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VOYAGEURS DU CORPUS :

Chapitre 3 : Le récit du voyage

A) Date et contexte de la publication

Trois marchands font paraître le récit complet ou partiel de leur voyage peu de temps après leur retour : Elkanah Watson en 1790, Joseph Sansom en 1805 et en 1808, et Joshua E.

White en 1816, soit entre trois et sept ans après leur passage en Europe. Il n’y a rien d’étonnant à ce qu’ils ne soient pas plus nombreux à publier leurs écrits, car ils ne sont pas des écrivains professionnels. Les récits de Watson et Sansom sont anonymes, mais le titre indique leur nationalité ou leur origine géographique : A Tour in Holland, in 1784, by an American (Watson) et Travels from Paris through Switzerland… by a native of Pennsylvania (Sansom). Dans les trois cas, les auteurs n’en sont pas à leur première publication.354 Les ouvrages paraissent sur le territoire national (à Worcester dans le Massachusetts pour celui de Watson, et à Philadelphie pour les deux autres), et les auteurs visent avant tout un public américain, et éventuellement britannique.355 Ainsi, même si Sansom fait paraître la deuxième édition de son récit à Londres en 1808, il s’adresse explicitement à ses « concitoyens » dans la préface et il instaure une certaine complicité avec son lecteur américain, comme par exemple en décrivant les arcs de triomphe situés à la sortie de certaines grandes villes européennes :

« For a word in the ear of my American reader… » (Sansom, Travels, 239). On ne relève qu’un seul passage à l’intention des lecteurs anglais.356

354 En 1788-1789, Elkanah Watson fait paraître dans la presse américaine une lettre comparant la France et les Etats-Unis ; Joseph Sansom publie en 1790 un poème dénonçant l’esclavage (« A Poetical Epistle to the Enslaved Africans : In the Character of an Ancient Negro, born a Slave in Pennsylvania. ») ; et Joshua White, ancien médecin et l’un des fondateurs de la Georgia Medical Society en 1806, rédige plusieurs articles sur la topographie de la région et divers sujets médicaux, qui paraissent dans The Medical Repository à New York, et publie en 1812 The History of Ann Moor, with a statement of the evidence, substantiating the fact of her long abstinence.

355 Ainsi, lorsque le poète américain John Trumbull (1750-1831) lit le récit de voyage de Elkanah Watson en Hollande, il l’estime susceptible d’intéresser un public à la fois américain et anglais, étant donné le peu d’ouvrages disponibles en anglais sur le pays : «In America we know little of Holland –nor do I believe the English in general know much more. […] I am of the opinion that your essay will supply it” (Watson, A Tour, Preface, Letter of John Trumbull, V-VI). En revanche, une critique littéraire identifie le récit de voyage de Joshua E. White comme «véritablement américain », c'est-à-dire, écrit par un Américain à destination de ses concitoyens : « This is truly an American book » (Analectic Magazine and Naval Chronicle, Nov. 1816, Vol.

VIII, 369).

356 Il s’agit d’une note destinée à préciser la signification spécifique du terme «fermier » en Amérique : « In America, the word farmer does not indicate the tenant of a manor, under the controul of a landlord, […] but an

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Le contexte politique de l’époque détermine en grande partie le point de vue adopté.

Dans le récit de son voyage en Hollande qui paraît en 1790, Elkanah Watson multiplie les comparaisons entre la république américaine et la république batave. Son message politique est clair : il appelle ses concitoyens à se rassembler derrière leurs institutions nationales, alors encore très fragiles, et les met en garde contre la menace d’éclatement de l’union s’ils ne parviennent pas à dépasser les rivalités entre états. Joseph Sansom, pour sa part, publie son ouvrage en 1805 et en 1808, à une époque où les relations entre les Etats-Unis et l’Angleterre deviennent de plus en plus tendues, et il cherche à apaiser les tensions en présentant un point de vue fédéraliste.357 Quant à Joshua E. White, fédéraliste lui aussi, il choisit d’attendre la fin de la guerre de 1812 pour publier le récit de son séjour, dix ans après : il y prône la réconciliation entre les deux peuples.

Lorsqu’il publie le récit de son voyage, l’auteur ne s’adresse plus à un cercle d’intimes mais à un lectorat plus large qu’il lui faut conquérir. Afin de prouver sa légitimité et d’établir un pacte de confiance, il rédige une préface, dans laquelle, comme pour Elkanah Watson, il peut se recommander d’un écrivain connu, en l’occurrence le poète américain John Trumbull (1750-1831). Watson insiste par ailleurs sur l’originalité de son témoignage, en soulignant qu’on trouve très peu de récits sur la Hollande. Joseph Sansom, pour sa part, met en avant sa nationalité : c’est la première fois, insiste-t-il, qu’un « touriste américain » communique ses impressions sur l’Europe (Sansom, Letters from Europe, Advertisement).358 Quant à Joshua E. White, il ne peut plus, en 1816, prétendre à un contenu original, en particulier après la parution en 1810 du journal de Benjamin Silliman, A Journal of Travels in England, Holland and Scotland, qui remporte un franc succès auprès des lecteurs américains. Il met donc en avant la qualité de son récit : il promet d’apporter à ses concitoyens des “sujets de réflexion utiles, des descriptions intéressantes, et des faits importants” et se targue d’être un observateur hors du commun et impartial, trait assez rare en cette période d’âpres luttes politiques entre Fédéralistes et Républicains :

The author viewed things with something more than common inquisitiveness, and with impartiality. […] He embraced every advantage of improving the

independent yeoman, who cultivates his own grounds, keeps a hospitable table, may be in the commission of the peace or represent his county in the House of Congress » (Sansom, Travels, 6).

357 Les positions de Sansom seront détaillées dans la troisième partie de cette étude, chapitre 3, II- C).

358 “[If his volume is successful, the author] may yet be induced to prepare for the Press his Letters from England and France –those interesting Countries which, however frequently described by European Travellers, have never yet been depicted by an American Tourist” (Sansom, Letters from Europe, Advertisement). Le document est reproduit dans les annexes (vol. 2, p. 169).

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opportunities which were afforded […]. Although he has travelled over ground familiar to many of his countrymen, his Letters will, notwithstanding, be found to contain some useful reflections, interesting descriptions, or important facts.

(White, Letters on England, Preface, VII)359

Il est un quatrième ouvrage qui présente un cas à part : publié près de vingt ans après le retour du voyageur, ou plutôt de la voyageuse, il s’agit du compte rendu par Beulah Sansom de son Grand Tour d’Europe, A Concise Narrative of a Tour, through some Parts of England, France, Holland, Switzerland, and Italy, in the years 1799, 1800, 1801, and 1802, in a letter to a friend in England. Comme l’indique le titre, la narration est concise (vingt-et-une pages), elle paraît de manière anonyme, et avec un tirage limité.360 L’éditeur, très probablement le mari de Beulah Sansom, souligne dans la préface que cette dernière n’est pas au courant de la publication, et précise qu’il ne cherche qu’à préserver le manuscrit : « a manuscript copy on sheets of paper […] is so subject to be injured by frequent handling, that I considered what would be the best means of securing a composition, so worthy of preservation” (Sansom, A Tour, Preface).361 Un tel besoin de se justifier s’explique par le fait que l’auteur est une femme : il s’agit d’éviter à cette dernière tout opprobre à une période où une femme ne devait pas outrepasser les limites de la sphère publique. Nous reviendrons plus avant sur ce qu’implique une telle publication dans la troisième partie de notre étude, dans un développement consacré aux femmes auteurs.362

Comment les auteurs qui conservent leur anonymat - Elkanah Watson, Joseph et Beulah Sansom - s’y prennent-ils pour convaincre leurs lecteurs de la véracité de leurs observations, sachant que des récits totalement fictifs paraissent à l’époque et sèment le doute dans l’esprit du public, comme le rappelle un critique en 1770 : « Because there have been lying travellers, the veracity of almost every traveller is suspected » (The Critical Review, vol.

30, 1770, 196) ?363 Plusieurs stratégies sont déployées. Elkanah Watson affirme ne pas avoir publié son récit de sa propre initiative, mais sur l’insistance de ses amis, des « gens de qualité », qui ont trouvé son manuscrit « excellent » et, comme indiqué plus haut, il se recommande du poète américain John Trumbull, qui a grandement apprécié l’ouvrage : “I am pleased with your descriptions, your sentiments, and your general manner of expressing them,

359 La préface est reproduite dans les annexes (vol. 2, p. 170).

360 Aucune publicité commerciale n’a été retrouvée dans la presse de l’époque, l’ouvrage était vraisemblablement destiné à un cercle restreint d’amis et de proches.

361 La préface de l’ouvrage est reproduite dans les annexes (vol. 2, p.173).

362 Troisième partie, Chapitre 3, II- D), p.476.

363 Percy G. Adams aborde la question dans Travelers and Travel Liars, 1660-1800, Berkeley, University of California Press, 1962 et dans Travel Literature and the Evolution of the Novel, The University Press of Kentucky, 1983 (en particulier le chapitre 3, 81-102).

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and must thank you for the valuable information I have received from them, of the country and manners of the Dutch” (Watson, Letter from John Trumbull, A Tour, Preface, VII).

Pour sa part, Joseph Sansom dédie son édition de 1805 à une personne de qualité, le botaniste William Hamilton (1745-1813), attestant ainsi de son sérieux.364 Les nombreuses citations latines et les descriptions détaillées des œuvres d’art observées témoignent par ailleurs de son érudition, et l’auteur se présente dans son récit comme un « gentleman voyageant pour son plaisir ».365 Quant au compte rendu de Beulah Sansom, il est le fait d’une

« femme respectable », qui a beaucoup voyagé, qui manie la langue avec aisance, et dont l’entourage a apprécié le récit « très intéressant », comme l’assure l’auteur de la préface, en l’occurrence, Joseph Sansom (Sansom, A Tour, Preface).

Par ailleurs, entre quarante et cinquante ans après leur séjour, quatre marchands du corpus retravaillent le récit de leur voyage pour l’intégrer à leurs mémoires. L’un d’entre eux, Ebenezer Smith Thomas, le fait paraître de son vivant, en 1840. Pour les trois autres (Elkanah Watson, Samuel Breck et Thomas H. Perkins), le récit autobiographique est complété par un proche et publié de manière posthume, entre deux et vingt ans après la mort de l’auteur, en 1856 et 1877.366

Ces documents hagiographiques sont avant tout destinés à défendre la réputation de l’auteur et à souligner les événements les plus glorieux de son existence : dans ses mémoires, Elkanah Watson ne consacre ainsi que trois lignes à la faillite de son entreprise en 1783, pour se concentrer sur son rôle de “messager de la paix” auprès du gouvernement anglais à la fin de la guerre d’indépendance. Il s’agit également de présenter l’auteur comme un modèle de vertu et de patriotisme à la nouvelle génération d’Américains qui n’a pas connu la guerre d’indépendance.367 L’éditeur des mémoires de Thomas H. Perkins - le petit-fils de ce dernier -

364 « Dedicated to William Hamilton, Esquire, of the Woodlands, in the State of Pennsylvania, as a gentleman whose taste in the fine arts, & liberal application to horticulture, have embellished, & improved his country » (Sansom, Letters from Europe, dedication).

365 Sansom écrit ainsi : «[At the Custom-house of Bolognese] a German fellow-traveller assured [the officers]

that I was an American gentleman traveling for his amusement » (Sansom, Travels, 228). Lorsque Sansom publie le récit de son voyage au Canada en 1817, toujours de manière anonyme, il ajoute qu’il est membre de la American Philosophical Society et qu’il est l’auteur de Letters from Europe (Sketches of Lower Canada, historical and descriptive, New York, printed for Kirk & Mercem, 1817).

366 En 1840, Ebenezer Smith Thomas publie ses Reminiscences of the last Sixty-Five Years, Commencing with the Battle of Lexington. Also, Sketches of his Own Life and Times. L’auteur y relate entre autres trois séjours effectués en Grande-Bretagne et en France en 1800, 1803 et 1820 ; En 1856, soit deux ans après la mort de Thomas H. Perkins, paraissent les Memoirs of Thomas H. Perkins, publiées par son petit-fils Thomas G. Cary ; La même année, les Memoirs d’Elkanah Watson sont publiées par son fils Winslow C. Watson, dix-neuf ans après la mort de l’auteur ; Pour finir, en 1877, quinze ans après la mort de Samuel Breck, Horace Elisha Scudder fait paraître les Recollections of Samuel Breck, with Passages from his note-books (1771-1862).

367 A ce propos, voir l’ouvrage de Joyce Appleby, Inheriting the Revolution, 257: “[The lives of the first generation of Americans] served as models of innovation. The narrative accounts of their successes set forth in

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affirme ainsi que ce « gentleman accompli », marchand intègre, mécène et philanthrope convaincu, constitue un exemple à suivre :

The life of one like him, who, with only such advantages as are within the reach of many young men, acquired great power to influence others, and, using it wisely, left the world, within his sphere of action, better for his existence, affords a useful example. (Perkins, Memoirs, 7)368

Les éditeurs justifient également la publication par la valeur historique des témoignages car, au-delà de l’histoire d’un homme, c’est celle de la naissance de tout un pays qui est évoquée à travers son existence. Le titre des mémoires d’Elkanah Watson est très explicite à ce sujet : Men and Times of the Revolution : or, Memoirs of Elkanah Watson, Including Journals of Travels in Europe & America, with his Correspondence with Public Men and Reminiscences & Incidents of the Revolution. L’éditeur – qui n’est autre que son fils - souligne dans la préface que son père a côtoyé pendant son séjour en Europe les plus grandes figures de l’époque (Benjamin Franklin, John Adams, Thomas Paine, Richard Price ou encore Joseph Priestley), et qu’il a été témoin et acteur de plusieurs événements fondateurs de la nation américaine :

The patronage and friendship of Doctor Franklin and Mr. Adams, introduced him to the refined circles of French society, and to an intercourse with the eminent statesmen and philosophers of England. He was the bearer of dispatches from Paris to London, connected with the preliminary negotiations which resulted in the treaty of peace; and, among a very limited number of Americans, was present in the House of Peers, when the King of Great Britain acknowledged the independence of the American colonies. (Watson, Memoirs, Preface to the first edition, 5)369

Il s’agit donc de faire revivre le passé et toute une époque glorieuse, comme l’explique l’éditeur des Recollections de Samuel Breck en 1877 :

The real value of the book will be readily perceived to lie in its power to reconstruct the past for us as a living force. To have talked with an old man who has a clear and intelligent memory […] enables the younger man to see the past as a contemporary. (Breck, Recollections, Preface, 7-8)

eulogies, testimonials, autobiographies, and memoirs formed a kind of cultural capital accumulating in the country alongside the savings from industry.”

368 Par exemple, l’éditeur rapporte l’hommage rendu par Abbot Lawrence lors d’une réunion des marchands de Boston à l’annonce de la mort de Perkins : « I feel, as you feel, that we have lost our guide ; our great exemplar in the mercantile profession […], a man endowed with great talent ; ever devoted to the best interests of his country […] a philanthropist, a friend of science, of art, and of literature. […] if ever a man died in this city who deserved to have written on his tombstone, that ‘the world is the better for his having lived in it,’ that man was Col. Thomas H. Perkins” (Perkins, Memoir, 264, 268).

369 La préface est reproduite en annexe (vol. 2, p.174).

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A travers ces récits autobiographiques, les auteurs apportent donc une contribution directe à l’écriture de l’histoire nationale. Au moment de la publication, à savoir à la veille ou au lendemain de la guerre de Sécession, cet objectif se double de la volonté de réconcilier nordistes et sudistes en insistant sur l’unité du pays qui a prévalu pendant la période révolutionnaire. Nous reviendrons plus avant sur la fonction patriotique de ces témoignages dans la troisième partie de cette étude.370

Il faut noter un cas particulier qui concerne la publication des témoignages de deux marchands loyalistes exilés en Angleterre pendant le conflit révolutionnaire : Journal and Letters of the Late Samuel Curwen, édité par George Atkinson Ward, petit neveu de l’auteur, en 1842 ; et en 1872, des extraits des journaux d’Edward Oxnard dans The New England Historical & Genealogical Register, édité par un descendant. Comme l’analyse Eileen Ka-May Cheng, il s’agit de réintégrer ici les Loyalistes à l’histoire américaine dont ils avaient été exclus depuis la fin du XVIIIe siècle :

Nationalistic purposes made it necessary [for the first American historians] to portray the Revolution as a unanimous uprising against tyranny. […] To further this goal, the revolutionary historians ignored or obscured the role of loyalist dissent in the Revolution. […] Such an interpretation denied the loyalists’ identity as Americans, for it made American identity contingent on allegiance to revolutionary ideals.371

George Atkinson Ward cherche en effet à les réhabiliter aux yeux de l’opinion publique.

Comme il l’explique dans la préface de l’ouvrage, il s’emploie à montrer aux lecteurs américains « la pureté des motivations » de son ancêtre et « l’affection ardente qu’il portait à sa terre natale » (Curwen, Journal and Letters, preface, III).372 Il présente Curwen et ses autres compagnons d’exil comme des victimes, et estime qu’il est temps de réparer l’injustice subie en dressant un portrait de leurs mérites :

370 Se référer à la troisième partie, chapitre 3, III-, p.488.

371 Eileen Ka-May Cheng examine plusieurs historiens (Charles Francis Adams, Lorenzo Sabine et William Gilmore Simms) - des « révisionnistes loyalistes » comme elle les appelle - qui, dès les années 1820, ont remis en question cette image négative des Loyalistes (Eileen Ka-May Cheng, « American Historical Writers and the Loyalists, 1788-1856 : Dissent, Consensus, and American Nationality, » Journal of the Early Republic, Vol.23, No. 4 (winter 2003), 491-519, 495). Comme le souligne Michael Kammen, avant les années 1820, la nation américaine n’a pas encore trouvé de cohésion culturelle et ses premiers historiens (1783-1820) n’ont d’autre choix que de minimiser la dissension qui règne à l’époque au sein de la jeune république (Kammen, A Season of Youth, 16-17).

372 Ainsi décide-t-il de faire figurer sur la page de garde de l’ouvrage la citation suivante des journaux de Samuel Curwen, qui n’a bien évidemment pas été choisie au hasard : « For my native country, I feel a filial fondness ; her follies I lament, her misfortunes I pity ; her good I ardently wish, and to be restored to her embraces is the warmest of my desires » (Curwen, Journal and Letters, January 10 1780).

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The period has arrived when a sealed book may be opened, […] this work is offered with the hope of removing to some extent, if not fully, whatever obloquy has been unjustly cast upon their names, and to show that they were, in many instances, not the less actuated by lofty principle than those who embraced the popular opinions of the day. (Curwen, Journal and Letters, IV)

Pour finir, entre la toute fin du XIXe siècle et le XXe siècle, paraissent les témoignages de douze marchands en voyage, et les éditeurs – des descendants, des sociétés historiques américaines ou des chercheurs - justifient ces parutions par leur intérêt historique.373 Plus on avance dans le XXe siècle, et plus les éditeurs sont fidèles à la source d’origine. Ainsi, lorsqu’en 1913 un descendant de Joseph Ballard décide de publier son journal quarante ans après sa mort, mal à l’aise face au manque d’éducation de son ancêtre, il corrige les erreurs d’orthographe et de ponctuation. En 1972 au contraire, Andrew Oliver publie les journaux de Samuel Curwen en conservant le texte original dans son intégralité, y compris les fautes d’orthographe, de syntaxe et l’utilisation de majuscules pour les mots importants.

Les témoignages publiés au XVIIIe ou au XIXe siècle impliquent donc un important travail de composition de la part de l’auteur ou de l’éditeur.