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L ’incrimination de l’ossature du terrorisme

Dans le document Crime contre l'humanité et terrorisme (Page 187-189)

Conclusion de la section

L ES ACTES DE PARTICIPATION

B. L ’incrimination de l’ossature du terrorisme

295. Au niveau international — Les rédacteurs de la Convention de 1937 pour la

prévention et la répression du terrorisme avaient déjà prévu une disposition qui demandait à chacune des Parties contractantes de prévoir dans sa législation pénale, non seulement, l’association ou l’entente en vue de l’accomplissement des actes, mais aussi la participation intentionnelle 713. La Convention, élaborée en réaction à l’attentat contre le

roi Alexandre de Yougoslavie et de Louis Barthou, prit en compte les conditions de préparation et de réalisation dudit attentat. Cet attentat, commis par un membre d’une organisation terroriste internationale et structurée 714, amena le droit international à

prévoir une répression au-delà des actes de complicité punissable.

296. Une conception moderne de la Convention de 1937 — La Convention de 1937

avait développé une conception moderne du terrorisme. En considérant le terrorisme comme une criminalité globale, une unité regroupant les actions et leur préparation, elle posait implicitement la question des liens entre le terrorisme et la criminalité organisée. Si les conventions internationales ont considéré pendant longtemps que la lutte contre les deux criminalités devait être distincte, récemment, les liens entre celles-ci ont été affirmés 715. Pendant longtemps, les conventions internationales postérieures à 1937 se

sont contentées d’exiger la répression de la complicité des actes qu’elles réprimaient 716.

En tant que structure du terrorisme, seules les conventions les plus récentes octroient une place spécifique à la répression de la participation. Certaines exigent, pour leur transposition, que soient incriminés dans les droits internes des États parties, outre la

712 Entscheidungen des Obersten Geritshofes Für die Britische Zone in Strafsachen (décisions de la

Cour suprême de la zone britannique), Berlin, 1949. T. I, p. 22. Cité dans JUROVICS Yann. Réflexions

sur la spécificité du crime contre l’humanité, op. cit., p. 393.

713 Article 3 de la Convention.

714 Pour les détails sur ladite organisation, lire CHALIAND Gérard et BLIN Arnaud. Histoire du terrorisme

de l’Antiquité à Al Qaida, op. cit., p. 221-229.

715 La première affirmation de ce lien existe dans le préambule de la Convention des Nations unies

contre la criminalité transnationale organisée par laquelle l’Assemblée générale des Nations unies notait « avec une profonde préoccupation les liens croissants entre la criminalité transnationale organisée et les crimes terroristes ». Une telle préoccupation fut réitérée dans la Résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité des Nations unies.

716 Convention internationale de 1970 (article 1b) ; Convention internationale de 1971 (article 2b) ;

Convention internationale de 1973 (article 2-1e) ; Convention internationale de 1979 (article 2b) ; Convention internationale de 1988 (article 3-2b) ; Protocole de 1988 à la Convention de 1988 (article 2-2b). La Convention internationale de 1980, quant à elle, impose la répression de la

complicité, la contribution à la commission de l’infraction dans le cadre d’un groupe de personnes agissant de concert 717.

297. Le recel de malfaiteurs — Plus récemment, le Protocole de 1988 à la Convention

internationale de 1988 718 a prévu l’obligation de punir celui qui transporte à bord d’un

navire une personne dont il sait qu’elle a commis une infraction à la Convention ou à l’une des conventions internationales de lutte contre le terrorisme 719. Une telle

obligation est innovante en ce sens qu’elle porte sur l’incrimination d’une forme de recel de malfaiteurs, jusque-là ignorée du droit international, déjà connu du droit français 720

et toujours ignorée des droits régionaux, notamment européen.

298. Au niveau de l’Union européenne — La criminalité organisée et la criminalité

terroriste, de façon indépendante et complémentaire, ont joué un rôle moteur dans la naissance d’un droit pénal de l’Union européenne. La Décision-cadre de l’Union européenne relative à la lutte contre le terrorisme 721 met à la charge des États

l’obligation de prendre des « mesures nécessaires pour rendre punissables […] la participation aux activités d’un groupe terroriste » 722.

299. Hormis le soutien humain, la criminalité terroriste et celle liée au crime contre

l’humanité puisent leur dangerosité dans le soutien matériel dont bénéficient les criminels. L’on ne saurait donc lutter contre ces deux criminalités sans s’attaquer à leurs racines. Telle est la logique qui anime le législateur interne et international actuellement et qui justifie l’appréhension, par le droit pénal, des manifestations du soutien matériel dans les deux criminalités.

§ 2. L

E SOUTIEN MATÉRIEL

300. Les exécutants dans la criminalité terroriste et dans celle se rapportant au crime

contre l’humanité ne sauraient perpétrer des actes criminels sans les nombreux moyens

717 Voir la Convention internationale de 1997 (article 2-3) ; la Convention internationale de 1999

(article 2-5) ; la Convention internationale de 2005 (article 2-4).

718 Le protocole qui n’est pas entré en vigueur a été adopté le 14 octobre 2005.

719 Hormis les infractions à la Convention internationale pour la répression des actes de terrorisme

nucléaire qui n’est pas visée en annexe.

720 Par le biais de la loi du 22 juillet 1996 (loi n° 96-647 du 22 juillet 1996 tendant à renforcer la

répression du terrorisme et des atteintes aux personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public et comportant des dispositions relatives à la police judiciaire, JORF n° 170 du 23 juillet 1996, p. 11104), le champ de l’incrimination terroriste a été enrichi du recel de malfaiteurs en droit français. En effet, l’article 434-6 CP auquel renvoie l’article 421-1, 3° CP incrimine « le fait de fournir à la personne auteur ou complice […] d’un acte de terrorisme […] un logement, un lieu de retraite, des subsides, des moyens d’existence ou tout autre moyen de la soustraire aux recherches ou à l’arrestation ».

721 Décision-cadre du Conseil 2002/475/JAI du 13 juin 2002. 722 Article 2 de la Décision-cadre supra.

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matériels mis à leur disposition par les autres participants au crime. Le soutien matériel occupe ainsi une place significative dans les deux criminalités. Cependant, si l’importance de cette forme de soutien s’est amoindrie dans la pratique jurisprudentielle pour ce qui est du crime contre l’humanité (A), elle tend plutôt à s’accroître dans l’incrimination terroriste (B).

A. Une forme de participation devenue marginale dans le crime

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