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surmortalité des jeunes adultes

4.3 Le long XIXe siècle

4.3.2 Le poids de la tuberculose

En ce qui concerne la surmortalité des jeunes hommes, la proportion de pays ne connaissant pas de bosse de surmortalité reste faible avant la Première Guerre.

Seuls quelques cas sporadiques en Suède et au Danemark suggèrent une absence de bosse de surmortalité significative. S’il est vrai que dans ces pays, le rebond est plutôt peu prononcé, après analyse au cas par cas, il semble qu’il s’agisse essentiel-lement d’estimations peu optimales de certains modèles.

Derrière cette apparente constance dans l’existence d’une surmortalité des jeunes hommes avant la Première Guerre, se cachent des situations nationales sensiblement différentes. Les deux mêmes groupes identifiés pour les femmes se retrouvent chez les hommes. D’une part, la France et surtout la Norvège, se distinguent nettement par une surmortalité plus élevée, la seconde qui plus est en forte croissance pendant la deuxième partie du XIXe siècle (figure figure 4.16). Un premier groupe de pays part de niveaux bas mais connait une tendance ascendante marquée, comme la Suède, l’Italie ou la Finlande, en plus de la Norvège. Au contraire, un autre groupe connait une baisse plus ou moins régulière de la surmortalité des jeunes hommes, comme la Belgique, les Pays-Bas, la France, voire le Danemark. Il s’agit quasiment des mêmes groupes que pour les femmes.

Figure4.16 – Espérance de vie perdue pour les jeunes hommes avant 1914

1840 1860 1880 1900 1920

0.0

1840 1860 1880 1900 1920

0.0

Au-delà de ces évolutions de long terme, des fluctuations similaires à celles ob-servées pour les femmes se retrouvent chez les hommes. Ces oscillations sont encore mieux visibles sur les données de cohorte, lorsqu’elles permettent de remonter suf-fisamment loin dans le temps (figure 4.17). Pour les deux sexes, les épisodes de haute surmortalité succèdent aux phases de basse surmortalité sur une périodicité d’une dizaine d’années. Ces pics de surmortalité interviennent au début des an-nées 1820 (Suède et France), au milieu des anan-nées 1830 (Danemark et France), au début des années 1840 (Danemark), autour de 1850 (Belgique, France, Pays-Bas,

voire Danemark), autour de 1860 (Norvège, Belgique, France, Danemark, Suède), autour de 1870 (tous les pays observés) et au milieu des années 1880 (tous les pays observés). La synchronicité de ces phases n’est pas parfaite mais est d’autant plus remarquable que les séries nationales ont été traitées séparément et qu’elles corres-pondent entre hommes et femmes.

Figure4.17 – Espérance de vie perdue par cohortes avant 1900

1820 1840 1860 1880

Cette similarité entre hommes et femmes se retrouve dans les cas particuliers (Norvège, France), les évolutions de long terme (deux groupes quasiment iden-tiques) et dans la présence de fluctuations synchronisées. Elle suggère fortement que les causes de la surmortalité des jeunes hommes et des jeunes femmes sont similaires, ce qui exclut d’emblée la mortalité maternelle, et prpobablement d’ori-gine infectieuse en raison des fluctuations qui font penser à des vagues épidémiques.

La cause la plus probable pour expliquer la surmortalité à la fois des jeunes hommes et des jeunes femmes est la tuberculose pulmonaire17. Cette affirmation repose sur deux observations. Premièrement, l’évolution historique de son taux de prévalence correspond globalement aux tendances décrites jusqu’ici. Deuxiè-mement, il s’agit de la cause de décès la plus importante pour les jeunes adultes jusqu’au début du XXe siècle. En effet, l’influence de la tuberculose dans la surmor-talité des jeunes adultes a déjà été mise en évidence par des médecins de l’époque et actuels, certes de manière lacunaire, mais suffisamment convainquante pour établir

17. La tuberculose pulmonaire est la principale cause de décès par infection de la bactérie Mycobacterium tuberculosis(ou bacille de Koch). Au cours des siècles elle a reçu plusieurs noms, notammentphtisie(en Grèce Antique, puis dans le vocabulaire médical), consomption ouWhite Death en anglais, et est généralement abbréviée TB en épidémiologie. Il s’agit d’une maladie d’origine bactérienne avec laquelle l’Homme a dû composer depuis le début de son existence.

Certains chercheurs avancent qu’elle serait apparue il y a 150 millions d’années (Hayman 1984).

Les descriptions les plus anciennes de la tuberculose remontent à la Grèce Antique et il est possible qu’elle ait fait plus de morts au cours de l’histoire de l’humanité que n’importe quel autre pathogène (Daniel 2006).

un lien de causalité. Reprenons plus en détails chacun de ces deux arguments.

Evolution internationale de la prévalence de la tuberculose

En l’absence de séries historiques internationales de la mortalité par tubercu-lose, il est difficile de comparer précisément les chiffres issus de nos calculs avec ceux liés à la tuberculose18. Le scénario voulant que les différences observées dans le poids de la surmortalité des jeunes adultes (figures 4.16) soient principalement dues aux niveaux de mortalité tuberculeuse dans chaque pays semble plausible.

Même si certains chercheurs situent le pic d’incidence au XVIIIe siècle (Grigg 1958), d’autres affirment que les taux du XVIIIe siècle sont surestimés (McKeown and Record 1962;Puranen 1991). Par conséquent, le pic de surmortalité enregistré entre 1870 et 1890 pourrait correspondre à la période de prévalence maximum de la tuberculose, bien que les preuves de cette théorie n’existent pas à l’heure actuelle.

Quoi qu’il en soit, de fortes variations transnationales et au cours du temps sont nettement observables au cours du XIXe siècle et correspondent aux connaissances que nous avons de l’évolution de la tuberculose à cette époque.

En effet, la Norvège, pays de notre échantillon le plus affecté par la surmorta-lité des jeunes hommes et femmes avant la Première Guerre, est connue pour avoir subi une mortalité due à la tuberculose particulièrement élevée jusqu’aux premières années du XXe siècle. Wood (1991) rapporte notamment que la mortalité tuber-culeuse y a triplé entre 1855 et 1905, passant d’environ 10 à 30 décès pour 10’000 habitants (ces estimations sont par ailleurs jugées conservatrices par l’auteur en raison du manque de diagnostics professionnels dans les campagnes). Une évolu-tion similaire mais moins extrême semble avoir eu lieu en Suède (Puranen 1991).

D’autres pays absents de notre échantillon ont également souffert d’une péjora-tion de la mortalité due à la tuberculose au cours du XIXe siècle. C’est notamment le cas de l’Irlande, dont le taux de mortalité surpasse même celui de la Norvège et progresse jusqu’à la fin du XIXe siècle. Quant à la France, elle semble avoir connu un niveau de mortalité due à la tuberculose très élevé tout au long du siècle (New-sholme 1906;Preston and Walle 1978). Or, dans chacune des analyses précédentes, la France ressort en deuxième place des pays ayant la plus haute surmortalité des jeunes adultes, après la Norvège.

Dans une étude comparative de l’évolution des causes de mortalité, Preston et Nelson mettent également en évidence la particularité des cas norvégien et suédois, pour lesquels ils excluent une explication climatique pourtant avancée plus tard parCaselli(1991, 72), ainsi que la forte baisse enregistrée en Angleterre, où "death rates fomr tuberculosis and other infectious diseases went from exceptionally high

18. Nous avons depuis pris connaissance de l’ouvrage dePreston et al.(1972), qui met à dispo-sition des taux de mortalité par cause de décès , âge et sexe pour plus d’une dizaine de pays et une centaine de populations au total. Cependant, toute trace électronique de ces données semble perdue d’après les contacts pris avec les auteurs survivants. Un projet de numérisation de l’ou-vrage est en cours au sein de l’équipe de la HMD à Berkeley, ce qui pourrait offrir une base de données très intéressante dans un avenir proche.

values in 1861 to average values (other infectious diseases) or below average values (tuberculosis) in 1901" (Preston and Nelson 1974, 36).

Au même moment, la mortalité tuberculeuse était déjà en recul dans d’autres régions d’Europe, qui sont pour certaines absentes de notre échantillon. En An-gleterre, la baisse commence avant le milieu du XIXe siècle pour des raisons qui restent disputées entre, d’une part les tenants de l’amélioration du niveau de vie en général et de l’alimentation en particulier (McKeown et al. 1975), et d’autre part ceux qui y voient une conséquence indirecte desPoor law de 1834 qui ont imposé que le secours aux pauvres ait lieu au sein des établissements publics, isolant ainsi les pauvres, principales victimes de la tuberculose, du reste de la population (Wil-son 2005). Caselli montre pourtant qu’en 1880 encore, l’Angleterre et le Pays de Galle auraient eu une espérance de vie à la naissance inférieure à l’Italie si les effets négatifs de la tuberculose n’avaient pas été compensés par des avantages nets sur d’autres causes de décès. L’auteur attribue cet avantage italien en termes de tuber-culose à l’industrialisation anglaise galopante associée à des "mauvaises conditions de vie et de travail", qui s’expriment notamment par un fort degré de promiscuité (overcrowding) (Caselli 1991, 76). En Ecosse, en Prusse et dans l’état américain du Massachusetts, la baisse a débuté dans les années 1880 (Newsholme 1906), des évo-lutions qui peuvent être mises en lien avec la découverte du bacille de Koch en 1882.

En ce qui concerne plus particulièrement les pays inclus dans notre échantillon et qui connaissent une baisse de la surmortalité des jeunes adultes au XIXe siècle, les informations les plus précises concernent la Belgique. Dans ce pays relativement neuf puisqu’il ne prit son indépendance des Pays-Bas qu’en 1830, ce qui peut ex-pliquer d’ailleurs la similitude de sa trajectoire avec celle de son voisin du nord, le nombre de décès dus à la tuberculose n’a fait pratiquement que baisser depuis le début des séries de données en 1851 (Devos 2006, 70). Alors qu’en 1851, ils re-présentent 19% des décès, soit près du double de la seconde cause de mortalité, ils ne comptent plus que pour 15% en 1870, soit à peine 2 points de plus que les bronchites. La mortalité liée à la tuberculose diminue donc même plus rapidement que les autres causes de décès. Malheureusement, la période de hausse temporaire de la surmortalité des jeunes adultes identifiée plus haut entre 1870 et 1890 est justement manquante dans les données belges, mais la tendance générale est claire.

Devos attribue notamment cette baisse précoce de la tuberculose à l’implication des médecins belges dans l’information qu’ils transmettaient au gouvernement, ainsi que dans le développement de la statistique médicale et la légitimation des inves-tissements dans les politiques de santé publique (Devos 2006, 71).

Il existe donc dans la littérature existante sur l’histoire de la tuberculose des éléments solides suggérant que les différences internationales observées dans la sur-mortalité des jeunes adultes reflètent en grande partie des différences dans le taux de mortalité dû à la tuberculose. Quelles que soient les explications avancées pour ces différences, la position relative de la France, la Norvège et la Belgique sont co-hérentes avec les différentiels de mortalité par tuberculose observés dans ces mêmes pays jusqu’au début du XXe siècle.

Incidence de la tuberculose par âge

La corrélation entre le niveau de surmortalité des jeunes adultes et le poids de la tuberculose constitue un premier indice permettant d’expliquer les évolutions nationales divergentes observées plus haut (figure 4.16). Elle n’explique cependant pas pourquoi les jeunes adultes seraient plus touchés que le reste de la population par une maladie infectieuse qui, à première vue, est tout autant susceptible de toucher les enfants ou les adultes plus âgés. Le lien entre surmortalité des jeunes adultes et tuberculose ne peut donc être confirmé que s’il est possible d’affirmer que la tuberculose contribue à créer une déviation significative du risque de décès par âge par rapport à l’évolution exponentielle liée à la sénescence.

Ce lien entre surmortalité des jeunes adultes et tuberculose est pour ainsi dire absent de la littérature démographique classique. Tous les démographes actuels trai-tant de la surmortalité des jeunes adultes la justifient plus ou moins explicitement par la surreprésentation des accidents et des suicides à ces âges-là. Ils ont raison dans la mesure où ils ne prennent quasiment jamais en considération les données antérieures aux années 1950. Pour les actuaires de l’époque, pourtant, le rapport à la tuberculose semble évident. Barnett écrit, par exemple, en 1955 que "the dip and trough in the mortality curve in the twenties is, subject to certain limitations, due to accident and tuberculosis" (Barnett 1955, 111). Cette observation est également soulignée par des médecins de l’époque, particulièrement en Angleterre (Springett 1950;Frost 1939).

La courbe particulière du taux de décès par tuberculose est également évidente dans les statistiques historiques. Par exemple, entre 1871 et 1951, le recul de la tu-berculose a contribué à 14% de l’augmentation de l’espérance de vie en Angleterre tant pour les hommes que les femmes, soit 3.73 ans (H) et 4.14 ans (F). Or, respec-tivement 2.37 ans (H) et 2.7 ans (F) de ces gains ont été réalisés sur les 15-39 ans.

Deux tiers des gains d’espérance de vie liés à la tuberculose sont donc réalisés sur les jeunes adultes. En Italie, le scénario est similaire mais puisque la tuberculose y était moins présente dès l’origine, sa contribution au total des gains d’espérance de vie y est inférieure. Entre 1881 et 1951, elle n’a en effet contribué qu’à 7.5% (H) et 10% (F) de l’augmentation de l’espérance de vie, mais à 57% (H et F) des gains sur les 15-39 ans (Caselli 1991, 80). Si ces succès sont si concentrés sur les jeunes adultes, c’est donc que ces derniers devaient être plus concernés par la tuberculose avant la diminution de cette cause de décès.

En Suisse également, il est possible de montrer que la tuberculose est respon-sable presque entièrement de la bosse de surmortalité des jeunes adultes à la fin du XIXe siècle (figure 4.18). En 1885, quasiment un décès sur deux entre 20 et 30 ans est dû à la tuberculose, tant pour les hommes que les femmes. En outre, la probabilité de décéder de cette maladie atteint un maximum à ces âges avant de stagner, voire diminuer, particulièrement dans le cas des femmes.

En retirant la mortalité due à la tuberculose, le taux de mortalité ne

pré-Figure4.18 – Mortalité due à la tuberculose en Suisse en 1885

0 20 40 60 80

−8.5

−8.0

−7.5

−7.0

−6.5

−6.0

−5.5

âge ln(qTB)

Quotient de mortalité par âge

Hommes Femmes

âge πTB

0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5

0 20 40 60 80

Proportion de décès dus à la TB

Hommes Femmes

sente plus qu’une très faible bosse de surmortalité (figure 4.19)19. Dans le cas des hommes, l’espérance de vie observée est de 42.4 ans, alors que l’espérance de vie calculée après suppression des décès dus à la tuberculose sur tous les groupes d’âge se monte à 46.4 ans, soit un gain hypothétique de 4 ans. Ce résultat est certes supérieur à l’espérance de vie perdue à cause de la bosse de surmortalité des jeunes adultes (eh= 0.9 an), mais cela s’explique par le fait que la tuberculose ne touche pas que les jeunes adultes. De plus, la simple inspection visuelle de la probabilité de décès par âge sans tuberculose montre que la surmortalité des jeunes adultes y est quasiment absente.

Les mécanismes étiologiques à la source de cette suraffection des jeunes adultes par la tuberculose sont étonnamment mal comprises. Cela s’explique probablement par le fait que le cycle de développement de la tuberculose elle-même est mal connu (Vynnycky and Fine 1997, 183). Cette maladie infectieuse a en effet la particularité de pouvoir s’enkyster après la primo-infection, sans que le sujet ne le réalise, puis de se manifester plusieurs années plus tard. Une hypothèse consiste donc à expliquer le relatif faible taux de mortalité des enfants par le temps de latence important entre la primo-infection et le développement de la maladie. Ce n’est toutefois pas la seule interprétation plausible.

Selon des études épidémiologiques récentes, le pic de mortalité par tuberculose autour des jeunes adultes serait dû à la combinaison à cet âge d’une incidence

d’in-19. Cela nécessite de faire l’hypothèse d’indépendance entre les cause de décès, c’est-è-dire qu’un individu "sauvé" d’un décès par tuberculose ne soit pas affecté dans son risque de décéder de toute autre cause. Le non-respect de cette hypothèse entraine une dépendance entre le moment de décès d’une certaine cause et le moment de fin d’observation (censure à droite) provoqué par le décès d’autres causes concurrentes (Putter et al. 2007). Cette hypothèse est néanmoins la seule possible en l’absence d’indications sur la corrélation entre causes de mortalité (Tsiatis 1975;Tsai et al. 1978). De plus, elle semble tenable vu les faibles taux de mortalité enregistrés sur les jeunes adultes après soustraction de la tuberculose.

Figure4.19 – Mortalité sans et avec tuberculose en Suisse en 1885

0 20 40 60 80

−6

−5

−4

−3

−2

âge

ln(q)

toutes causes sans TB

Hommes

0 20 40 60 80

−6

−5

−4

−3

−2

âge

ln(q)

toutes causes sans TB

Femmes

fection élevée (risque de contracter le bacille) et un risque plus grand de développer la maladie une fois infecté (Vynnycky and Fine 1997, 198). Quant à la cause même de cette vulnérabilité accrue des jeunes adultes, elle a été débattue depuis long-temps. Si certains l’ont attribuée à des facteurs hygiéniques et environnementaux (mauvaise alimentation et conditions de travail) ou socioéconomiques ("the strain and stress of competitive wage-earning", "the speed of life"), d’autres ont avancé l’influence des courants migratoires, alors que d’autres encore ont proposé l’hypo-thèse selon laquelle, suite à un recul historique des infections pendant l’enfance, les jeunes adultes deviendraient moins bien immunisés20 (Hill 1936). Cette dernière piste a reçu un certain crédit plus récemment grâce à une modélisation des dyna-miques d’infection qui a permis de montrer que la baisse des taux d’infection, due notamment au vaccin BCG, a engendré paradoxalement une augmentation de la morbidité tuberculeuse chez les jeunes adultes. Cela explique que ce groupe d’âge ait été plus résistant aux progrès en termes de mortalité (Vynnycky and Fine 1997).

De plus, la bosse de surmortalité des jeunes adultes est souvent plus évidente lorsqu’on l’observe sur des données longitudinales (par cohorte). Ce type de don-nées par cause de décès étant encore plus rare que les dondon-nées de période, il est impossible de l’illustrer au niveau suisse ou même sur d’autres pays. Par contre, d’autres études ont permis de monter clairement que dans un contexte de baisse de la mortalité due à la tuberculose, la surmortalité s’étend aux âges plus avancés lors-qu’on les observe de manière transversale, puisque les plus anciennes cohortes sont plus touchées que les nouvelles. En d’autres termes, "if improvement in mortality occurs mainly by a reduction of morbidity while the case fatality remains unalte-red, and if most cases of tuberculosis originate in young adult life, it follows that the mortality at ages above young adult life will depend directly on the morbidity of the group in young adult life" (Springett 1950, 369). Il est donc probable que le pic de mortalité par tuberculose parfois observé aux âges avancés ne représente pas

20. Il s’agit d’une hypothèse intéressante pour expliquer la phase des années 1870 à 1890.

un repoussement du pic par âge, mais indique plutôt que les taux élevés observés chez les personnes âgées résultent de taux d’infection élevés subis plus tôt dans leur vie (Frost 1939, 96). Cela explique pourquoi le taux de mortalité par tuberculose semble stagner après 30 ans dans une perspective transversale, alors qu’en réalité, dans chaque cohorte, ce sont toujours les jeunes adultes qui sont systématiquement plus touchés (figure 4.18).

Une autre ligne d’interprétation mérite qu’on s’y attarde un peu plus longue-ment, car elle fournit une clef de lecture particulièrement utile, qui permet de lier la compréhension de la baisse de la tuberculose avant l’introduction des antibiotiques modernes avec celle de la surmortalité des jeunes adultes. Il s’agit du lien avéré entre tuberculose et pauvreté. Nous y reviendrons dans la section suivante, lorsque nous nous intéresserons à l’évolution de la surmortalité des jeunes adultes pendant l’entre-deux-guerres.

4.4 Les deux Guerres mondiales et la grippe de