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CHAPITRE I : LA CONSTITUTION DES SYSTEMES DE CULTURE MARAICHERS DANS

2. Résultats sur la localisation des parcelles et le positionnement de la tomate dans les successions de culture

2.3. La place de la tomate dans le territoire maraîcher et dans les successions de culture

exploitations croisent de fait deux échelles de temps : l’infra-annuel et le supra-annuel, ce dernier donnant un cadre dans lequel les sucessions infra-annuelles sont raisonnées. Nous commençons donc par analyser et catégoriser les successions supra-annuelles.

2.3.1. Les successions supra annuelles

Trois grands types de systèmes de culture maraîchers sont rencontrés en saison sèche en fonction de l’occupation du sol pendant la saison des pluies (Figure II-3) :

Ü Maraîchage / interculture / maraîchage (SC1) : deux à trois cycles de cultures maraîchères peuvent être réalisés pendant la saison sèche. Les terres ne sont pas cultivées pendant toute la saison des pluies, puis sont à nouveau mises en culture la saison sèche suivante.

Ü Maraîchage / culture non maraîchère / interculture / maraîchage (SC2) : comme précédemment, plusieurs cycles de cultures maraîchères se succèdent durant la saison sèche. En fin de saison, une céréale ou légumineuse est installée (souvent du maïs ou du « voeme7 » seul ou en association), suivie d’une période d’inter culture de un mois à un mois et demi jusqu’au démarrage de la campagne de saison sèche suivante. Pendant la saison des pluies, l’agriculteur s’occupe en priorité de ses parcelles vivrières (surtout bananiers et manioc) en s’adonnant à d’importantes opérations manuelles que sont le défrichage, le désherbage et la plantation. Ces cultures n’étant pas irriguées, il est donc important que les plantations se fassent pendant cette période, et l’agriculteur partage alors son temps inégalement entre le maraîchage et les cultures vivrières au profit de cette dernière. Ce sont essentiellement les Mahorais qui possèdent des champs vivriers.

Ü Maraîchage continu (SC3) : certains producteurs continuent à produire en saison des pluies en plein champ mais sur une surface réduite. Les espèces rencontrées sont la tomate, le concombre, l'aubergine et dans une moindre mesure les laitues type batavia. Cette pratique reste néanmoins marginale à cause des risques culturaux importants (pression parasitaire, dégâts dus aux pluies). Cependant, si les récoltes sont bonnes, le producteur peut en retirer un gain important car les prix à la vente sont élevés en cette période. Les producteurs clandestins qui ont une bonne technicité pratiquent souvent le maraîchage en saison des pluies pour son intérêt spéculatif mais aussi parce qu’ils n’ont pas de champ vivrier. S’ils ne peuvent pas cultiver en saison des pluies, ils s’impliquent dans une activité extra-agricole en attendant de reprendre le maraîchage la saison sèche suivante.

Au sein d’une même exploitation, on peut rencontrer ces différents systèmes de culture supra annuels (c’est par exemple le cas de Lep, Ybo, Ord, Nba …). On rencontre surtout les systèmes SC1 et SC2. Le système SC3 n’est pas fréquent car il est très difficile de produire des légumes à Mayotte en plein champ en saison des pluies à l’exception de quelques espèces rustiques telles que l’aubergine et les brèdes. Les cultures sous abri sont par ailleurs encore très peu développées à Mayotte.

2.3.2. La place de la tomate dans les successions infra année

Les principales successions incluant la tomate, rencontrées sur les deux campagnes de production, sont indiquées à la figure II-4. Pour identifier les différentes successions, nous avons recensé les cultures présentes en saison des pluies sur les différentes parcelles maraîchères, et celles présentes en saison des pluies sur ces mêmes parcelles.

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Compte tenu du cycle de culture relativement long de la tomate (4 à 4,5 mois) et du risque d’avoir des sols fortement infestés par Ralstonia solanacearum (agent du flétrissement bactérien des Solanacées), les agriculteurs effectuent généralement un seul cycle de tomate sur la même parcelle (86% des cas) au cours d’une saison ; seuls trois agriculteurs affirment effectuer deux cycles successifs de tomate sur la même parcelle en saison sèche à cause du manque de surface cultivable.

En dehors d'une interculture ou d’une friche qui constituent le premier précédent cutlural de la tomate (54% des cas), les cultures rencontrées avant la mise en place du 1er cycle de tomate en saison sèche sont des céréales (souvent du maïs, quelquefois associé au voeme, et épisodiquement du riz pluvial) dans 25 % des cas, des Cucurbitacées (courgette, concombre, melon) dans 11 % des cas et de la salade dans 8% des cas.

La tomate est surtout plantée en début de campagne de saison sèche (vers mai-juin) en tête de rotation (80% des situations).

Les cultures rencontrées après la tomate en saison sèche sont le maïs (25% des cas), le chou (8%), les Cucurbitacées (7%), les brèdes mafane et morelle (4%), la tomate (4%) et la salade (1%). La parcelle est souvent laissée en friche après la culture de tomate jusqu’à la prochaine saison sèche (50% des cas).

Par interculture, nous désignons une courte période de quelques semaines à quelques mois, séparant deux cycles de cultures maraîchères, pendant laquelle la parcelle n’est pas cultivée et reste enherbée. Par friche, nous désignons une parcelle maraîchère non cultivée depuis au moins six à sept mois, soit au minimum la durée d’une saison de culture.

2.3.3. La place de la tomate dans les successions selon les catégories d’agriculteurs

On cherche ici à analyser les relations possibles entre les successions de culture incluant la tomate et les types d’agriculteurs ou les groupes d’accès au foncier présentés précédemment (Figure II- 4).

Chez les agriculteurs du type C, on observe parfois deux cycles de culture de tomate par saison. En effet, ces agriculteurs intensifient leur système et diversifient les cultures en vue de satisfaire leur clientèle en termes de diversité de produits et de régularité de production. A l’opposé les trois agriculteurs du type b3, c'est-à-dire les doubles-actifs, ne font qu’un cycle de tomate en saison sèche par parcelle. Après la récolte, la parcelle est laissée en friche jusqu’à la prochaine saison. Ces agriculteurs du type b3 ont peu d’expérience agricole en maraîchage et ont tendance à s’appuyer sur les compétences techniques d’ouvriers clandestins qui travaillent pour eux. Il est assez courant que ces ouvriers quittent l’exploitation avant la fin de campagne pour cause de désaccord avec le propriétaire (lié à l’indemnisation, aux conditions de prêt d’un terrain, de partage des récoltes…). Les productions sur l’exploitation peuvent ainsi être très diversifiées et intensives selon l’investissement personnel que l’individu double-actif y consacrera, soit directement au travers de ses compétences et du temps passé sur l’exploitation, soit en recrutant du personnel qualifié. Il est à noter qu’une partie des doubles actifs (non représentés dans notre échantillon) sont des techniciens salariés d’organismes agricoles (Daf, Conseil Général) et possèdent par conséquent une expérience avérée en production végétale. Les double- actifs se spécialisent généralement sur quelques productions et ne diversifient pas à outrance.

Chez les agriculteurs du type b2, c'est-à-dire les clandestins, le profil des successions est différent selon la durée d’occupation du terrain par l’agriculteur :

- Dans le groupe Gf2 où les agriculteurs changent souvent de terrain (après quelques années de culture), on observe deux cas de figure : i) un seul cycle de tomate puis le terrain est laissé en friche ou planté en maïs de saison des pluies, ii) ou deux cycles successifs de cultures maraîchères comprenant un cycle de tomate suivi d’une culture à cycle court (brèdes, chou, concombre). Dans tous les cas, l’agriculteur défriche la parcelle pour planter en priorité de la tomate.

- Dans le groupe Gf3 où les agriculteurs ont une certaine stabilité foncière, on observe surtout deux cycles de culture en saison sèche (55% des cas) avec différentes combinaisons : tomate-concombre

ou courgette, tomate-chou, haricot-tomate, concombre-tomate, tomate-brèdes, tomate-piment, tomate-tomate. La tendance est à l’intensification, les agriculteurs recherchant le profit maximal. Lorsque la parcelle ne reçoit qu’un seul cycle de tomate en saison sèche, soit elle est laissée en friche en saison des pluies, soit cultivée en maïs.

- Dans le groupe Gf4, où les agriculteurs n’ont pas la certitude de cultiver le même terrain l’année suivante, la succession type qui se dégage surtout est « interculture/friche-tomate-interculture », soit un seul cycle de tomate en saison sèche. Il est rare d’observer une autre culture en succession avec la tomate (concombre-tomate). Les autres espèces cultivées sur l’exploitation (sans rotation avec la tomate) sont la laitue, le concombre, la courgette, les brèdes (mafane, morelle, pet-saï) et occasionnellement l’oignon, le melon, le piment et le chou. La tomate reste la culture pivot. Les brèdes sont surtout destinées à la consommation familiale.