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Les phénomènes de brèche et violation comme constituants du « travail de deuil » constituants du « travail de deuil »

Dans le document tel-00845413, version 1 - 17 Jul 2013 (Page 138-149)

L’extension des processus de brèche et de violation par la théorie du deuil

2.3. Une lecture analytique du modèle théorique

2.3.4. Les phénomènes de brèche et violation comme constituants du « travail de deuil » constituants du « travail de deuil »

Le « travail de deuil » se réfère « à tous les processus psychologiques conscients et inconscients qui sont déclenchés par la perte » (Bowlby, 1984, p 33) quelles qu’en soient les formes de détachement comme le souligne Freud (1915, p 146) : « le deuil est régulièrement la réaction à la perte d’une personne aimée ou d’une abstraction mise à sa place, la patrie, la liberté, un idéal, etc. ». Comme l’affirme Faure (1995, p 16), il est ainsi légitime de parler du deuil dans les entreprises dans le sens où celui-ci « ne se limite pas seulement à la perte d’un être cher (…) : chaque rupture, chaque abandon, chaque renoncement implique, à un niveau ou à un autre, un travail de deuil où on apprend à s’ajuster à une nouvelle réalité, parfois à son corps défendant ! » c’est-à-dire à faire l’épreuve du « manque »148.

Les processus de « comparaison et d’interprétation » comme préalables au

« travail de deuil »

L’univers organisationnel est un contexte qui n’échappe pas à cette « réalité ». Il peut même être propice à cette épreuve en phase de changement organisationnel au regard des « pertes » que cette dernière peut induire tant au niveau spatial, praxéologique, cognitif, affectif, culturel et/ou symbolique. Ces pertes peuvent ainsi porter sur des éléments sur lesquels reposait directement le rapport du sujet à son organisation c'est-à-dire sur lesquels se fondait son contrat psychologique.

Elles peuvent venir signifier une « attaque » directe (volontairement ou non, implicitement ou non) concernant les termes de la relation d’emploi par la remise en question des attentes ou obligations du contrat psychologique initialement engagé. Par exemple, un salarié fondant sa relation avec l’entreprise sur une attente de sécurité de l’emploi pourra percevoir, par l’implémentation d’une restructuration, une atteinte directe à son contrat psychologique (Kets de Vries et Balazs, 1997 ; Rousseau et Wade-Benzoni, 1995) par la remise en cause corrélative de l’obligation de sécurité d’emploi qu’il percevait de son entreprise. Ceci a pour objectif de souligner que le « manque » n’existe que dans le regard de celui qui l’éprouve, ce qui nous renvoie à une situation intra-personnelle, c’est-à-dire que c’est la perception de ce que représenterait la « perte » ou « renoncement » à une attente donnée, réelle (je « suis » licencié économique/sécurité d’emploi) ou imaginaire (le plan de licenciement « veut dire » que je serai

148 Comte-Sponville (1995, p 14) souligne qu’il y a « deuil chaque fois qu’il y a perte, refus, frustration (…) Le deuil est cette frange d’insatisfaction ou d’horreur, selon le cas, par quoi le réel nous blesse et nous tient, d’autant plus fortement que nous tenons davantage à lui ».

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licencié/sécurité d’emploi), qui fait éprouver au sujet le « manque » dans son désir. Aussi, au commencement du deuil nécessaire à l’accommodation de la situation au travers d’un processus de renoncement à l’objet aimé (Freud) ou de l’objet perdu du désir (Lacan), se situe un

« processus de comparaison subjectif et imparfait »149, relevé par les sciences de gestion (Morrison & Robinson, 1997), entre la promesse entendue (l’objet du désir) par le sujet et le traitement qui en est fait par l’organisation. C’est ce processus (préalable à la perception de brèche du contrat psychologique) qui peut conduire à une perception de promesse non tenue c’est-à-dire à la reconnaissance par le sujet de devoir faire face à la perte de l’objet du désir.

Néanmoins, tous les sujets confrontés à cette perception de promesse non tenue ne seront pas nécessairement conduit à percevoir que leur contrat psychologique a fait l’objet d’une brèche face à une « réalité extérieure » (Haynal, 1986). En effet, en accord avec les sciences de gestion, le processus de brèche dépend des biais cognitifs servant le « soi » (Taylor & Brown, 1988) ou encore des dispositions personnelles (Huseman, Hatfield & Miles, 1987) du sujet. Mais plus précisément, celui-ci dépend de ce que l’objet perdu, initialement « choisi sur une base narcissique » (Freud, 1915), soutenait du désir singulier du sujet ou, autrement dit, de ce que cet objet « signifiait » ou « représentait » de son désir. Pour reprendre notre exemple de la perte de la sécurité de l’emploi en période de restructuration, deux salariés peuvent avoir des perceptions totalement différentes. L’un pourra par exemple percevoir, au regard de son âge, de ses compétences très spécifiques ou de son histoire professionnelle antérieure, une brèche masquant derrière la perte de l’emploi la place vide du désir de travail que représente le chômage, alors qu’un salarié plus jeune et qualifié pourra y percevoir l’occasion de se rejouer sur la scène professionnelle dans une nouvelle entreprise et de développer de nouvelles compétences. Aussi, dans la mise en devoir de faire face à l’éventualité de la perte d’objet(s) partiel(s) qui occupait(ent) la place de son désir générée par un évènement, le sujet est pour ainsi dire mis en situation d’envisager le renoncement voire l’abandon de cet objet perdu (objet a) fortement investi. Il est nécessaire de le désinvestir pour que « la libido trouve de nouveaux objets » (Dubouloy, 1996). Comme le dit Freud (1915, p 148), « l’épreuve de réalité a montré que l’objet aimé (objet du désir) n’existe plus et édicte l’exigence de retirer toute la libido des liens qui la retiennent à cet objet ».

C’est en ce sens que toute perception de brèche implique un processus de « deuil » qui n’en devient pas pour autant « pathologique » dans le sens où ce processus de détachement libidinal à

149 Car, comme nous l’indiquions, un employé peut déterminer qu’une brèche du contrat psychologique est survenue même quand une évaluation objective de la situation ne supporte pas cette conclusion

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l’objet perdu (du désir), qui correspond à un renoncement narcissique, peut trouver sa résolution dans l’investissement de nouveaux objets ou du même objet renégocié. Le sujet, dans ce deuil

« normal », est ainsi parvenu à un compromis dans son rapport à l’objet perdu de son désir qui pourra même comporter des aspects positifs (d’où la perception d’une opportunité pour le sujet) liés aux possibilités de réaménagement, sur le plan psychique, des liens d’objet (Haynal, 1986).

Néanmoins, comme le souligne Freud (1915, p 148), « là-contre (ce processus de détachement) s’élève une rébellion compréhensible (…) qui peut être si intense qu’on en vienne à se détourner de la réalité et à maintenir l’objet ». Ce maintien de l’objet perdu ou encore cette impossibilité de s’en détacher témoigne alors à quel point celui-ci soutient le sujet dans son existence c’est-à-dire à quel point il s’agit d’une perte d’un « petit bout de soi » (Allouch, 1995) pour le sujet : accepter de m’en détacher c’est accepter de perdre une partie de Moi. C’est en cela qu’un évènement de la vie organisationnelle peut revêtir, pour un sujet donné, la forme de « l’évènement traumatique » c’est-à-dire un « évènement de la vie du sujet qui se définit par son intensité, l’incapacité où le sujet se trouve d’y répondre adéquatement, le bouleversement et les effets pathogènes durables qu’il provoque dans l’organisation psychique » (Laplanche et Pontalis, 1967, p 499).

Si l’évènement prend le costume « traumatique » pour le sujet, c’est que celui-ci, au travers de processus cognitifs et affectifs complexes, engage une construction d’une représentation subjective de l’événement vécu et d’attribution de la responsabilité du « tort éventuel subi » (Morrison et Robinson, 1997). La résonnance de l’évènement reposera sur un processus d’interprétation du sujet dans la tentative qu’il représente pour lui de « faire sens » de l’évènement (Frijda, 1988 ; Ortony & al, 1988). Son interprétation pourra ainsi le conduire à percevoir dans l’évènement la signification d’une menace de perdre un objet partiel perçu comme narcissiquement indispensable (par une identification du Moi à l’objet désiré) et intimement noué à son désir. Notons que l’expérience réelle de perte ne signifie pas que l’objet disparaisse « mais que la vie n’offre plus les conditions pour que le sujet puisse agir et interagir, pour la réalisation d’une certaine scène » (Wildlöcher, 1981, p 962)… celle de son désir. D’une certaine manière, la perte de ce dernier, qui comblait la place du désir, représenterait une perte traumatique d’une relation signifiante laissant une place vide, un « manque » ne permettant plus au sujet d’accrocher son désir. Dans l’incapacité à faire face à la perte ou au renoncement de l’objet du désir et par conséquent à opérer une déliaison de la libido pour la déplacer sur un nouvel objet (autre que l’objet perdu ou renégocié), le sujet restera fixé à (ou capté par) l’objet perdu (objet a ou objet du désir). Ce qui n’a pu aboutir repose sur un double processus (Pailot, 1996) de séparation (accepter de se séparer de l’objet perdu) et de différenciation (accepter de renoncer à faire avec l’objet dont

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il se sépare) qui laisse le sujet dans l’incapacité de se décoller de l’image de l’objet150. La symbolisation de la perte de l’objet n’a pu être conduite (ou est arrêtée) laissant le champ libre à l’imaginaire et à sa prolifération. La violation tient donc dans la perception du sujet d’une mise en devoir de détachement de l’objet, sous l’influence du « préjudice réel » porté par l’évaluation cognitive d’une promesse non tenue (processus de comparaison), d’une fêlure perçue du retour (sur soi) de ce qui est à la fois attendu et désiré (Ortony & al, 1988 ; Robinson & Morrison, 1995 ; Robinson & Rousseau, 1994), à laquelle celui-ci ne peut répondre dans l’immédiat au regard du coût narcissique qu’elle représente (processus d’interprétation).

Les phénomènes de brèche et de violation au cœur des étapes du « deuil »

La première phase du deuil est alors celle du « choc » (dénégation), de la sidération et du déni de la perte ou encore de « l’engourdissement » (Bowlby, 1984) : « les premiers moments sont marqués par un état de choc à l’annonce de la perte qui nous arrive, qui nous frappe » (Hanus, 1995, p 95). Or, le sujet n’y entrera que si « l’annonce » de la perte perçue, au regard du résultat du « processus de comparaison » réalisé entre la promesse entendue/attendue (l’objet du désir) et le retour (traitement) qui en est fait par l’organisation, est d’une part « négative » (retour inférieur à l’attente) et d’autre part, au regard du « processus d’interprétation », qu’il constitue une

« attaque narcissique » (« s’attaquer à l’objet de mon désir, c’est s’attaquer à Moi »). Si le sujet se trouve dans l’incapacité de « compenser » la perte de l’objet, il se trouve plongé dans la stupeur, la sidération, dans quelque chose qui annihile sa pensée. D’une certaine manière, il se tient dans le refus d’accepter la perte, un « je n’en veux rien savoir » lacanien, pouvant durer de quelques heures à quelques semaines151 et qui touche l’ensemble de son être (corps, vie psychique, activité et vie relationnelle) (Hanus, 1994). Cette non-reconnaissance de la perte constitue un mécanisme de défense, de protection, qui lui permettra d’intégrer progressivement le premier niveau du deuil : la reconnaissance de la perte. Si le sujet peut être conscient de la perte subie, il n’en demeure pas moins que cette phase puisse s’accompagner d’une « forme d’anesthésie affective » (Pailot, 1996) (distance par rapport aux évènements, absence d’émotions intenses, etc.) permettant au sujet de s’engager dans le processus de deuil à son rythme sans être submergé par ses propres émotions (Faure, 1995) même si certaines « décharges émotionnelles » peuvent être intenses (sanglots, crises de colère, etc.).

150 L’objet perdu, dans son « manque », devient ainsi un signifiant qui révèle, dans le vacillement du sujet, la place qu’il occupait dans son désir et dont il pourra préférer maintenir la présence de manière fantasmatique ou illusoire

151 Au-delà d’un mois, c’est le signe que le processus de deuil est bloqué et qu’il ne peut suivre son cours « normal »

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La seconde phase est celle de la « déliaison et désintrication pulsionnelle » à partir de laquelle le sujet s’engage dans un mouvement de prise de conscience graduelle de la réalité de la perte (et de ses conséquences) qui se poursuivra jusqu’à la phase d’acceptation. La prise de conscience passe aussi par un « processus d’interprétation » de l’évènement de perte en vue de lui redonner un sens progressif. Bien entendu, la prise de conscience n’est pas immédiate car subsiste dans les premiers temps suivant le choc du « manque » un non-sens de l’évènement pour le sujet comme en atteste les sciences de gestion par la formule de « violation » : « sentiments de profonde trahison et de détresse psychologique » (Rousseau, 1989, p 129). Par conséquent, tout au long de ce processus au long cours, le sujet pourra éprouver des crises affectives intenses (détresse, nostalgie, colère et/ou culpabilité, agressivité, etc.) et une volonté de réinstallation fantasmatique de l’objet perdu qui se résorberont au cours du deuil. Néanmoins, les expressions émotives « marqueront » la présence d’une angoisse de séparation mettant en cause la perte d’un « petit bout de soi » dont nous parlions plus haut : « toutes les fois qu’on éprouve les pertes de la personne aimée, cette expérience amène la sensation de sa propre destruction » (Klein cité par Hanus, 1995, p 114). La solitude de chacun est ainsi l’un des faits les plus marquants de cette phase (Dubouloy, 1996) au regard du conflit interne dans lequel est enserré le sujet, de la culpabilité qu’il peut être amené à ressentir et du non-sens dans lequel il est inscrit. A cette étape, « l’objet est mort et cependant plus présent que jamais, son image s’impose à tout moment à la conscience » (Lubtchansky, 1994, p 130). En d’autres termes, l’objet est perdu mais la relation se poursuit avec son « ombre » (Freud, 1915, p 150) car le désinvestissement des représentations implique le détachement d’une « foule d’impressions et de représentations inconscientes qui ont un caractère hallucinatoire »152.

Dans un troisième temps, le sujet s’engagera dans un « marchandage » avec l’objet perdu. D’une part, les réactions affectives et agressives à l’égard d’une cible quelconque s’expriment pour tenter de rétablir, face à l’angoisse de séparation, le lien rompu car « il semble qu’aussi longtemps que la colère persiste, la perte n’est pas acceptée comme définitive et l’espoir demeure » (Bowlby, 1984, p 122). D’autre part, le sujet peut refuser l’épreuve de réalité et s’inscrire dans une hyperactivité (qui trahit l’angoisse), une fuite en avant qui plonge le sujet dans « une incessante agitation, avidité de consommation affective, matérielle, culturelle, sociale ou encore intellectuelle » (Pailot, 1996, p 138). Dans les deux cas, le prolongement de ces réactions attitudinales et comportementales pourra témoigner de l’éventualité d’un deuil raté (Cournut, 1994). Aussi, selon Hanus (1994), le travail de deuil proprement dit, c’est-à-dire l’expérience douloureuse et répétée de la prise de conscience de la perte (Widlöcher, 1981) et de ses

152 Dans le sens où elles maintiennent de manière illusoire l’objet du désir alors que celui-ci est perdu : « le travail de deuil ne porte pas sur un objet mais sur les multiples images de celui-ci » (Widlöcher, 1983, p 103).

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conséquences, ne commence vraiment que lorsque le temps du refus a pu être dépassé. Il s’agit pour le sujet d’opérer un mouvement de détachement progressif de ses investissements sur l’objet perdu qui prend la forme d’une régression narcissique dans le sens où ceux-ci sont orientés vers le Moi : « le narcissisme sert donc au sujet d’objet interne substitutif qui veille sur le moi comme la mère veille sur l’enfant » (Green, 1983, p 51). La manifestation de cette régression peut être celle d’un retrait du monde extérieur (isolement, recroquevillement, etc.) et/ou un appel plus ou moins déguisé à l’attention ou l’amour de l’autre (semblable) en vue d’obtenir son soutien (et soutien de son Moi).

La quatrième phase est celle de la « déstructuration » ou de « désorganisation » (et de désespoir) qui génère « un état de dérégulation, de confusion ou de déperdition objectives vécues subjectivement » (Pailot, 1996, p 140). Il s’opère par le sujet une reconnaissance de « l’inutilité », ou rejet (Kets de Vries et Miller, 1985), des anciens modèles affectifs, cognitifs et comportementaux associés à la situation précédant la perte de l’objet désiré qui représentait

« quelque chose procurant la sécurité de base et le bien-être, si bien qu’on se sent menacé par cette perte » (Haynal, 1987, p 128). Cette reconnaissance est nécessaire pour faire émerger de nouveaux modèles c’est-à-dire redéfinir progressivement la situation malgré l’entrecoupement d’états dépressifs et apathiques épisodiques (et plus ou moins récurrents) sans que soit pleinement acceptée et comprise la situation nouvelle qui accable, désole et désespère (Kets de Vries et Miller, 1985). Ici, « le pessimisme, la culpabilité, le figement de l’action sont autant de signes de ce rapport pathologique au temps » (Widlöcher, 1983, p 69). L’affect dépressif, qui traduit partiellement un épuisement psychologique et physique, est déclenché « par la perception que nous avons d’être diminués par rapport à quelque chose, par le sentiment d’inadéquation face à une image de ce que nous avons été et que nous avons possédé, et de ce que nous désirons posséder ou être, en comparaison avec ce que nous sommes devenus et ce que nous avons perdu » (Haynal, 1987, p 55). Il est l’expression et la conséquence du travail de désinvestissement (Hanus, 1984) et la marque d’un processus de deuil en bonne voie de résolution (Faure, 1995). La reconnaissance du caractère définitif de la perte de l’objet désiré est acceptée et la mise en mouvement du travail de détachement progressif et processuel des investissements associés à l’objet témoigne du processus de « cicatrisation ».

Enfin, la cinquième phase de « réorganisation » ou de « reconstruction » tient à une redéfinition personnelle et situationnelle qui implique la reconnaissance et l’acceptation de l’irréversibilité de la perte. Elle se traduit par une « prise de conscience », « une modification et une reconstruction des modèles représentationnels internes qui conduisent à réorganiser, voire à réorienter, le

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comportement d’attachement de manière concordante avec la réalité extérieure » (Pailot, 1996, p 142). Néanmoins, la restauration plus ou moins complète n’est pas la seule issue possible. Il se peut que cette cinquième phase ne se conclue pas (soit par refus, déni de la perte) et laisse le sujet dans le vécu d’un deuil inachevé qui par là deviendra pathologique153. Le non accomplissement du deuil repose alors sur une « adhésivité narcissique » (Pailot, 1996) du lien que le sujet entretient avec l’objet perdu. Quoi qu’il en soit, la fin de deuil, s’il y a, « ne se solde en aucun cas par l’oubli. Il restera toujours une trace des bouleversements vécus lors du deuil » (Bacque, 1992, p 66). La figure ci-dessous résume la description du processus de deuil154 que nous avons conduit en soulignant d’une part l’inscription des processus de comparaison (brèche) et d’interprétation (violation) et, d’autre part, les réactions affectives, émotionnelles qui se manifestent à chacune des phases.

Figure 5. Articulation de la brèche/violation du contrat psychologique avec le processus de deuil

153 D’ailleurs notons que le sujet peut rester « bloqué » aux phases antérieures de la même manière, ce qui le plongera dans le « deuil pathologique »

154 D’un point de vue lacanien, la première étape du deuil serait celle de « l’instant du regard » qui laisse le sujet « choqué » par la perte de l’objet. La seconde et troisème étape correspondraient au « temps pour comprendre » c’est-à-dire de prise de conscience progressive. Enfin, la quatrième et cinquième étape renverraient au « temps pour conclure » c’est-à-dire de l’acceptation de la perte

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Les « symptômes » attitudinaux et comportementaux associés

Le tableau suivant présente la nature des réactions identifiées dans les étapes du « travail du deuil » qui caractérisent également celles qui succèdent à la perception d’une violation du contrat psychologique.

Tableau 9. Les réactions affectives et émotionnelles du deuil

Nature Caractéristiques Phase de deuil

Colère Emotion agressive se manifestant par une forte expressivité gestuelle et verbale pouvant devenir incontrôlable. Une situation frustrante ne pouvant être surmontée par un sujet peut amener celui-ci à se mettre en colère. Si l’objet réel de la colère ne peut être abordé en face, des déplacements peuvent se produire, ayant pour cible des objets ou personnes.

Dénégation (Choc) Déliaison

Agressivité Perçue en premier lieu comme une tendance à l’agression, l’agressivité peut être due à des causes variées. La frustration, l’incapacité à réussir certaines Stress Le stress est « fondamentalement une réaction physiologique » (Rivolier,

1989). Il y a des facteurs internes (état de santé physiques ou psychiques, fatigue, blessures etc...) et/ou externes (environnement, rapports sociaux etc...) susceptibles de modifier la réceptivité de l’organisme.

Dénégation (Choc) Déliaison Angoisse L’angoisse est une peur irrationnelle accompagnée la plupart du temps de

modifications neurovégétatives du type de celles observées lors de chocs émotionnels. Désorganisant la conscience et entraînant une régression de la pensée et de l’affectivité, l’angoisse trouve ses causes dans un conflit

modifications neurovégétatives du type de celles observées lors de chocs émotionnels. Désorganisant la conscience et entraînant une régression de la pensée et de l’affectivité, l’angoisse trouve ses causes dans un conflit

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