• Aucun résultat trouvé

Les besoins du réseau à grande échelle

À partir des années 1920, l’adaptation du réseau automobile sur une grande échelle devint de plus en plus pressante. Non seulement le réseau devait être adapté aux besoins de l’automobile, mais une relative unité était attendue dans le pays, voire en Europe.

Dans un premier temps, l’élément déclencheur de l’extension du réseau national fut un programme de modernisation. Les réseaux transférés des départements ou des villes vers le ministère des Travaux publics étaient donc désignés comme devant être mis aux normes.

Dans les périodes précédentes, les collectivités territoriales ont relativement mal perçu la tutelle de l’État en matière de gestion des réseaux. Dans ce cas, la justification initiale pour raison de trafic routier ouvrit la voie à une lecture double, immédiatement interprétée à leur avantage par certains départements. Le département de la Loire-Inférieure, par exemple, avait proposé un plan d’échange de réseau. Il s’agissait d’identifier le trafic sur le réseau, de donner au ministère les tronçons les plus chargés en trafic et de récupérer les tronçons du réseau national ne supportant que peu de trafic.

Relativement rapidement, une nouvelle circulaire administrative précisa que les tronçons de réseau proposés devaient exclure la possibilité de rétrocéder du réseau. Cette restriction a probablement généré des oppositions de la part des collectivités territoriales, car le ministère semble avoir justifié ce procédé comme une mesure de soulagement financier pour ces dernières.

Système de planification du réseau

Les incompréhensions initiales faisaient référence à la multiplicité des systèmes de planification du réseau. Il est important de rappeler que durant l’entre-deux-guerres en Europe, les systèmes de comptage de trafic sont nouveaux et peuvent être faits de deux manières :

► en comptages journaliers moyens annuels ; ► en comptages aux heures de pointe.

Le premier type de comptage fut surtout utile pour analyser l’usure de la route d’un point de vue de la maintenance de l’infrastructure. Essentiellement, ce volume permet de dimensionner la chaussée et d’estimer la rapidité de dégradation.

Le second comptage permettait de calculer les besoins en capacité de trafic du réseau aux heures de pointe. On pouvait ainsi identifier les points de congestion et les types de gestion des conflits à mettre en œuvre.

84

À cette période, les calculs de projections de développement du trafic dans le futur n’étaient que peu ou pas connus. Le choix qui semblait avoir été fait en France pour planifier le développement du réseau était probablement celui d’un schéma directeur ; action volontaire décidant des axes à développer et dans quel ordre. Environ 40 000 km de réseau furent désignés initialement pour le transfert sous le contrôle du ministère. 12 000 km de réseau furent considérés comme prioritaires. Ces 40 000 km correspondaient essentiellement à un doublement du réseau national de l’époque (qui était de 38 000 km en 1903).

Comme le système administratif français imposait de traiter toutes les collectivités locales de manière similaire, cette allocation fut répartie de manière quasiment égale entre tous les départements. Un ajustement fut fait pour les départements ayant des petites surfaces, mais la notion de valeur du temps ou de justification de l’investissement sur la base de leur rentabilité était absente. La considération principale présentée fut celle du financement des projets par l’intermédiaire du ministère plutôt que du département.

Le changement de structure administrative

Le transfert du réseau aux services de l’État se fit en deux temps. Dans un premier temps, une rationalisation du réseau s’est produite. En effet, la réforme des chemins départementaux prit place avec le décret-loi du 14 juin 1938. Après le vote de cette loi, les routes départementales, chemins vicinaux de grandes communications et d’intérêt commun furent regroupés sous la dénomination de chemins départementaux. Lors de cette réforme, les dépenses de construction, d’aménagement et d’entretien furent prises en charge par le Conseil général, sans que le département ne puisse demander de participation aux communes.

Cette réforme impliqua dans les faits une disparition des services techniques pour le réseau vicinal, ces services étant assurés par les Ponts et Chaussées.

Dans un deuxième temps, avec la loi du 15 octobre 1940, tous les services de voirie départementale et vicinale ont été rattachés à l’administration des Ponts et Chaussées dans tous les départements. Cette loi a entériné une situation de fait concernant le réseau vicinal et a placé le réseau départemental sous le contrôle du ministère.

Les pouvoirs des préfets furent donc fortement renforcés et le transfert des services techniques limita grandement la capacité d’opposition des collectivités locales par manque d’expertise technique.

Cette évolution dans les structures de gestion du réseau correspondait bien au mouvement historique de centralisation qui existait depuis la création du corps des Ponts et Chaussées. Bien évidemment, cette centralisation bénéficiait aux grands corps de l’État.

85 Les travaux routiers pour les politiques de relance

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les grands travaux s’inscrivant dans le cadre de la politique de relance économique durant la grande dépression des années 1930 ne se focalisaient pas que sur le réseau routier. En effet, le réseau ferroviaire resta dominant à cette époque et obtint l’essentiel des investissements.

La crise de 1929 ne sembla donc pas avoir accéléré la construction du réseau routier de manière significative.

En France, même si des autoroutes sont planifiées avant la Seconde Guerre mondiale, l’allocation des budgets n’a pas permis leur réalisation avant cette période. Les travaux de l’autoroute de l’Ouest avaient bien débuté avant la guerre, mais les hostilités y ont mis fin. Il faudra attendre les années 1960 pour que ces projets reprennent.

Transformation du recrutement des Ponts et Chaussées et ingénieurs des travaux publics de l’État

Depuis 1850, il existait une possibilité pour les conducteurs de travaux de l’administration des Ponts et Chaussées de rejoindre le corps des ingénieurs dans des circonstances exceptionnelles. Si cette procédure fut rare dans le contexte d’un réseau routier en déclin, la relance du développement du réseau sembla inciter les pouvoirs publics à rendre cette procédure plus aisée. En effet, en 1920, les conducteurs se voient reconnaître le titre d’ingénieur des travaux publics de l’État. Une telle logique de glissement des titres semblait correspondre au grossissement de l’appareil étatique et donc à la concentration des échelons supérieurs dans des tâches administratives. Après la Seconde Guerre mondiale, ce phénomène s’accéléra54.

Outline

Documents relatifs