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Introduction du chapitre

1. Les théories classiques du changement

1.1. Dimensions sociologique, culturelle et cognitive

Les sociologies françaises des organisations et de l’entreprise se sont particulièrement penchées sur la question du changement et considèrent que l’organisation produit ses propres règles et ses propres contraintes. Pionnier de l’analyse stratégique, et reconnu comme le sociologue des organisations (Durand & Weil, 1990), Michel Crozier assimile le changement à une rupture de l’ordre interne de l’entreprise, remettant en cause les jeux existants. L’ouvrage de référence11 présente le salarié, ou plus précisément l’individu, comme un acteur qui prend des risques, agissant selon ses propres buts. « Joueur », il est contraint par le « système », mais dispose de marges de manœuvre lui permettant de construire le changement, et non pas de le subir. De cette manière, le jeu « concilie la liberté et la contrainte » (Crozier & Friedberg, 1977, p. 113). Cette théorie de l’acteur refuse la notion de rôle prédéterminé de l’individu face à des contraintes imposées. La seule obligation est d’entrer dans des jeux permettant aux hommes de « structurer leurs relations de pouvoir et de les régulariser tout en se laissant leur liberté » (idem, p. 113). Ainsi, les conditions du changement organisationnel dépendent du comportement de l’acteur, qui agit localement, et parfois même « clandestinement » (Moullet, 1992).

La sociologie de l’entreprise, décrite par les travaux de Sainsaulieu & Segrestin (1986), Bernoux (1996) ou Thuderoz (1996), appréhende le changement comme la résultante d’une interaction constante entre l’entreprise, les ressources et les contraintes sociétales. « L’entreprise produit du changement non

pas tant par les jeux décentralisés de ses acteurs, que par sa puissance institutionnelle, qui en fait un foyer de production identitaire, un espace doté d’une autonomie réellement accrue face à la force traditionnelle des régulations sociétales importées dans l’entreprise » (Sainsaulieu, Segrestin, 1986, p.

341). L’accent est mis ici sur la construction sociale des organisations, postulat fort issu des théories institutionnalistes (Selznick, 1949 ; Commons, 1934) et néo-institutionnalistes (DiMaggio & Powell, 1983, 1991). Elles mettent en exergue le rôle des valeurs partagées, de la solidarité, de la participation ainsi que la confiance (Segrestin, 1992) entre les collaborateurs dans les entreprises. En effet, « la confiance est

des relations salariales et commerciales » (Courpasson, 1998, p. 9). Pour ne pas rompre cette confiance,

l’entreprise s’adapte et évolue davantage en fonction des exigences sociales du marché et de son secteur d’activité que des exigences économiques. Ce comportement souligne l’ambiguïté et l’irrationalité des processus organisationnels, maintes fois démontrées depuis les travaux de Simon (1961) sur la rationalité limitée des individus.

Entre vision du changement par l’interaction locale et par la sociologie institutionnaliste, se place une approche régulationniste. L’acteur participe réellement au changement et construit ses règles (Reynaud, 1989). La contrainte rationnelle des acteurs est ici celle du compromis et de la négociation.

Plus en marge des approches précédemment citées, la littérature anglo-saxonne défend une vision spontanée du changement, basée sur le hasard et la chance. Cette position stigmatise une vision « processuelle » de l’organisation, où le changement est quasi perpétuel (Chia, 1996). La place est laissée à la créativité dans les organisations en se focalisant sur les processus de création de sens et en considérant les individus comme des agents actifs déterminant leur destinée (Weick, 1995).

Par ailleurs, l’analyse du changement relève d’une vision globale de l’organisation qui ne peut être comprise sans aborder le contexte environnemental ou politique dans lequel elle s’insère. L’introduction de la notion d’environnement vise à mettre l’accent sur l’événement historique dans son contexte. Inspirée par une vision Schumpétérienne de l’entrepreneur innovateur, mais aussi par la théorie de la contingence (Lawrence & Lorsch, 1967), cette approche considère que les managers détiennent le pouvoir d’instituer et de conduire le changement, vision que l’on retrouve chez Chandler (1962). La notion d’entrepreneur est ici prise au sens large et désigne un collectif concernant les dirigeants, mais aussi les cabinets extérieurs et les cadres supérieurs, impliqués dans les processus de décisions stratégiques pour l’entreprise. Le changement naît d’une crise extérieure, mettant en danger l’entreprise, et contraint les managers à définir une nouvelle organisation. Le changement ne peut donc être évoqué sans la prise en compte du contexte politique de l’entreprise. Il s’analyse à travers les choix, sciemment construits par les managers, que les objectifs prévus soient ou non atteints. En ce sens, le changement est « un des

moyens de légitimer, en interne et en externe, la souveraineté et la compétence supposées, et donc le pouvoir des gouvernants » (Courpasson, 1998, p. 11). En effet, la direction impose ses lois aux autres

acteurs et le changement est sociologiquement perçu comme un « outil politique ». Il ne s’agit pas ici d’une réalité gestionnaire, mais d’une « stratégie de gouvernement délibérée » (idem, p. 15). Cette littérature managériale assimile le changement organisationnel aux crises et aux ruptures (Lagadec, 2000). Les grandes ruptures viennent de l’extérieur et le rôle du manager est de tempérer la vague de changement à l’intérieur de l’entreprise, en lui donnant un rythme (Airaudi, 1998). Des innovations managériales se forment et de nouvelles formes d’organisation s’instaurent et se défont. Certains auteurs vont jusqu’à penser que sans grande rupture, on ne peut vraiment parler de changement, mais d’adaptation (Doublet, 1996). Partageant cette idée du rôle majeur que détient le manager, ou plus exactement du leader, d’autres considèrent que le changement ne dépend pas tant des crises, jugées rares, que du contexte interne et externe de l’entreprise. Le changement ne peut être extrait du contexte qui l’a crée et qui lui donne un sens (Pettigrew, 1986). Ainsi, il se crée par régénération (Whipp & al., 1987), grâce à la capacité des leaders à prendre conscience de la nécessité du changement. Il est alors analysé sous l’angle d’un « processus », forcément très long, permettant aux managers d’exercer leur pouvoir et de légitimer ce changement. Ce courant majeur ouvre un champ de recherche en stratégie qui prend en compte le contenu, le processus et le contexte dans lequel le phénomène se déroule (Pettigrew, 1986).

Cette prise en compte de l’environnement en tant que facteur d’évolution est issue de deux courants majeurs que sont l’écologie des populations (Hawley, 1950 ; Campbell, 1969 ; Aldrich, 1979) et l’évolutionnisme (Aldrich, 1999). Le premier considère qu’il faut « prendre en compte le contexte sociétal

dans lequel les organisations sont créées, survivent ou disparaissent (…) dans l’obscurité » (Aldrich,

1979, p. 29). Cette approche se penche sur la diversité des organisations (Hannan & Freeman, 1977) en se focalisant notamment sur des variables d’ordre démographique comme les taux de création et de disparition des populations observées. A partir d’un modèle général du changement organisationnel en trois étapes (variation, sélection, rétention), le courant sur l’écologie des populations repose sur l’idée que « la sélection des formes organisationnelles se produit du fait des contraintes environnementales : les

populations met davantage en exergue les disparitions d’organisations que leurs adaptations (Scott, 1998), du fait de l’inertie structurelle et de la difficulté des managers à anticiper les changements (Hannan

& al., 1996). Le courant évolutionniste va plus loin et aborde la question du changement à des niveaux

d’analyse à la fois plus variés et plus fins. Le modèle général du changement organisationnel est décrit à travers quatre étapes : variation, sélection, rétention/diffusion, et lutte pour les ressources rares. Ces quatre processus agissent de manière simultanée en étant reliés par des boucles de rétro-action « dans la

mesure où les processus de rétention limitent les variations possibles, et la lutte pour les ressources rares peut changer les critères de sélection » (Forgues, 2002, p. 74).

Enfin, un tout autre courant cherche à donner une cause cognitive au processus de changement, en construisant des modèles explicites de la manière dont les individus peuvent exercer une influence sur leur destinée. Il ne s’agit pas tant de déterminer s’il s’agit d’un changement organisationnel volontaire ou contraint, mais de mettre en évidence les processus d’apprentissages individuels et collectifs qui participent à l’élaboration de la transformation et à l’évolution elle-même. Le changement organisationnel est appréhendé comme « un processus de transformation radicale ou marginale des structures et des

compétences qui ponctue le processus d’évolution des organisations » (Hafsi & Fabi, 1997). Ainsi, ce

courant alternatif ne se positionne ni sur une vision du changement imposée par la direction ni sur une vision du changement comme une simple réponse de l’organisation à une pression externe, mais décrit comment les mécanismes de changement reflètent des processus d’apprentissage organisationnel. Autrement dit, les périodes de changement sont des « moments apprenants » et les périodes de stabilité, des phases de compréhension des mécanismes de changement (Guilhon, 1998).

Le champ théorique de la connaissance et du savoir est extrêmement vaste et fait preuve d’une « inépuisable complexité et richesse » (Prax, 1998, p. 9). Les catégories sont nombreuses. Grundstein (1998) distingue les savoirs et les savoir-faire. Cette notion de « savoir-faire » englobe trois catégories de savoirs : les « savoir-faire », « savoir-comprendre » et « savoir combiner » (Hatchuel & Weil, 1992). Les travaux sur l’apprentissage organisationnel remontent au début du siècle dernier mais ont été particulièrement marqués par les apports de Simon (1991). Ce dernier a explicité les liens entre

l’organisation et les processus mentaux et cognitifs des acteurs dans la prise en compte de l’environnement. Les domaines de recherche de la psychologie expérimentale, de la gestion des connaissances et du management du changement, permettent de préciser les caractéristiques et les mécanismes de l’apprentissage. Selon Bateson (1977), l’apprentissage est un indicateur de changements, garants des mécanismes d’évolution des organisations. En effet, l’apprentissage organisationnel est un courant majeur de la théorie des organisations (Argyris & Schön, 1978 ; Schön, 1996). Cette théorie développe l’idée selon laquelle les individus agissent à partir de leurs croyances, attitudes et valeurs (espoused theory) et des règles et procédures mises en pratique (theory in use) au sein des organisations. Dans ses travaux, Argyris (1996) envisage l’apprentissage à différents niveaux : depuis l’individu jusqu’à l’organisation. Ce modèle de l’apprentissage en simple ou en double boucle est devenu la base fondatrice de l’analyse du changement organisationnel. Il propose notamment une représentation en double boucle où il explique que la volonté de modification d’un acte, sans modification de ses valeurs directrices correspond à une action vouée à un échec immédiat ou à terme. Hatchuel (1996) partage cette idée d’un double apprentissage par la confrontation et les échanges de deux savoirs distincts engendrant un enrichissement mutuel.

Probst & Buchel (1997) définissent l’apprentissage organisationnel comme « un élargissement et un changement du système de valeurs et de connaissances,

l’amélioration des capacités de résolution de problèmes et d’actions ainsi que le changement de cadre commun de référence des individus à l’intérieur d’une organisation ».

Pour Koenig (1994), c’est un « phénomène collectif d’acquisition et

d’élaboration de compétences qui, plus ou moins profondément et plus ou moins durablement, modifie la gestion des situations et les situations elles-mêmes ».

Alice Guilhon précise que « l’apprentissage organisationnel peut se déduire

d’apprentissage organisationnel lorsqu’elles cherchent à exprimer l’évolution et donc le changement des organisations » (Guilhon, 1998, p. 98).

L’apprentissage organisationnel est décrit comme un processus de changement révolutionnaire des structures et des comportements, appréhendé au niveau global de l’entreprise (Guilhon, 2000).

L’apprentissage est directement lié à des contextes en mutation, au sein desquels les organisations doivent s’adapter (Schön, 1996). Développement des savoirs et des modes de fonctionnement sont associés lors d’un projet de changement (Charrue & al., 1994). Leur succès dépendra de la capacité des acteurs de l’organisation à voir les choses d’une façon nouvelle, à acquérir une compréhension neuve et à produire de nouveaux schémas de comportement. Alsene & Lefebvre (1993) proposent des mesures stratégiques d’accompagnement pour optimiser la gestion globale du changement technologique en intégrant les aspects économiques, techniques, humains et organisationnels. Ces propositions consistent à informer et former le personnel, organiser le travail par le partage et la coordination des tâches, structurer des organisations et changer les traditions, mentalités et habitudes de travail du personnel.

L’apprentissage se réalise dans l’action (donc dans l’action de changement) (Argyris, 2000). Il constitue un cadre d’analyse de l’évolution des organisations, expliquée par des changements successifs et conséquents entre quatre éléments : les représentations, la compétence collective, l’histoire et les routines organisationnelles (Guilhon, 2000).

Figure 3 : Apprentissage et évolution des organisations (d’après Argyris, 2000 ; Guilhon, 2000)

La gestion des connaissances comprend l’articulation de quatre formes d’actions qui consistent à repérer les connaissances, à les préserver, à les valoriser puis à les actualiser (Grundstein, 1998). Il faut ensuite déterminer le contenu des actions à réaliser, c’est à dire préciser la « matière » à capitaliser. Les connaissances évoluent selon un cycle qui passe par des stades de codification, puis de diffusion : les connaissances naissent, se développent, atteignent un stade d’utilité maximale puis se banalisent et deviennent périmées (Mack, 1995).

Il faut distinguer création et gestion de connaissances. La force des entreprises se situe davantage dans l’aspect création que dans la gestion (Takeuchi, 1998). Les travaux de Nonaka et Takeuchi (1995) proposent une représentation de la transformation des connaissances individuelles vers des connaissances collectives par un « Cercle de création des connaissances » en quatre grandes étapes. La socialization correspond à un partage de connaissances tacites au sein d’une équipe de travail. L’externalization correspond au passage des connaissances tacites vers des connaissances explicites, étape de formalisation, qui permet de diffuser les connaissances sous une forme accessible à un plus grand nombre. La combination correspond aux interactions des nouvelles connaissances avec celles déjà acquises, c'est-à-dire les connaissances explicites. Enfin, l’internalization correspond à

Changement de la compétence collective Changement des représentations Changement de l’histoire Apprentissage Changement des routines organisationnelles

humaines se créent et se diffusent via les interactions sociales qui se produisent lors de la conversion des connaissances tacites en connaissances explicites. Il s’agit soit d’interactions entre individus, soit d’interactions entre les individus et l’organisation. On voit ici apparaître le lien entre connaissances individuelles et connaissances collectives : l’organisation en tant que telle ne peut créer de connaissances mais ses modes de fonctionnement peuvent jouer, un rôle fondamental dans l’incitation aux échanges et dans la facilitation de la diffusion des connaissances individuelles (Nonaka, 1994). Les connaissances tacites sont intimement attachées à son détenteur et relèvent d’un caractère incommunicable. Les connaissances explicites, elles, ont un caractère scientifique et échappent à son détenteur (Polanyi, 1983).

Les cadres intermédiaires permettent de favoriser la transformation et la création des connaissances, grâce à leur position de relais entre les savoirs tacites de la direction et les autres collaborateurs et employés (Nonaka, 1988). La littérature sur ce Middle-Up-Management est devenue un axe de recherche important dans de nombreux travaux sur l’analyse des organisations : leurs rôles dans les stratégies de coopétition (Nalebuff & Brandenburger, 1996) entre les partenaires des réseaux d’affaires (Le Roy, 2003), leur présence majeure dans les économies de proximités…

Dans l’analyse stratégique du changement, le manager doit savoir « modeler conjointement,

pensée et action, contrôle et apprentissage, stabilité et changement » (Mintzberg, 1990, p. 66). Le modèle

complexe d’une vision systémique du changement implique de manière explicite les phénomènes d’apprentissage (Mintzberg & Westley, 1992). Ces derniers constituent un moyen d’orchestrer les processus de changements possibles. Ainsi, l’apprentissage fournit aux acteurs de l’organisation les moyens d’adapter leur comportement aux évolutions de l’environnement. Les mécanismes du changement organisationnel sont ceux qui favorisent la compréhension et la réussite du changement par les individus de l’organisation. Ils sont donc inhérents à la capacité d’apprentissage individuel mais aussi organisationnel (Guilhon, 1998).

Certains contextes sont plus favorables que d’autres à l’émergence de situations d’apprentissage (Ingham & Mothe, 2000), notamment dans le domaine des coopérations technologiques interentreprises,

selon des déterminants comportementaux et structurels. La motivation, l’engagement des individus mais aussi celui de l’organisation, représentent un moteur dans le processus d’apprentissage. Dans le domaine de l’ergonomie cognitive, la motivation est considérée comme le moyen de développement d’un apprentissage dans le sens où elle crée une attente chez le sujet et peut augmenter son niveau de vigilance ainsi que son seuil de charge mentale. La motivation est comme une condition nécessaire à une contribution effective des personnes. Elle se définit par un ensemble de facteurs et de mécanismes qui, à un moment donné, « déclenchent l’activité du sujet, la dirigent vers certains buts, lui permettent de se

prolonger si ces buts ne sont pas atteints, et l’arrêtent le moment venu » (Reuchlin, 1977, cité dans

Cazamian & al., 1996). Elle consiste notamment à diffuser les informations, à former le personnel et à introduire des systèmes de participation. La motivation au travail est un processus complexe, qu’on ne peut réduire à quelques recettes simples (Devise & Vaudelin, 2001). Parmi les multiples stratégies qui permettent de gérer et de reconstruire en permanence la motivation des groupes, le leadership tient une place importante. C’est la raison pour laquelle « le chef de projet doit chercher à garantir l’implication des

acteurs du projet dans la réalisation d’un système participatif d’apprentissage » (Shrivastava, 1983, p. 12).

Nous ne pouvons poursuivre notre propos sur l’apprentissage organisationnel sans souligner la variable temporelle, qui impulse une orientation et un engagement à long terme. En effet, « l’apprentissage est toujours, dans une situation donnée, le comportement le plus coûteux : coûteux en

temps, en énergie, coûteux aussi sur le plan psychologique puisqu’il requiert d’abandonner la recherche immédiate de l’efficacité pour s’engager dans une recherche intellectuelle toujours aléatoire et dont on ignore évidemment à l’avance les satisfactions qu’elle réserve » (Meirieu, 1996, p. 30).

En somme, les différents travaux sur l’apprentissage organisationnel permettent d’énoncer les principes suivants :

- le fonctionnement organisationnel est le produit de l’intégration des apprentissages antérieurs. Les expériences passées, assimilées sous forme de routines, façonnent les comportements des entreprises. Une fois constituées, les routines ont une vie propre, indépendante des

conditionnée par des pratiques, des savoir-faire et des routines organisationnelles déjà existantes (De La Ville, 1998) ;

- l’apprentissage est lié au développement individuel des membres de l’organisation. Ainsi, l’analyse de l’adaptation et de l’évolution des acteurs au sein des organisations constitue le moyen privilégié pour améliorer le fonctionnement de l’organisation dans son ensemble ; - la capacité des entreprises à changer passe par une participation active et intelligente de tous,

développée par une culture collective. Cette culture est le produit d’un apprentissage prenant appui sur les expériences passées. En effet, les apprentissages individuels se traduisent au niveau de l’organisation par la création d’une culture commune (idem, 1998) ;

- la modification du système de raisonnement des individus favorise l’apprentissage organisationnel. Une entreprise devient apprenante lorsque ses membres améliorent leur capacité à prendre des décisions en intégrant la complexité du fonctionnement organisationnel. Ils modifient alors leurs modèles mentaux, leurs cartes cognitives. ;

- enfin, l’apprentissage est un processus qui s’inscrit dans la durée.

Ces différents principes montrent qu’il existe, à l’évidence, un lien entre changement et apprentissage. Cependant, l’apprentissage des individus et des organisations n’est pas automatique. Le changement est souvent perçu comme une menace et une perte des avantages déjà acquis. « Il convient

de ne jamais oublier que les écrits sur le changement organisationnel ont vu le jour dans la littérature managériale en même temps que ceux sur la résistance aux changements » (Morin, 1988). L’adhésion et

l’appropriation des collaborateurs et des employés aux décisions et aux actions de la direction ne sont pas obtenues d’emblée. Il faut vaincre les effets d’inertie, de routines et de résistances collectives et individuelles pour engendrer la transformation dans les organisations.

En effet, l

e temps objectif du projet (son temps de réalisation et la durée de participation des acteurs) et le temps subjectif (vision partagée des délais par les acteurs) ont une influence notable sur la réalisation d’apprentissages collectifs au cours des projets (Bourgeon, 1998). L’entreprise recherche un équilibre délicat entre deux objectifs souvent contradictoires : accomplir un projet le plus rapidement possible, tout en laissant aux acteurs le temps de développer des apprentissages collectifs (Bourgeon, 2001). Ainsi, le changement entraîne l’apparition

d’un stress potentiellement dysfonctionnel tant au niveau individuel qu’organisationnel (Ouimet & Dufour, 1997). Ce climat de stress généré par les contraintes de délais imposés dans les projets représente un frein à la réalisation de l’apprentissage (Midler, 1995). Il convient donc de privilégier les moyens