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CHAPITRE I : LA CONSTITUTION DES SYSTEMES DE CULTURE MARAICHERS DANS

1. Concepts et formalisation des résultats

Pour comprendre comment les agriculteurs raisonnent leurs décisions techniques pour la conduite de la culture de tomate à l’échelle de la parcelle et de la saison de culture, nous nous appuyons sur le concept de modèle d’action. La formalisation des processus décisionnels fait appel à différentes catégories de variables décisionnelles et de règles de décisions mises en évidence dans des travaux antérieurs et jouant un rôle dans la gestion technique d’une culture (Aubry et al., 1998, Dounias, 1998 ; Mathieu, 2005). Les différents types de variables et de règles de décisions qui sont présentés ci après tiennent compte de ce niveau d’analyse (Aubry, 1995).

- Les variables décisionnelles sont les variables qui définissent l’objet sur lequel porte la décision

(une opération par exemple) et ce que l’agriculteur doit décider (des dates, des doses par exemple). Elles décrivent d’une part les modalités de réalisation d’une opération (avec la constitution de chantiers possibles), et d’autre part son positionnement dans le temps, avec notamment la définition de l’intervalle de temps possible d’une opération (IT).

- Les règles de décision sont de plusieurs catégories selon les variables qu’elles contribuent à

déterminer. On distingue au moins deux types de règles : celles qui jouent sur le positionnement

des opérations dans le temps et celles qui jouent sur leurs modalités.

• Concernant les règles de positionnement dans le temps des opérations, on distingue classiquement :

- Les règles d’enchaînement qui définissent l’ordre de succession des opérations culturales parmi les possibles sur chaque parcelle (qui peut éventuellement varier selon les situations).

- Une autre catégorie de règles permet d’organiser et de structurer le temps en dépassant l’échelle de la parcelle. Elle regroupe les règles de déclenchement et les règles de fin qui, pour un ensemble de parcelles de tomates à l’échelle de la saison de culture, conditionnent le début et la fin d’une opération (au sein de l’intervalle de temps IT défini pour cette opération) le plus souvent à l’atteinte d’une valeur seuil pour un

CHAPITRE 2 : FORMALISATION DE LA CONDUITE CULTURALE DE

LA TOMATE DE PLEIN CHAMP

indicateur (date calendaire, stade repère…). Ainsi, le début des plantations sur la saison culturale est dépendant d’un évènement climatique (fin de la saison des pluies qui se traduit par un sol ressuyé). La règle de fin des plantations s’exprime généralement par un mois calendaire, celui de septembre, qui doit permettre de récolter les fruits avant les premières grosses pluies marquant le démarrage de la saison des pluies.

• Concernant les règles relatives aux modalités des opérations, on distingue :

- Les règles de constitution de chantiers déterminent les mobilisations des moyens en main d’œuvre et en matériel, pour la constitution des chantiers possibles pour réaliser une tâche culturale. « Une tâche culturale peut être constituée d’une succession

d’opérations élémentaires à réaliser à la suite les unes des autres de façon très rapprochée » (Dounias, 1998). Le chantier précise le matériel et la main d’œuvre

nécessaires à la réalisation d’une opération.

- Les règles précisant les modalités (nature, doses etc.) d’une opération comportent les règles de constitution des modalités d’une opération et les règles d’attribution des différentes modalités constituées aux parcelles (ou aux sous unités de gestion)

- Une catégorie transversale de règles est représentée par les règles d’arbitrage, qui peuvent jouer entre cultures et/ou entre opérations pour une culture. Cela n’implique pas nécessairement un ordre chronologique entre les opérations soumises à l’arbitrage, c'est-à-dire que cela ne se traduit pas par un enchaînement unique sur toute la portion d’espace concernée ni sur toute la durée des IT concernés. L’arbitrage peut aussi se traduire par l’interruption d’une opération sur un espace afin de démarrer ou de poursuivre une autre action qui est prioritaire sur les autres. C'est-à-dire que pour une opération, on peut avoir plusieurs règles d’arbitrage : O1 est prioritaire sur O2 pendant la période [t1, t2] sur l’espace (ensemble de parcelles ou ensemble de planches par exemple) considéré, puis O2 (ou O3) devient prioritaire sur O1 pendant [t2, t3].

Ces notions d’arbitrage existent fortement au niveau de la sole (une opération entre plusieurs parcelles), voire entre soles (des opérations ou la même entre plusieurs cultures), mais aussi au niveau de la parcelle (entre différentes unités de gestion : le « trou », les lignes ou planches de plantation) comme nous le verrons plus loin.

Dans notre cas, ces règles sont activées lorsque plusieurs opérations sont concomitantes, que leur enchaînement ne peut pas être défini à l’échelle des unités de gestion concernées et qu’elles ne peuvent pas être menées ensemble (manque de moyens pour les mener simultanément donc chantiers mobilisant, pour partie au moins, les mêmes matériels et/ou la même main-d’œuvre) : on a alors concurrence réelle entre ces opérations, et donc nécessité de définir des priorités dans le temps et dans l’espace. Pour des opérations concomitantes portant sur la conduite de la végétation (tuteurage, taille, effeuillage, égourmandage), l’agriculteur définit une succession entre opérations à l’échelle de la parcelle, et il peut arbitrer en faveur de différentes unités de gestion. Par exemple, certains agriculteurs vont s’organiser pour que ces opérations de conduite de végétation s’enchaînent dans un même chantier à l’échelle du plant, par contre de ce fait ils arbitrent au sein de la parcelle, en découpant des sous unités de gestion pour ces opérations (les lignes ou planches qu’ils traitent ensemble). D’autres agriculteurs peuvent s’organiser différemment pour enchaîner les opérations à l’échelle d’une sous unité de gestion par exemple : ils réalisent le tuteurage pour tous les plants de la planche, puis la taille, puis l’effeuillage.

- Les unités de gestion. L’agriculteur structure la parcelle de tomate en plusieurs unités spatiales sur lesquelles les opérations sont faites à un moment donné. L’unité élémentaire de gestion est le trou (ou le plant en ce sens qu’on ne repique qu’un seul plant par trou). Une unité surfacique plus importante est la planche ou lignes de plantation qui est en fait une sous parcelle et à un niveau plus englobant, on a la parcelle où certaines décisions techniques culturales trouvent leur application (travail mécanisé du sol, désherbage, …). Ces unités sont aussi bien des unités de conception des opérations que des unités d’application des techniques.