• Aucun résultat trouvé

L’ouverture à l’altérité pour tendre collectivement vers la coconstruction

Partie II : Analyse des résultats

1- Un espace collectif de valeurs vécues et en lien avec la communauté

1.3 Décentraliser les ressources et potentialiser l’action sur les territoires

1.3.4 L’ouverture à l’altérité pour tendre collectivement vers la coconstruction

Par sa participation à différentes tables de concertation et de regroupements ainsi qu’à d’autres activités et événements, Le Rivage entre en contact avec une hétérogénéité d’acteurs. Ces rencontres permettent au Rivage de mieux se faire connaître, tant dans ses pratiques que dans ses approches globales, et de contaminer ses interlocuteurs. En quelque sorte, c’est une stratégie de diffusion et de partage de leur vision et de leur philosophie de l’intervention qui se fait progressivement.

Les participations du Rivage avec ces groupes d’acteurs permettent non seulement de mieux faire comprendre les pratiques du Rivage, mais aussi d’ouvrir sur un dialogue pouvant faire évoluer les visions de la santé mentale. Deux permanentes, E4 et E5, en témoignent :

Moi, la façon que je vois que l’on peut faire ça, c’est beaucoup par

contamination. Essayer d’aller dans les tables de concertation, d’aller dans les endroits de la communauté pour parler de ce que nous on fait, de notre vision et d’essayer de transmettre, de propager la bonne nouvelle, si on veut ! […] Prochainement, on va faire une rencontre avec une équipe [un autre organisme communautaire] et notre équipe pis on va échanger. Donc, ça, c’est vraiment intéressant parce qu’on va pouvoir élargir une vision. On va pouvoir contaminer un peu. (E5)

Ce premier extrait fait foi de la proactivité du Rivage pour aller vers de futurs collaborateurs et de contribuer à une meilleure compréhension de leurs pratiques. Selon ce que cet extrait laisse sous-entendre, certains a priori sont souvent présents lorsqu’il est question de santé mentale. La rencontre avec ces groupes et regroupements d’acteurs contribue alors à corriger les fausses idées. Par cette façon de procéder, Le Rivage travaille en amont des problèmes de santé mentale en éclairant sur la dimension sociale de ceux-ci et en amenant l’idée de la possibilité de solutionner ces problèmes par une approche collective engageant les acteurs présents dans les communautés, incluant alors le groupe qu’il rencontre à ce moment précis.

Le deuxième extrait, cette fois-ci de E4, intervenante au Rivage, amène l’idée de persévérance dans les efforts engagés pour réitérer la légitimité des pratiques alternatives du Rivage.

Ça m’arrive souvent au niveau du CLSC de devoir réexpliquer certains choix qui ne font pas toujours de sens avec le contexte du CLSC. Mais à chaque fois, bien, j’ai l’impression que l’on promeut un petit peu nos

façons de faire. […] Puis de le faire aussi avec des partenaires qui

habituellement, n’ont pas la même vision. Je trouvais que c’était d’autant plus le fun. (E4)

Par la réflexion et le dialogue, Le Rivage se fait connaître en tant que ressource alternative en santé mentale et transmet aussi sa vision et ses pratiques d’intervention qui lui sont propres. Par ailleurs, aller vers des partenaires qui « n’ont pas la même vision » permet de s’ancrer davantage dans ses valeurs, d’affirmer son identité et de se positionner comme acteur légitime dans une visée de soutien à l’intégration des personnes avec une problématique de santé mentale dans la communauté.

Une intervenante externe, E3 souligne également que la contribution du Rivage dans les concertations permet d’atteindre la cible que le groupe s’est initialement donnée.

C’est une belle richesse d’avoir ces gens-là qui réfléchissent de cette façon-

là autour de la table. Je pense que ça fait même […] de bons gardiens de cette orientation-là […] du sens et de ce que ça comporte et de ce que ça implique de travailler dans cette perspective-là [de mobilisation citoyenne]. Et de garder ce focus-là dans des endroits, dans des

concertations où justement, il y a des gens d’un peu partout, pleins de bonne

volonté, qui se retrouvent, mais qui n’ont pas nécessairement autant développé une expertise dans ces pratiques-là. […] Parce que ce ne sont pas toujours des projets alternatifs en santé mentale dans lesquels ils sont impliqués. À ce moment-là, ils vont peut-être, des fois, avoir une opinion

critique ou une opinion différente sur certaines choses. Mais ils ne vont pas nécessairement faire obstacle, se retirer, ou mettre des bâtons dans les roues parce que ça ne reflète pas exactement leurs valeurs, leurs façons de voir, à la lettre et tout ça. C’est pour ça que je dis que ce sont des bons joueurs. (E3)

Ce qu’il ressort de cet extrait de E3, c’est que la réflexion et le dialogue avec les partenaires en concertation permet non seulement de garder l’orientation initiale du projet, mais qu’en plus, la différence dans les modalités d’actions et la divergence d’opinions sont une source d’enrichissement pour la réflexion qui est engagée avec des

acteurs soucieux, eux aussi, d’apporter le changement. Le Rivage sait apporter son point critique, mais en même temps le fait avec souplesse et ajoute aux démarches proposées plutôt que de leur faire obstacle. Il affirme ainsi sa particularité, mais dans une optique collaborative.

Dès lors, une manière de coconstruire ces collaborations est d’ouvrir la perspective à une vision plus globale comme E4 le fait valoir :

Je pense que c’est un des objectifs de ne pas se présenter dans ces rencontres- là pour nos intérêts personnels d’organisation. Mais vraiment d’avoir des

préoccupations plus larges. Et nous, quand on participe, ou moi quand je

participe au comité « sociopro », je ne pense pas juste à notre entente de service […]. On essaie d’avoir une vision plus globale de l’intégration socioprofessionnelle puis de la santé mentale globale. (E4)

Ainsi, E4 nous révèle que Le Rivage utilise des pratiques d’ouverture, d’écoute et exerce une vision englobante et large afin de mieux comprendre les besoins et enjeux des partenaires. Bref, pour arriver à contaminer l’autre, il faut d’abord ouvrir sa propre vision et comprendre l’autre. Le Rivage tente d’élargir les visions, mais il ouvre également la sienne pour arriver à coconstruire avec ses partenaires et comprendre leurs réalités particulières.

Bref, ce qu’il faut retenir, c’est que la ressource du Rivage, en accord avec ses valeurs d’accueil et de respect, s’ouvre à l’autre et à ses réalités pour établir un dialogue et arriver à partager sa philosophie, ses approches et ses pratiques. Il agit comme accompagnateur des groupes pour leur permettre de garder le sens premier de leur projet. Ce faisant, Le Rivage tente également de transmettre sa vision large et globale de la santé mentale à ses partenaires.

Synthèse : agir sur l’environnement social par le collectif, les valeurs et la communauté

Ce premier chapitre de notre analyse nous a permis de comprendre le modèle de pratiques du Rivage où l’utilisation de la transformation des espaces sociaux s’emploie comme outils d’action d’inclusion, de reconnaissance et de construction identitaire positive des personnes rencontrant des problèmes de marginalisation et de stigmatisation sociales dues à des problèmes de santé mentale. Ce travail d’action sur l’espace sociale s’accomplit

certes à l’intérieur de l’organisme, mais également à l’extérieur dans les communautés et dans la poursuite de liens collaboratifs avec les divers acteurs intervenant dans ces communautés. En somme, les pratiques du Rivage agissent sur l’environnement social des personnes et contribuent à la création d’espaces habilitants et non stigmatisants. En ajout et en consolidation de cette modélisation des pratiques du Rivage en tant que construction d’espaces sociaux habilitants et capacitants, ajoutons maintenant le thème de la mise en réflexivité des acteurs comme principe d’un agir communicationnel.

2- La réflexion pour préparer l’espace à l’échange communicationnel

Outline

Documents relatifs