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L’aménagement du territoire urbain comme outil d’intervention sociale

DEVELOPPEMENT DURABLE EN MILIEU URBAIN

3. L’aménagement du territoire urbain comme outil d’intervention sociale

Au début du XXIe siècle, alors que les règles de l’individualisme et du profit économique pur montrent leurs limites, il serait plus que jamais erroné de passer outre le fait que la durabilité des villes et des agglomérations dépend très fortement du climat social que l’on y rencontre.

“La faillite du sens ronge les parois de la ville plus encore que l’urbanisme bâclé ou les façades délabrées des quartiers déshérités” (Pierre Bourdieu, cité par Antonio Da Cunha

in La Revue Durable, mai-juin 2003, p.29).

On a mentionné plus haut le phénomène de ségrégation sociale, ou différenciation sociale, propre aux agglomérations. En effet les villes, en apparence toujours plus riches et mieux équipées, sont en même temps le lieu de la plus grande solitude et pauvreté sociale.

L’Office du développement territorial ne s’y trompe pas, qui remarque que c’est dans les villes-centres, communes qui offrent la plus grande diversité de prestations sociales, que se concentrent les populations plus faibles socialement: personnes à bas revenu, personnes âgées, étrangers, jeunes en formation. “Les villes-centres des agglomérations deviennent ainsi le lieu de cristallisation de problèmes sociaux: pauvreté, drogue, intégration des étrangers50” (ARE, 4 novembre 2003).

Dans les dernières décennies, les mutations économiques, la modification des structures sociales et familiales et la crise du système de l’Etat-providence sont autant de facteurs qui ont aggravé la précarité des conditions de vie des classes de population citées ci- dessus.

Dès lors, il est urgent de prendre le contre-pied de cette tendance en développant des politiques et des instruments d’inclusion sociale, par exemple en favorisant la mixité sociale en zone urbaine, de façon à créer un cadre apte à prévenir et à limiter les conflits sociaux entre les différentes catégories de la population et le climat de tension permanente qui en résulte. La relégation des habitants plus pauvres dans des quartiers de type “cités” ne fait qu’entretenir un sentiment de disqualification, de société à deux vitesses.

Les politiques de la ville qui existent dans certains pays européens “partent de l’idée que la prévention de la précarité passe par une action globale (transversale) liant plus intimement des interventions jusqu’alors trop cloisonnées au niveau de la création d’emplois, de l’éducation et de la formation, de l’accès aux soins, de l’aide sociale, du logement, de l’urbanisme, des transports” (La Revue Durable, mai-juin 2003, p.30).

Outre les politiques classiques de création d’emploi et d’aide sociale, il existe en effet une multitude de moyens complémentaires pour rendre la ville plus “humaine” et plus agréable à vivre. On peut par exemple penser à:

- prendre garde que l’aménagement du territoire tienne suffisamment compte des besoins des enfants, des jeunes, et donc des familles;

- développer ou protéger la nature et les espaces verts de promenade, de loisirs, ne serait-ce que des petites plantations ciblées, d’agrément, soit mettre un peu d’environnement dans la ville: l’espace devient plus accueillant, et la diversité biologique urbaine s’en trouve améliorée;

- développer les transports publics de manière à les rendre suffisamment attractifs pour réduire nettement le besoin (ou le réflexe) d’utiliser les véhicules individuels;

- soutenir et encourager la vie sociale, au travers de la création ou de la redynamisation, dans le bâti déjà existant, d’espace de rencontres, ou d’associations de quartier permettant de recréer des liens personnels entre habitants.

50 On notera au passage, anecdotiquement, qu’il eût été plus heureux de mentionner comme problème la mauvaise intégration des étrangers!

L’expression peut sembler utopique, encore une fois, mais il est nécessaire pour le long terme de “donner du beau” aux habitants des villes si l’on veut que celles-ci prospèrent. “Seules les personnes liées à leur environnement peuvent s’engager pour améliorer la qualité de ce dernier. L’esthétique des zones à forte concentration urbaine est plus que jamais au centre des préoccupations. La population a besoin d’être proche de la nature, de beaux paysages, d’un environnement donnant une identité aux habitations” (Willy Geiger, vice-directeur OFEFP, lors des Journées nationales du développement durable, Berne, 13 novembre 2003). L’environnement naturel et construit est ici étroitement associé au développement social.

Il existe un choix à faire dans les quartiers dits “défavorisés”, ou “déshérités”, ou encore “sensibles”. Soit refuser que la qualité de vie perçue dans l’aménagement de l’espace soit aussi basse que le niveau des revenus, et décider pour y remédier de consentir à des investissements économiquement non rentables (en termes monétaires), soit laisser la situation évoluer dans le sens d’un mécontentement croissant portant son lot d’incivilités, de dépradations et d’autres formes de violence plus ou moins ouverte.

Dans les pays pauvres, on aborde le développement durable comme une possibilité donnée à chaque individu de développer son potentiel, de saisir sa chance de manière à pouvoir s’épanouir grâce aux opportunités de vie à sa portée. Nos villes riches, saisies de malaises en ces années de vaches maigres, doivent redécouvrir cette possibilité et s’organiser de manière à être à même de l’offrir à tous leurs habitants.

§II Problèmes et exemples de solutions pour la mobilité en milieu urbain

L’objectif de durabilité de la mobilité doit prendre en compte des facteurs qui sont d’une multiplicité déconcertante, comme l’illustre la figure ci-après.

Qu’il suffise de simplifier le problème et de chercher, sans nuire à l’économie de coordonner une réduction du trafic motorisé individuel et une réduction du déficit des transports publics, allant de pair avec une amélioration de l’environnement. Lorsqu’on se propose de modifier les habitudes modales, c’est-à-dire la propension des individus à utiliser plus volontiers la voiture ou les transports publics51, il est difficile de savoir par quel côté commencer: est-ce l’amélioration de l’offre de transports publics qui va inciter à limiter l’usage de la voiture, ou faut-il se montrer plus sévère avec les automobilistes de manière à les contraindre à recourir davantage aux moyens de transports publics? L’une des stratégies et en quelque sorte une invitation, l’autre relève davantage de la coercition.

51

Les trajets effectués en vélo ou à pied ne sont pas négligeables, mais ne représentent qu’un aspect marginal.

Figure n°10: Comment évaluer la durabilité en matière de transports?

Source: PNR 41, www.nfp41.ch

Quelle que soit l’approche choisie, il est clair qu’il y a nécessité d’imaginer des mesures efficaces de gestion de la circulation et du stationnement en ville.

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