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Distribution des établissements ethniques par nationalité dans le centre-ville

Première partie Migrations et mutations sociospatiales à Athènes : la question de l’insertion dans la ville et de

Carte 1. Distribution des établissements ethniques par nationalité dans le centre-ville

athénien en 2009

Source : traitement de données du Service du commerce et du tourisme de la région d’Attique

82 En fin de compte, nous constatons que le centre-ville athénien attire un commerce ethnique spécialisé. Il est essentiellement destiné à une clientèle migratoire. Ceci devient visible par la forte présence de commerces alimentaires, de magasins de vente de cartes téléphoniques ou de portables, de salons de coiffure, et d’autres petits établissements de services qui répondent aux besoins des nouveaux arrivants. L’exception à la règle est le commerce chinois, qui est destiné à une clientèle mixte. Nous reviendrons sur ce sujet au chapitre 4.

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Conclusion

Athènes continue, encore aujourd’hui, d’être remodelée par des vagues migratoires successives. Premièrement, l’arrivée des réfugiés entre les années 1920 et 1930 et l’exode rural qui suit la guerre civile participent à l’élargissement de la ville. De nouveaux quartiers s’ajoutent successivement à sa périphérie. Ces migrants s’intègrent relativement vite à l’économie de la ville et au tissu urbain. Comme de nombreux chercheurs le souligne, Athènes a une capacité spectaculaire d’« incorporer » ces nouveaux arrivants ; les grands clivages sociaux sont alors évités et une forte mixité la caractérise.

Les grandes évolutions urbanistiques et démographiques que nous avons soulignées dans le Chapitre 1, changent progressivement sa géographie. L’urbanisation intensive de la proche banlieue, surtout dans la partie est de la ville, conduit à un certain abandon des quartiers centraux. Ce délaissement est clairement visible lors des recensements de la population au niveau de la ville et de la municipalité d’Athènes. Nous avons constaté que les départs des jeunes ménages sont importants et, en même temps, la baise de la population totale s’élève à 16 %.

Durant cette période, et plus spécifiquement entre 1990 et 2000, des vagues migratoires internationales arrivent. Elles sont composées de migrants venus des pays balkaniques et de l’ex-Union Soviétique (Albanie, Bulgarie et Roumanie). Au niveau spatial, ces primo arrivants s’installent de manière relativement diffuse dans le tissu urbain, mais déjà, le centre-ville constitue une première porte d’entrée. Les espaces vacants, laissés par les habitants qui jusqu’alors avaient profité du système de la contreprestation, offrent des logements accessibles pour la plupart des migrants. Ces logements, quoique souvent en mauvais état, permettent des « coexistences » entre migrants et membres de la société d’accueil. Elles sont visibles à l’échelle des quartiers et même à la micro échelle des nombreux immeubles de cinq à six étages près du centre.

Pendant la période entre 2000 et 2005, les vagues migratoires internationales s’intensifient et connaissent un fort élargissement vers de nouveaux pays, confirmant l’hypothèse de Gildas Simon (2008). L’immigration chinoise est partie prenante de ces

84 nouveaux flux, composés principalement de migrants originaires de nombreux pays asiatiques, du Proche-Orient et de l’Afrique. Les données du dernier recensement de la population grecque montrent nettement cette diversification géographique. Ces migrants suivent de modes d’installation nouveaux, s’approprient différemment l’espace et exercent des types d’activité autres. Au niveau spatial, le centre-ville est particulièrement investi, tant comme lieu principal d’habitation que comme lieu d’exercice des activités entrepreneuriales. Parmi eux, nombreux sont « en transit » et ont accès à un habitat précaire. La Grèce n’est souvent qu’une étape de leur parcours migratoire.

Dans le deuxième chapitre, nous avons approfondi sur une thématique que nous considérons comme préalable pour l’étude du commerce chinois dans la ville et le quartier de Metaxourgio : le fort déclin du petit et du moyen commerce à Athènes, ainsi que l’accroissement de l’activité entrepreneuriale ethnique. En effet, le déclin que connaît les activités commerciales depuis les années 2000 est, en grande partie, contrebalancé par la dynamique du commerce ethnique.

À travers deux sources de données, nous avons vu quelles sont les nationalités majoritaires des migrants entrepreneurs, ainsi que leurs principaux objets d’activité. Effectivement, au centre-ville athénien, un nouveau pôle commercial a été créé avec l’ouverture de 338 établissements recensés en 2009. Ce pôle est surtout lié aux nouveaux courants migratoires internationaux qui se succèdent depuis 2000 et se voit renforcé par la forte centralité de cette partie de la ville.

Concernant les commerces ethniques recensés, nous constatons qu’ils sont en grande partie destinés à une clientèle migratoire ; le commerce chinois s’en distingue, car non seulement il occupe une place centrale dans l’ensemble des activités ethniques inventoriées, mais il est en plus destiné à une clientèle mixte. Compte tenu de leur nombre, nous pouvons parler d’une surreprésentation économique chinoise.

Au final, c’est dans ce contexte que la politique de la « non intervention », suivie par l’État face à la gestion des flux migratoires, devient problématique. Les derniers arrivants ont un statut très vulnérable et les possibilités d’insertion économique sont encore plus limitées. La seule réponse officielle est le contrôle des frontières et la mise

85 en place de pratiques de détention près des principales trajectoires suivies par les migrants. Au niveau du tissu athénien, la concentration dans les quartiers centraux produit des réactions phobiques de la part d’une partie des habitants. De nombreux articles dans les grands quotidiens parlent souvent de quartiers « chauds », et vont même jusqu’à les décrire comme des « ghettos urbains ». Bien que la grande majorité des études et des recherches effectuées confirment que la ségrégation ethnique n’est pas généralisée, la présence des migrants est devenue synonyme de la forte dégradation des conditions de vie et on lui attribue l’ensemble des problèmes dont souffre le centre-ville.

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Deuxième partie. Du global au local : aspects de la diaspora

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