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Première partie Migrations et mutations sociospatiales à Athènes : la question de l’insertion dans la ville et de

hapitre 1. Migrations et nouvelles territorialités : politiques et débats

1.2. Grands courants migratoires à Athènes

1.2.3. Entre 1990 et 2010 : migrations internationales

Au recensement de 2001, qui est le premier à posséder des renseignements détaillés sur le nombre et le statut des migrants, les étrangers installés en Grèce s’élevaient à 761 813 personnes, pour une population totale de moins de 10 964 000 habitants, soit 7 %. Cette catégorie englobe tous les « non nationaux », c’est-à-dire tous ceux qui ne possédaient pas, à ce jour, la nationalité grecque.

Selon l’étude analytique de Martin Baldwin-Edwards, effectuée en 2004, leur pourcentage est bien plus fort, il s’élève à 10 % de la population, soit 100 000

41 individus de plus. D’après l’auteur, la Grèce est parmi les pays d’Europe du sud qui ont le plus fort taux d’étrangers par rapport à leur population. Il souligne que les sources officielles ne doivent être considérés que comme indicatives, puisque le recueil des données auprès des différentes instances, comme le ministère de l’Intérieur ou le ministère de la Protection civile, présente de nombreuses lacunes (Baldwin-Edwards, 2004 ; Baldwin-Edwards, Apostolatou, 2009).

Dix ans plus tard, au recensement de 2011, le nombre d’étrangers s’élève à 911 929 sur une population totale de 10 815 197 habitants, soit 6,5 % (communiqué de presse, « EL.STAT. », 23/8/2013). Ce pourcentage est en progression par rapport à 2001, mais ne reflète pas, lui non plus, la situation réelle (Kozamanis, Dyken, 2012). Notons que cette forte présence prend toute son importance si on tient compte du fait que, pour la première fois depuis les années 1950, la population grecque dans son ensemble est en baisse, autrement dit, connaît un déclin démographique.

Voyons en détail, pour 2001, quelle est la répartition des migrants par pays d’origine, par sexe, par raisons d’émigration, ainsi que par lieu d’installation (Tableau 1) :

En grande majorité, ils sont originaires d’Albanie (57,5 %), de Bulgarie (4,6 %) et de Roumanie (2,9 %). Si nous y ajoutons les migrants de l’ex-Yougoslavie prise dans son ensemble, les deux tiers des migrants recensés en Grèce sont originaires des pays balkaniques : 498 966 personnes, soit 65,5 %.

La deuxième catégorie concerne ceux provenant des pays de l’ex-Union Soviétique : 82 571, soit 10,8 % ; les Géorgiens et les Russes étant majoritaires. Le reste vient d’Ukraine, de Pologne, d’Arménie et de Moldavie.

La troisième catégorie porte sur les migrants d’origine asiatique, qui s’élèvent à 38 550, soit 5,1 %. Ils viennent surtout du Pakistan, d’Inde, d’Irak, des Philippines et du Bangladesh. Les Chinois y sont très peu représentés : seulement 554 personnes de cette groupe migratoire ont été officiellement recensées en Grèce en 2001. Parmi eux, 29 étaient originaires de Taïwan.

La quatrième catégorie recense les migrants provenant du Proche-Orient, auxquels nous ajoutons ceux venus de Turquie. Si aux Syriens et aux Libanais, qui sont

42 majoritaires, nous ajoutons les Égyptiens, dont la présence en Grèce est active et de longue date puisqu’ils travaillent comme marins suite à des accords bilatéraux, ils s’élèvent à 14 710, soit 2 % environ.

En 2001, les hommes forment la majorité de la population migrante, soit 55 % du total et, les femmes, 45 %. Or, de fortes asymétries caractérisent certains groupes : la présence de femmes est minime chez les migrants originaires du Pakistan, du Bangladesh et d’Inde, tandis qu’elle est forte chez ceux venant de Bulgarie, de Géorgie, d’Ukraine, de Moldavie ou des Philippines. La répartition entre hommes et femmes dans la nombreuse population albanaise est, respectivement, de 60 % et de 40 %.

Les raisons d’installation évoquées sont principalement le travail (50 %), la réunification familiale (12 %), les études (2,6 %), et la demande d’asile et le statut de réfugié (1,6 %). Le reste des personnes n’a pas définit sa raison de mobilité.

Par regroupement des diverses sources de données, dont le travail de Martin Baldwin- Edrwards déjà cité, mais aussi les renseignements statistiques, nous pouvons décrire les principaux emplois occupés par les migrants.

Ils travaillent principalement dans l’agriculture comme ouvriers saisonniers, puis dans la construction. Ensuite, viennent les secteurs du travail domestique, les services et la construction. Le bâtiment occupe la grande majorité des migrants (hommes) venus d’Albanie et de Pologne. Le travail agricole, lui, occupe ceux venus de Bulgarie, d’Inde, du Pakistan ou du Bangladesh. Chez les femmes, ce sont les travaux domestiques qui les occupent principalement : l’aide aux personnes âgées ou la garde d’enfants en bas âge (Cavounidis, 2003, 2004; Baldwin-Edwards, 2004).

Leur principal lieu d’installation est la région d’Attique : 369 973 migrants y ont été recensés, soit presque la moitié (48,5 %). Dans les limites administratives de la préfecture d’Athènes, nous rencontrons 274 882 migrants, soit plus du tiers du total (36 %). Le reste se localise dans les Préfectures de l’Est et du Pirée, soit 82 885, et seulement 12 000 se trouvent dans la Préfecture de l’Ouest de l’Attique. Dans les deux grandes municipalités de la capitale, Athènes et le Pirée, se concentre la majorité des

43 migrants : 137 505 dans la première et 15 491 dans la seconde, pour un total de 152 996 personnes. Ils représentent 20 % du total des migrants recensés en Grèce, soit un sur cinq. Pays 2001 2011 Balkans Albanie 438 036 57,5 480 824 52,7 Bulgarie 35 104 4,6 75 915 8,3 Roumanie 21 994 2,9 46 523 5,2 Yougoslavie 3 832 0,5 — — Total 498 966 65,5 603 262 66,2 Ex-Union Soviétique Géorgie 22 875 3,0 27 400 3,0 Conf. Russe 17 535 2,3 13 807 1,5 Ukraine 13 616 1,8 17 006 1,9 Pologne 12 831 1,7 14 145 1,6 Arménie 7 742 1,0 8 113 0,8 Moldavie 5 716 0,7 10 391 1,1 Kazakhstan 2 256 0,3 1 289 0,1 Total 82 571 10,8 92 151 10,1 Pays asiatiques Pakistan 11 130 1,5 34 177 3,7 Inde 7 216 1,0 11 333 1,2 Irak 6 936 0,9 3 692 0,4 Philippines 6 478 0,9 9 804 1,1 Bangladesh 4 854 0,6 11 076 1,2 Iran 1 011 0,2 1 569 0,2 Chine 554 0,0 3 857 0,4 Afghanistan 371 0,0 6 911 0,8 Total 38 550 5,1 82 419 9,0 Proche- Orient et Turquie Turquie 7 881 1,0 5 157 0,6 Syrie 5 552 0,8 7 628 0,8 Liban 1 277 0,2 879 0,1

44 Total 14 710 2,0 13 664 1,5 Afrique Égypte 7 448 1,0 10 455 1,1 Niger 2 015 0,3 3 285 0,4 Éthiopie 1 163 0,1 1 606 0,2 Total 10 626 1,4 15 346 1,7 Divers pays, UE, USA, etc. Total 116 390 15,2 105 087 11,5 TOTAL 761 813 100 911 929 100

Tableau 1. Répartition de la population étrangère par pays d’origine en 2001 et 2011

Source : recensements 2001 et 2011, EL.STAT.

Dix ans plus tard, la situation est différente. Les migrations internationales gagnent du terrain et les facteurs de mobilité changent. La Grèce n’est plus seulement perçue que comme pays d’installation, mais aussi comme pays de transit.

Au recensement de 2011, nous rencontrons 911 929 étrangers, dont 708 003 proviennent de pays situés hors de l’Union européenne. Malheureusement, les données publiées jusqu’aujourd’hui ne nous permettent pas de faire une approche analytique aussi précise que celle de 2001. Pourtant, à l’aide des premières données rendues publiques (communiqué de presse, « EL.STAT. », 23/8/2013), une première analyse comparative, qui met en évidence les changements intervenus, peut être faite dès lors.

Première constatation, le poids des migrants provenant des pays balkaniques reste relativement stable dans son ensemble, quoique leur nombre augmente de presque 80 000 personnes. Cette augmentation provient peu de la présence albanaise, qui régresse. Elle est surtout due au doublement des migrants provenant de Bulgarie et de Roumanie. Ces deux pays appartiennent désormais à l’Union européenne, leur mobilité en sort ainsi renforcée.

Deuxième constatation, les pays de l’ex-Union Soviétique cessent d’être une source importante de départs, quoique avec des différenciations : de Géorgie et d’Ukraine, nous observons une augmentation restreinte, tandis que la Moldavie double le nombre de ses citoyens qui émigrent vers la Grèce. Ce sont les migrants d’origine asiatique qui

45 présentent la plus forte augmentation à cette date : les Pakistanais triplent leur nombre, passant ainsi à 34 200 individus, les Bangladeshis le double (11 100), les migrants provenant de l’Inde, eux, restent stables (11 300). Les Philippins, eux aussi, augmentent, mais ne présentent plus la dynamique qu’ils avaient précédemment.

Image 1. Principales origines de la population étrangère en Grèce en 2011

Source : communiqué de presse, « EL.STAT. », 23/8/2013

Troisième constatation, nous voyons l’arrivée en force de réfugiés d’Afrique du nord et d’Afrique subsaharienne, et en particulier du Nigeria. Les données que nous possédons ne permettent pas de présenter ce mouvement analytiquement. Seul constat : une augmentation des Égyptiens, qui s’élèvent à 10 500.

Quatrième constatation, qui est particulièrement importante dans notre car, les Chinois triplent, passant de 554 à 3 857. Ce nombre reste loin des estimations puisque une étude effectuée en 2006 estimait leur nombre à 20 000 personnes, tandis que les associations (entretien I. 5, 7, 28) et des représentants de l’ambassade chinoise (entretien III. 3) parlaient de 15 000 à 20 000 ressortissants chinois vivant en Grèce.

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