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Les sections précédentes offrent une bonne lecture du sens et du type de liens entre l’enfant et l’environnement envisagés par David Sobel. Ce dernier envisage pour eux l’exploration du monde, la manipulation de matériaux modelables, la fabrication de lieux spéciaux, l’empathie avec la nature et la réalisation de représentations du monde – du plus intime vers le plus lointain.

En ce qui a trait aux lieux spéciaux, Sobel évoque les liens entre le sujet et l’objet et il analyse les effets psychologiques d’une telle expérience de se faire une place à soi en dehors de la maison, dans le monde.

Au départ, un simple sentiment qu’il y a quelque chose de spécial dans le paysage. Ensuite sont empilées des branches ou des planches liées ensemble pour créer une structure primitive. Éventuellement l’intérieur est modifié, un tapis est installé, des tablettes sont construites. Progressivement, un espace unique est façonné qui reflète le moi émergeant. Ainsi, les activités de construction des enfants sont « une concrétisation du processus d’individuation ». Parce que les enfants ont besoin d’interagir avec des matériaux concrets pour enraciner leur processus cognitif durant l’enfance, ils ont besoin d’utiliser du bois, des roches et de la terre pour s’engager dans le processus qui laisse le moi naître et venir au monde. (Sobel, 1993, p. 71, trad. lib.)

Le lien entre l’enfant et ce lieu qu’il s’est construit revêt une grande importance aux yeux de Sobel, chez qui la notion du « fort » prend une tournure psychologique.

Ces lieux sont appelés des forts parce qu’ils servent de retraite face aux forces du monde. Au moment où le moi commence à mûrir dans l’enfance, les enfants commencent à percevoir combien fragile est leur individualité face au vaste monde dehors. Le petit monde gérable du fort, où tout est ramené vers l’intérieur, est calme et rassurant. Il agit comme

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une barrière protectrice où les pouvoirs personnels peuvent être rassemblés afin de pouvoir faire face à l’assaut de l’altérité (onslaught of otherness). (Sobel, 1993, p. 74, trad. lib.) Rappelons encore que dans ces lieux et dans ces occasions, « les enfants font l’expérience d’être simultanément immergés dans et séparés de l’environnement » (Sobel, 1993, p. 84, trad. lib.). Il s’agit en fait d’apprendre à ressentir du bien-être et à avoir confiance en sa capacité d’être là-dehors dans le monde. Les recherches faites à partir de récits de vie révèlent à Sobel que pour les adultes, ces endroits de la mémoire « deviennent des lieux de repos et d’assurance où retourner » (p. 86, trad. lib.).

Sobel identifie des « composantes spécifiques à cette expérience des lieux ». Ils sont « trouvés ou construits par les enfants, par eux-mêmes ». Ils sont « secrets ». Ils « sont la “propriété” de leur créateur. Ils « sont sûrs ». On s’y sent « calme et reposé » et on y trouve une ambiance propre à la « réflexion » et à la « méditation » où l’on « entre en soi ». Enfin, ces lieux « sont organisés » (Sobel, 1993, p. 95-96, trad. lib.).

Dans les relations avec la nature et l’environnement, Sobel envisage celles-ci avec trois mots clefs qui résument ces relations : empathie, exploration et action sociale.

Pour les 3-7 ans, l’empathie signifie pour Sobel de développer l’empathie avec les animaux et les autres créatures via les histoires, les contes et les mimes. Sobel reconnaît que les enfants sont attirés par les bébés animaux. Il vise à favoriser la connexion émotive entre l’enfant et les animaux. Cette connexion ouvre aussi sur la question des connexions en écologie. Sobel donne l’exemple des oiseaux où pour lui, les enfants aimeront beaucoup plus se faire des ailes et s’imaginer voler plutôt que de voir des oiseaux dans des livres (Sobel, 1995, p. 15). Pour les 7-11 ans, l’exploration signifie pour Sobel l’immersion dans la « physicalité » organique et non organique du monde :

construction de forts, création de petits mondes imaginaires, chasser et cueillir, chercher des trésors, suivre des ruisseaux, des sentiers et des pistes, faire des cartes, prendre soin d’animaux, jardiner et modeler la terre. (Sobel, 1995, p. 16, trad. lib.)

Pour les 11-15 ans et au-delà, l’action sociale signifie pour Sobel de commencer les activités centrées sur les problèmes environnementaux et les solutions : recyclage et ainsi de suite. Sobel invite à le faire dans une perspective plus locale. De plus, il envisage aussi la question des rites de passage pour marquer un accueil dans la vie adulte (1995, p. 16).

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Le travail de cartographie proposé par Sobel est aussi une manière de s’approprier son monde et de s’y sentir à l’aise. Ce travail de cartographie, comprenant la réalisation de cartes mais aussi la construction de maquettes et la réalisation de croquis se fait parfois à l’extérieur et les enfants y sont activement impliqués, parfois avec des matériaux modelables. Ces activités stimulent l’acquisition de connaissances et d’habiletés et elles sont plus proches de celles habituellement retrouvées dans un curriculum. Le livre de Sobel (1998), un manuel de cartographie, propose une foule d’activités selon les âges et il n’est pas possible ici de les énumérer toutes, d’autant que ce n’est pas l’objet de ce projet de recherche. L’intérêt réside davantage dans le modèle à deux axes qu’il propose avec des âges associés : aller de l’intérieur vers l’extérieur ou du proximal au distal : maison, école, voisinage, quartier, région, et ainsi de suite et aller du concret à l’abstrait : de la maquette à la photo aérienne.

7.5 L’agent : avant tout enseignants et parents puis les autres membres de la

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