• Aucun résultat trouvé

Le Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL)

Situation 4 dite des langues séparées

3.7. Typologie des politiques linguistiques

3.7.3. Politiques linguistiques supranationales

3.7.3.3. Le Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL)

Le CECRL poursuit l’objectif de rendre homogène l’enseignement des langues vivantes et l’évaluation des compétences sur le continent européen. Il agit donc de manière concrète et « pratique » sur le tissu multilingue de l’Europe en instituant une méthodologie commune d’enseignement des langues dans le but primordial de faciliter la communication entre les citoyens et favoriser le multilinguisme et la multiculturalité européenne en stimulant les échanges, la mobilité et l’intercompréhension entre les peuples :

« Le Préambule à la Recommandation R (98) 6 réaffirme les objectifs politiques de ses actions dans le domaine des langues vivantes.

– Outiller tous les Européens pour les défis de l’intensification de la mobilité internationale et d’une coopération plus étroite les uns avec les autres et ceci non seulement en éducation, culture et science mais également pour le commerce et l’industrie

– promouvoir compréhension et tolérance mutuelles, respect des identités et de la diversité culturelle par une communication internationale plus efficace

– entretenir et développer la richesse et la diversité de la vie culturelle en Europe par une connaissance mutuelle accrue des langues nationales et régionales, y compris les moins largement enseignées

– répondre aux besoins d’une Europe multilingue et multiculturelle en développant sensiblement la capacité des Européens à communiquer entre eux par-delà les frontières linguistiques et culturelles ; il s’agit là de l’effort de toute une vie qui doit être encouragé, concrètement organisé et financé à tous les niveaux du système éducatif par les organismes compétents

– éviter les dangers qui pourraient provenir de la marginalisation de ceux qui ne possèdent pas les capacités nécessaires pour communiquer dans une Europe interactive » (CECRL, 2001, p. 10).

Afin de renforcer la cohésion sociale à l’intérieur des frontières de l’Europe, le Conseil de l’Europe se dote d’un instrument d’enseignement des langues mis au point par des spécialistes de différents pays et validé par tous les États membres pour « parvenir à une plus grande unité parmi ses membres et atteindre ce but par l’adoption d’une démarche commune dans le domaine culturel » (Ibid., p. 9).

Le CECRL met en place des outils pédagogiques par le biais d’une méthodologie spécifique, la perspective actionnelle, « en ce qu’elle considère avant tout l’usager et l’apprenant d’une langue comme acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches dans des circonstances et un environnement donnés » (ibid., p. 15) ; et par le biais d’une grille uniforme d’évaluation et de certification par niveaux de compétences déclinés en 6 valeurs :

- le niveau introductif ou découverte A1 ; - le niveau intermédiaire ou de survie A2 ; - le niveau seuil B1 ;

- le niveau avancé ou indépendant B2 ; - le niveau autonome C1 ;

- le niveau maîtrise C2.

Cinq compétences sont évaluées par niveau :

- la compréhension orale ; - la compréhension écrite ; - l’expression orale ; - l’interaction orale ;

- l’expression écrite (ibid., p. 29).

Il s’agit, pour le Conseil de l’Europe, de favoriser l’émergence d’un citoyen européen acteur

plurilingue dans un environnement multilingue où le plurilinguisme est compris comme du « C’est dans cette perspective que l’insistance sur le respect de la diversité des langues et sur l’importance d’apprendre plus d’une langue étrangère en contexte scolaire prend son plein sens. Il ne s’agit pas seulement d’un choix de politique linguistique à un moment déterminé de l’histoire, par exemple, de l’Europe, ni même – si importante soit cette visée, de donner de meilleures chances d’avenir à des jeunes capables de recourir à plus de deux langues. Il s’agit bien surtout d’aider les apprenants

– à construire leur identité langagière et culturelle en y intégrant une expérience diversifiée de l’altérité ;

– à développer leurs capacités d’apprenants à travers cette même expérience diversifiée de la relation à plusieurs langues et cultures autres » (CECRL, 2001, p. 106).

ressort de la « compétence des locuteurs » et le multilinguisme comme « la présence des langues sur un territoire donné » (Beacco, Byram, 2003, p. 9). Le CECRL est une politique linguistique éducative supranationale qui retient comme principe fondamental par le Conseil de l’Europe le plurilinguisme qui est à entendre selon J.-C. Beacco et M. Byram comme :

« • la capacité intrinsèque de tout locuteur à employer et à apprendre, seul ou par un enseignement, plus d’une langue. Cette compétence à utiliser plusieurs langues, à des degrés de compétence différents et pour des buts distincts est définie dans le Cadre européen commun de référence, en tant que compétence « à communiquer langagièrement et à interagir culturellement d’un acteur social qui possède, à des degrés divers, la maîtrise de plusieurs langues et l’expérience de plusieurs cultures ». Cette compétence se matérialise dans un répertoire de langues que le locuteur peut utiliser. La finalité des enseignements est de développer cette compétence (d’où l’expression : le plurilinguisme comme compétence)

• une valeur éducative fondant la tolérance linguistique : la prise de conscience par un locuteur du caractère plurilingue de ses compétences peut l’amener à accorder une valeur égale à chacune des variétés utilisées par lui-même et par les autres locuteurs, même si celles-ci n’ont pas les mêmes fonctions (communication privée, professionnelle, officielle, langue d’appartenance…). Mais cette prise de conscience doit être accompagnée et structurée par l’École, car elle n’est aucunement automatique (d’où l’expression : le plurilinguisme comme valeur) » (ibid., p. 15-16).

Une politique même linguistique poursuit donc un objectif de politique générale. Le but ultime de CECRL n’est pas uniquement d’harmoniser les systèmes didactiques parmi les 47 États souverains qui le composent, mais de créer des acteurs sociaux modérés et tolérants, émancipés des clichés et des stéréotypes sur les cultures voisines et finalement peu enclins à se battre, par la relativisation de leur propre culture au contact approfondi des autres :

« Les politiques et les idéologies linguistiques seront donc appréhendées relativement à la manière dont elles prennent en charge le plurilinguisme en ce qui concerne :

• la formation plurilingue, qui consiste à valoriser et à développer les répertoires linguistiques individuels des locuteurs, dès les premiers apprentissages et tout au long de la vie. Par formation(s) plurilingue(s), on se référera désormais aux enseignements de langues (nationale, "étrangère", régionale …) dont la finalité est le développement du plurilinguisme comme compétence

• l'éducation au plurilinguisme, qui constitue l’une des conditions du maintien de la diversité linguistique. Par éducation au plurilinguisme, on se référera aux enseignements, non

nécessairement de langues, destinés à éduquer à la tolérance linguistique, à sensibiliser à la diversité des langues, et à former à la citoyenneté démocratique

L'éducation plurilingue comprend à la fois les formations plurilingues et l’éducation au plurilinguisme, telles qu’elles viennent d’être spécifiées » (ibid.).