beaucoup donc j’ai pas mal lu par rapport à ça [rire]. Pour moi c’est quelque chose d’effrayant si on arriv e dans une société comme ça. Je me dis que les progrès de la médecine nous permettent d’avoir des réponses thérapeutiques pour des pathologies, m ais nous ouvre nt aussi à un m onde hallucinant qui ne répond pas à une pathologie, qui n’est plus de l’ordre du thérapeutique mais qui est de l’ordre du je sais pas quoi qui est assez vertigineux. (…)

Solène : Qu’est-ce qui fait que c’est important qu’on ne médicalise pas trop, qu’on ne fasse pas d’utérus artificiel ?

[silence]. C’est quand même de déposséder la fem me et l’homme de la grossesse et de la naissance en en faisant quelque chose que de technique et m édical alors que ça a pas lieu d’être dans beaucoup de cas. (Jade, adjoint)

L’utérus artificiel a fait l’objet de débats importants dans la littérature comme je l’ai exposé dans la première partie, certains chercheurs, chercheuses ou juristes l’appelant de leurs vœux comme un moyen de libérer les femmes du joug reproducteur (Atlan 2007; Iacub 2004a; voir aussi les commentaires de Knibiehler 2012 à ce sujet)139. Pour Jade, ce serait au contraire le signe d’une dérive de la médecine qui destituerait la femme (mais aussi l’homme, nous dit-elle), du pouvoir procréateur. Surtout, pour Jade, la grossesse et la naissance ne peuvent être résumées à des actes médicaux.

Pour plusieurs autres médecins adjoints, la balance coût-bénéfice des césariennes doit aussi dans une certaine mesure comprendre des données sur le vécu psychologique de l’enfant et de la mère. Selon Marc (adjoint) « l’attachement de la mère ou du couple avec le nouveau-né [peut être] troublé par la période post-opératoire » et doit donc être pris en compte dans les décisions de césarienne. Selon Andréa (adjoint), l’incertitude relative à l’accouchement est importante pour la construction du statut de mère selon elle, de même qu’une naissance par voie vaginale. Même si elle signifie que la priorité doit être donnée aux risques strictement médicaux, cette dimension lui importe.

Solène : Certains m édecins disent qu’il n’y a pas tant de risques que cela aux césariennes et pourquoi on ne pourrait pas imaginer une situation où on atteint un nom bre de césariennes très im portant pour plus contrôler les risques, plus se retrouver avec des instrum entés où on enclave le bébé dans le bassin, les déchirures sont invoquées, il y aura moins d’incontinence, qu’est -ce que tu…

Alors non, moi je suis totalement contre cette idée. Pour moi l’accouchement c’est vaginal, c’est la meilleure façon d’accoucher pour la maman et pour le bébé, c’est une certitude absolue pour moi, je suis sûre. Maintenant, une césarienne c’est une opération ! c’est l’enfer. Déjà c’est super désagréable d’accoucher par césarienne. Je dis pas que c’est super agréable d’accoucher par voie vaginale mais après avec l’antalgie, etc. surtout ces dames qui ont des césariennes électives, qui viennent, elles ont l’impression d’aller à la Migros, bonjour, aujourd’hui je vais accoucher, et 10 minutes après… c’est 10 minutes ! après, plouff le bébé il est là ! et à m on avis, il y a qua nd m êm e tout un passage qui est bien obligatoire pour… je dis pas qu’il faut ça absolument pour être maman, mais c’est ce passage qui est important. Je pense que ça c’est

139 Ces propositions s’inscrivent également en creux dans un « adieu aux corps » (Le Breton 2013) revendiqué par les post humanistes pour lesquels celui-ci est devenu un poids et une limite plus qu’une possibilité. Le corps devenu anachronique devrait pouvoir être supprimé, pour que l’esprit seul soit conservé, par exemple au sein d’une machine dans le mouvement de la cyberculture et ainsi dégagé de la décrépitude du corps et in fine, de la mort.

114 Construction du moment magique : « un des plus beaux jours de votre vie »

difficile. Mais quand il faut parce qu’il y a trop de risques, par exemple un placenta prævia [placenta m al inséré qui peut causer de graves com plications] . C’est sûr que je vais jamais dire, il faut essayer parce que nanana… là le risque il est trop grand, c’est sûr qu’il faut faire une césarienne, mais dans l’idée d’une césarienne com m e accouchement pour tout le monde, c’est épouvantable. Je pense que c’est pas bien ! après il y a pas eu d’études sur la relation mère -enfant que je connaisse vraim ent développées césarienne v ersus accouchem ent voie vaginale, m ais il y a quelque chose qui es t peut être différent là-dedans, je peux peut-être penser. Mais c’est même pas le côté le plus important. C’est plutôt le côté médical [elles citent les complications]

(Andrea, adjoint).

Dans le même sens, Sophie (sage-femme mat, suivi global) pense que les personnes qui accompagnent aujourd’hui les naissances jouent un rôle qui ne peut se résumer à la surveillance médicale. Le métier est aussi relationnel et les professionnelles seraient tenues de s’investir puisque la naissance est un moment spécial pour les personnes qu’elles accompagnent. Même si « cela fait que de temps en temps [elle] a mal au dos », elle estime

« qu’on ne peut pas louper l’accouchement d’une femme pour elle, on ne peut pas se permettre de dire que bof, Ma foi c’est pas grave. Non, c’est un événement majeur »140. Sophie critique certaines de ses collègues trop « techniciennes » et insuffisamment présentes auprès des parents141.

Conclusion du chapitre 5

Les discours de professionnelles et de parturientes présentés dans cette partie caractérisent une résistance à penser l’accouchement uniquement à travers le prisme du risque médical, y compris en milieu hospitalier. Elles parlent de ce moment et le vivent comme touchant, magique, important dans la vie des couples. Les émotions fortes qui sont suscitées par la naissance, ne se bornent pas à être négatives.

Dans la perspective présentée ici, c’est d’une part le côté biologique d’un corps féminin puissant, efficace, beau et sensuel qui est mis en avant. La nature est décrite comme fascinante et « bien faite », même les douleurs de la naissance sont utiles pour la mener à bien. Les interventions médicales qui s’invitent dans les naissances, par le biais d’hormones de synthèse par exemple, ou dans la perspective d’un utérus artificiel, suscitent de la méfiance dans leur capacité à troubler un mécanisme naturel bien rodé. D’autre part, c’est le caractère éminemment social de la naissance qui est invoqué à travers le rituel (voir aussi:

Malacrida et Boulton 2012). Même les périodes de carnaval et les fêtes païennes, si elles sont des occasions de jouer avec les normes sociales et les statuts, n’en restent pas moins des « désordres conformisés », pour reprendre l’expression de Knibiheler (2012, 39). Je montrerai ainsi dans les parties suivantes qui contiennent des analyses des pratiques à l’hôpital ou en dehors, en quoi ce rituel est traversé par des normes sociales qui instituent un certain type de comportements admis, qui concernent surtout le corps des femmes.

140 Accompagner une femme qui accouche peut parfois être une vraie épreuve physique pour la sage-femme qui engage son corps auprès de la parturiente : masser, servir d’appui, se plier et se tordre pour faire des touchers vaginaux d’une femme debout, etc. Cet engagement est cependant beaucoup moins visible en milieu hospitalier du fait du taux élevé de péridurales.

141 J’ai analysé ces tendances des sages-femmes à être « technicienne » ou « relationnelle », et les tensions entre les professionnelles qui revendiquent une appartenance à l’une ou l’autre de ces figures (ou désignées comme telles) à l’occasion d’une précédente recherche (Gouilhers 2010). Des phénomènes semblables ont été observés par Vega (2000) à propos des infirmières et infirmiers.

Tout comme le sont les risques intolérables, le moment magique est un construit social, il ne va pas de soi. Il est situé géographiquement et culturellement. Certaines regrettent que la prise en charge médicale freine l’expression de ce moment magique. Cependant, il faut se méfier des analyses trop rapides. La réduction de la médicalisation ne favorise pas nécessairement le vécu d’un moment magique. Je fais l’hypothèse que le développement de cette représentation et des vécus qui y sont relatifs a d’autant plus sa place aujourd’hui que l’accouchement est sûr en Suisse. Dans de nombreuses cultures, l’enfant n’est pas investi lors de l’accouchement, ni dans les jours, semaines, voire premières années (Gottlieb 2000) par exemple, notamment du fait du risque élevé de mortalité. C’est donc le progrès médical qui a fait de la place à de nouvelles représentations de la naissance, et constitue peut-être et paradoxalement, une partie du terreau à la base des choix en matière d’accouchements à domicile ou en maison de naissance. De plus, dans des régions du monde où l’accouchement est très peu médicalisé, celui-ci n’est pas nécessairement vécu comme un moment beau, transcendant, extraordinaire, et les sensations de la naissance décrites

Tout comme le sont les risques intolérables, le moment magique est un construit social, il ne va pas de soi. Il est situé géographiquement et culturellement. Certaines regrettent que la prise en charge médicale freine l’expression de ce moment magique. Cependant, il faut se méfier des analyses trop rapides. La réduction de la médicalisation ne favorise pas nécessairement le vécu d’un moment magique. Je fais l’hypothèse que le développement de cette représentation et des vécus qui y sont relatifs a d’autant plus sa place aujourd’hui que l’accouchement est sûr en Suisse. Dans de nombreuses cultures, l’enfant n’est pas investi lors de l’accouchement, ni dans les jours, semaines, voire premières années (Gottlieb 2000) par exemple, notamment du fait du risque élevé de mortalité. C’est donc le progrès médical qui a fait de la place à de nouvelles représentations de la naissance, et constitue peut-être et paradoxalement, une partie du terreau à la base des choix en matière d’accouchements à domicile ou en maison de naissance. De plus, dans des régions du monde où l’accouchement est très peu médicalisé, celui-ci n’est pas nécessairement vécu comme un moment beau, transcendant, extraordinaire, et les sensations de la naissance décrites

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