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IV. Mesures et axes d’interventions prioritaires de la stratégie

4.1.3. Principales pratiques à l’échelle nationale

A l’échelle nationale, les autorités et les professionnelles de la santé qui travaillent dans le dispositif sanitaire de la lutte contre la tuberculose ont la responsabilité

157 Dans le Manuel de la tuberculose, il est écrit : « [L’OFSP] harmonise ses activités de lutte contre la tuberculose avec les recommandations, directives et critères de qualité des organisations internationales, notamment celles issues de l’OMS. » (LPS 2012:31) En revanche, des médecins sur le terrain, lors de discussions entre spécialistes de la santé et à l’occasion de journées de formation, se réfèrent à la DOTS comme étant la stratégie développée par l’OMS.

des tâches suivantes : la coordination, l’élaboration et l’évaluation de la stratégie nationale, la surveillance épidémiologique, l’uniformisation des pratiques et la communication d’informations relatives à la tuberculose. Je précise encore trois pratiques menées à l’échelle nationale et centrale à ce dispositif sanitaire : les moyens de la surveillance de la tuberculose, la délimitation de groupes à risque et le dépistage aux frontières.

Pour assurer une surveillance épidémiologique de la tuberculose à travers le pays, l’OFSP regroupe des informations sur la tuberculose relatives aux différents cantons. L’obligation de déclarer les cas de maladies transmissibles, dont la tuberculose, date de la modification de la loi sur les épidémies de 1970, suite à laquelle un système de déclaration obligatoire a été mis sur pied en 1988158. Deux types de situations mènent à une déclaration à la médecin cantonale et à l’OFSP : lorsque des BK sont détectés au laboratoire et lorsque, dans la clinique, une médecin prescrit un traitement antituberculeux – de minimum trois antibiotiques – , pour une tuberculose active159. Etablir des statistiques est, par conséquent, rendu possible par cette pratique de déclaration des médecins et des laborantines aux autorités sanitaires cantonales. L’OFSP centralise ces informations et, à partir de celles-ci, publie des comptes-rendus sur la situation épidémiologique dans le pays ainsi que dans chaque canton, effectuant ainsi une surveillance épidémiologique. Deux autres types de surveillance sont menés au Centre national de référence pour les mycobactéries à l’Université de Zurich. Lors d’une résistance à l’un des antibiotiques antituberculeux la rifampicine, un échantillon de l’isolat doit être transmis aux professionnelles de ce centre ; ceci afin qu’elles puissent effectuer des tests permettant d’évaluer s’il existe également d’autres

158 La base légale de cette pratique est la loi sur les épidémies. L'ordonnance sur la déclaration (RS 818.14.1, RO 1999) décline les règles de la déclaration des maladies transmissibles causées par des « agents pathogènes pour l’homme ».

L’OFSP (sa Division Maladies transmissibles) et les cantons (leur service du médecin cantonal) doivent mettre en place « les mesures qui s'imposent pour lutter contre les maladies infectieuses ». Site internet OFSP « Procédure de

déclaration »,

http://www.bag.admin.ch/k_m_meldesystem/00733/02061/index.html?lang=fr, consultée le 1e juillet 2015.

159 Un résultat positif au test de la tuberculose latente, ainsi qu’un traitement initié pour une tuberculose latente ne sont pas déclarés à l’OFSP. Les laborantines annoncent au service du médecin cantonal et directement à l’OFSP les cultures positives de mycobacterium tuberculosis – les mycobactéries du complexe tuberculeux (notamment M. tuberculosis, M. bovis, M. africanum et M. caprae) – et d’autres informations en cas de résistance de la bactérie aux antibiotiques utilisés dans le traitement contre la tuberculose.

résistances aux « médicaments de réserve »160, tout cela dans le but de mener une surveillance moléculaire161.

La délimitation des catégories à risque constitue l’une des prérogatives des professionnelles de l’OFSP, aidée par celles de la ligue pulmonaire suisse. Les populations à risque soumises à des dépistages de la tuberculose sont, d’une part, les requérantes d’asile, à leur arrivée dans le pays, et les prisonnières, au moment de leur incarcération. Sont également soumises à des dépistages, les employées d’institutions de santé (dont les hôpitaux), de migration (les centres d’enregistrements et de procédure pour requérantes d’asiles), d’institutions pénitentiaires, de certains services sociaux (notamment ceux ciblant les personnes sans-abris et toxicomanes). De plus, les autorités sanitaires recommandent de dépister les membres de l’entourage de personnes récemment diagnostiquées d’une tuberculose contagieuse, ainsi que des personnes immuno-supprimées ou risquant de le devenir (par exemple, lors de l’introduction d’un traitement qui a un impact sur le système immunitaire). Puisqu’il cible différents groupes de personnes, le dépistage de la tuberculose en Suisse se fait dans plusieurs institutions et lieux. Au niveau national, un dépistage est effectué à la frontière.

Au XXIe siècle, la tuberculose représente la seule maladie pour laquelle un dépistage systématique à l’entrée sur le territoire suisse est encore réalisé et il cible aujourd’hui une population, les requérantes d’asile162. Cette pratique

160 « Une éventuelle résistance à l’une de ces substances est systématiquement recherchée, vu son importance au niveau clinique. Si elle concerne l’isoniazide et la rifampicine (on parle dans ce cas de tuberculose multirésistante, MDR-TB), on utilise les médicaments dits « de réserve », notamment l’amikacine, la capréomycine, la kanamycine, les fluoroquinolones, l’éthionamide / la prothionamide, PAS, la cyclosérine ou la linézolide. Si l’on observe chez un patient MDR-TB une résistance au moins à l’une des substances telles que la kanamycine, l’amikacine ou la capréomycine et aux fluoroquinolones, on parle alors d’une tuberculose ultrarésistante (XDR-TB). La proportion de germes résistants est liée à un traitement antérieur avec des antituberculeux. » Bulletin 21 de OFSP du 20 mai 2013, « La tuberculose en Suisse, 2005-2011 (Etat des données 17 octobre 2012) » p.343.

161 Des méthodes de biologie moléculaire permettent de « rechercher des souches génétiquement identiques, ce qui permet de déterminer un éventuel lien épidémiologique entre les patients concernés ». L’OFSP décrit la « typisation moléculaire de toutes les souches MDR » comme une étape « dans la surveillance moléculaire nationale de M. tuberculosis » (OFSP 2002:176).

162 « La loi sur les épidémies de 1970 prévoit entre autres que le Conseil Fédéral prenne les mesures nécessaires contre la diffusion de maladies contagieuses provenant de l’étranger. Actuellement, le seul contrôle obligatoire consiste en un dépistage de la tuberculose, afin de pouvoir établir un diagnostic précoce et instaurer un traitement rapide si nécessaire. Ce dépistage est pratiqué chez les

nommée « dépistage précoce » et « dépistage actif » (screening) a pour but de poser un diagnostic le plus tôt possible afin d’empêcher la contamination à autrui.

Elle se justifie, selon l’OFSP pour les individus provenant de pays à haute incidence de tuberculose. Cependant, il est précisé « pour autant toutefois qu’ils soient accessibles. En Suisse, ce n’est le cas que pour les requérants d’asile et seulement lors de la demande d’asile. » (OFSP 2012a:72) L’accessibilité correspond au dépistage des requérantes d’asile à leur arrivée dans les cinq centres d’enregistrement et de procédure répartis sur le territoire suisse et aux deux espaces de procédure pour les requérantes d’asile arrivées aux aéroports de Genève et Zurich, des lieux placés sous la responsabilité du Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) du Département fédéral de justice et police.

Dans le document Aide-mémoire destiné aux requérants d’asile et aux personnes à protéger émis par l’Office fédéral des migrations (ODM) et transmis aux personnes demandant l’asile en Suisse, il est expliqué : « [p]our des raisons de santé publique, à votre arrivée au Centre, vous serez soumis à un contrôle destiné à évaluer vos risques en relation avec la tuberculose » (2011:2). Ce dépistage consiste depuis 2006 en une interrogation des requérantes d’asile, à partir d’un questionnaire standardisé163. Depuis 2006, l’OFSP délègue à l’entreprise privée ORS Service AG, mandatée par les autorités de migration suisses pour la prise en charge des requérantes d’asile dans les centres d’enregistrement et de procédure, la responsabilité d’effectuer les dépistages des requérantes d’asile.

Par ailleurs, les professionnelles de la santé collaborent encore avec l’Office fédéral des migrations (ODM), par la transmission d’informations. Cette pratique découle de l’objectif que s’est donné l’OFSP: « Les traitements de la tuberculose chez les personnes du domaine de l’asile doivent être menés à terme en Suisse.

Ceci n’est possible que si l’Office fédéral des migrations a été informé à l’aide du formulaire « Rapport médical ».164 Cette transmission d’information via ce rapport médical sera discutée ultérieurement, de même que la collaboration entre les médecins de la lutte contre la tuberculose et les autorités de migration.

Comment le dispositif de la lutte contre la tuberculose à l’échelle d’un canton suisse se distingue-t-il du dispositif à l’échelle nationale et quels en sont les institutions, les acteures et les pratiques principales ?

requérants d’asile/réfugiés. » Site internet de l’OFSP : http://www.bag.admin.ch/themen/medizin/00682/00687/index.html?lang=fr

163 En fonction des réponses de la requérante d’asile à 11 questions et de l’appréciation de la professionnelle qui effectue le dépistage, cette dernière peut faire le choix de diriger la personne vers une médecin pour une « investigation ciblée ».

164 Site internet de l’OFSP consulté le 21 septembre 2012.