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Discussion du modèle choisi pour simuler la turbulence

1.5 Ma thèse dans ce contexte

2.1.5 Discussion du modèle choisi pour simuler la turbulence

Le modèle de turbulence adopté par l’ESO (Gitton 2010) pour caractériser les fluc- tuations en différence de marche est un modèle asymptotique continu basé sur un modèle Kolmogorov, suivant les lois de puissance suivantes :

˜ wψ(f ) ∝ { f−2/3 si f < f c1 f−8/3 si f > f c1 . (2.36)

avec la fréquence de coupure fc1 ≃ 0, 2V/B. Ce modèle ne tient pas compte du filtrage par la pupille des télescopes (loi de puissance en f−17/3) car cet effet n’est en pratique

pas observé dans les spectres des fluctuations de phase mesurés. Comme attendu pour un modèle de Kolmogorov, ce spectre diverge à la fréquence nulle.

Pour cette raison, j’ai utilisé un spectre de fluctuations en différence de marche basé sur le modèle de von Kármán, dont le spectre sature à la fréquence nulle, pour caractériser la turbulence atmosphérique que corrigera le suiveur de franges de GRAVITY, en négligeant également la loi de puissance en f−17/3 :

˜ wψ(f ) ∝      f0 si f < fc0 f−2/3 si fc0 < f < fc1 f−8/3 si fc2 < f < fc2 , (2.37) avec fc0 ≃ V/L0, fc1 ≃ 0, 2V/B et fc2 ≃ 0, 3V/D.

L’échelle externe L0 de la turbulence a été mesurée sur le site de Paranal au cours de

deux campagnes en 1998 et en 2007 (Martin et al. 2000;Dali Ali et al. 2010), par mesures des fluctuations de l’angle d’arrivée du front d’onde entre quatre positions par l’instrument GSM –Generalized Seeing Monitor. Ces deux campagnes de mesure ont conduit à des valeurs médianes de 22 et 17 m respectivement pour L0. Cependant, les fluctuations de

différence de marche mesurées au VLTI ne sont pas en accord avec celles prédites par ces valeurs de L0, et ce de deux points de vue.

D’une part, à énergie fixée, une telle valeur de l’échelle externe de la turbulence at- ténue considérablement les composantes à basse fréquence des fluctuations par rapport aux hautes fréquences, comparé aux perturbations obtenues avec une valeur de L0 plus

grande. Pour illustrer ce phénomène, j’ai simulé des séquences temporelles de différences de marches à partir du modèle Kolmogorov d’une part4, et du modèle de von Kármán avec différentes valeur de L0 d’autre part5 (représentés en figure 2.2), et je les ai comparées

à des séquences de différences de marche typiques mesurées au VLTI avec le suiveur de franges FINITO (Gai et al. 2003; Bonnet et al. 2006) et le suiveur de frange de PRIMA (Delplancke et al. 2003; Sahlmann et al. 2009), reproduits en figure 2.3. La comparaison de ces mesures aux simulations des différents modèles montre que les valeurs de L0 ∼ 20 m

ne concordent pas avec les mesures observationnelles.

De plus, pour une valeur de L0 = 20 m, les fluctuations de phase saturent à une

fréquence plus élevée que pour de plus grandes valeurs de l’échelle externe de la turbulence, ce qui induit des variations d’énergie plus faibles. Pour déterminer une valeur de L0 plus

représentative des fluctuations de différence de marche mesurées à Paranal, j’ai calculé l’écart-type des fluctuations de différence de marche pour différentes valeurs de l’échelle 4. Simulation réalisée par le produit dans le domaine de Fourier du spectre de l’équation2.36par le spectre d’un bruit blanc Gaussien

5. Simulation réalisée par le produit dans le domaine de Fourier du spectre de l’équation2.37par le spectre d’un bruit blanc Gaussien

Figure 2.2 – Haut-gauche : Modèles asymptotiques des spectres de la différence de marche, avec un modèle Kolmogorov et von Kármán avec deux valeurs différentes de L0 (20 et 100 m).

Les trois spectres sont normalisés pour avoir la même énergie (σδ = 10 µm). Autres : simulation d’une séquence de perturbation pour ces trois spectres. Ces trois séquences temporelles ont le même écart-type, mais des composantes fréquentielles très différentes.

Figure 2.3 – Haut : séquence temporelle de fluctuation de différence de marche typique mesurée par FINITO, et mesure de rapport signal-sur-bruit correspondante ; tiré de Le Bouquin et al. (2008) ;abscisses en secondes, ordonnées en microns. Bas : de même avec le suiveur de franges de PRIMA ; tiré deSahlmann et al.(2009) ; abscisses en secondes.

externe, en fonction de la longueur de base (équations 2.31, 2.32, 2.34), représenté en figure 2.4. Une valeur de σδ ∼ 2 µm est obtenue pour une valeur de L0 = 20 m et une

longueur de base de 80 m, tandis que des valeurs typiques de 10 µm sont mesurées à Paranal (Sahlmann et al. 2009;Maire 2007). Un L0de 100 m est beaucoup plus en accord

avec les mesures obtenues sur ce site.

Figure 2.4 – Écart-type des fluctuations de différence de marche en fonction de la longueur de base pour un spectre de Kolmogorov, et un spectre de von Kármán avec différentes valeurs de L0.

SelonMaire(2007), cette différence entre la valeur de L0 mesurée sur le site et l’analyse

des mesures des fluctuations de différence de marche peut s’expliquer par une contribution instrumentale de l’interféromètre sur la mesure des différences de chemin optique (turbu- lence dans les tunnels des lignes à retard, vibrations instrumentales), mais également par la description mono-couche de l’atmosphère. En effet, la prise en compte de plusieurs couches d’atmosphère turbulente à des vitesses d’écoulement différentes peut conduire à des valeurs d’échelle externe plus grandes que pour un modèle à une seule couche.

Ainsi, pour l’étude des performances du suiveur de franges de GRAVITY, j’utilise- rai systématiquement dans la suite un spectre de turbulence utilisant un modèle de von Kármán avec une échelle externe L0 = 100 m. Pour des conditions médianes d’observa-

tion (r0 = 60 cm à λ = 2, 2 µm, correspondant à un seeing de 1′′), l’énergie totale des

fluctuations conduit à un écart-type de la différence de marche de σδ= 10 µm, valeur que

j’utiliserai pour normaliser le spectre des fluctuations dans le cas de conditions médianes de piston atmosphérique.