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La Justice Organisationnelle

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1.2. Les facteurs de modération ou d’amplification des perceptions de brèche et/ou de violation des perceptions de brèche et/ou de violation

1.2.3. La Justice Organisationnelle

La justice organisationnelle fait référence aux perceptions d’un individu quant à l’équité ou à l’impartialité en vigueur au sein de l’organisation, en termes de résultats octroyés (justice distributive), de procédures de prise de décision mises en œuvre pour atteindre ces résultats (justice procédurale) et de traitement interpersonnel reçu durant la mise en œuvre de ces procédures (justice interactionnelle).

L’inscription de la justice organisationnelle dans l’échange social

La justice organisationnelle apparaît comme étant l’une des « théories de moyenne portée les plus utiles du comportement organisationnel » (Weick, 1966, p 439). Ce jugement est émis dès les années 1960 à propos de la théorie de l’équité qui en est toujours l’un des soubassements principaux (Weick, 1966). La théorie de la justice organisationnelle s’inscrit très largement dans la perspective de la théorie de l’échange social (Blau, 1964) d’après laquelle les attitudes et comportements du salarié au travail sont déterminés par les bénéfices que celui-ci reçoit de la part de ceux qui l’emploient. Comme l’ont noté Cropanzano, Rupp, Mohler et Schmike (2001, p 42),

« dans une perspective de justice, un traitement juste (parmi d’autres causes possibles) est de nature à promouvoir des relations d’échange social plus proches et ouvertes. Ce type de relations engendre l’obligation pour l’employé de s’acquitter de sa dette envers le supérieur ou l’organisation. Dès lors, une meilleure performance au travail, des comportements de citoyenneté organisationnelle, et ainsi de suite, sont susceptibles d’en découler ». On retrouve donc la norme de réciprocité selon laquelle les individus cherchent à retourner l’équité du traitement qu’ils ont reçu. Il n’est donc guère surprenant que les effets d’un traitement juste sur les réactions de l’employé soient similaires à ceux mis en évidence par les travaux sur la rupture du CP. La justice organisationnelle perçue est positivement associée à la confiance dans l’organisation, à l’implication organisationnelle, aux comportements de citoyenneté organisationnelle et à la performance au travail (Cropanzano & Prehar, 1999).

Aussi, si le CP et la justice organisationnelle partagent certaines racines théoriques puisées dans l’échange social et la norme de réciprocité, ils diffèrent cependant sur un certain nombre de points. Tout d’abord, le champ d’application de la justice organisationnelle est plus large que celui du CP puisqu’elle inclut potentiellement n’importe quelle décision organisationnelle. De plus, dans la justice organisationnelle, le point de référence que les employés utilisent pour évaluer leur relation avec leur employeur repose sur une comparaison de ce qui a été promis et de ce qui a été

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reçu alors que dans le CP il s’agit de la manière dont les employés réagissent à la rupture du CP.

Enfin, la justice organisationnelle constitue un concept plus englobant que le CP qui se concentre essentiellement sur les résultats de la relation d’échange alors que la justice organisationnelle inclut également :

 La justification donnée aux résultats obtenus renvoyant à la justice distributive qui montre que les salariés évaluent s’ils sont traités justement en comparant ce qu’ils apportent à l’entreprise à ce que l’entreprise leur alloue (principalement en termes de bénéfices matériels),

 Les procédures adoptées pour atteindre ces résultats renvoyant à la justice procédurale qui met l’accent sur la justice des procédures formelles utilisées dans l’entreprise dans la détermination des allocations. Cette justice joue un rôle souvent plus important que la justice distributive elle-même lorsque les salariés jugent s’ils ont été traités justement.

La justice procédurale tend à prédire le SOP c’est-à-dire la relation d’échange social entre un employé et une organisation (Masterson & al, 2000 ; Wayne, Shore, Bommer &

Tetrick, 2002).

 Le traitement interpersonnel reçu durant la mise en œuvre de ces procédures renvoyant à la justice interactionnelle (Bies et Moag, 1986) c’est-à-dire à la manière informelle dont le salarié a été traité à l’occasion de la mise en œuvre des procédures visant à lui allouer des bénéfices. Selon ces auteurs, les perceptions de justice interactionnelle sont favorisées lorsque les employés sont traités avec respect et sensibilité et lorsque l’organisation leur transmet les explications nécessaires pour la compréhension des décisions les concernant et ce, de manière franche et sans s’engager dans de la tromperie. Cette dernière famille de recherches a, d’une part, montré la grande importance du jugement de justice interactionnelle dans l’explication de comportements au travail déviants ou citoyens (Bies et al., 1997 ; Skarlicki et Folger, 1997 ; Konovsky et Pugh, 1994) et, d’autre part, mis en évidence que la source de la justice interactionnelle était presque exclusivement représentée par le supérieur hiérarchique31 (Aryee et al., 2002). La justice interactionnelle est considérée comme représentant une composante processuelle de la justice organisationnelle, au même titre que la justice procédurale, par opposition à la justice distributive qui concerne le résultat d’une allocation. La justice interactionnelle tend à prédire l’ELM c’est-à-dire la relation d’échange social entre un employé et son manager immédiat (Cropazano & al, 2002 ; Masterson & al, 2000).

31 Par opposition aux deux autres types de justices (distributive et procédurale) qui trouvent leur source dans l’entreprise de façon globale

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Tableau 6. Comparaison entre Contrat Psychologique (CP) et Justice Organisationnelle

Comparaison entre ce qui est promis et reçu négatives, l’individu désire avant tout attribuer la responsabilité du tort subi (fairness theory).

Cela l’amène à diriger ses réponses envers l’organisation et ses managers lorsqu’il s’aperçoit qu’ils sont responsables du tort subi ou à modérer ses réactions dans le cas contraire. L’attribution de la responsabilité est le résultat d’issues négatives de trois processus de simulation cognitive (Folger et Cropanzano, 1998, 2001 ; Shaw & al., 2003) consistant à imaginer les alternatives à la situation vécue, processus équivalents à des « pensées contraires aux faits » (Roese, 1997) :

 « Would counterfactual » : confrontation des résultats négatifs de la décision organisationnelle à d’autres résultats possibles considérés comme positifs et meilleurs pour l’individu ;

 « Could counterfactual » : faisabilité des autres alternatives identifiées par l’individu et au degré de discrétion du décideur ;

 « Should counterfactual » : caractère moral et éthique de la décision prise.

Lorsque les managers agissent en accord avec les principes moraux et éthiques en vigueur, ils évitent d’être la cible des réactions négatives même s’ils possèdent une marge de discrétion leur permettant d’émettre des décisions plus favorables pour les employés. Les trois processus cognitifs interagissent ainsi pour aider à désigner la partie responsable de l’injustice subie (Folger et Cropanzano, 1998, 2001 ; Cropanzano et al, 2004). Ces auteurs soulignent que l’une des applications possibles de cette théorie consiste à lier le premier processus cognitif au sentiment d’injustice distributive et les deux autres aux jugements de la justice procédurale et interactionnelle. La présence d’une issue négative de ces trois processus (existence de meilleures alternatives, présence de la discrétion du manager, non application des principes éthiques) est une

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condition pour l’attribution de la responsabilité des actions négatives et donc de la rupture du CP à l’organisation ou son agent. En l’absence d’excuses ou d’explications de la part du manager ou de l’organisation en général, l’employé va lui reprocher son mauvais sort et par conséquent diriger ses réponses ou réactions négatives envers l’organisation (Colquitt et Chertkoff, 2002 ; Shaw et al, 2003). La justice procédurale et interactionnelle jouent un rôle déterminant dans le déroulement de chacun de ces processus : l’existence de procédures formelles, d’excuses, de justifications, d’explications suffisantes et de traitement interpersonnel adéquat sont de nature à réduire les divergences entre les jugements de l’expérience vécue et ceux des expériences alternatives.

Cropanzano et Prehar (2001) soutiendront donc qu’il existe une relation réciproque entre la justice organisationnelle et le CP qui adoptent, selon les auteurs, des points de vue différents pour examiner le même phénomène. Le CP part des termes du contrat pour envisager si ces termes ont ensuite été remplis ou rompus, tandis que la justice organisationnelle part d’une rupture pour envisager les standards utilisés précédemment pour établir ce jugement. Selon cette perspective, le CP est un antécédent de la justice et l’expérience d’une injustice prédirait ensuite à son tour le contenu du CP d’un individu. Cependant, cette relation réciproque n’a pas été testée sur le plan empirique. D’un point de vue empirique, on a pu démontrer que la justice organisationnelle était un antécédent de la rupture du CP et un médiateur de la relation entre la rupture du CP et les attitudes et comportements de l’employé. Ainsi, l’étude de Tekleab, Takeuchi et Taylor (2005) révèle que la justice procédurale est un antécédent de la rupture du CP où les perceptions de justice procédurale confèrent un sentiment plus important de support organisationnel, ce qui réduit ensuite les perceptions de brèche. D’autre part, Kickul, Lester et Finkl (2002) ont souligné l’effet médiateur de la justice procédurale et interactionnelle sur la relation entre la rupture du CP et ses variables conséquentes comme la satisfaction professionnelle, l’intention de quitter l’organisation, la performance au travail et les comportements de citoyenneté organisationnelle.

Aussi, l’ensemble des résultats suggère que la justice procédurale et interactionnelle exercent une influence importante sur la manière dont les employés répondent à une rupture perçue du CP.

Rousseau et McLean Parks (1993) proposent pour leur part que la justice distributive peut entrer en jeu après la perception d’une rupture du CP. Celle-ci pourrait permettre aux employeurs de prendre des mesures permettant de restaurer un sentiment de justice aux yeux des employés, et par conséquent de la confiance et d’une réduction des réactions négatives de leur part, malgré la perception première d’une rupture de contrat conduisant à des perceptions d’injustice distributive.

Comme le soulignent Turnley et Feldman (1999), les recherches suggèrent que les réponses

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individuelles à des actions non favorables sont moins sévères quand les individus perçoivent que le processus de prise de décision est juste dans sa procédure. Le ressentiment des employés à la rupture ou violation du CP serait donc fort si les actions de l’organisation ou de ses agents, ayant généré la perception de la rupture, sont perçues comme intentionnelles et injustifiables. Dans ce sens, plusieurs études32 signalent le rôle des perceptions relatives à la justice organisationnelle dans la modération des effets négatifs de la rupture du CP. Ceci justifie l’adoption de la justice organisationnelle comme variable médiatrice dans la perception d’une brèche ou violation du CP.

32 Turnley et Feldman, 1999a, 1999b ; Robinson et Morrison, 2000 ; Kickul, 2001 ; Kickul et al, 2002 ; Turnley et al., 2003

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1.3. Les conséquences attitudinales et

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