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Les instances normatives relatives à la principauté de Liège

Dans le document Charles de Méan, le Papinien liégeois (Page 35-49)

Cinq instances normatives méritent d’être brièvement mentionnées ici, à sa­ voir, en ce qui concerne les instances normatives internes à la principauté, les trois Etats, le prince­évêque et le Conseil privé du prince et, quant aux instances de l'empire, la diète d'Empire et le Cercle de Westphalie.

Sous-section 1 : Les trois Etats

Cette sous­section contiendra quatre paragraphes : dans le premier, il sera à nouveau142 question du fonctionnement des trois Etats ; les trois autres nous permet­

tront d’aborder plus en détail chacun d’eux et de les mettre en relation avec les trois ordres ; après avoir parlé de l’Etat primaire, nous aborderons l’Etat noble pour finir avec l’Etat tiers.

§ 1er : Le fonctionnement des trois Etats

41. L’origine des Etats du pays de Liège et comté de Looz, comme on les ap­ pelle, se situe dans le " synode mixte ", qui est le " conseil de l’évêque composé dès le XIe siècle du Chapitre de Saint­Lambert, des principaux abbés du diocèse, des nobles et des vassaux qui doivent conseil au prince143".

42. Comme nous l’avons vu précédemment144, les Etats ont effectué une de

leurs premières apparitions dans la Paix de Fexhe du 18 juin 1316 qui est " la pre­

141 De manière générale sur ces questions, voy. G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judi­

ciaires de la Principauté de Liège aux temps modernes, Bruxelles, Crédit communal de Bel­

gique, 1987 ; S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions

publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume,

2012 et Ch. BEHRENDT et S. VANDENBOSCH, "Le droit constitutionnel de la Principauté de Liège

au 18e siècle", in Revue belge de droit constitutionnel, 2015, pp. 265­287.

142 Pour rappel, il a été question du Sens du pays et donc des Etats supra n° 28 et 30­32.

143 E. TOUSSAINT, " Etats ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les

institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du

Royaume, 2012, p. 239. Pour plus de détails sur le synode épiscopal et le synode mixte, voy. J. AVRIL (éd.), Les statuts synodaux de Jean de Flandre, évêque de Liège (1288), Bulletin de

la Société d'art et d'histoire du diocèse de Liège, t. 61, 1996, pp. 30­34 et J. MAQUET, " Faire

justice " dans le diocèse de Liège au Moyen âge (VIIIe­XIIe siècles), Liège, Bibliothèque de la

mière charte constitutionnelle ratifiée par les trois ordres145". Cette charte édicte no­

tamment le principe suivant lequel le Sens du pays est le gardien, l’interprète, le cor­ recteur de la loi ; ainsi, les pouvoirs souverains du prince et les lois et coutumes ne peuvent être modifiées qu’avec le consentement des trois Etats146147.

43. Concernant la composition, trois ordres constituent les Etats : l’Etat pri­ maire ou le clergé, l’Etat secondaire ou l’Etat noble et le Tiers Etat, qui réunit les re­ présentants des bonnes villes148.

44. Comme l’écrit Emilie Toussaint, les trois Etats se réunissaient en général au palais des princes­évêques149. Ils étaient convoqués par le prince­évêque150.

Quant aux compétences et activités de ceux­ci, nous les avons déjà abordées151. Il

nous suffira donc de rappeler que le Sens du pays était compétent notamment pour lever les impôts, pour modifier et interpréter les paix ainsi que pour signer des traités, conclure des alliances et déclarer la guerre.

§ 2 : L’Etat primaire152

45. A partir du 14e siècle, le Chapitre cathédral de Saint­Lambert voudra être

considéré comme constituant seul l’Etat primaire153. Ainsi, seuls les chanoines du

144 Voy. supra n° 28.

145 E. TOUSSAINT, " Etats ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les

institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du

Royaume, 2012, p. 240.

146 Ibidem.

147 Notons que, à suivre J. Gilissen, cette situation est exceptionnelle pour nos régions (J.

GILISSEN, "Loi et coutume. Esquisse de l'évolution des sources du droit en Belgique du XIIe au XXe siècle", in Revue de droit international et de droit comparé, 39, 1962, p. 22 et J. GILISSEN, "Les états généraux des pays de par deçà (1464­1632), in X., Assemblées d'états,

Paris, Béatrice­Nauwelarts, 1965, p. 309).

148 E. TOUSSAINT, " Etats ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les

institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du

Royaume, 2012, p. 240.

149 Ibidem. 150 Ibidem, p. 242. 151 Voy. supra n° 30­32.

152 Pour plus d’informations sur le Chapitre cathédral de Saint­Lambert, voy. A. WILKIN, " Chapitre cathédral " in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions

publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume,

2012, pp. 184­221. Sur le Chapitre cathédral au 17e siècle, voy. A. DUBOIS, Le Chapitre cathé­

dral de Saint­Lambert à Liège au XVIIe siècle, Liège, Université de Liège, Faculté de Philoso­

phie et Lettres, 1949.

153 A. WILKIN, " Etat primaire ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de),

Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives géné­

Chapitre de Saint­Lambert sont habilités à représenter l’ensemble des clercs lié­ geois154. Cette composition particulière a pour conséquence que les réunions de

l’Etat primaire se tiennent dans la salle capitulaire de la cathédrale155.

46. Le chapitre de la cathédrale est formé de maximum soixante clercs156.

Ceux­ci, pour être nommés membres du Chapitre cathédral, doivent être nobles ou gradués, soit diplômés d'une université157.

47. A côté de ses fonctions au sein des trois Etats, le chapitre de la cathédrale tenait un rôle politique particulier. Tout d’abord, c’est lui qui élit le prince­évêque158.

En outre, en tout cas à partir du 17e siècle, " lorsque le siège épiscopal est vacant –

on parle alors de sede vacante –, c’est­à­dire entre la mort d’un évêque et l’inaugura­ tion de son successeur, [le Chapitre cathédral] exerce les droits souverains habituel­ lement dévolus au prince159". Enfin, selon les termes de Georges Hansotte, les cha­

noines du Chapitre cathédral " entendent, avec des fortunes diverses, imposer au prince régnant leur participation à l’exercice de son pouvoir160". Notons également

que, au fil du temps, le pouvoir du Chapitre cathédral a crû161.

154 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 113.

155 A. WILKIN, " Etat primaire ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de),

Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives géné­

rales du Royaume, 2012, p. 255.

156 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 113 et L. BERKVENS, " Staatkun­ dige en institutionele geschiedenis van de Limburgse territoria, 1548­1795 " in P. TIMMERS et

alii, Limburg. Een geschiedenis 1500­1800, Maastricht, LGOG, 2015, p. 48.

157 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 113.

158 Voy. notamment G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de

Liège aux temps modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 53 ; P.

BRUYÈRE, " Aux sources du droit public liégeois (XIIe – XVIIIe siècles) ", in S. DUBOIS, B.

DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté

de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, p. 57 et L. BERKVENS,

" Staatkundige en institutionele geschiedenis van de Limburgse territoria, 1548­1795 " in P. TIMMERS et alii, Limburg. Een geschiedenis 1500­1800, Maastricht, LGOG, 2015, p. 47. Pour

un article concernant la situation aux 13e et 15e siècle, voy. A. MARCHANDISSE, "La vacance

du siège épiscopal et la mambournie sede vacante à Liège aux XIIIe­XVe siècles", in Cahiers

du CRHDI, Bruxelles, FUSL, 2001, pp. 65­92.

159 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 115. Pour plus de détails en ce

qui concerne le 17e siècle, voy. A. DUBOIS, Le Chapitre cathédral de Saint­Lambert à Liège au

XVIIe siècle, Liège, Université de Liège, Faculté de Philosophie et Lettres, 1949.

160 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 115.

161 M.L. POLAIN (éd.), Recueil des ordonnances de la principauté de Liège, 3e série 1684­1794, 2e

volume, 1ère partie contenant les ordonnances du 10 mars 1744 au 4 mai 1765, Bruxelles,

Emm. Devroye, 1860, pp. II­IV et A. WILKIN, " Etat primaire ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­

L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­

§ 3 : L’Etat secondaire ou l’Etat noble162

48. Au début de la principauté de Liège, il suffisait de posséder un fief pour avoir le pouvoir de siéger à l’Etat noble163. Toutefois, à la longue, les conditions

d’admission ont été de plus en plus sévères, de sorte que l’ordre a présenté un ca­ ractère oligarchique croissant164. Ainsi, par exemple, en 1765, l’on exigeait la preuve

de seize quartiers de noblesse pour être noble165. Dès lors, en 1789, seules dix­sept

personnes appartenaient à l’Etat secondaire ; celles­ci étaient, en outre, presque toutes apparentées et d’origine étrangère166.

§ 4 : L’Etat tiers167

49. Ce sont des délégués des bonnes villes qui ont le pouvoir de participer aux Journées d’Etat en tant que représentant de l’Etat tiers168. Ainsi, les bonnes villes

162 Pour plus d’informations sur le sujet, voy. G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judi­

ciaires de la Principauté de Liège aux temps modernes, Bruxelles, Crédit communal de Bel­

gique, 1987, pp. 120­124 et, surtout, F. JEURIS et E. TOUSSAINT, " Etat noble ", in S. DUBOIS, B.

DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté

de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, pp. 258­273.

163 F. JEURIS et E. TOUSSAINT, " Etat noble ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la

direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Ar­ chives générales du Royaume, 2012, p. 258.

164 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 120 et F. JEURIS et E.

TOUSSAINT, " Etat noble ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de),

Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives géné­

rales du Royaume, 2012, p. 258.

165 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 122 et F. JEURIS et E.

TOUSSAINT, " Etat noble ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de),

Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives géné­

rales du Royaume, 2012, p. 262.

166 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 122 et F. JEURIS et E.

TOUSSAINT, " Etat noble ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de),

Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives géné­

rales du Royaume, 2012, p. 263.

167 Pour plus d’informations sur le sujet, voy. G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judi­

ciaires de la Principauté de Liège aux temps modernes, Bruxelles, Crédit communal de Bel­

gique, 1987, pp. 125­126 et, surtout; F. JEURIS et E. TOUSSAINT, " Etat tiers ", in S. DUBOIS, B.

DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté

de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, pp. 274­280.

168 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 125 et F. JEURIS et E.

TOUSSAINT, " Etat tiers ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les

institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du

sont les villes qui "ont le privilège d'être représentées aux assemblées d'Etats169 170".

Elles présentent par ailleurs une autre caractéristique: elles sont toutes entourées d'une enceinte ou d'une muraille fortifiée171. Contrairement aux bonnes villes, " les

autres villes et les campagnes ne sont (…) pas représentées et ne sont pas asso­ ciées aux travaux des Etats172". Concernant le fonctionnement de cet Etat lors des

Journées d’Etats, il a la particularité d’ajourner ses débats pour que les délégués puissent en référer aux autorités dont ils dépendent et prendre instruction sur le vote à accomplir173. En effet, leur mandat est impératif174.

Sous-section 2 : Le prince-évêque175

Il y aurait beaucoup de choses à dire sur le rôle du prince­évêque au sein de la principauté de Liège. Toutefois, nous nous contenterons d’indiquer les éléments les plus importants – dont certains ont déjà été esquissés – et encore en ce qui concerne uniquement les temps modernes, soit l’époque au cours de laquelle Charles de Méan a vécu.

50. Le prince­évêque est élu par les membres du Chapitre cathédral176. Son

pouvoir est limité, depuis la Paix de Fexhe, par les prérogatives du Sens du pays177.

169 E. TOUSSAINT, "Les bonnes villes de la principauté de Liège: introduction", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté

de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, p. 901.

170 Ces bonnes villes sont au nombre de 23 à la fin de l'Ancien Régime, à savoir Châtelet, Ciney,

Couvin, Dinant, Fosse, Huy, Liège, Thuin, Verviers, Visé, Waremme, Beringen, Bilzen, Bree, Hamont, Hasselt, Herck, Looz, Maaseik, Peer, Saint­Trond, Stokkem et Tongres.

171 Ibidem. Pour plus de détails, voy. E. TOUSSAINT, "Les bonnes villes de la principauté de Liège:

introduction", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions

publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume,

2012, pp. 901­903 et l'ensemble des présentations individuelles des bonnes villes qui se trouvent dans cet ouvrage.

172 F. JEURIS et E. TOUSSAINT, " Etat tiers ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la di­

rection de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Ar­ chives générales du Royaume, 2012, p. 276.

173 Ibidem, p. 278.

174 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 126.

175 Pour des compléments d’informations sur le sujet, voy. G. WILLIOT, " Origine du pouvoir prin­

cier dans la principauté de Liège ", in Bulletin de l’Institut archéologique liégeois, t. 65, 1945, pp. 95­111 ; J. BRASSINNE, " Le titre des souverains liégeois ", in Bulletin de la Société royale

Le Vieux­Liège, t. 3, 1940­1950, pp. 456­458 ; G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judi­

ciaires de la Principauté de Liège aux temps modernes, Bruxelles, Crédit communal de Bel­

gique, 1987, pp. 53­80 ; J.­L. KUPPER et P. CARRÉ, " Evêque et prince au Moyen âge ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la

principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, pp. 121­

141 et B. DEMOULIN, " Evêque et prince aux Temps modernes ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et

J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­

Il dispose cependant de plusieurs prérogatives, dont le pouvoir de police générale. Néanmoins, celui­ci s’exerçait via l’intervention de son Conseil privé178.

51. En outre, le prince est " la source et le chef de la juridiction179", pouvoir

issu de celui de l’Empereur180. Ainsi, c’est au prince­évêque que revient le pouvoir de

trancher les conflits d’attribution181. Néanmoins, " depuis la Paix de Fexhe, il ne peut

plus participer à l’instruction des procès et à l’élaboration des sentences182". Toute­

fois, il dispose encore de plusieurs attributions en matière de justice : il a en effet le droit d’arsin, qui lui permet de brûler la maison des coupables d’homicide ; il a le pri­ vilège de l’action publique ; il décide, avec son Conseil privé, d’accorder ou non le bénéfice de la révision ; il dispose, à certaines conditions, du pouvoir de gracier ou d’amnistier les condamnés ; il peut ouvrir des prisons et il nomme des officiers de justice183.

52. A côté de ses prérogatives en matière de justice, le prince dispose égale­ ment de pouvoirs en matière militaire et de politique étrangère184. Ainsi, il a notam­

ment le droit de construire des forteresses et des enceintes urbaines et de choisir les

176 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 53 et P. BRUYÈRE, " Aux sources

du droit public liégeois (XIIe – XVIIIe siècles) ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER

(sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, p. 57.

177 E. POULLET, Les constitutions nationales belges de l’Ancien Régime à l’époque de l’invasion

française de 1794, Bruxelles, F. Hayez, 1875, p. 81 ; P. BRUYÈRE, " Aux sources du droit pu­ blic liégeois (XIIe – XVIIIe siècles) ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direc­

tion de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, pp. 54­55 ; E. TOUSSAINT, " Etats ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN

et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège

(980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, p. 242 et B. DEMOULIN,

" Evêque et prince aux Temps modernes ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la

direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Ar­ chives générales du Royaume, 2012, p. 145.

178 P. BRUYÈRE, " Aux sources du droit public liégeois (XIIe – XVIIIe siècles) ", in S. DUBOIS, B.

DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté

de Liège (980­1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, p. 56 et B. DEMOULIN, " Evêque et prince aux Temps modernes ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la

direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Ar­ chives générales du Royaume, 2012, p. 151.

179 Cette expression est empruntée à Sohet et provient du titre XXXV du livre I de ses Instituts de

droit.

180 B. DEMOULIN, " Evêque et prince aux Temps modernes ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L.

KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­

1794), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, p. 151. Voy. également G.

HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps mo­

dernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 65.

181 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, p. 69.

182 B. DEMOULIN, " Evêque et prince aux Temps modernes ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L.

KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­

représentants diplomatiques ; en outre, il est le chef des forces armées. Toutefois, ses pouvoirs sont limités par les prérogatives des Etats tant en matière de fiscalité – en effet, il faut bien payer les représentants diplomatiques et construire et entretenir des forteresses est fort coûteux – qu’en matière de politique étrangère – puisque pour conclure tant des traités de commerce que des traités de paix, l’accord des Etats est requis185.

53. Enfin, le prince­évêque possède des attributions en matière de politique intérieure et d’administration générale186. Ainsi, " il exerce la tutelle sur les collectivi­

tés locales, règle l’activité économique par sa politique monétaire, le contrôle des poids et mesures, la protection et l’encouragement des entreprises, les flux commer­ ciaux (…), exerce la police rurale et forestière (…), de la voirie, du roulage, des cours d’eau, la police sanitaire, la surveillance de la moralité publique, de l’imprimerie, de la librairie et celle de l’enseignement187".

Après avoir esquissé les prérogatives du prince­évêque, nous allons nous pencher sur le principal organe de son administration, à savoir le Conseil privé.

183 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, pp. 65­70 et B. DEMOULIN,

" Evêque et prince aux Temps modernes ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la

direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Ar­ chives générales du Royaume, 2012, pp. 151­152.

184 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, pp. 71 et 76­78 et B. DEMOULIN,

" Evêque et prince aux Temps modernes ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Ar­ chives générales du Royaume, 2012, p. 152.

185 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, pp. 71 et 76­78 et B. DEMOULIN, " Evêque et prince aux Temps modernes ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la

direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Ar­ chives générales du Royaume, 2012, p. 152.

186 G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires de la Principauté de Liège aux temps

modernes, Bruxelles, Crédit communal de Belgique, 1987, pp. 71­76 et B. DEMOULIN,

" Evêque et prince aux Temps modernes ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L. KUPPER (sous la

direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­1794), Bruxelles, Ar­ chives générales du Royaume, 2012, p. 152.

187 B. DEMOULIN, " Evêque et prince aux Temps modernes ", in S. DUBOIS, B. DEMOULIN et J.­L.

KUPPER (sous la direction de), Les institutions publiques de la principauté de Liège (980­

Sous-section 3 : Le Conseil privé188

Après un bref historique, il sera question des compétences du Conseil privé avant d’en terminer avec la composition de celui­ci.

§ 1er : Historique

54. A l’origine, et ce jusqu’au 13e siècle, le prince­évêque prenait avis auprès

Dans le document Charles de Méan, le Papinien liégeois (Page 35-49)