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Chapitre I. Revue de la littérature et Problématique

1.1 Le Syndrome d’Apnées Obstructives du Sommeil

1.1.1 Présentation biomédicale du Syndrome d’Apnées Obstructives du Sommeil

1.1.1.1 Les différents types de Syndromes d’Apnées du Sommeil (SAS)

Les apnées du sommeil sont des arrêts respiratoires qui apparaissent au cours de la nuit. Il est courant de faire des apnées au cours de son sommeil sans que cela entraine de trouble particulier. Néanmoins, la présence d’un SAS est avérée à partir de cinq apnées par heure (Société de Pneumologie de Langue Française, 2010). Plus le nombre d’évènements respiratoires est important, plus le SAS est sévère. L’indice de sévérité d’un SAS est l’Index d’Apnées Hyponées, l’IAH, qui correspond au nombre d’apnées et d’hypopnées par heure de sommeil. L’hypopnée correspond à une apnée non aboutie, qui se traduit toutefois par une diminution du flux respiratoire d’au moins 30% (Société de Pneumologie de Langue Française, 2010). Le SAS est qualifié de léger lorsque l’IAH est compris entre 5 et 15 évènements par heure, de modéré pour un IAH compris entre 15 et 30 évènements par heure,

et de sévère à partir de 30 apnées-hypopnées par heures (Société de Pneumologie de Langue Française [SdPdF], 2010).

C’est en 1976 que Guilleminault, Tikian et Dement décrivent le type de SAS le plus répandu, caractérisé par des apnées et hypopnées dites obstructives : le Syndrome d’Apnées Obstructives du Sommeil (SAOS). Deux autres types de SAS, le Syndrome d’Apnées Centrales et le Syndrome Mixte, se distinguent du SAOS en raison de l’absence d’effort ventilatoire. Ainsi, trois types d’apnées sont distingués :

- « les apnées obstructives correspondant à un arrêt du débit aérien

naso-buccal pendant au moins 10 secondes avec une persistance d’efforts ventilatoires pendant l’apnée ;

- les apnées centrales correspondant à un arrêt du débit aérien

naso-buccal pendant au moins 10 secondes avec l’absence d’efforts ventilatoires pendant l’apnée ;

- les apnées mixtes correspondant à un arrêt du débit aérien

naso-buccal pendant au moins 10 secondes. L’apnée débute comme une apnée centrale, mais se termine avec des efforts ventilatoires. »

(SdPdLF, 2010).

Notre recherche se focalise exclusivement sur l’observance des patients souffrant du Syndrome d’Apnées Obstructives du Sommeil (SAOS), dont le traitement de référence est l’appareil de Pression Positive Continue.

1.1.1.2 Les mécanismes physiologiques du syndrome

Une apnée ou hypopnée obstructive se produit lorsqu’il y a obstruction, partielle ou totale, du passage de l’air dans le pharynx, en raison des muscles des voies aériennes supérieures qui se relâchent, provoquant ainsi un collapsus (cf. Annexe A.1). Ainsi, « le

Syndrome d'Apnées Obstructives du Sommeil se caractérise par des épisodes répétés d’obstruction des voies respiratoires supérieures qui se produisent pendant le sommeil, le plus souvent associés à une réduction de la saturation en oxygène du sang » (American Academy of Sleep Medicine, 2001).

En raison du manque d’oxygène dans le sang, au cours d’une apnée ou d’une hypopnée, les muscles respiratoires se contractent de manière automatique et de plus en plus

forte afin d’ouvrir les voies aériennes et laisser passer l’oxygène, ce qui provoque un micro-éveil (Fédération Antadir, 2010, p. 40). Ces micro-micro-éveils répétés au cours de la nuit fragmentent la structure du sommeil et rendent ainsi difficile l’accès à la phase de sommeil profond, qualifiée également de sommeil réparateur. Ainsi le SAOS a des conséquences sur la qualité de sommeil des patients qui en souffrent (American Academy of Sleep Medicine, 2001).

1.1.1.3 Le diagnostic du Syndrome d’Apnées Obstructives du Sommeil

Selon l’American Academy of Sleep Medicine (2001, p. 57), les critères diagnostiques du Syndrome d’Apnées Obstructives du Sommeil (SAOS) sont les suivants :

- Critère A : somnolence diurne excessive non expliquée par d’autres facteurs ; - Critère B : au moins deux des critères suivants non expliqués par d’autres facteurs :

o Ronflements sévères et quotidiens,

o Sensations d’étouffement ou de suffocation pendant le sommeil, o Sommeil non réparateur,

o Fatigue diurne,

o Difficultés de concentration,

o Nycturie (plus d’une miction par nuit) ;

- Critère C : Critère polysomnogaphique ou polygraphique : IAH supérieur à cinq. Le SAOS est diagnostiqué à partir d’une évaluation clinique réalisée par un médecin formé à la pathologie du sommeil. Cet examen clinique s’effectue par des enregistrements nocturnes permettant de confirmer le diagnostic : soit par polysomnographie qui étudie à la fois la structure du sommeil et la respiration ; soit par polygraphie ventilatoire qui étudie la respiration seulement. Dans certaines situations, ces enregistrements sont associés à une oxymétrie qui permet de mesurer la saturation en oxygène du sang (SdPdLF, 2010).

1.1.1.4 Les données épidémiologiques

D’une manière générale, le Syndrome d’Apnées Obstructives du Sommeil concernerait 4% de la population adulte, en raison de prévalences similaires retrouvées dans différents pays, tels que les États-Unis, l’Australie, l’Inde, l’Espagne, le Japon ou encore l’Israël (Al Lawati, Patel, & Ayas, 2009; Punjabi, 2008). En France, aucune étude de prévalence ciblant le SAOS n’a été effectuée, cependant des estimations ont été réalisées à partir des données de deux enquêtes déclaratives, dont l’ESPS (Enquête Santé et Protection

Sociale – 2008) intégrant un auto-questionnaire sur le sommeil (Fuhrman et al., 2012). La prévalence d’un SAOS diagnostiqué (déclaré dans l’auto-questionnaire) est estimée à 2,4 % chez les sujets de plus de 16 ans. Selon les auteurs, le SAOS reste sous-diagnostiqué en raison de la prévalence des symptômes évocateurs du SAOS déclarés par 4,9 % des participants de cette étude. Selon les estimations de la Haute Autorité de Santé (2014), effectuées à partir d’une revue de la littérature, le SAOS concernerait 4 à 8% des Français et 2 à 6% des Françaises, ce qui correspondrait à 2.5 jusqu’à 6.4 millions d’adultes en France. Cette estimation est concordante avec les résultats de Young et al. (1993), selon lesquels le sex-ratio est de deux hommes pour une femme à l’âge adulte. De plus, la Haute Autorité de Santé (2014) précise que :

« En tenant compte du vieillissement de la population française et de l’évolution de la prévalence de pathologies comme l’obésité […], il est à prévoir que le nombre de cas de SAHOS tout stade de gravité confondu […] devrait augmenter dans les années à venir. »

(HAS, 2014, p. 54)

Bien que le SAOS peut apparaitre à n’importe quel âge, le pic d’incidence est estimé entre 50 et 60 ans (Lindberg & Gislason, 2000). En effet, la prévalence du SAOS est également dépendante de certains facteurs de risque, tels que le vieillissement, le sexe ou l’IMC (Senaratna et al., 2016).

1.1.1.5 Les facteurs de risque de développer ce syndrome

Les facteurs de risque les plus étudiés dans la littérature scientifique sont : le sexe, le vieillissement, le surpoids, l’anatomie cranio-faciale, l’ethnie, les prédispositions familiales et génétiques ainsi que la consommation de tabac et d’alcool. Nous allons présenter chacun de ces facteurs de risque.

Les hommes présentent une plus grande vulnérabilité à développer un SAOS que les femmes. Selon Punjabi (2008), cette disparité peut être attribuée à des différences anatomiques et fonctionnelles des voies respiratoires supérieures. Les femmes développeraient un SAOS particulier, avec un IAH moins important, davantage d’hypopnées et des évènements respiratoires plus courts. De plus, les hormones sont également susceptibles de jouer un rôle important dans cette prévalence (Punjabi, 2008).

Le vieillissement est fréquemment associé aux troubles du sommeil. Ancoli-Israel et ses collaborateurs (1991) rapportent une prévalence du SAOS chez 70% des hommes et 56% des femmes âgées de 65 à 99 ans. Le lien entre l’âge et le SAOS s’expliquerait par une modification de la tonicité des tissus de la gorge au cours du vieillissement, soit en raison d’un surplus de tissus graisseux autour du pharynx, soit par les changements hormonaux (Shahar et al., 2003). Ces hypothèses pourraient en partie expliquer que les femmes soient plus touchées après leur ménopause.

Un Indice de Masse Corporelle (IMC) supérieur à 30 kg/m2, indiquant la présence d’une obésité, est un facteur de risque de SAOS (Friedman et al., 1999). Une prise de poids d’au moins 10% de son poids initial augmente le risque d’apparition de SAOS par six (Young, Peppard, & Gottlieb, 2002). Cependant, le lien entre le surpoids et le SAOS semble plus complexe, puisque tous les morphotypes ne sont pas concernés de la même manière par le SAOS (Young et al., 2002). Il semble que la circonférence de la nuque soit plus pertinente qu’un IMC global pour expliquer la présence d’évènements respiratoires : plus le tour de cou est important, plus le risque de développer un SAOS l’est également en raison des tissus graisseux autour du pharynx (Young et al., 2002).

Les deux ethnies les plus concernées par le SAOS sont les ethnies afro-américaines et asiatiques. Des études épidémiologiques ont mis en avant que les jeunes adultes afro-américains sont plus concernés par le SAOS (Redline et al., 1997). Cette disparité tend à s’équilibrer à l’âge adulte, mais elle se retrouve à nouveau chez les personnes âgées (Ancoli-Israel et al., 1995). Par ailleurs, les études épidémiologiques en Asie ont démontré une prévalence équivalente à celle des États-Unis (Punjabi, 2008), résultats étonnants en raison de la proportion de personnes souffrant d’obésité nettement inférieure sur ce continent1. En effet, en contrôlant l’âge, le sexe et l’IMC, les Asiatiques présentent un IAH plus élevé que les Caucasiens. Cette différence s’explique par les particularités cranio-faciales des individus d’origine asiatique, notamment caractérisées par une distance entre le cou et le menton moins importante (Lam, Ip, Tench, & Ryan, 2005).

Les morphologies du visage et du cou sont ainsi un facteur de SAOS si leurs caractéristiques induisent un petit espace pharyngé, expliqué par un menton fuyant, une langue épaisse ou un voile de palais épais (Punjabi, 2008). Une tendance familiale a été

1 Par exemple, en 2014 moins de 9% de la population souffrent d’obésité en Chine contre plus de 33% aux

États-Unis ; selon l’OMS, repéré à l’adresse suivante :

décrite dans plusieurs études, celle-ci s’explique par la transmission de ces caractéristiques morphologiques cranio-faciales ainsi que par le risque d’un surpoids familial (Al Lawati et al., 2009). Si parallèlement des chercheurs ont tenté de mettre en évidence la présence d’un gène « SAOS » (Gottlieb et al., 2004), une autre étude n’a pas permis de confirmer une quelconque prédisposition génétique (Al Lawati et al., 2009).

Les consommations d’alcool ou de tabac sont présentées comme des facteurs aggravants du SAOS. La consommation d’alcool entraine en effet une hypotonie des muscles oropharyngés, augmentant le risque d’apnées au cours du sommeil. Cependant les études expérimentales, comme les études observationnelles, ne démontrent pas de manière constante une corrélation entre la consommation d’alcool et la sévérité du SAOS (Young et al., 2002). Ainsi l’influence de la consommation d’alcool sur le collapse du pharynx reste encore mal comprise (Punjabi, 2008). Concernant le tabagisme, l’inflammation des voies aériennes ainsi que le sevrage nicotinique au cours de la nuit seraient en cause (Young et al., 2002). Kashyap, Hock et Bowman (2001) ont démontré qu’il existe une forte prévalence de fumeurs chez les patients souffrant de SAOS (35% contre 18% chez les sujets sans SAOS). D’après leurs résultats, le tabagisme multiplie par trois le risque de développer un SAOS (Kashyap et al., 2001). Le risque pour les anciens fumeurs est non avéré, restant équivalent à celui des non-fumeurs (Punjabi, 2008).

1.1.1.6 La sémiologie du Syndrome d’Apnées Obstructives du Sommeil

Les principaux symptômes du Syndrome d’Apnées Obstructives du Sommeil sont les ronflements et la somnolence diurne excessive (SdPdLF, 2010). Les ronflements sont bruyants et quotidiens, ponctués par les évènements respiratoires qui peuvent être constatés par le patient ou son entourage. La somnolence est provoquée par la fragmentation du sommeil induite par les micro-éveils. Il s’agit d’une perte de la vigilance ou d’épisodes de sommeil involontaires. La somnolence peut avoir des conséquences sur la vie sociale ou professionnelle en fonction de son importance et apparait plus facilement pendant des activités nécessitant peu d’attention, comme regarder la télévision ou être passager dans une voiture (SdPdLF, 2010). Cependant, une somnolence sévère peut même se produire lors d’activités de la vie quotidienne, telles que manger, tenir une conversation ou encore conduire. L’échelle la plus couramment utilisée pour évaluer la somnolence est l’Échelle de

Somnolence d’Epworth (ESS) de Johns (1991). Il s’agit d’un questionnaire d’auto-évaluation ayant une bonne sensibilité pour différencier les degrés de somnolence ainsi que pour prédire

l’altération de la qualité de vie (Johns, 1991 ; SdPdLF, 2010). La somnolence est parfois flagrante et très handicapante pour le patient, mais il arrive aussi qu’elle soit minimisée (AAMS, 2001).

Les autres symptômes considérés comme évocateurs de la présence d’un SAOS sont une nycturie, des céphalées matinales, la bouche et la gorge sèches au réveil ainsi que les troubles de la libido (AAMS, 2001).

1.1.1.7 Les comorbidités cardio-vasculaires de ce syndrome

Le SAOS est associé à la présence des troubles cardio-vasculaires qui comprennent l’athérosclérose, l’hypertension artérielle, les pathologies coronaires, les arythmies cardiaques et l’insuffisance cardiaque (Young et al., 2002). Le SAOS semble en effet être un facteur de risque pour certaines pathologies vasculaires comme l’athérosclérose ou encore les cardiopathies coronaires (SdPdLF, 2010). Il est également associé à un risque accru de survenue d’accidents cardio et cérébro-vasculaires fatals ou non, le pronostic fonctionnel après un accident vasculaire cérébral étant plus pessimiste en présence de SAOS (SdPdLF, 2010). L’importance des désaturations en oxygène répétées au cours de la nuit déterminerait la morbidité cardio-vasculaire associée au SAOS (SdPdLF, 2010). Cependant l’ensemble de ces conclusions, concernant le lien entre SAOS et pathologies cardio-vasculaires, obtiennent un niveau de preuve scientifique compris entre 2 et 4 (SdPdLF, 2010), considérés comme faibles, ne constituant au mieux qu’une présomption scientifique (Haute Autorité de Santé, 2013c). En effet, seul le lien entre le SAOS et l’hypertension artérielle est fortement établi (niveau de preuve 1). Le SAOS est donc un facteur de risque d’hypertension en raison d’une relation « dose-réponse » entre la sévérité du SAOS et le risque de survenue d’hypertension. D’ailleurs en cas d’hypertension résistante au traitement, il est recommandé d’effectuer un dépistage du SAOS (SdPdLF, 2010).

1.1.2 L’impact de cette maladie chronique sur la qualité de vie des