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4-1 L’ÉVOLUTION DE L’AGGLOMÉRATION LONDONIENNE

Contrairement à la situation française, le paysage administratif londonien depuis le début du XIXe siècle est le théâtre de nombreuses réformes. Ces réformes touchaient au fonctionnement des administrations, mais aussi et surtout au territoire qu’elles couvrent.

En effet, contrairement à la région parisienne, il existait une volonté de longue date de faire de cette agglomération une ville du point de vue administratif. Cependant, au XIXe s., en raison de la

taille de la ville et de la lenteur des transports en commun, les habitants voyaient l’agglomération surtout comme une juxtaposition de villes ayant chacune leur caractère et leur activité économique propre.

Dans ce contexte, la vision d’une ville unifiée tenait surtout de l’idéalisme politique de la part du Parti travailliste61. C’est la croissance des classes professionnelles et le développement des

déplacements pendulaires centre - périphérie qui permettaient l’appropriation de la vision d’agglomération par ses habitants. Pour rappel, en 1888, le London County Council (LCC) fut créé pour remplacer le Metropolitain Board of Works, sur la même zone géographique et avec seulement quelques pouvoirs supplémentaires. La City resta exclue de cette réorganisation, et le gouvernement conservateur de l’époque limita la portée représentative de cette nouvelle institution par crainte d’offrir une plate-forme au parti de gauche de l’époque.

Avant la Seconde Guerre mondiale

La période initiale du LCC fut donc marquée par une ambition intégratrice, mais, entre 1907 et 1934, les conservateurs gagnèrent les élections. Durant cette période, l’agenda de cohérence d’agglomération fut laissé de côté et par la suite, cette divergence de vue concernant l’intégration politique de l’agglomération entre les conservateurs (se concentrant sur l’échelle du borough) et les travaillistes (se concentrant sur l’échelle de l’agglomération) se perpétua.

Quelle que soit l’approche de l’équipe au pouvoir, le recensement de 1901 montra pour la première fois que les banlieues avaient débordé des limites administratives du LCC. À cette date,

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2 millions de Londoniens vivaient déjà dans le Kent, Surrey, Essex ou Middlesex. À partir de ce recensement, la population du LCC commença à baisser au profit des banlieues.

Malgré la volonté du gouvernement de contenir le phénomène d’étalement urbain, les collectivités territoriales ne s’étaient pas organisées dans ce sens. Rien ne fut fait avant la Seconde Guerre mondiale. Une proposition de ceinture verte fut bien avancée en 1935 par le Greater London

Regional Planning Committee, mais elle ne fut possible qu’après le Town and Country Planning Act de 1947.

À Londres, comme à Paris, la situation du logement était préoccupante. La fin du XIXe s. et la

première moitié du XXe virent de nombreuses interventions ambitionnant de raser les bidonvilles et logements insalubres. En dépit de ce travail, au commencement de la Seconde Guerre mondiale, la question de la salubrité des logements restait entière.

Durant la Seconde Guerre mondiale

En 1940 et 1941, la ville de Londres subit des bombardements importants. Elle fut en partie évacuée ; 40 000 civils furent tués et 1 million de bâtiments détruits. Les destructions furent donc tout à fait majeures et déclenchèrent la mise en place d’un plan de reconstruction. Les bidonvilles ont été particulièrement affectés par cet épisode de la guerre. Les bombardements allemands s’étant concentrés sur les usines, cela peut expliquer l’impact sur le logement ouvrier62. En outre,

au-delà de ces bombardements, une politique volontariste de dispersion des communautés ouvrières fut mise en place après la guerre63.

Abandonnant l’idée d’une coordination volontaire entre les collectivités locales, le London County

Council commissionna à John Henry Forshaw et Sir Leslie Patrick Abercrombie la production d’un

schéma directeur pour la région londonienne (County of London Plan – 1943). Ensuite, le Ministry

of Works ordonna The Greater London Plan en 1944. L’espace géographique couvert par le plan

alla au-delà de la zone urbanisée pour prendre en compte une zone verte et ainsi contenir l’urbanisation. La Figure 16 montre le plan de la région urbanisée et la délimitation d’un zonage de la ville en zones résidentielles / mixtes, zones industrielles, zones commerciales, etc.

Il est important de noter l’absence notable de la City de Londres, en noir sur la carte.

62 http://www.20thcenturylondon.org.uk/slums.

63 Adams D., Larkham P. J., (Re)planning the Metropolis: Process and product in the Post-War London, University

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Figure 16 County of London Plan – 1943

Au final, le plan proposait des solutions d’aménagement pour remédier aux points suivants :

► la congestion du trafic ; ► la crise du logement ;

► la distribution spatiale des activités dans la ville ;

► le chevauchement des zones industrielles et résidentielles ; ► l’étalement urbain.

Le plan soumettait aussi la création de villes nouvelles, satellites de l’agglomération principale au- delà d’une ceinture verte64. Ces dernières seraient venues compléter le réseau des villes de

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proche banlieue déjà accessibles en train. La ceinture verte aurait ainsi correspondu à un espace protégé quasi inconstructible de milieux boisés et agricoles. L’idée était de fournir aux habitants de Londres un lieu récréatif protégé en plus des espaces verts dans la ville.

Après la Seconde Guerre mondiale

Après la Seconde Guerre mondiale, les besoins de coordination de l’agglomération londonienne ne déclenchèrent pas une réorganisation du GLC. À la place, le Town and Country Planning Act de 1947 donna au gouvernement central la fonction de supervision stratégique du développement régional.

À cette époque, en raison de l’étendue de la ville et des divergences grandissantes d’intérêts entre les communautés locales, peu de gens ont prôné l’extension géographique du GLC. En outre, les collectivités de banlieue ont résisté à toute intégration dans la structure du GLC. En effet, il existait une division politique importante entre le cœur de l’agglomération, bastion travailliste, et la banlieue traditionnellement conservatrice. Malgré tout, entre 1957 et 1960, une commission royale dirigée par Sir Edwin Herbert recommanda la création de 52 nouveaux boroughs. Après examen du parlement, 32 boroughs supplémentaires furent créés et intégrés à la structure du GLC.

Cette extension avait pour but d’équilibrer les forces politiques dans la capitale, jugées trop à gauche par les élites nationales. Par conséquent, il n’est donc pas possible d’attribuer à l’extension du GLC un quelconque motif de rationalisation du fonctionnement de l’agglomération. Comme en France, les fonctionnaires des différents ministères étaient exaspérés par la paralysie du système politique en place65, qui impliquait de nombreux conflits locaux.

Toutefois, à partir des années 1950, la situation économique s’améliora. L’industrie manufacturière progressa ainsi que le nombre d’emplois de bureau. Malgré tout, la population de Greater London passa de 8 615 050 en 1939 à 8 193 921 en 1941. L’agglomération ne retrouva jamais sa population d’avant-guerre. Cette perte correspondait à une fuite des habitants en dehors de l’agglomération, en direction des villes satellites accessibles en train ; tendance qui se poursuivit dans les décennies suivantes.

Dans Greater London, un transfert de population du centre vers les banlieues s’est aussi produit. Le cœur de l’agglomération a perdu près de 650 000 habitants. Une immigration de travailleurs de l’Empire fut organisée pour aider au plan de reconstruction. Ces derniers s’installèrent dans les

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quartiers traditionnellement ouvriers du centre et héritèrent des conditions de précarité qui s’y trouvaient.

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