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3-3 MOBILITÉ URBAINE ET ÉCONOMIES D’AGGLOMÉRATION

Souvent confondue avec les réseaux de transports, la mobilité des biens et des individus a des conséquences économiques propres.

Activité économique et mobilité

Beaucoup d’industries ont besoin des transports pour leur activité économique23. L’industrie, la

construction et le commerce sont de très importants secteurs d’activités et de gros consommateurs de transport. Les activités de logistique sont donc directement affectées par le niveau de production des grands secteurs économiques. Le secteur des transports peut être compris comme l’un des intrants pour la production d’un bien ou d’un service. Dans ce schéma, si la production de biens et de services augmente, les besoins en logistique et mobilité suivent cette croissance.

La hiérarchie urbaine et la concentration des activités à forte valeur ajoutée

La hiérarchie urbaine est une théorie qui classe les centres urbains en fonction des services offerts dans la ville. Plus une ville a une position élevée dans la hiérarchie, plus une personne est disposée à faire de longues distances pour accéder à ses services. En pratique, cela influe aussi beaucoup sur la taille de la ville. Cette notion est proche du modèle gravitaire couramment utilisé dans les modèles de transport.

La théorie des lieux centraux hiérarchise les centres urbains en fonction des industries de services. « Selon les versions de la théorie, les zones d’influence des centres [urbains] sont

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emboîtées (chez Christaller) » ; en effet, « les centres de niveau supérieur offrent généralement tous les services de portée inférieure (chez Lösch) »24.

Dans le contexte de mondialisation actuelle, cette notion de service s’est relativement libérée de son emprise territoriale, et certaines villes comme New York et Londres dominent la hiérarchie urbaine mondiale. Ce faisant, elles concentrent les industries de service à forte valeur ajoutée comme les services financiers.

Cette concentration des activités est directement liée au développement de la vitesse des communications.

Les bénéfices d’agglomération

En parallèle de cette concentration des activités, il existe des bénéfices d’agglomération pour les entreprises25. En effet, plus une ville est grande, plus elle facilite l’accès à une population de

travailleurs spécialisés, ce qui permet des augmentations de productivité.

Le mode de transport automobile, en l’absence de congestion, accroît encore la mobilité des individus et permet une augmentation des bénéfices d’agglomération. Une bonne qualité de l’infrastructure permet donc de rendre une agglomération plus compétitive.

Activités économiques et acceptabilité de la congestion

Malheureusement, en parallèle de la croissance économique urbaine, il se développe une augmentation de la congestion. Cette augmentation a un impact différencié en fonction du secteur économique des entreprises26. Elle induit principalement deux coûts économiques :

► un coût de fonctionnement pour un certain nombre d’entreprises ; ► une limitation de la mobilité des employés.

24 Hypergeo, « Lieux centraux », 2004, tiré de http://www.hypergeo.eu/spip.php?article13 - Consulté le 25 mars

2011.

25 Rosenthal, S., Strange, W.C. “Evidence on the nature and sources of agglomeration economies”, Handbook of

Regional and Urban Economics, 4, 2004.

26 Graham, D. “Variable returns to agglomeration and the effect of road traffic congestion”, Journal of Urban

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Les coûts économiques de la congestion conduisent les entreprises vendant des services à faibles valeurs ajoutées à progressivement quitter les grands centres urbains. En effet, les coûts de fonctionnement deviennent trop importants.

En parallèle, les foyers à revenus moyens qui ont migré du centre-ville vers la banlieue ont profité du faible coût des terrains pour devenir propriétaires. L’augmentation de la congestion accroît le coût du travail et limite leurs opportunités.

À ce stade, il est très important de noter que l’Homme est un animal territorial et qu’il existe une certaine limite naturelle de déplacement quotidien27. Selon ce principe, un déplacement d’environ

une heure par jour semble être une limite moyenne acceptable. Dans les dernières décennies, le temps consacré aux transports par les habitants des espaces parisien et londonien est bien supérieur à une heure. Dans ce contexte, devoir allonger son temps de parcours d’une heure trente à une heure quarante-cinq sera considéré par de nombreux usagers comme une augmentation non acceptable, entraînant peut-être un changement de travail. Si ce même quart d’heure affecte une personne dont le temps de trajet initial est de vingt minutes, une telle réaction est improbable. Dans ce contexte, le temps de trajet marginal d’un habitant d’une grande ville est plus précieux que celui d’une petite ville, mais cette distinction ne se retrouve absolument pas dans les formules employées dans les analyses économiques de planification des transports28.

Évolution d’une ville mondiale

Dans les villes supérieures de la hiérarchie urbaine mondiale comme New York ou Londres, la concentration des services à forte valeur ajoutée, comme les services financiers, fait que les niveaux de congestion continuent d’augmenter dans le cœur de la ville malgré les coûts économiques induits. Cette situation pose un double risque :

► premièrement, celui de voir toutes les autres activités de la ville n’opérer qu’à l’aide de

subventions (le plus souvent des aides au logement et de faibles taxes) ;

► deuxièmement, celui de voir l’économie de la ville s’effondrer dans l’éventualité d’un départ des

activités financières29.

27 Marchietti C., “Anthropological Invariants in Travel Behaviour”, Technological forecasting and social change,

1994.

28 https://www.gov.uk/transport-analysis-guidance-webtag

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Dans ce contexte, le principe de la mobilité automobile pour tous n’est pas une solution viable car elle pose un risque pour l’économie de la ville, voire du pays, en question. De ce point de vue, les espaces parisien et londonien sont très différents du reste de leur espace national en cas d’aggravation des conditions de circulation ; aucune autre industrie n’est susceptible de rester dans ces villes.

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