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Introduction du chapitre

1. Les théories classiques du changement

1.3. Le management du changement

L'intervention des individus dans le changement organisationnel est nécessaire pour adapter l'organisation à son environnement. Le rôle du manager prend une dimension essentielle pour engager le processus de changement et ainsi contrer l'inertie qui semble caractériser l'organisation. Plusieurs auteurs (Kanter, 1983 ; Nadler & Tushman, 1989 ; Kotter, 1990) relèvent l'importance d'un leader emblématique, charismatique, qui symbolise la volonté de changement. Son rôle est de marquer la volonté de changer en diffusant au sein de l'organisation une nouvelle vision des choses. La littérature s'est d'ailleurs beaucoup intéressée aux qualités requises pour piloter des programmes de changement au sein des organisations. A ce propos, Reitter (1991) résume les principales caractéristiques des transformational leaders mis en

définissent eux-mêmes comme agent de changement, ils sont courageux, à la fois intellectuellement et affectivement, croient en la capacité des hommes d'assumer des responsabilités et savent animer une organisation. Ils réfléchissent en termes de valeurs et sont capables d'articuler celles-ci et de les faire partager par leurs collaborateurs. Ils comprennent leurs erreurs et en tirent des leçons, savent gérer la complexité, l'ambiguïté et l'incertitude. Ce sont des visionnaires, capables de parler du futur et de le rendre imagé (Reitter, 1991 ; Vas, 2000). Dans une perspective plus large, Wiersema & Bantel (1992) ont étudié le lien qui pourrait exister entre les caractéristiques démographiques de l'équipe dirigeante et les changements stratégiques menés dans les organisations. Ils suggèrent dans leurs conclusions que des équipes dirigeantes d'âge jeune (en moyenne), ayant peu d'ancienneté dans l'entreprise, un bagage intellectuel élevé (niveau d'études) et présentant une forte hétérogénéité en termes de spécialisation scolaire, facilitent le changement stratégique des entreprises. En résumé, il semble bien que l'équipe dirigeante et les contextes dans lesquels elle évolue, jouent un rôle déterminant dans le pilotage du changement.

Le management du changement se décline le plus souvent sous la forme de projets mis en œuvre par les organisations. La direction de projet intègre l’ensemble des aspects stratégiques et politiques (Giard, 1991). La gestion de projet a pour objectif essentiel d’apporter à la direction des éléments pour prendre en temps voulu toutes les décisions lui permettant de respecter les termes du contrat passé avec le client, en contenu, en qualité, en délai et en coût. L’intérêt d’un tel management réside dans sa capacité à fournir une infrastructure puissante au processus de changement permettant aux équipes de se mobiliser avec bien plus d’efficacité et d’efficience (Grundy, 1993). Il permet d’apprendre en réalisant (learning by doing), d’explorer des champs nouveaux, de confronter les anciens modèles mentaux à la réalité (Leroy, 1996). Il redistribue les cartes du pouvoir, les processus de prise de décision, les modes d’engagement des ressources clés. Enfin, il est en perpétuelle évolution en fonction du jeu des acteurs.

La gestion de projet se caractérise par un processus cyclique comprenant quatre activités reliées : la définition, la planification, l’exécution et le contrôle (Winter, 1996). Sa mise en œuvre est d’abord le fait du rôle intégrateur du chef de projet, puis de la mise en place d’une équipe pluridisciplinaire. Elle intègre

également une structure aplatie, organique et mouvante, un mode de fonctionnement souple et des relations latérales. Par ailleurs, elle met en jeu des mécanismes pour gérer efficacement les interfaces internes et externes et se caractérise par la décentralisation au niveau de l’action et par des systèmes et des procédures adaptés aux besoins du projet (Raynal, 2001).

Les approches dites Top-Down, Bottom-Up et Middle-Up-Down, constituent un socle pour les nombreuses propositions de la littérature sur le management du changement organisationnel. Le Top-

Down se caractérise par une stratégie définie par la direction, qui se décline en actions opérationnelles au

niveau de toutes les structures fonctionnelles et hiérarchiques de l’entreprise. Elles relèvent d’une forte volonté hiérarchique et laissent peu de place à la responsabilisation et à la prise d’initiative des autres collaborateurs de l’organisation. En revanche, la direction mobilise des moyens techniques, humains et financiers importants pour la mise en place et le suivi des actions dont elle est à l’origine. Ce management « par le haut » est peu adapté à la prise en compte d’un nouveau défi, d’un nouvel enjeu qui s’imposerait à l’entreprise en mobilisant des connaissances nouvelles et des changements complexes. Ce type de management est davantage opérationnel et efficace lors d’un changement pour lequel les connaissances préexistent et peuvent être plus rapidement traduites en actions concrètes. Les approches Bottom-up, opposées au modèle précédent, construisent la stratégie globale de l’entreprise à partir des savoir-faire issus du terrain. Leur efficacité peut être rapidement mesurée à des échelles locales. Mais, face à la diversité des savoirs mobilisés, l’entreprise se trouve confrontée à la difficulté de construire une démarche globale et cohérente afin d’élaborer une vision stratégique à long terme. Cependant, en participant à l’élaboration de la stratégie globale par la prise en compte de leurs activités quotidiennes, les collaborateurs de l’entreprise adhèrent plus facilement aux changements organisationnels. Contrairement aux deux précédentes, les approches managériales Middle-Up-Down, ne répondent pas à une logique mono-directionnelle (Nonaka, 1988). Cette forme de management s’appuie sur les acteurs de l’entreprise qui occupent une position d’intermédiaires (de relais) entre la hiérarchie dirigeante et les équipes opérationnelles. Elle permet de mieux combiner les relations organisationnelles, du fait de la capacité des

du changement dans les organisations : les formes déductives et inductives, qui s’appliquent aux différents niveaux de l’entreprise. Il suggère un déroulement plus itératif que linéaire des processus à mettre en œuvre pour réaliser un changement pérenne. Le management du changement s’appuie alors sur une hiérarchie intermédiaire.

L’implication du Middle Management ne peut se faire que par l’évolution des modes de management en s’assurant de la capacité de l’organisation à passer d’un mode de management directif à un management participatif, voire à la délégation. Ce sont en effet les acteurs de terrain qui savent ce qui se passe réellement, et qui sont les premiers à pouvoir faire remonter des solutions et des idées d’amélioration en vue de faire évoluer l’organisation. C’est donc en leur faisant partager leurs connaissances et leur savoir que l’entreprise s’enrichira. Ce « regain de pouvoir de l’opérationnel » passe bien évidemment par le « savoir faire-faire » : faire participer les équipes aux projets, en insistant sur l’importance de la bonne compréhension des enjeux des chantiers et en les responsabilisant dans leur accomplissement. Afin de concrétiser et de fédérer les équipes autour du projet, il semble évident de devoir former, impliquer et motiver les Hommes comme il se doit. Il faut également avoir conscience que chaque individu réagissant différemment face au changement, certaines personnes peuvent adopter une posture « négative » potentiellement nuisible. Il faut donc être prêt à pouvoir gérer ce genre de situation.

Une des pratiques managériales souvent employée par les organisations consiste à mettre en place des démarches d’empowerment. Les traductions de ce terme varient de « la mise en pouvoir », à « la prise en charge », ou à « l’appropriation du pouvoir ». Morin (1996) définit l'empowerment comme le pouvoir d'agir avec autorité, c'est-à-dire l'habilitation des membres de l'équipe. « Pour être efficace,

l'équipe doit avoir le pouvoir de négocier des ententes et d'effectuer les ajustements requis pour accomplir son mandat » (Morin, 1996, p. 361). Pour Brunet & Broudreault (2001, p. 1), « l'empowerment est une variable importante de la motivation au travail, influencée par les composantes de la tâche, de l'organisation et du leadership ». Thomas & Velthouse (1990) soulignent que la signification

épistémologique du mot « empowerment » porte sur le fait de « donner le pouvoir » afin de susciter la motivation intrinsèque des subordonnés. L'empowermemt est motivationnel car il se centre avant tout sur l'individu et exprime sa motivation intrinsèque (Tymon, 1988) ; relationnel parce que son processus donne

de la place à l'environnement et aux interactions sociales. En résumé, l'empowerment est le processus de motivation intrinsèque par lequel un employé en vient à donner son plein rendement au travail dans une organisation. Il fait partie des pratiques de gestion à caractère participatif dont l'objectif est d'augmenter la motivation des employés au travail (Morin, 1996).

En conclusion, le management du changement ne peut être normé par une catégorie d’approche plutôt qu’une autre en raison de sa nécessité d’adaptation à la culture, aux méthodes de travail et au mode de fonctionnement global de l’organisation. La réalité de terrain des entreprises montre que ce sont les approches intermédiaires qui semblent davantage adaptées à l’intégration d’une nouvelle donne dans l’entreprise, du fait de la participation conjointe des différents niveaux d’acteurs à l’élaboration d’actions concrètes et d’une vision stratégique nouvelle. Cette position favorise des modes d’organisations transversales, qui créent des conditions favorables à l’apprentissage et au changement (Bourgeon, 2001). Cela permet, au travers de l’autonomie et du pouvoir de décision conférés à l’équipe, la réalisation d’apprentissages collectifs. C’est en effet toujours au travers de ce qui peut paraître flou, car informel, que les acteurs de l’entreprise, et notamment les cadres intermédiaires, en partageant relations et savoirs, construisent et participent au déroulement de la stratégie des organisations auxquelles ils appartiennent (Hatchuel, 1999 ; Birkinshaw & al., 2008).