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CHAPITRE I : ELEMENTS DE BIBLIOGRAPHIE SUR LE FONCTIONNEMENT DU PEUPLEMENT

2. Influence des facteurs et des conditions du milieu sur le rendement

2.3. Les facteurs biotiques

2.3.1. Les adventices

Plusieurs auteurs (Friesen, 1979 ; Weaver and Tan, 1983 ; Sajjapongse et al., 1989) ont montré qu’un désherbage total entre le 28ème et le 35ème jour après plantation, soit vers le stade de floraison - nouaison, empêche toute baisse de rendement, tout comme le positionnement d’un herbicide de pré- émergence de 24 à 36 jours de persistance d’action, ou le positionnement d’un herbicide post-émergent dans un délai inférieur à 24 jours après plantation. Kasasian et Seeyave (1969), quant à eux, montrent que la tomate est surtout sensible à la compétition par les mauvaises herbes pendant le premier mois qui suit la plantation. Cette compétition s’exerce pour l’accès à l’eau, aux éléments minéraux et surtout pour l’interception du rayonnement, et se traduit par une baisse du poids de matière sèche des plants de tomate et du rendement. Plus courte est la période où la parcelle est exempte d’adventices ou plus le désherbage intervient tardivement après la plantation, plus la diminution du poids sec et du nombre de fruits apparaît tôt (Weaver and Tan, 1983). Il convient donc pour maximiser le rendement de maintenir la parcelle propre pendant la période critique qui s’étale de la plantation à la floraison du troisième bouquet (Bezert et al., 1999 ; Dumas et al., 1999), ce que semblent faire par expérience la majorité des agriculteurs à Mayotte. Après la floraison-nouaison du troisième bouquet qui survient trente à quarante jours après la plantation, l’absence de désherbage est sans conséquence sur le rendement.

2.3.2. Les maladies et ravageurs

La présentation ci-dessous se résume aux problèmes parasitaires rencontrés à Mayotte.

2.3.2.1. L’action des ravageurs

Les principaux ravageurs pouvant affecter le rendement à Mayotte sont les chenilles des noctuelles, la mouche des fruits, l’acariose bronzée, les mouches mineuses et les aleurodes qui sont vecteurs du virus de la virose de l’enroulement (Tableau III-1). Les dégâts sont dus à l’activité nourricière de ces ravageurs au cours de laquelle des parties importantes de plantes peuvent être affectées. Les dégâts peuvent être le creusement de galeries à l’intérieur du mésophylle de la feuille (cas des mineuses), la transmission de virus lors de la succion du contenu des cellules épidermiques (cas de

Bemisia tabaci), le creusement de trous à l’intérieur des fruits (cas des larves de la mouche de la tomate

et des noctuelles). Les ravageurs piqueurs-suceurs (thrips, aleurodes, acariens) ne causent pas seulement la destruction de la chlorophylle, mais aussi des défoliations indirectes, et favorisent la pénétration de microorganismes pathogènes par les blessures qu’ils ont causées aux tissus végétaux (Berlinger, 1986) En zones tropicales où il n’y a pas de période de froid pour ralentir le cycle de multiplication de ces ravageurs, la pression parasitaire se maintient toute l’année et les agriculteurs ne font pas de pause dans les traitements. Il n’y a pas eu d’études à Mayotte sur la dynamique de population des ravageurs pour quantifier les populations selon les périodes de l’année et connaître leur répartition. La flore locale constitue très probablement un réservoir important pour le maintien de ces ravageurs, car elle recèle de nombreuses Solanacées indigènes (aubergine, morelle, Datura…). La mouche de la tomate est particulièrement dommageable car la larve fore un trou au-dessous du calice, et on s’aperçoit que le fruit a été piqué et impropre à la vente souvent au moment de la récolte ou quand il est pourri. Les nématodes à galles (Meloidogyne sp.) sont peu fréquents dans les parcelles maraîchères, mais les attaques sévères se traduisent également par la perte rapide de la culture.

La littérature est très pauvre sur la quantification des pertes de production et leur relation avec la densité de population des ravageurs de la tomate. Les pertes directes de rendement dues aux ravageurs attaquant les fruits et les jeunes plants repiqués sont assez faciles à quantifier, contrairement aux dégâts causés à l’appareil foliaire. Des évaluations d’impact de ravageurs sur le rendement ont été faites en testant différents niveaux de défoliation (Slack, 1981 ; Stacey, 1983), mimant les dégâts foliaires des parasites. Les feuilles proches des fruits sont de première importance. Le nombre et le poids de fruits diminuent fortement avec la sévérité de l’effeuillage (Stacey, 1983). La défoliation entraîne également un retard de floraison, mais favorise la précocité de maturation. L’activité photosynthétique dans les cellules foliaires altérées par les mineuses par exemple est très réduite, et ne se limite pas seulement aux zones minées (Berlinger, 1986). Les fruits sont plus sensibles aux mineuses quand ils sont à mi- grossissement. Les acariens en revanche agissent tôt quand les fruits sont encore petits. Ils causent une diminution du rendement en inhibant le développement des fruits.

D’une manière globale, les insectes et les acariens agissent d’une part sur la réduction de la capacité photosynthétique de la plante, et d’autre part sur la diminution du nombre de fruits et de leurs calibres par action directe ou indirecte (diminution des assimilats carbonés). Les nématodes à galles conduisent souvent à la mort du plant.

2.3.2.2. L’action des maladies

Les principales maladies contre lesquelles les agriculteurs traitent sont l’alternariose, la corynesporiose, l’oidium, la cladosporiose et la gale bactérienne (Tableau III-2). Ces parasites affectent le feuillage et par conséquent le fonctionnement photosynthétique de la plante et causent des perturbations dans les transferts des assimilats des parties végétatives vers les organes reproducteurs. Ils gênent ainsi le grossissement normal des fruits, ce qui peut conduire à des fruits de faibles calibres.

Tableau III-1 : Principaux ravageurs et maladies affectant la tomate à Mayotte.

Nom commun Agent causal Symptômes Parties de plante

affectées Bactéries Flétrissement bactérien Moelle noire Gale bactérienne Ralstonia solanacearum Pseudomonas corrugata Xanthomonas campestris pv. vesicatoria Flétrissement brutal. Tige creuse et pourriture. Nombreuses petites taches nécrotiques (1-2 mm).

Tiges, feuilles. Tiges.

Tiges, feuilles, pétioles, fruit, fleurs. Champignons Corynesporiose Alternariose Cladosporiose Oïdium interne Corynespora cassiicola Alternaria solani Fulvia fulva Leveillula taurica

Petites taches nécrotiques Petites taches nécrotiques, pourriture fruit

Taches blanchâtres / verdâtres sur face inférieure feuille.

Taches blanchâtres / jaunâtres sur face inférieure feuille.

Feuilles, pétioles, tiges, fruit. Feuilles, pétioles, tiges, fruits. Feuilles. Feuilles. Ravageurs Noctuelles Mouche de la tomate Mouches mineuses Mouches blanches Acarioze bronzée Acariens Nématodes à galles Helicoverpa armigera Trirhithromyia cyanescens Lyriomiza trifolii Bemisia tabaci Aculops lycopersici Tetranychus sp. Meloidogyne sp.

Trous dans fruit, pourriture. Pourriture.

Galeries dans feuilles. Vecteur de virose Tylcv. Bronzage de la plante, nanisme. Aspect gratté de l’épiderme. Jaunissement de la plante, flétrissement lent, galles sur racines.

Fruit. Fruit. Feuilles. Feuilles.

Feuilles, tiges, fruits, pétioles, pédoncule. Feuilles.

Racines.

Virus

TLCMyV Tomato Leaf Curl Mayotte Virus

Nanisme, chlorose, jaunissement et enroulement des feuilles avec parfois des colorations violacées.

Feuilles, tiges, fruits, fleurs.

Tableau III-2 : Caractéristiques des principales maladies affectant la tomate à Mayotte (Berlinger, 1986 ; Waterson, 1986 ; Csizinszky et al., 2005).

Nom commun Facteurs favorisant Méthode de lutte

Gale bactérienne Températures élevées (28-30°C) Pluies violentes

Conservation sur résidus de culture Transmission par semences

Traitements chimiques à base de cuivre Rotation culturale adaptée

Désinfection des semences

Brûlage résidus de culture en fin de cycle Flétrissement

bactérien

Précédent cultural (Solanacées) Pluies violentes et températures élevées

Conservation sur résidus de culture et adventices Plaies racinaires et plaies de taille

Choix de variétés résistantes Greffage sur porte greffe résistant Brûlage résidus de culture en fin de cycle Rotation culturale adaptée

Moelle noire Précédent cultural (Solanacées)

Excès d’eau et fertilisation riche en azote

Brûlage résidus de culture en fin de cycle Pas d’excès d’eau, réduire apports azotés Corynesporiose Climat chaud et humide ou pluvieux

Conservation sur résidus de culture

Traitements chimiques

Brûlage résidus de culture en fin de cycle Alternariose Climat chaud et humide ou pluvieux

Conservation sur résidus de culture

Traitements chimiques dès 1ers symptômes Brûlage résidus de culture en fin de cycle Cladosporiose Climat chaud et humide ou pluvieux

Conservation sur résidus de culture en saprophyte Dissémination des spores par le vent ou la pluie

Traitements chimiques dès 1ers symptômes Brûlage résidus de culture en fin de cycle Oïdium interne Climat chaux et sec

Dissémination des spores par le vent

Traitements chimiques dès 1ers symptômes Il n’existe pas de variété résistante

Contre le flétrissement bactérien et la moelle noire qui sont causés par des bactéries vasculaires, aucun remède chimique n’existe et les attaques se traduisent souvent par la mort du plant. Les traitements à base de cuivre peuvent atténuer le développement de la maladie mais ne l’arrêtent pas. Le greffage donne des résultats satisfaisants, mais la technique n’est pas très répandue compte tenu de la technicité nécessaire pour sa réalisation et le coût du plant. Le flétrissement bactérien touche toutes les zones humides tropicales.Les maladies évoquées ci-dessus peuvent se manifester pendant toute la durée du cycle cultural. En zone tropicale, ce sont surtout contre les maladies que les agriculteurs doivent lutter.

A part les attaques de flétrissement bactérien, voire de nématodes, où on peut dénombrer facilement le nombre de pieds atteints pour évaluer l’impact de ces parasites sur le rendement, il n’existe pas encore d’indicateurs fiables permettant de corréler des intensités de symptômes de maladie sur le peuplement avec des pertes de rendement ou des évolutions de composantes du rendement.

A partir des années 70 ont démarré en Europe des travaux sur la lutte intégrée des cultures sous serre compte tenu de la gamme relativement limitée des ravageurs et maladies dans ces environnements circonscrits (Van Lenteren, 2000). En culture de plein champ, le programme Qualitom (tomate d’industrie) visait à mettre au point des règles de décision pour le déclenchement des traitements phytosanitaires en se basant sur des relevés de données climatiques et sur des observations et comptages au champ de parasites (Dumas et al., 2000), l’objectif principal étant de réduire le nombre de traitements phytosanitaires tout en assurant une bonne protection de la culture. Cette approche agronomique correspond à des enjeux de société où s’exacerbe le souci de la protection de l’environnement et de la qualité hygiénique des productions commercialisées. La méthode utilisée, quoiqu’intéressante, est exigeante en main-d’œuvre (temps de suivi, qualification des observateurs) et n’est pas encore au point pour être utilisée comme élément de pilotage des traitements et comme indicateur de diagnostic. De plus, il faut un œil averti pour savoir reconnaître les ravageurs et maladies et distinguer les premiers symptômes d’agression parasitaire. Cette contrainte ne facilite pas le diagnostic agronomique.