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4.5 Recombinateur de type ABC : adaptation du suiveur de franges

4.5.3 Adaptation aux consignes non nulles

Suivre des franges à une consigne de différence de marche non nulle n’est cependant pas aussi trivial que pour d’autres asservissements classiques, pour lesquels il « suffit » d’appliquer l’algorithme de contrôle sur l’écart entre la consigne et la mesure des résidus. Deux difficultés sont en effet à prendre en compte : les relations de clôture de phase d’une part, et l’incertitude sur l’ordre de la frange dont la phase est estimée d’autre part.

Contrainte des relations de clôture de phase

Pour comprendre la difficulté imposée par ces relations de clôture de phase, commen- çons par considérer une architecture à seulement trois télescopes (i, j, k). Supposons que l’étoile observée par le suiveur de franges soit non-résolue. Les phases propres de l’objet étant alors nulles, les phases différentielles mesurées ne sont dues qu’aux perturbations vues par chaque télescope et sont liée par la clôture de phase Cijk nulle de ce triplet

Cijk= 0 ⇒ φij + φjk+ φki = 0, (4.10)

où la phase différentielle φij entre deux télescopes i et j est définie par la différence des

déphasages ϕi et ϕj vus par chaque télescope :

φij = ϕj − ϕi. (4.11)

Si le suiveur de franges asservit les trois différences de marche (donc les trois phases différentielles) à une consigne nulle, la relation4.10est vérifiée, et il n’y a pas de problème d’asservissement. Cependant, si une consigne Φ1non nulle est imposée sur l’une des bases,

l’asservissement des deux autres bases ne pourra se faire sans biais que si la relation4.10est vérifiée. Ainsi, les trois consignes sont liées entre elles par deux paramètres indépendants, les consigne Φ1 et Φ2 imposées sur deux bases, fixant la consigne sur la troisième base :

     φij = Φ1 φjk = Φ2 φki = −Φ1− Φ2 (4.12)

Ce simple cas à trois télescopes nous fait donc entrevoir qu’il ne sera pas si simple d’asser- vir les deux bases impactées par la métrologie à une consigne non nulle tout en maintenant l’asservissement sur la frange blanche pour les quatre autres bases.

Analysons maintenant cette contrainte appliquée à l’architecture à quatre télescopes de GRAVITY, notés (i, j, k, l). En supposant une fois de plus que la cible est une étoile non résolue, les phases différentielles sont liées entre elles par trois relations de clôtures nulles indépendantes :

Cijk= 0 ⇒ φij+ φjk+ φki = 0 (4.13)

Cijl= 0 ⇒ φij+ φjl+ φli = 0

Cikl= 0 ⇒ φik+ φkl+ φli= 0.

La quatrième relation de clôture est liée aux trois précédentes par la relation

Cijk+ Cikl = Cijl+ Cjkl (4.14)

L’asservissement ne peut être réalisé que si les consignes sur les six bases respectent ces relations de clôture. Or ce système est entièrement déterminé par trois paramètres indé- pendants Φ1, Φ2 et Φ3 tels que :

                 φij = Φ1 φik = Φ1+ Φ3 φil = Φ1+ Φ2+ Φ3 φjk = Φ3 φjl= Φ2+ Φ3 φkl = Φ2 (4.15)

– peut-on suivre les franges sur deux bases opposées (i-j et k-l) avec des consignes non nulles, et asservir les quatre autres bases à une consigne nulle ?

Autrement dit : soient Φ1 6= 0 et Φ2 6= 0 ; existe-t-il Φ3 ∈ R tel que φik = φil =

φjk = φjl = 0 ? La réponse est non : par exemple, il n’est pas possible de fixer les

consignes Φik et φil à zéro si Φ2 est non nulle ;

– peut-on suivre la même consigne sur toutes les bases ?

Autrement dit existe-t-il des combinaisons (Φ1, Φ2, Φ3) telles que φij = φik= φil =

φjk = φjl = φkl? La réponse est oui, l’unique solution est alors Φ1 = Φ2 = Φ3 = 0,

pour laquelle toutes les consignes sont nulles.

Deux autres combinaisons de paramètres sont intéressantes dans notre cas imposé par la modification de l’injection du laser de la métrologie : les deux voies obturées par les fibres optiques correspondent toutes deux aux voies D des quatre sorties en quadrature de phase. Il faudra donc imposer des consignes Φ1etΦ2identiques sur les deux bases correspondantes.

Je présente dans la figure4.19les combinaisons de consigne possibles en fonction du choix des paramètres (Φ1, Φ2, Φ3) dans ce cas, et dans le cas où ces deux consignes sont opposées.

Sur les bases autres que celles modifiées par la métrologie, on souhaite a priori asservir les franges à des consignes aussi proches de zéro que possible pour rester à proximité de la frange blanche. Dans le cas où Φ1= Φ2, la meilleure combinaison est donc donnée pour

Φ3= −Φ1.

Figure 4.19 – Combinaisons de consignes possibles sur les six bases, dans le cas où Φ1= Φ2= Φ

à gauche, et dans le cas où Φ1 = −Φ2 = Φ à droite. Une coupe verticale pour une valeur de Φ3

choisie indique les six consignes correspondantes, en unité de Φ.

Précaution à prendre concernant l’ordre des franges

La seconde difficulté à suivre les franges à des consignes non nulles est due au fait que la phase est estimée modulo 2π. Si la consigne est fixée à une valeur proche de ±π, l’asservissement est rendu très instable par l’indétermination de l’ordre de la frange suivie, et oscillera entre deux franges. La figure4.20présente un schéma explicatif de ce genre de situation instable.

Il convient donc de constamment vérifier l’ordre de la frange observée avec l’estimation du retard de groupe afin d’être sûr de rester sur la frange centrale d’une part, et d’autre part de déplier l’erreur à la consigne si celle-ci est supérieure à π.

Figure 4.20 – Schéma explicatif du risque d’instabilité provoqué par des consignes proches de ±π. Deux figures de franges sont représentées avec des déphasages différents, en pointillés à l’instant

t1 et en trait plein à l’instant t2. Les commandes appliquées aux actionneurs sont basées sur les

écarts ǫ1 et ǫ2 à la consigne. Si le déphasage entre les deux instants est bien inférieur à π, la

seconde commande sera erronée, car estimée à partir d’une frange différente de celle de la première commande. Dans ce cas, la commande appropriée eût été ǫ

2, soit ǫ2− 2π.