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Efficacité selon la nature de la vibration

4.3 Comparaison du contrôleur Kalman et du VTK

4.3.3 Efficacité selon la nature de la vibration

Pour commencer, je vais comparer la capacité de chaque contrôleur à compenser dif- férents types de vibration. En effet, on a vu que le modèle de vibration utilisé par le contrôleur Kalman est basé sur un modèle auto-régressif d’ordre deux, particulièrement bien adapté aux vibrations légèrement amorties. Quant à l’algorithme VTK, ses corrections générées par des sinusoïdes en quadrature le rendent a priori bien adapté aux vibrations peu amorties. Cette partie a donc pour but de vérifier ces hypothèses. C’est également l’oc- casion de caractériser la robustesse des différents contrôleurs à des variations temporelles des vibrations, comme celles observées au VLTI.

Pour vérifier ces hypothèses, j’ai donc simulé des perturbations en piston ne comprenant qu’une seule vibration ajoutée au piston atmosphérique, afin de ne pas biaiser les résultats par la propension des contrôleurs à corriger plusieurs pics de vibration à la fois. De plus, ces simulations sont réalisées à haut rapport signal-sur-bruit sur une étoile de magnitude

K = 6. J’ai simulé successivement six vibrations :

1. une vibration purement sinusoïdale, de fréquence 18 Hz et d’amplitude 400 nm ; 2. une vibration amortie de fréquence propre 18 Hz, excitée par un bruit Gaussien

d’écart-type 5 nm, de coefficient d’amortissement k = 0, 001 (correspondant à une résonance de 54 dB par rapport à la fréquence nulle), dont l’écart-type total est fixé à 280 nm rms ;

3. une vibration amortie de fréquence propre 18 Hz, excitée par un bruit Gaussien d’écart-type 5 nm, de coefficient d’amortissement k = 0, 005 (correspondant à une résonance de 40 dB par rapport à la fréquence nulle), dont l’écart-type total est fixé à 280 nm rms ;

4. une vibration sinusoïdale dont la fréquence varie linéairement de 16 à 20 Hz, d’am- plitude 400 nm ;

5. une vibration sinusoïdale de fréquence moyenne 18 Hz modulée sur une amplitude de 1 Hz à une fréquence de 0,01 Hz, et d’amplitude 400 nm ;

6. la même vibration à fréquence dérivante que la numéro quatre, mais dont l’amplitude moyenne de 400 nm est lentement modulée sur 80 nm à une fréquence de 0,04 Hz. Les simulations des trois premières vibrations permettront ainsi de caractériser la capacité des contrôleurs à corriger des vibrations purement sinusoïdales ou légèrement amorties, tandis que les simulations des trois dernières vibrations permettront de mesurer leur robus- tesse à compenser des vibrations variant temporellement. Il est à noter que les fréquences des vibrations sont toutes fixées à 18 Hz (choix arbitraire), afin d’utiliser la même zone

spectrale des fonctions de transfert des trois contrôleurs. De même les amplitudes de vi- brations sont choisies de telle sorte que toutes aient un écart-type de ∼ 280 nm rms, et donc la même énergie dans le spectre des perturbations.

Le tableau 4.5 présente la médiane sur les dix simulations de l’écart-type des résidus de différence de marche, pour les six cas simulés. La figure 4.11 montre les spectres de la perturbation et des résidus obtenus avec les trois contrôleurs pour l’un des dix échantillons simulés, pour chaque type de vibration. Enfin, le tableau4.6 présente une estimation des vibrations résiduelles obtenues avec chaque contrôleur. Je calcule la variance de ces résidus de vibrations en intégrant le spectre des résidus de différence de marche sur une petite bande spectrale autour de la vibration, après avoir pris soin de soustraire la contribu- tion énergétique propre au résidu de turbulence atmosphérique, estimée en moyennant le spectre sur une bande spectrale dix fois plus large. Le principe de ce calcul est schématisé en figure 4.10.

Figure 4.10 – Schéma présentant le principe utilisé pour estimer l’énergie d’une vibration. La contribution énergétique < DSP > de la turbulence atmosphérique est estimée en moyennant le spectre autour de la fréquence propre f0de la vibration sur une bande spectrale dix fois plus large

que la vibration, en négligeant la contribution du pic de vibration étroit. La variance de la vibration

σ2

vibest estimée en intégrant le spectre duquel on a soustrait cette contribution atmosphérique sur une bande spectral étroite df.

On constate que quelles que soient les perturbations simulées, le contrôleur Kalman est bien plus efficace que les contrôleur PI et PI associé au VTK (tableau4.5), conduisant à des résidus de différence de marche 3 à 5 fois plus faibles par rapport à l’algorithme VTK. En observant les spectres de la figure 4.11, on voit que c’est majoritairement dû à une meilleure correction de la turbulence atmosphérique par rapport au contrôleur PI. Il s’avère en effet que les gains de ce contrôleur sont volontairement réduits pour privilégier la stabilité du contrôleur à son efficacité, et ainsi limiter la divergence des commandes en cas de perte de flux ou d’augmentation soudaine des perturbations. Étant donné que le contrôleur Kalman utilise un gain statistiquement optimisé par rapport au bruit de mesure et à la variance des perturbations, il n’est pas confronté à cette difficulté. De plus ces premières simulations étant réalisées à haut rapport signal-sur-bruit et sans variation de flux, la perte de stabilité de la boucle est très improbable et ne justifie pas l’utilisation de faibles gains.

Type de DDM résiduelle (nm rms) Vibration PI PI + VTK Kalman 1 255 176 54 2 264 256 63 3 256 262 55 4 266 192 57 5 252 186 60 6 265 190 59

Tableau 4.5 – Écart-type des résidus de différence de marche, obtenus avec les trois contrôleurs simulés, pour chacune des six conditions d’observation simulées : les simulations ont été réalisées pour une étoile de magnitude six, avec 12 µm rms de turbulence atmosphérique, sans perte de flux, avec six types de vibrations différentes. Voir dans le texte pour le détail des caractéristiques des vibrations.

Type de Vibr. simulée Vibr. estimée Vibr. résiduelle (nm rms) Largeur Vibration (nm rms) (nm rms) PI PI + VTK Kalman intégrée (Hz)

1 283 284 191 40 10 1 2 280 275 187 158 33 1 3 280 261 176 167 11 1 4 283 279 191 50 32 4 5 283 279 187 63 28 2 6 284 279 192 52 29 4

Tableau 4.6 – Écart-type des résidus de vibration, estimés par intégration du spectre dans une zone de 0,5 à 2 Hz autour de la vibration, après soustraction d’une estimation du résidu de tur- bulence atmosphérique. La troisième colonne indique la largeur spectrale utilisée pour estimer le résidu de vibration. La quatrième colonne présente l’écart-type de la vibration non corrigée, cal- culé de la même façon à partir du spectre de la turbulence, et la deuxième colonne présente le véritable écart-type simulé. La comparaison entre les colonnes deux et quatre donne ainsi une idée de l’exactitude de la méthode pour estimer les résidus de vibrations.

Concernant la correction propre aux vibrations (voir tableau 4.6), on constate comme attendu que le contrôleur PI est proprement inefficace à les corriger, et laisse entre 40 et 45 % de leur énergie non compensée dans le spectre des résidus. Il n’est capable de les corriger en partie que parce que leur fréquence propre de 18 Hz est légèrement inférieure à sa bande passante. Le contrôleur Kalman est le plus efficace à corriger les vibrations quelle que soit leur nature, ne laissant que 0,1 à 1,4 % de leur énergie dans les résidus, tandis que le VTK compense les vibrations à 2–4 % de leur énergie, excepté pour les vibrations amorties où plus de 30 % de l’énergie des vibrations est encore présente dans les résidus. De plus, le contrôleur Kalman est tout à fait robuste aux variation temporelles en fréquence et en amplitude simulées pour les trois dernières vibrations, puisqu’il les corrige mieux que le VTK. Il est intéressant de noter que l’identification du modèle de perturbation est réalisée sur des séquences en boucle pseudo-ouvertes représentatives du début des variations temporelles (les 5 000 premiers points), et que ce sont visiblement les fréquences correspondantes qui sont le mieux corrigées (voir les spectres résiduels de la colonne de droite de la figure4.11) : la fréquence des vibrations 4 et 6 est croissante avec le temps, allant de 16 Hz en début de simulation à 20 Hz à la fin. Les 5 000 points utilisés pour identifier le modèle correspondent donc aux fréquences proches de 16 Hz, qui sont

Figure 4.11 – Densités spectrales de puissance de la perturbation (noir) et des résidus de différence de marche avec le contrôleurs PI (rouge), PI associé au VTK (vert), et Kalman (bleu), pour chacune des six conditions d’observation analysées, indexées de haut en bas et de gauche à droite.On note que le spectre obtenu avec le contrôleur PI est très peu visible : il est en effet superposé avec celui obtenu avec l’algorithme VTK, excepté aux fréquences correspondant aux vibrations. Ce phénomène est parfaitement attendu, puisque la correction apportée par le VTK n’est appliquée que sur étroite bande fréquentielle autour des vibrations, et que les autres composantes fréquentielle de la perturbation sont corrigées par le contrôleur PI.

effectivement mieux corrigées par le contrôleur Kalman.

Il faut enfin apporter deux compléments sur les remarques précédentes concernant les performances du VTK :

– dans le cas de vibrations amorties ou s’étalant sur une bande spectrale un peu large, il est possible d’ajuster un paramètre particulier de l’algorithme du VTK pour optimiser sa correction. Ainsi, en reproduisant ces simulations en utilisant un facteur d’oubli λ = 0.99 au lieu de λ = 0.998 (voir Di Lieto et al. (2008) pour

plus de détails), les résidus obtenus pour les vibrations large-bande sont du même ordre que ceux obtenus avec le contrôleur Kalman, alors que ceux obtenus pour la vibration purement sinusoïdale restent inchangés. L’étude détaillée de l’algorithme VTK est cependant au-delà de l’objectif de ces simulations, et j’ai donc privilégié son utilisation avec ses paramètres par défaut, tel qu’utilisé au VLTI ;

– la correction de vibrations amorties apportée par le VTK dépend également de la fréquence propre des vibrations. Ainsi, en reproduisant les simulations avec la vibration 2 (la moins amortie) en utilisant le même coefficient d’amortissement, le même écart-type, mais en changeant sa fréquence propre à 24 Hz, le VTK apporte une meilleure compensation que pour une fréquence propre de 18 Hz, ne laissant que 100 nm rms de résidus de différence de marche spécifiques à cette vibration, soit 13 % de son énergie initiale.

Suite à cette analyse du comportement des différents contrôleurs en fonction de la nature des vibrations, je simulerai uniquement de pures sinusoïdes.