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PARTIE III LA LUTTE CONTRE LA TUBERCULOSE EN PRATIQUE PRATIQUE

Chapitre 5 Soigner et prévenir par le contrôle

5.1. Isolement respiratoire

5.1.2. Expériences des personnes isolées à l’hôpital

Les personnes isolées à l’hôpital expriment des vécus différents du fait d’être ainsi mises à l’écart et vis-à-vis des conditions matérielles de l’isolement respiratoire à l’hôpital. Ces dernières représentent une modification momentanée de leurs conditions de vie correspondant, selon les patientes, à une péjoration ou à une amélioration.

I. Péjoration momentanée des conditions de vie et doléances pas entendues Pour les Suisses et les personnes ayant des conditions de vie stables et élevées – en général de classe sociale moyenne ou supérieure – l’isolement respiratoire mène à une péjoration momentanée de leurs conditions de vie, principalement due au changement de nourriture, au confort moindre de la chambre d’hospitalisation et à l’éloignement de leur famille. De plus, ces personnes se plaignent davantage des conditions matérielles de l’isolement respiratoire209 que les patientes du second groupe dont les conditions de vie sont précaires.

Il ressort des témoignages des patientes que les mesures d’isolement sont appliquées de façons différentes : certaines ont eu le droit de sortir de la chambre avec un masque et d’ouvrir les fenêtres de la chambre, d’autres non. Les principales doléances concernent le fait de ne pas pouvoir sortir de la chambre, ce qui induit notamment de ne pas pouvoir se doucher et marcher (hors de la chambre), et le fait de n’être pas autorisée à ouvrir les fenêtres. Mme Biller, une étudiante suisse, raconte :

« La médecin généraliste m’a dit que [je pouvais sortir] si je porte un masque. […] Une infirmière qui n’était pas au courant, quelqu’un d’incompétent, m’a interpellée dans le couloir. Je voulais aller à la douche avec mon masque. Elle m’a dit : “Les masques à coque ce n’est que pour nous, c’est que pour nous !“ […] Quand j’ai dit à une infirmière : “Est-ce que je peux avoir mes 20 minutes [de sortie hors de la chambre munie d’un masque]?“ Elle m’a dit : “Mais non vous n’avez pas le droit.“ A chaque fois, il fallait reéexpliquer et elle devait aller discuter et ça faisait un débat. Au début, je n’avais pas le droit à la fenêtre ouverte, selon le médecin qui

209 A l’exception des rares personnes qui ont été hospitalisées dans une unité privée et qui ont par conséquent accès à des toilettes et des douches à l’intérieur de la chambre et à un balcon. Les chambres d’hospitalisation standards n’ont ni toilettes, ni douches, ni balcon. Contrairement à ces chambres des unités pour les personnes en possession d’une assurance dite « privée » ou « semi-privée » qui comprennent une salle de bain.

m’avait pris en charge tout au début. Puis les pneumologues m’ont dit :

“Non, non, ouvrez.“ Finalement, c’est une infirmière qui m’a dit : “ Non, normalement vous ne pouvez pas.“ Les 20 minutes [de sortie quotidienne]

viennent d’un [interniste]. Je trouvais cela logique, car en même temps, eux, ils rentrent avec le masque… » (entretien)

A l’instar de cette femme, plusieurs patientes interrogées sur leur séjour à l’hôpital décrivent avoir reçu des règles contradictoires de la part des professionnelles quant à l’isolement respiratoire. « Ni les lieux sont adaptés, ni les personnes formées ! L’hôpital de Genève n’est pas fait pour l’isolement ! » s’exclame M.

Pencin, un homme suisse de plus de cinquante ans, après plusieurs jours d’isolement.

Par ailleurs, l’isolement est mal vécu par ces patientes pour d’autres raisons.

Séparées d’autrui, les personnes isolées se sentent parfois assimilées à des « pestiférées ». Le fils de Mme Cerjun, une femme de quatre-vingt-quatre ans, suisse et née en Hongrie, ajoute que cette dernière a pris cette mesure comme une humiliation. M. Ferner, un Suisse de quarante-neuf ans, se souvient du début de l’isolement respiratoire :

« Quand je suis arrivé [aux urgences], on m’a enfermé dans une chambre

« Ne pas entrer, danger public. » Mon épouse a dû mettre un truc [un masque] pour entrer. Je suis arrivé un mardi, j’y suis resté jusqu’à vendredi dans la chambre séparée. C’était dur, dur, dur. Comment dire... On n’avait pas de repère. On se sentait… [Il désigne avec sa main le sol.] … en bas, dégradé, impuissant. On subissait. » (entretien)

D’autres patientes isolées partagent l’idée que l’isolement est inutile, à l’exemple de M. Collins, un homme originaire d’Asie travaillant dans une organisation internationale :

« It's ok if Switzerland has higher standards than the UN or WHO, still compromise needs to be made with the people suspected [of TB].

Remember suspected is only suspected. Maybe not hospitalize the people [in good shape] and not contagious [like me]. And make us comfortable and as human as they can. […] And not to use mask if the person is not contagious, because it is very devastating people looking at us when wearing a mask. Only when one cough, but I didn't cough. And to be able to take a walk in the hospital, in a park, we need to go out of the room. » (entretien)

Hormis la prise des médicaments, certaines patientes ont parfois l’impression qu’il ne s’est rien passé. Mme Weber s’étonne : « Moi, ici, je n’ai fait que prendre des médicaments, il n’y avait pas de soins. » Et elle précise qu’habitant seule, elle aurait pu s’isoler à son domicile.

Des membres de leur famille de patiente, pour leur part, ne comprennent pas le fait d’être tenues à l’écart de leur proche ni le port du masque à l’hôpital, alors qu’elles ont passé les dernières semaines ensemble. Evoquant le fait que sa femme doive porter un masque pour entrer dans sa chambre, M. Ferner dit : « Ma

femme, ça fait deux mois qu’on dort ensemble et tout à coup… c’est un peu bizarre car si elle doit l’avoir, j’ai dû la lui transmettre bien avant. »

Après douze jours en chambre, M. Pencin souligne la pénibilité physique et morale des conditions de l’isolement et son impression générale « ils traitent la tuberculose, pas le patient » qu’il développe ainsi :

« [A l’hôpital], je suis une tuberculose active, mais pas un être humain. Pour la tuberculose, ils sont très efficaces. Ils ne parlent pas avec une personne mais avec une tuberculose active. Je n’ai pas le droit de prendre une douche, de me promener. Après quatre jours, si j’étais [en régime]

pénitentiaire, j’aurais le droit. Ici, je n’ai aucun droit. » (entretien)

Quelques personnes comparent ce régime d’isolement à un emprisonnement carcéral, en pire, selon elles, car sans accès à une douche et sans sorties. Ainsi un autre homme suisse de cinquante ans se scandalise :

« Pas le droit de sortir du tout. Je trouve cela ridicule, c’est mon avis. Les infirmières rentrent et sortent, les bactéries, les bacilles, sortent avec elles, il n’y a pas de sas, par contre on vous interdit d’ouvrir la fenêtre parce qu’on a peur qu’ils sautent par la fenêtre et aillent dans l’étage d’en dessous. […]

Il a fait plus de 30 degrés dans la chambre. C’est la canicule. Pas le droit de ventilateur, car ça ferait sortir les bactéries par la porte et ensuite ça stagnerait dehors. De 22h au matin, j’avais le droit d’ouvrir, la nuit car les microbes dorment la nuit !!! [Rires]. C’est pénible et il n’y a pas de ventilation, pas de douche et pas de toilette. Ça c’est vraiment dur, le lavage au lavabo. Dur quand on a transpiré et qu’il fait plus de 30 degrés ! […] Même à [la prison de Genève], on est enfermé mais on a le droit à une sortie dans la cour. Ici pas. Ici, c’est encore pire que [la prison]. » (entretien) Plusieurs patientes soulignent encore l’importance d’être écoutées et entendues, témoignant du soutien reçu d’infirmières, d’aides-soignantes ou de médecins, et de bénéficier de respect et de l’empathie. Lorsque cela a manqué, d’autres patientes le regrettent : notamment les contacts trop peu nombreux avec ces professionnelles limitant leurs allers et venues dans la chambre d’isolement et le manque d’explication entre autres concernant la suite de leur prise en charge et la fin de l’isolement. Un homme suisse d’une quarantaine d’années dit de l’isolement : « Des fois, je ne vois personne de la journée, à part si je sonne pour vider le vase. [Parfois, le médecin] vient deux jours de suite puis je ne le vois plus pendant deux-trois jours, ainsi de suite. A part les infirmières qu’on voit régulièrement, mais bon… c’est vrai qu’on est un peu isolé. » Certaines patientes ont observé des réactions de panique de la part de professionnelles lorsque la tuberculose est mentionnée ou suspectée. Mme Tazi regrette :

« A l’hôpital, une aide-soignante a dit : “Si elle a la tuberculose, je ne vais pas rentrer. “ Je comprends, mais c'est blessant. C'est normal qu'elle veuille se protéger, mais moi je n'ai rien fait. […] Le personnel n'est pas formé pour cela. […] [Qu’ils se déguisent], ce n’est pas grave, mais [il ne faut] pas laisser les [professionnels] dans l'ignorance, ils paniquent. La personne malade, ensuite, culpabilise. » (entretien)

Quelques personnes évoquent pour leur part la peur entretenue, à leurs yeux, par les professionnelles. M. Chapeli, le fils trentenaire d’une femme isolée pour une suspicion de tuberculose s’exprime sur la peur engendrée par une partie des professionnelles : « Ils foutent les boules! Ils créent un climat de terreur » et de mentionner l’autocollant orange « AIR » signalant l’isolement respiratoire, dont il dit : « Et puis il y a même un autocollant sur la porte de la chambre, genre tête de mort, chambre à gaz… ! » Une jeune étudiante raconte : « Quand elles ont vu que je disais : “Ah non je ne peux pas sortir !“, [les infirmières] m’ont expliqué qu’il y a eu un cas où ils ont dû mettre un Sécuritas devant la porte, ils ont sécurisé la porte pour pas que la personne, elle sorte. J’ai dit : “Ecoutez, je ne vais pas faire un scandale.“» Plusieurs patientes regrettent les interactions avec les médecins basées sur la menace, à l’instar de cette dernière ou de M. Kand, un homme au bénéfice d’une carte de légitimation à Genève :

« I felt [the doctors] were paranoid. They said I had to be hospitalized on that day. […] A doctor threatened me saying: “If you don’t get hospitalized, we will force you“. They said they would do everything – the police also – to force me to be hospitalized that night. They said they could use the police or the government because it is a national issue. They said they would talk with my boss. I got scarred. » (entretien)

Ces doléances, quelques patientes racontent avoir tenté en vain de les communiquer aux professionnelles, comme cet homme suisse de plus de cinquante ans :

« En ce qui concerne les médecins, ils focalisent sur la tuberculose. Ils sont obligés de faire avec les patients, mais ils font la tuberculose. Il n’y a pas de respect pour les malades. […] J’ai fait seize jours à l’isolement et je n’ai pas eu d’air frais, pas eu de promenade, pas eu de douche, je n’ai pas fumé, bon je m’en fiche de cela car j’étais malade. […] Et l’interdiction d’ouvrir la fenêtre, de prendre une douche. Les médecins ont un pouvoir supérieur. A [la prison de Genève], ça ne se passerait pas ainsi. Ce serait dans les médias. J’en ai parlé avec une médecin de l’étage, elle m’a répondu : “Est-ce que vous voulez parler à un psychiatre ?“ J’ai répondu :

“Je ne peux pas l’aider !“ Le jour du départ, j’ai encore répété la même chose à un autre médecin qui m’a dit “Monsieur Weims vous revenez d’Afrique, vous êtes comme un lion en cage.“ Il n’a pas écouté. Je n’avais rien à dire. Ils visent la tuberculose point final ! » (entretien)

Il résume ainsi le résultat de sa tentative de transmettre ses plaintes aux médecins de l’unité de soins où il a été isolé: « Selon les médecins, eux n’ont commis aucune erreur. Leur réponse ça a été [de dire] “Vous êtes comme un lion en cage“

et vouloir m’envoyer le psy. » Une patiente venue consulter au CAT discute avec un pneumologue de ses doléances concernant sa prise en charge globale à l’hôpital et la relation avec quelques professionnelles. Lorsqu’il fait part du contenu des plaintes de la patiente à un collègue, ce dernier répond en disant que la

patiente a « un trouble de la personnalité » 210. En parallèle, une collègue du CAT me raconte avoir entendu cet après-midi-là un pneumologue rapporter à une infirmière du CAT que la patiente reproche aux infirmières de l’avoir mise sous pression concernant la reprise de son travail. L’infirmière répond : « Ah bon… Elle est psy, cette patiente… » Stigmatisées en tant que personnes pathologiques, ces deux patientes qui ont tenté de transmettre leur expérience du dispositif aux professionnelles ont été décrédibilisées ; ainsi leur message, le contenu de leurs critiques, sont aussitôt oubliés211.

II. Amélioration temporaire des conditions de vie et profondes inquiétudes Contrairement aux personnes qui cherchent à exprimer leurs doléances aux professionnelles et à partager leur vécu du dispositif – et qui sont, le plus souvent, des personnes suisses ou ayant un permis stable, établies de longue date en Suisse et parlant couramment le français – les personnes isolées ayant des conditions de vie précaires se plaignent très peu de l’isolement respiratoire212. Quelles expériences ces dernières font-elles du même dispositif ? Pour celles-ci, la situation lors de l’isolement représente parfois une amélioration temporaire de leurs conditions de vie : de la nourriture servie trois fois par jour, du repos et du calme dans une chambre seule ou encore une trêve d’un travail pénible bienvenue. Une femme sans-papiers dont le logement est conditionné à son travail où elle prend soin d’une personne âgée qui ne la laisse pas dormir

210 Parfois des médecins et des infirmières pathologisent une patiente lorsque les comportements vont à l’encontre de ce qu’il est convenu, selon elles, de faire.

Des professionnelles de plusieurs services de l’hôpital témoignent de ce mécanisme. Une soignante relève « qu’[à l’hôpital] quand les patientes disent quelque chose qui les [autres professionnelles] dérangent, c’est alors des “cas psy“ ». A quelques reprises, j’ai observé des professionnelles qualifier certaines patientes suspectées de tuberculose de « cas psy » ; ce pouvait être des personnes qui ne parlent pas lorsque les professionnelles le désirent ou, au contraire, celles qui s’expriment mais dont les propos ne semblent pas leur convenir. Une psychiatre de l’hôpital de Genève intervenant auprès de patientes à l’appel des médecins dit être frappée du nombre de fois où elle est appelée par des collègues pour se rendre auprès de patientes qui, d’après elle, ne veulent simplement pas procéder de la façon dont les médecins ou soignantes le désirent.

211 Dans son étude sur la relation entre des médecins et des patientes dans des hôpitaux français, Fainzang rapporte un phénomène similaire. Elle relate que « certains patients sont désireux de parler des problèmes qui leur semblent liés aux structures de soins et aux modes de prise en charge, mais qui n’ont rien à voir avec leur état psychologique. « On nous envoie la psychologue quand on fait part de notre mécontentement ! » » (2006:60)

212 Dans une étude sur les femmes migrantes fréquentant plusieurs maternités de la région parisienne, Nacu souligne que « s’engager dans une telle négociation demande un capital social, dont les migrantes récentes ne disposent pas » (2011:126). Elle observe encore que « les soignants sont moins sensibles à une demande qui ne trouve pas toujours le moyen de s’exprimer » (2011:122).

beaucoup, dit : « At the house, I couldn't sleep. Suddenly here alone, it's a big change! »

En revanche, ces patientes s’inquiètent abondamment de l’impact que l’isolement pourrait avoir sur leur vie à la sortie. Parmi les possibles pertes, de nombreuses craintes concernent le domaine professionnel. Les statuts juridiques ainsi que les conditions d’emploi de la personne induisent un impact différent. Les Suisses, ainsi que les personnes ayant un permis B et C, les employées d’organisations internationales ne s’inquiètent que rarement de perdre leur emploi, contrairement aux personnes sans-papiers ou ayant des permis provisoires. L’impossibilité de travailler durant l’hospitalisation – et quelques fois après également – représente un souci financier majeur pour ces dernières. Une partie des travailleuses non déclarées, ne bénéficiant pas d’assurance maladie et d’assurance accident, se soucient de comment elles vont payer les frais d’hospitalisation et gagner de l’argent à la sortie de l’hôpital, éléments nécessaires à leur vie quotidienne et parfois à leur famille à l’étranger ou encore pour rembourser des dettes.

En parallèle, un second sujet de préoccupation est le logement. Les personnes dont l’hébergement est conditionné à un travail domestique craignent de perdre leur toit en perdant leur emploi. Des personnes sans-papiers qui vivent en colocation se soucient également pour leur logement, parce que des colocataires pourraient ne plus vouloir d’elles dans leur appartement. Une situation qu’ont connue quelques patientes.

La tuberculose vient ainsi parfois s’ajouter à différentes formes d’exclusion, de précarité, de dépendance et de solitude préexistant à la maladie, et que la maladie accentue ou visibilise davantage. La parfois longue et difficile attente d’une réponse à la demande d’asile, de même que la crainte d’être renvoyées de Suisse ont aussi un impact sur l’expérience du dispositif faites par des requérantes d’asile. La peur d’être expulsées de Suisse est partagée par des personnes sans-papiers, déboutées et frappées d’une NEM.

Enfin, les expériences que certaines patientes ont eues par le passé avec le système de santé d’un autre pays ainsi que d’un autre dispositif en Suisse peuvent également avoir un impact sur leur vécu de l’isolement respiratoire. Deux hommes somaliens ayant demandé l’asile en Suisse racontent que, dans leur pays d’origine, les malades atteintes de tuberculose sont mises à l’écart de la communauté, et généralement meurent, car le traitement ne permet pas là-bas aux gens de guérir. Ainsi ils n’ont pas compris dans un premier temps que l’isolement en Suisse ne serait que momentané et qu’ils pourraient guérir de la tuberculose. L’expérience d’autres institutions suisses, telles que le dispositif de la lutte contre l’immigration non désirée, mène certaines personnes précarisées à craindre d’être renvoyées à leur sortie de l’hôpital.

En somme, les expériences de l’isolement relatées par les personnes ayant été traitées pour une tuberculose varient. Des éléments liés au parcours de vie de la personne et à ses conditions de vie actuelle, ont un impact sur le vécu de l’hôpital.

Il s’agit avant tout du statut juridique en Suisse qui offre à certaines personnes une forme de stabilité (qu’induisent différents droits, des assurances sociales et

médicales). Tandis que, pour d’autres personnes, le vécu va de pair avec l’absence de certains droits et de certaines assurances. Les conditions de travail et de logement, l’entourage et le réseau social, ainsi que des expériences antérieures avec un dispositif sanitaire ou d’autres dispositifs étatiques dans un autre pays ou en Suisse influencent encore l’expérience que les patientes font de l’isolement.

Les enjeux principaux de l’isolement respiratoire pour les patientes résident dans le fait qu’il peut accentuer une situation de solitude et de précarité antérieure. De plus, la mise à l’écart et la transmission de l’information qu’elles sont contagieuses peut générer des risques pour les patientes, des pertes pouvant mener à dégrader fortement leur vie quotidienne (travail, école, logement, relations). Enfin, l’isolement rend visible une situation « d’être à risque » pour autrui, ce qui représente un souci pour les patientes : lors de l’isolement respiratoire, elles sont très nombreuses à s’inquiéter d’avoir contaminé des proches, préoccupation qui se poursuit parfois encore à la sortie de l’hôpital.

Une femme de plus de quatre-vingt ans isolée en sanatorium au milieu du XXe siècle témoigne d’une expérience propre à cette ancienne institution, où elle s’était sentie entourée. « On était une famille » et « c’était un clan d’amis, on se

Une femme de plus de quatre-vingt ans isolée en sanatorium au milieu du XXe siècle témoigne d’une expérience propre à cette ancienne institution, où elle s’était sentie entourée. « On était une famille » et « c’était un clan d’amis, on se