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2.2 La Connaissance et le savoir en organisation

2.2.2 Perceptions économiques 1 Perspective diachronique

2.2.2.3 Modèle hybride néo-taylorien et systémique

Dans cette même période, les années 1990, d’autres chercheurs apportent nuances et aspects critiques, grâce aux observations issues des PME-PMI. La finalité première reste l’identification assez stricte aux décisions et fonctions déterminées par le dirigeant.

Nous avons choisi, des références européennes et américaines représentatives. Ces références illustrent un deuxième courant sensible. Dès lors, nous pouvons distinguer deux types de savoir :

- Le savoir comme ressource. Il s’agit d’une expertise spécifique à l’entreprise. Les

ressources composent un réseau simple : il y a peu de composantes, les limites de ce réseau sont assez facilement identifiables. Ce savoir existe au niveau d’un individu ou d’un groupe, par exemple, au sein d’une fonction de l’entreprise.

- Le savoir comme compétence. Il s’agit de routines organisationnelles créées par un

réseau complexe de composants. Elles relèvent de la dimension organisationnelle et mettent généralement en œuvre des composants appartenants à différentes fonctions de l’entreprise. Ces compétences représentent le savoir que l’entreprise a créé et possède en tant qu’organisation. Elles peuvent être une explication de l’existence de l’entreprise : ce que l’entreprise fait mieux que le marché, c’est le partage et le transfert du savoir des individus et des groupes dans l’organisation. »82

81 R.-W. Wright, G. Van Wijk et I. Bouty. Les principes du management des ressources fondées sur le savoir. In

Revue Francaise de gestion. Les Chemins du savoir de l’entreprise. Op. Cit.

82 J.-L. Arrègle. Le Savoir et l’approche Ressource Based : une ressource et une compétence. In Les chemins du

J.-L. Arrègle note, à la suite de ses collègues américains C. Snow, L. Hrebiniak83 et M. Hitt et

D. Ireland84 :

« Peu de recherches essayent d’identifier ces savoirs organisationnels que sont les compétences de l’entreprise. Les principaux travaux portent sur la notion de compétence distinctive. Par exemple, Snow et Hrebiniak ont caractérisé les comportements stratégiques de la typologie de Miles et Snow par les fonctions perçues comme importantes par les dirigeants. Hitt et Ireland utilisent une liste de compétences distinctives potentielles qu’ils agrègent ensuite en sept fonctions de la chaîne de valeur.

Cependant, ces auteurs considèrent généralement les compétences de niveau fonctionnel en analysant les fonctions séparément. Pour reprendre la notion de ressources système que sont généralement les compétences, il est nécessaire de travailler à un niveau interfonctionnel en considérant des compétences qui font appel à plusieurs fonctions. »85

En synthèse, ces différents analystes, que nous avons cités comme représentants des deux

modèles, le modèle néo-taylorien et le modèle hybride néo-taylorien et systémique, ont souvent encore recours à des typologies qui marquent de fortes et d’antérieures formalisations. Les structures observées, les obligent à un regard mixte imprégné d’une forte modélisation et enclin à un mouvement d’évolution donc de déstabilisation.

- Le premier courant illustrerait une prospective que nous pourrions nommer néo-

taylorienne. Les connaissances ou savoirs deviennent questions de management, dès lors que

cette réduction de coûts et cette recherche de compétitivité passent par une flexibilité adaptative, mobilisatrice et innovatrice. Le simplisme du postulat de F.-N. Taylor est donc revu. Son modèle se basait uniquement sur les savoirs de référence : ceux de la science et des ingénieurs. L’approximation et l’informel ne sont pas pris en compte.

Le projet de F.-N. Taylor est de mettre en forme les modes opératoires des tâches exclusivement dans leur contenu, leur rythme et leurs articulations par une logique cohérente et unique.

83 C. Snow, L. Hrebiniak. Strategy, Distinctive Competence and Organizational Performance, Administrative

Science Quarterly, vol. 25, pp. 317-335, 1980.

84 M. Hitt et D. Ireland, Corporate Distinctive Compétences, Strategy, Industry and Performance. In Strategic

Management Journal, vol. 6, pp. 273-293,1985.

85 J.-L. Arrègle. Le Savoir et l’approche Ressource Based : une ressource et une compétence. In Revue Française

Certains praticiens ou chercheurs de cette tendance, ont révélé la césure qui existait, d’une part entre les orientations, les discours, les projets des directions d’entreprises et d’autre part la prise de conscience de l’existence et de la complexité des savoir-faire.

Cette tendance se révèle par ses limites instrumentales : le savoir de l’organisation est contrôlé, aliéné, soumis à des décisions centralisées et autoritaires afin de créer une composante, un élément univoque du savoir de l’entreprise. Il est à remarquer, justement à ce propos que les différents auteurs notent le savoir (au singulier) et les savoir-faire (au pluriel). Nous tenterons une analyse, sur l’évolution des termes employés, prochainement.

- Le second courant s’ouvre plus idéologiquement, à des perceptions nouvelles telles

que le changement, l’évolution voire la transformation des structures organisationnelles et ce qu’on entend alors comme ressources-clefs de l’organisation : la gestion et la capitalisation des connaissances et savoirs. Cette tendance est très perceptible, autour de ce début du XXI° siècle. Pour cela, nous l’avons nommée : modèle hybride néo-taylorien et systémique.

Cette approche présente certaines caractéristiques fédératives : elle est plus encline à la transversalité des démarches. Le management, la prise de décision ne sont pas les seuls points de repères. Si l’information est comprise comme data et signal, la connaissance renvoie au stade suivant de la chaîne de l’information. La gestion de cette connaissance se veut collective, stratégique tant les savoirs sont pluriels et complexes à appréhender.

Cette connaissance est vue aussi comme une accumulation d’informations qui s’organisent et se managent. Son dernier stade de transformation correspond à la production de compétences collectives nommées aussi macro-compétences qui sont considérées, alors, comme les leviers stratégiques de l’entreprise.

Si l’accent est plus porté sur le collectif par l’adhésion du groupe et la maîtrise personnelle, au sein du groupe, la nouveauté est d’initier une pensée systémiquequi fédère toutes les autres. On peut faire remonter la naissance de la pensée systémique, science des interactions à Epicure, (341-270 avant J.-C.), avec sa théorie des atomes. Cet auteur soutenait que l’Univers entretenait un ballet continuel d’atomes, le clinanem, interagissant afin d’agir sur la pérennité des mondes. Blaise Pascal (1623-1662) a eu également l’intuition essentielle sur le lien, l’interaction des choses entre elles.

C’est vers les années 1940, que la pensée systémique naît de la rencontre de chercheurs de disciplines différentes : la biologie, la théorie de l’information et la théorie des systèmes. la neurologie et la cybernétique de N. Wiener. Ludwig von Bertalanffy est le père de la

technologie des systèmes. Ces chercheurs, pour la plupart, localisés au MIT, Massachusset

Institute of Technology de Boston, soulignent une corrélation entre l’organisme et la machine.

Ces interactions sont rendues possibles par les progrès des technologies. Par ouvertures méthodologiques, un rapprochement est fait avec l’économie, l’entreprise et la société.86

L’organisation, pensée comme système complexe génère des processus87 qui interagissent au

travers de boucles de rétroaction.

La perception nouvelle provient du fait que la valeur obtenue par l’organisation est une propriété du système lui-même. Par conséquent ce système s’auto régule par une constante adaptation critique.

Nous poursuivrons l’exploration de ces courants novateurs dans les prochains chapitres. Il est à noter que les chercheurs du premier courant, choisissent plus fréquemment le terme de

savoir, (au singulier), plus particulièrement de savoir-faire et le terme, au pluriel, de compétences. Les contenus ne paraissent pas stabilisés, la nature du savoir se confond encore

implicitement avec la production.

Les seconds plus soucieux de leur désignation stipule connaissance au singulier afin de marquer la mise en transformation des compétences ou savoirs (au pluriel dans les deux cas) et de rendre compte de la production des connaissances.